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2o. Brillon rapporte au mot opposition, no. 1, un arrêt du grand-conseil, qui jugea que les créanciers ne pouvaient être reçus tiers opposans à un arrêt contradictoirement rendu avec leur débiteur; qu'ils n'ont que la voie de la requête civile.

Depuis le Code, les créanciers qui exercent les droits de leur débiteur, en vertu de l'article 1166 du Code civil, ne pourraient même revenir par requête civile, s'ils ne prouvaient qu'il y a eu dol ou collusion de la part de leur débiteur. Voy. le chap. suiv. de ce vol.

3o. La femme Desburreaux, comme curatrice de son mari devenu imbécille, voulut attaquer par tierce opposition trois arrêts rendus contre lui lorsqu'il était déjà privé de la raison. Par arrêt du 5 février 1777, le

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par

lement de Paris la déclara non recevable, sauf à elle à se pourvoir en requête civile contre lesdits arrêts.

Il faudrait aujourd'hui porter la même dé

cision.

4o. Par arrêt du 12 fructidor an 9, la cour de cassation a cassé un jugement du tribunal d'appel de Caen, qui avait admis la tierce opposition d'un créancier hypothécaire à un arrêt rendu contradictoirement avec son débiteur.

*

« Attendu que, lors de cet arrêt, le créancier n'avait encore aucun droit sur les objets litigieux; qu'il n'était que l'ayant-cause de son débiteur.»

Cette décision, fondée alors sur les art. 5 et 11 du tit. 27, et l'art. 1er., tit. 35 de l'ordonnance de 1667, est conforme au vœu de l'art. 474 du Code.

Nous ajouterons d'autres exemples pour faciliter encore l'intelligence de cet article.

5o. En matière de question d'état, les tiers ne peuvent attaquer par tierce opposition un jugement rendu entre des contradicteurs légitimes.

Nous entendons par contradicteur légitime, celui dont dérivent les droits des individus qui voudroient former tierce opposition au juge

ment.

Ainsi, quand un père aurait été condamné à reconnaître un enfant pour son fils, tous les 'autres enfans ne seraient pas fondés à attaquer le jugement par tierce opposition.

Il en serait autrement à l'égard des frères et sœurs, ou autres collatéraux.

Dans le cas où l'un d'eux seulement aurait paru au procès pour constater l'état de cet

enfant, les autres collatéraux auraient droit d'attaquer le jugement par tierce opposition, parce qu'ils ne représentent pas la partie condamnée. Voy. M. Proudhon, p. 41, tom. 2, de son cours de législ. et de jur.

6o. S'il y a solidarité entre plusieurs individus, et que l'un d'entre eux soit condamné par jugement en dernier ressort, les autres ne peuvent revenir par tierce opposition, parce que s'ils ne le représentent pas, ils font cause commune avec lui, et sont censés avoir été condamnés dans la personne de leur co-débiteur.

7°. Celui qui eût pu intervenir n'a pas toujours le droit de former une tierce opposition.

On assigne, par exemple, l'acquéreur d'une terre, en revendication de quelques fonds; sans doute, pour éviter un recours en garantie, le vendeur eût pu, eût même dû intervenir dans l'instance; mais après le jugement, tout est terminé à l'égard du propriétaire revendiquant. Il ne peut être recherché par le vendeur.

En vain, celui-ci dirait-il, que l'acquéreur s'est mal défendu, qu'il a négligé les meilleurs moyens; qu'il y avait des titres à produire qui eussent infailliblement repoussé et fait proscrire la demande en revendication.

On lui répondrait qu'un propriétaire est fondé

à revendiquer son fonds entre les mains de tout tiers détenteur, c'est à celui-ci à appeler en cause son vendeur, son donateur, etc.; ceux, en un mot, de qui il tient ses droits, sinon il court le risque de perdre d'une part l'objet revendiqué, et de l'autre, son recours en garantie, si le garant vient à prouver qu'il eût pu repousser la demande en revendication par des moyens pé

remptoires.

80. Remarquez enfin qu'entre plusieurs tiers intéressés, le jugement sur la tierce opposition ne profite qu'à celui qui l'a obtenu.

Ainsi jugé par arrêt de cassation du 15 pluviose an 9.

S.III.

Devant quel tribunal doit étre portée la tierce opposition?

Lorsqu'une tierce opposition est formée par une instance principale, elle a dû de tous les tems, être portée devant le juge de qui émane le jugement ou l'arrêt qu'elle attaque.

Mais il en était autrement d'une tierce oppo. sition, lorsqu'elle se trouvait incidemment liée à une procédure pendante devant un autre juge, et dans le cours de laquelle la partie adverse avait fait emploi du jugement attaqué.

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On fondait cette distinction sur l'art. 25, tit. 35 de l'ordonnance de 1667, qui étant formel pour la requête civile, semblait l'indiquer pour la tierce opposition. Voy. le Répertoire, vo. opposition (tierce), § 3.

Lorsque cette distinction fut proposée dans le projet, la COUR DE CAEN dit : « qu'il y avait de l'inconvénient à faire admettre la tierce opposition, même incidente, par un tribunal autre que celui qui a rendu le jugement lorsque l'opposition n'est pas portée en la cour d'appel à `laquelle ressortit le jugement contre lequel porte l'opposition.

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«Il peut naître, en adoptant le projet, contradiction d'arrêt et de jugement, si celui attaqué l'est successivement par diverses parties en divers tribunaux; ce qui peut arriver dans beaucoup d'affaires, telles que les questions d'état et autres. Il est donc plus expédient de renvoyer la tierce opposition au tribunal qui l'a rendu, toutes les fois que l'incident ne sera pas élevé en la cour d'appel d'où il relève, auquel cas elle pourra la retenir. >>

La COUR D'AGEN disait aussi qu'il était plus régulier de se pourvoir, dans tous les cas, devant le tribunal qui a jugé.

Nonobstant ces observations, l'art. 475 du

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