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La recherche de la paternité, quoique défendue en général, est admise dans le cas particulier de l'enlèvement *.

La recherche de la maternité est admise indéfiniment le cas de l'incesté et de l'adultère ***.

** hors

Le bâtard simple non reconnu a donc deux moyens pour parvenir à la preuve de sa filiation.

Maintenant, prenons garde « que la loi ne présume pas la qualité d'adultérin ou d'incestueux, et que jusqu'à la preuve du contraire, les enfans illégitimes sont réputés simplement bâtards » (1).

Il en résulte que celui qui, dans les deux cas des articles 340 et 341, se présente pour réclamer le titre de fils, doit être écouté, si l'on ne lui oppose pas d'abord l'exception de l'adultèrè ou de l'inceste.

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Supposons qu'on ne fasse pas valoir ces exceptions, que l'inces tueux ou l'adultérin se présentant comme bâtard simple sõit admis à la preuve des faits, et qu'il y réussisse; la demande sera justifiée: mais des détails de la cause et de l'instruction pourront sortir accidentellement des indices d'inceste ou d'adultère, qui ne permettront pas aux Tribunaux de déclarer le réclamant bâtard simple.

Dans ce cas, comme la paternité ou la maternité në laissera pas d'être établie, il faudra bien prononcer que la filiatión est certaine; mais comme il ne sera pas moins établi qu'il y a adultère ou inceste, il faudra en même temps déclarer l'enfant incestueux ou adultérin.

Ceci arrivera toutes les fois que l'enquête, en prouvant la filiation, prouvera en même temps qu'il y a eu un commerce adultérin ou incestueux 6 (2).

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(1) M. Bérenger, Procès-verbal du 26 brumaire an 16 (2) M. Treilhard, Exposé des motifs du titre Des Successions, Procès-verbal du 24 germinal an 11, tome II, p. 732. * Voyez l'article 340, page 203. — ** Voyez l'article 341, page 213. *** Voyez

l'article

342, page 223.

Cette hypothèse n'est pas imaginaire : il est facile d'en trouver des exemples.

Un individu se pourvoit contre les héritiers du ravisseur de sa mère. Celle-ci étoit libre; le ravisseur étoit marié. Ses héritiers l'ignoroient. Ils découvrent ce fait après l'enquête, et lorsque la filiation est justifiée. Aussitôt ils le font valoir, et demandent que le Tribunal n'adjuge pas au réclamant la portion que l'article 757 donne aux enfans naturels, et qu'il ne lui soit attribué que les alimens réglés par l'article 762.

Autre exemple: Un enfant se prétend fils d'une femme fibre. Dans le cours de l'instruction, on découvre qu'il est né du commerce que cette femme a eu avec un homme marié ou avec un de ses parens. Les adversaires du réclamant demandent que ses

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droits sur la succession de sa mère soient réduits conformément à l'article 762.

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Ces exemples et plusieurs autres qu'il est facile de proposer prouvent que l'article 762 peut recevoir son application, sans que la recherche de la paternité ou de la maternité soit permise aux enfans adultérins ou incestueux, et sans qu'on autorise leurs père et mère à les reconnoître.b

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Sans doute que s'ils se présentoient sous ces titres, ils ne devroient pas être écoutés: mais s'ils réclament le titre de bâtard simple, et que, par le cours de la procédure, on parvienne à reconnoître qu'à la vérité ils sont réellement nés de ceux dont ils se prétendent les enfans, que cependant ils sont les fruits de l'inceste ou de l'adultère, la certitude de leur filiation leur servira pour obtenir des alimens, et la certitude qu'ils doivent le jour à un crime, servira à leurs adversaires pour leur faire refuser les droits que le Code accorde aux bâtards simples sur la succession de leur père.

1

III. SUBDIVISION,

Dans quels cas et comment la Reconnoissance établit la Filiation. (Articles 336 et 337.)

LA reconnoissance ne peut intervenir que dans différentes il est possible qu'elle soit faite,

1.o Par un père et une mère tous deux libres;

quatre positions

2.o Par la mère seule, mais par une mère non engagée dans les liens du mariage;

3.o Par le père seul non marié ;

4. Par le père ou par la mère, l'un ou l'autre mariés, depuis la naissance de l'enfant, avec une autre personne que celle avec laquelle ils ont eu commerce.

