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DE LA LUTTE CONTRE L'AFFLUX DES ÉTRANGERS EN SUISSE. SOURCE.-M. M., La question des étrangers en Suisse, Journal des Débats, 31 mai 1910.

BIBLIOGRAPHIE.

- Clunet 1909, p. 621 ; ibid. 1910, p. 361. Clunet, Tables générales, III, vo Etranger, p. 791; et IV, vo Refoulement des étrangers, p. 562; vo Vie internationale, p. 1053, nos 6 et s.; vo Xénonomie, p. 1075, nos 1, 8.

Edmond BOISSIER, L'assimilation des étrangers, Genève, librairie Julien. V. aussi : La Suisse en sept conférences, Genève (édition Star), et Paul SEIPPEL, Escarmouches, Lausanne, librairie Payot, 1910.

Placée au centre de l'Europe, riche de ses beautés naturelles, accueillante, libre et heureuse, la Suisse devait fatalement attirer les étrangers. Elle les attire puissamment, trop peut-être. Du moins les Suisses commencent-ils à trouver que la force d'attraction de leur pays, si flatteuse qu'elle soit, affecte des proportions vraiment inquiétantes. Un moment viendra bientôt, si l'on n'y met ordre, où l'élément suisse sera débordé. M. Virgile Rossel a calculé que les non-Suisses qui formaient en 1888 le 8 % de la population helvétique en formaient plus du 12 % en 1900. C'est une proportion qui ne se rencontre dans aucun autre Etat d'Europe et qui s'aggrave d'ailleurs d'année en année. Si l'immigration étrangère continue sur la même échelle, la Suisse comptera dans quatorze ans 24% d'étrangers. Plus élevée encore que dans le reste de la Suisse, la proportion des non nationaux à Genève. La <«< Cité de Calvin », la « Rome protestante » deviendra fatalement, dans un temps relativement court et si l'on ne trouve un remède à la situation actuelle, ce que M. Edmond Bois sier appelle une « Cosmopolis amorphe ». A Genève, les étrangers qui formaient, il y a cinq ans, le 39,4 % de la population, représentent aujourd'hui le 46 %. Ils seront vraisemblablement, dans quarante à cinquante ans, d'ici, en majorité dans le canton. Rien d'étonnant dans ces conditions, à ce que les autochtones s'affligent, se consultent et cherchent à réagir. La Suisse a d'autres ambitions que de servir de refuge intangible aux révolutionnaires du monde entier. Elle ne considère pas non plus comme sa mission essentielle de départir dans ses excellentes Universités une instruction solide et peu coûteuse à la jeunesse moscovite et balkanique.

Elle ne veut pas être seulement le lazaret cosmopolite cher aux cachexiques des deux hémisphères. La Suisse est un peuple. Si la définition de Renan est exacte : « Une nation est une âme, un principe spirituel », la Suisse mérite d'être appelée une nation. Elle a donc toutes sortes de bonnes raisons de s'attacher à défendre l'intégrité de son esprit, non moins essentielle, pour un peuple, que l'intégrité du territoire.

Les sept conférences que la maison genevoise d'édition «Atar» vient de réunir en volume sont nées de ce mouvement de conservation nationale. Les sept conférenciers dont cet ouvrage recueille les patriotiques propos appartiennent à tous les cantons de la Suisse romande, Genève et Vaud sont dignement représentés par MM. Horace Micheli et Albert Bonnard, Fribourg par un jeune écrivain dont la renommée grandit M. Gonzague de Reynold. MM. Bonnard et Micheli sont protestants, M. de Reynold est catholique. Les uns et les autres ont parlé d'ailleurs en Suisses, en patriotes uniquement préoccupés de servir la patrie. Par delà les diversités ethniques et confessionnelles, il existe aussi bien en Suisse un esprit suisse, formé des éléments les plus disparates, mais constamment entretenu par des traditions, des tendances, des nécessités communes. La Suisse allemande n'est pas plus une simple province intellectuelle de l'Allemagne que la Suisse française n'est une simple province intellectuelle de la France. Jean-Jacques Rousseau, Mme de Staël, Amiel, Edouard Rod ont un accent qui n'appartient qu'à eux. Ils se différencient aussi nettement des écrivains de nationalité française que Gottfried Keller ou M. Karl Spitteler des écrivains allemands de langue allemande. L'esprit suisse, encore une fois, u'est pas un mythe.

C'est le fait que les conférenciers de Genève se sont attachés à proclamer, la vérité qu'ils se sont plu à mettre en évidence. Ils ont constaté le danger que faisait courir à la nationalité suisse l'afflux croissant des étrangers. Ils se sont plaints de la situation prédominante, de la situation excessive que cet élément exotique prenait peu à peu dans la vie nationale, au détriment des autochtones. Enfin ils ont manifesté la volonté énergique de conjurer le péril.

