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4. QUESTION. Le Choix du Père ou de la Mère impose-t-il au Tuteur désigné l'obligation d'accepter la tutelle !

L'ACCEPTATION de la tutelle est un office d'ami pour celui qui ne se trouve pas dans la classe des personnes à qui la loi en fait un devoir; or, de semblables services sont essentiellement volontaires. Il étoit donc impossible de forcer le tuteur désigné par le père ou la mère, de se charger du fardeau qu'ils lui imposoient, à moins qu'il ne fût du nombre de ceux à qui la tutelle auroit pu être déférée par la famille,

SECTION III,

DE LA TUTELLE DES ASCENDANS. (Articles 402, 403 et 404.)

LES Romains, à défaut de tutelle testamentaire, avoient admis une tutelle qui passoit aux agnats, c'est-à-dire, à tous les parens du côté paternel indistinctement et suivant la proximité du degré, Comme elle leur étoit dévolue de plein droit, et par la seule force de la loi, on l'avoit appelée légitime,

Cette tutelle n'appartenoit jamais aux cognats, c'est-à-dire, aux parens du côté maternel; parce que, dans le système des Romains, la famille de la mère ne tenoit à l'enfant que par les liens de lą parenté naturelle (1),

Notre tutelle des ascendans diffère de cette tutelle des Romains, en ce qu'elle ne passe pas à la ligne collatérale, et en ce qu'elle

(1) Inst,

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est

est donnée aux ascendans maternels comme aux ascendans paternels; mais, au fond, elle a les trois caractères qui constituoient essentiellement la tutelle légitime: elle est déférée directement par la loi * ; elle l'est à raison de la parenté; elle exclut la tutelle

dative.

Nous avons à examiner

Comment cette tutelle passe aux ascendans ;

Quels ascendans y sont appelés ;

A qui elle appartient, lorsqu'il y a concours entre les ascendans.

Lre PARTIE.

COMMENT LA TUTELLE LEGITIME PASSE AUX ASCENDANS,

L'ASCENDANT seroit-il, de plein droit, tuteur? Ne le deviendroit, il que par la confirmation de la famille Il a fallu choisir entre ces deux systèmes.

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La Commission avoit présenté le dernier; elle proposoit la disposition suivante : Lorsque l'enfant mineur n'a ni père ni mère la famille doit déférer la tutelle à l'ascendant le plus proche (1). Mais pourquoi faire intervenir la famille?

Si c'étoit pour que la tutelle ne fût pas déférée à un ascendant d'un degré plus éloigné, au préjudice d'un ascendant plus proche, la

(1) Projet de Code civil, liv. I.", tit. IX, art. 20, page 62.

* La tutelle des père et mère est bien aussi déférée directement par la loi; mais chez nous, elle se confond avec la puissance paternelle,

1

précaution de faire délibérer la famille devenoit inutile; on pouvoit laisser les prétendans faire valoir eux-mêmes leurs droits.

On a donc décidé que la tutelle passeroit, de plein droit, à l'ascendant.

Cette décision, au surplus, étoit sans inconvénient; car elle ne fixe pas la tutelle dans des mains affoiblies par l'âge. • L'ascendant peut repousser ce fardeau, si des infirmités graves, ou le progrès des années, l'empêchent de le soutenir (1) on peut aussi l'en décharger malgré lui, s'il présume trop de ses forces, puisque l'inaptitude est une cause de destitution *. Ce moyen seroit un peu dur, sans doute; mais l'ascendant contre lequel l'intérêt des mineurs obligeroit de l'employer, ne pourroit imputer qu'à lui-même les désagrémens que son opiniâtreté lui auroit attirés.

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La question étoit de savoir si la tutelle légitime seroit exclusivement réservée aux aïeuls, ou si les aïeules y seroient aussi appelées.

La Commission donnoit la préférence à l'ascendant le plus proche, quel que fût son sexe ** (2): En cas de concours de deux ascendans au même degré et de sexes différens, la tutelle devoit être déférée au mâle (3).

La Section proposa de n'accorder la tutelle légitime qu'aux aïeuls (4).