Dans le premier cas, la reconnoissance ne sauroit souffrir de difficulté, elle est l'ouvrage de toutes les parties intéressées : la Commission avoit rappelé ce principe (1); mais il étoit tellement évident, qu'on n'a pas cru devoir l'exprimer dans le Code.

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Il étoit sans inconvénient d'admettre la reconnoissance de la mère seule, parce que la maternité est un fait palpable et qu'on peut prouver » (2), parce que d'ailleurs cette reconnoissance ne nuit à personne, aujourd'hui que les déclarations de paternité sont interdites. Il n'y avoit donc pas là de difficulté que le Code dût lever.

Dans le troisième cas, se présentoit la question de savoir si lą reconnoissance faite par le père seul devoit avoir quelque effet, et quel seroit cet effet : l'article 336 la décide.

(1) Projet de Code civil, liv. I.", tit. VII, art. 28, page 56. — (2) M. Tronchet, Procès-verbal du 26 brumaire an 10,

Enfin, dans le quatrième cas, une règle positive étoit nécessaire pour concilier l'effet de la reconnoissance avec l'intérêt et les droits des enfans nés d'une union légitime et avec le mariage existant. Cette règle est établie F'article 337. par

NUMÉRO I.cr

De la Reconnoissance faite par le père seul non engagé dans les liens

du mariage.

ARTICLE 336.

LA reconnoissance du père, sans l'indication et l'aveu de la mère, n'a d'effet qu'à l'égard du père.

Nous aurons à examiner sur cet article,

Pourquoi la reconnoissance du père est valable sans être appuyée de l'aveu de la mère ;

Si le désaveu de la mère, peut la détruire;

Quelle est l'étendue des effets de cette reconnoissance.

Pourquoi la Reconnoissance du père est valable, sans être appuyée de l'aveu de la mère.

LA Commission avoit adopté le système contraire à celui que l'article 336 consacre. La rédaction qu'elle proposoit étoit ainsi conçue : Toute reconnoissance du père seul, non avouée par la mère, est de nul effet, tant à l'égard du père, que de la mère; sans préjudice néanmoins de la preuve de la maternité et de ses effets, contre la mère seulement (1).

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(1) Projet de Code civil, liv. I.", tit. VII, art. 27, page 56,

La Cour d'appel de Montpellier demanda que la reconnoissance du père eût son effet lorsque la maternité seroit d'ailleurs prouvée 6 (1). La Cour d'appel de Paris vouloit que 5 du moins la reconnoissance du père fût suffisante par rapport à lui-même, lorsque la mère seroit morte, ou absente, ou en démence, ou incapable, par toute autre cause, de donner une déclaration £ (2).

Néanmoins la Section présenta l'article de la Commission sans y rien changer (3).

Dans cet état de choses, on eut à examiner si la reconnoissance du père seul devoit être valable, ou si elle n'auroit de force que l'aveu de la mère.

par

Les sentimens furent d'abord partagés. Je vais exposer les raisons qui ont été alléguées de part et d'autre.

I. Raisons pour l'affirmative. On a fait valoir en faveur du système de la Commission:

Le peu de certitude que donne la reconnoissance du père touchant le fait de la filiation;

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Voici comme on a développé ces diverses considérations:

« Il est contre les principes, a-t-on dit, d'admettre comme une preuve de l'état, la reconnoissance du père qui jamais ne peut être sûr de sa paternité. Le droit des enfans nés hors mariage est sans doute fondé sur la nature; mais il ne leur est acquis que quand ils ont une juste présomption en leur faveur or, la reconnoissance du père seul est-elle une juste présomption

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(4) ?

(1) Observations de la Cour d'appel de Montpellier, page 16. — (2) Observations de la Cour d'appel de Paris, page 65. — (3) 1." Rédaction, chap. III, art. 8, Procèsverbal du 26 brumaire an 10. — (4) M. Portalis, Procès-verbal du 24 brumaire an 10,

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