Page images
PDF
EPUB

de ses enfans? Avec un tel frein, les mères d'enfans riches se remarieront bien rarement: quant aux veuves d'artisans, laboureurs, &c., il importe qu'elles se remarient, même pour l'intérêt de leurs enfans en bas âge, qui retrouvent un appui dans le second mari de leur mère » (1).

Néanmoins, comme, par son second mariage, la mère passe sous une autorité étrangère qui peut n'être pas favorable aux mineurs, on a statué qu'elle pourroit être privée de la tutelle si l'intérêt des mineurs paroissoit l'exiger.

Mais, qui sera ici le juge?

On pouvoit s autoriser le père à ôter, par son testament, à la mère, jusqu'à la qualité de tutrice, dans le cas où elle se remarieroit (2).

Si on croyoit devoir refuser ce droit au père, ou dans le cas où il n'auroit rien statué, on pouvoit obliger la mère à consulter la famille sur son mariage, et décider que l'omission de cette formalité rendroit le second mari responsable de la gestions (3).

Le Conseil d'état a préféré le second de ces moyens. Le premier 'étoit trop absolu ; il eût pu empêcher des mariages qui auroient été projetés pour l'avantage des enfans. En constituant pour juge la famille, on ne tombe pas dans cet inconvénient; d'après ce système, il est permis de peser les circonstances, et de n'ôter la tutelle à la mère que lorsque son second mariage peut nuire aux

mineurs.

Suites du défaut de Délibération de la part de la Famille.

La loi corrobore, par deux autres dispositions, la disposition qui

(1) M. Berlier, Procès-verbal du 22 vendémiaire an 11, tome II, page 66. — (2) Le Consul Cambacérés, ibid., page 67.

(3) Ibid.

F

oblige la mère à soumettre à la famille le mariage qu'elle projette.

I. D'abord, faute d'avoir rempli cette formalité, la mère perd, de plein droit, la tutelle. Il lui devient donc impossible d'éluder la sage mesure prescrite par le Législateur, puisque sa désobéissance lui deviendroit inutile.

Cette disposition, au surplus, fait naître une question : la famille, lorsqu'elle procède à la nomination d'un nouveau tuteur, peut-elle rendre à la mère la tutelle?

J'ai déjà dit que la Commission vouloit qu'elle la perdît sans retour *.

Mais cette disposition n'a pas passé dans le Code: or,

1. L'article de la Commission prouve que le Législateur a examiné la question, et, le rejet de cet article, qu'il n'a pas voulu admettre la prohibition proposée ;

2.o Les prohibitions ne se suppléent pas dans les lois, à moins qu'elles ne soient des conséquences directes et nécessaires de leurs dispositions.

II. Une seconde précaution que la loi a prise pour forcer la mère à consulter la famille, a été de donner intérêt au mari à lui faire remplir cette formalité : lorsqu'elle a été omise, le nouveau mari devient responsable du fait de la mère.

Dans la rédaction communiquée au Tribunat, on n'avoit pas donné assez d'étendue à cette responsabilité. On s'étoit borné à dire que le nouveau mari seroit solidairement responsable de l'indue gestion qui auroit eu lieu depuis le nouveau mariage (1).

(1) Rédaction communiquée au Tribunat, article 7, Procès-verbal du 6 brumaire an 11, tome II, page 116.

* Voyez page 38.

Le Tribunat demandas qu'il fût exprimé dans l'article, que le second mari devoit répondre non-seulement de l'indue gestion, mais encore du défaut de gestion ↓ (1).

En conséquence, la disposition a été généralisée. On a déclaré le mari solidairement responsable de TOUTES les suites de la tutelle que la mère a indûment conservée *.

NUMÉRO II.

Cotutelle du second Mari lorsque la Mère remariée demeure Tutrice.

ARTICLE 396.

LORSQUE le conseil de famille, dûment convoqué, conservera la tutelle à la mère, il lui donnera nécessairement pour cotuteur le second mari, qui deviendra solidairement responsable, avec sa femme, de la gestion postérieure au mariage.