(1) M. Berlier, Exposé des motifs, Procès-verbal du 26 ventôse an 11, tome II, page 618.—(2) Projet de Code civil, liv. 1.", titre IX, article 20, page 62. — (3) Ibid. — (4) 1. Rédaction, article 14, Procès-verbal du 22 vendémiaire an 11, tome II, page 70, 1." * Voyez page 168,-** Voyez page $7.

• Son intention n'étoit pas d'exclure absolument les aïeules de toute tutelle; mais il lui paroissoit dangereux d'admettre, de plein droit, des personnes en qui la foiblesse du sexe est jointe à la foiblesse de l'âge. En conséquence, en leur ôtant la vocation de la loi, la Section leur laissoit d'ailleurs, dans le cas de la tutelle dative, la faculté d'être nommées par le conseil de famille, qui sauroit distinguer celles qui sont capables de porter un tel fardeau (1) l'aïeule n'est pas toujours d'un âge assez avancé pour qu'il lui soit impossible d'administrer la tutelle: on peut donc permettre qu'elle soit nommée tutrice lorsqu'il n'y a pas d'autres tuteurs légitimes (2).

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Il n'y avoit rien à conclure contre cette proposition d'exclure l'aïeule, de la disposition qui défère, de plein droit, la tutelle à la mère. La tutelle est un office viril; la mère n'y est appelée que par une exception qu'il seroit peut-être convenable de faire disparoître : à plus forte raison, ne faut-il point y appeler l'aïeule » (3). Au surplus, la mère a des titres qui n'appartiennent pas à l'aïeule paternelle, ni même à aucun ascendant mâle de cette ligne : elle a porté l'enfant dans son sein; elle l'a élevé; elle doit avoir nécessairement pour lui une affection plus vive que l'ascendante d'un degré supérieur » (4). « La mère, d'ailleurs, a sur l'aïeule l'avan

tage de n'être pas affoiblie par les années » (5).

On ne devoit pas non plus se reposer sur l'espérance que << l'aïeule s'excusera d'accepter la tutelle, lorsqu'elle ne se sentira pas assez de force pour la gérer » (6). Il étoit à craindre que des conseils perfides et intéressés ne la déterminassent à se charger de la tutelle, quoiqu'elle fût très-incapable » (7).

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Le système de la Section a été adopté sans modifications: les

J

(1) M. Berlier, Procès-verbal du 22 vendémiaire an 11, tome II, page 70. — (2) Ibid. (3) M. Treilhard, ibid., (4) M. Berlier, ibid., page 70. —(5) Ibid.,

page 71.

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- (6) M. Portalis, ibid., page 71,— (7) M. Treilhard, ibid.

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aïeuls sont seuls appelés à la tutelle légitime; mais les aïeules peuvent être nommées à la tutelle dative *.

III. PARTIE.

DU CONCOURS ENTRE LES ASCENDANS. Articles 402, 403 et 404.)

L'ASCENDANT le plus proche en degré devient toujours tuteur légitime, à l'exclusion de l'ascendant d'un degré plus éloigné, à quelque ligne qu'il appartienne; ainsi, l'aïeul maternel obtiendra la tutelle avant le bisaïeul paternel.

Mais, s'il se trouve plusieurs ascendans du même degré, il s'établit alors un concours sur lequel la loi a dû donner des règles. Le concours a toujours lieu

Ou entre les ascendans des deux lignes,

Ou entre les ascendans de la ligne paternelle,

Ou entre ceux de la ligne maternelle.

Distinguons ces trois cas.

Ire DIVISION.

Du Concours entre les Ascendans des deux lignes.

ARTICLE 402.

LORSQU'IL n'a pas été choisi au mineur un tuteur par le dernier mourant de ses père et mère, la tutelle appartient, de droit, à son aïeul paternel; à défaut de celui-ci, à son aïeul maternel; et ainsi en remontant, de manière que l'ascendant paternel soit toujours préféré à l'ascendant maternel du même degré.

LA Commission proposoit de décider qu'en cas de concours de

→ Voyez art. 442, pages 157 et 160.

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