Il étoit indispensable de donner pour cotuteur, à la mère, le mari sous la puissance duquel elle va passer; c'étoit le seuf moyen de concilier la gestion de la tutelle avec les dispositions qui veulent que la femme ne puisse agir que sous l'autorisation du marí

Cette réflexion prouve la sagesse de l'article 395. Les enfans. en effet, changent réellement de tuteur dans le cas du convof: feur mère n'est plus leur tutrice que de nom; c'est le beau-père qui, dans le fait, gère la tutelle. Dès-fors la famille devoit être appelée à décider si ce nouveau futeur convenoit aux mineurs.

II

y a plus le mari ne pouvoit devenir tuteur que par l'autorité de la famille; car, du moment qu'il n'y a plus, dans le fait, de tutelle naturelle, parce que ce n'est plus la personne à qui elle est déférée

(1) Observations du Tribunat.

* Voyez le texte de l'article 395, page 37.** Voyez titre Du Mariage, tome II, page 344 et suiv.

qui administre, la tutelle devient dative, et c'est à la famille à la conférer.

Je sais que la mère peut aussi nommer un tuteur, mais ce n'est que pour le temps qui suivra sa mort; tant qu'elle vit, il ne lui est pas permis de se faire substituer. D'ailleurs, elle perd ce droit de nomination lorsqu'elle se remarie. La cotutelle du second mari a donc essentiellement les caractères de cette tutelle dative à laquelle la famille seule doit nommer.

SECTION II.

DE LA TUTELLE DÉFÉRÉE PAR LE PÈRE OU LA MÈRE. (Articles 397, 398, 399, 400 et 401.)

«IL étoit tout naturel, en donnant la tutelle, de droit, aux père et mère, de leur conférer aussi le droit de choisir, d'élire un tuteur à leurs enfans, soit par testament, soit par acte public; c'étoit une suite de cette première confiance que leur donnoit la loi » (1). Ainsi, celui des parens que la mort vient arracher au fils dont il étoit le seul appui, sentira des regrets moins déchirans; il lui laisse un ami, le choix de son cœur: il meurt, et sa tendresse vivra encore près de cet enfant que la nature abandonne » (2).

[ocr errors]

Telle est la théorie des articles de cette section.

Ils déterminent

Dans quels cas il y a lieu à la tutelle testamentaire;

Dans quelle forme elle est déférée;

Par quels pères et mères elle peut
Quels en sont les effets.

l'être ;

(1) M. Huguet, Tribun, Tome II, page 149, — (2) M. Leroy, Tribun. Ibid., page 173.

Ire PARTIE.

DANS QUELS CAS IL Y A LIEU À LA TUTELLE DÉFÉRÉE PAR LE PÈRE OU LA MÈRE.CAD

ARTICLE 397.

Le droit individuel de choisir un tuteur parent, ou même étranger, n'appartient qu'au dernier mourant des père et mère.

i

La tutelle testamentaire ne doit avoir lieu qu'à défaut de la tutelle naturelle, laquelle subsiste tant que l'un des deux époux est vivant; et voilà pourquoi elle ne peut être déférée que par le dernier mourant du père ou de la mère. Mais la tutelle légitime réservée aux ascendans n'y fait pas obstacle.

Cette opinion n'étoit pas celle de la Commission. Elle proposoit de donner la préférence à la tutelle des ascendans sur la tutelle testamentaire; et, en conséquence, elle présentoit la disposition suivante: Lorsqu'il n'y a n'y a pas d'ascendans, le dernier mourant des père et mère a le droit de choisir un tuteur (1).

[ocr errors]

1

La Cour d'appel de Montpellier demanda par quelle raison, forsqu'il y a un ascendant, le père ou la mère n'auroit pas le droit de choisir un tuteur, sur-tout si l'ascendant n'est pas reconnu propre à exercer la tutelle » (2).

2

Les Romains en avoient jugé ainsi; chez eux la tutelle légitime ne venoit qu'après la tutelle testamentaire : Quibus TESTAMENTO

[ocr errors]

(1) Projet de Code civil, liv. I.", tit. IX, art. 15, page 61,- (2) Observations de la Cour d'appel de Montpellier, page 19.

« PreviousContinue »