Un peuple a le droit, un peuple a le devoir d'en agir ainsi. Il convient de louer les conférenciers de Genève pour leur

unanimité et leur entrain à faire face au danger qui menace leur pays. Mais il conviendrait aussi qu'ils ne gardassent point d'illusions sur la difficulté de la tâche qu'ils entreprennent. Tout contribue à attirer en Suisse les ouvriers étrangers, prolétaires et oisifs. On ne voit pas trop comment pourrait être construite une muraille de Chine assez haute pour défendre l'Helvétie contre cette invasion pacifique. Dans sa brochure sur l'assimilation des étrangers, M. Edmond Boissier met en avant deux moyens : le premier consisterait à imposer la naturalisation « à tous les enfants nés dans le canton de Genève de parents étrangers, ou qui y sont arrivés avant la septième année ». Le second consisterait à faire donner l'école. Il faudrait doter l'enseignement primaire et secondaire à Genève d'un caractère nettement national, en sorte que l'école coopérât systématiquement à l'éducation nationale des nouveaux Genevois acquis par la naturalisation. Les mesures mises en avant par M. Edmond Boissier sontelles bien pratiques? Elles ne sont pas près en tout cas d'être adoptées. La naturalisation forcée, dans les proportion où il la demande, exigerait, pour pouvoir être légalement décrétée, une revision préalable de la Constitution fédérale. Une telle mesure provoquerait d'ailleurs sûrement des représailles de la part des puissances étrangères. La question, avant d'être tranchée, mérite donc d'être longuement considérée.

On voit, par le rapide exposé qui précède, combien est grave, d'une part, mais délicat aussi et pour tout dire presque insoluble, le « problème des étrangers » en Suisse. Le peuple helvétique n'aura pas trop de tout son légendaire bon sens, de tout son traditionnel esprit politique pour le résoudre

sainement.

Le Conseil National de la République à Berne s'est vivement préoccupé de la question; il cherche un remède du côté des modifications à apporter aux lois sur la naturalisation:

Le Conseil national a discuté dans une de ses dernières séances des moyens propres à faciliter la naturalisation des étrangers. Tous les orateurs, y compris le président de la Confédération, se sont trouvés d'accord pour reconnaître la nécessité de parer à l'augmentation incessante de l'élément étranger en Suisse. On avait déjà été frappé, lors du rencensement de 1900, de la progression du nombre des étrangers

qui atteignait alors le chiffre de 384,000; ils représentaient une proportion de 116/1,000, contre 79/1,000 en 1888. Voici comment ils se répartissaient d'après les nationalités : 168,000 Allemands, 117,000 Italiens, 58,000 Français, 23,000 Autrichiens.

Ce sont naturellement les cantons frontières qui accusent la plus forte proportion d'étrangers. Ainsi le canton de Genève accusait pour 134,000 habitants 53,000 étrangers, dont 34,000 Français; 47,000 Allemands habitaient le canton de Zurich, et 37,000 étaient domiciliés à Bâle. Enfin 29,000 Italiens étaient établis sur le territoire du canton du Tessin. Ce sont là, comme nous l'avons dit, les chiffres de 1900; mais il est certain que le recensement de 1910 accusera encore la progression de l'élément étranger.

Le Conseil fédéral a accepté de rechercher les mesures propres à remédier à cette situation. La création d'un indigénat, suisse, indépendant du droit de bourgeoisie communal, n'a pas ses sympathies. En revanche, la naturalisation d'office des étrangers nés en Suisse a de nombreux partisans dans le Parlement, et c'est de ce côté que semblent devoir se diriger les études du Conseil fédéral. On a fait remarquer en effet que le tiers des étrangers domiciliés en Suisse sont nés dans le pays et que cette proportion va croissant. La question se complique du fait que les frais d'assistance sont à la charge des communes, mais cette difficulté serait facilement levée si la Confédération décidait d'en prendre une part à sa charge. Il est probable que les études du Conseil fédéral seront menées activement, et il ne serait pas impossible que les Chambres fussent saisies d'un projet de loi avant la fin de l'année» (Le Temps. 28 juin 1910).

De la difficulté d'appliquer en Belgique les lois rÉPRESSIVES DE L'OBscénité et dE LA PORNOGRAPHIE AU THÉATRE.

Source. Rev. de droit pénal et de criminologie (R. de Ryckere et H. Jaspar), Bruxelles, juin 1910, p. 603.

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BIBLIOGRAPHIE. Cf. Clunet, Tables générales, IV, vo Pornographie, p. 423. Lutte contre la Pornographie en Allemagne, Clunet 1909, p. 334. Association de beauté et exhibition du nu en Allemagne, ibid., p. 595. Condamnation du nu au théâtre en France, Clunet 1909, p. 887.

Il n'existe peut-être pas d'affaires plus délicates et plus difficiles, exigeant à la fois plus de perspicacité, plus d'énergie et plus de doigté, que les poursuites du chef d'infraction aux art. 383 (loi du 29 janvier 1905) et 384 du Code pénal belge, s'appliquant aux pièces de théâtre et aux revues obscènes.

Il n'existe pas non plus d'affaires où le public et la presse se montrent souvent plus systématiquement incohérents et injustes.

Ce genre d'affaires exige de la part du magistrat instructeur des qualités spéciales que l'on ne rencontre pas toujours chez tous les juges d'intruction.

Périodiquement les journaux, les ligues contre la licence. des théâtres, des cafés-concerts, etc., les simples citoyens même s'adressent au Parquet et lui signalent les inqualifiables ordures qui s'étalent complaisamment devant un public vraiment peu dégoûté. « Le public, dit avec raison un journal, a les spectacles qu'il mérite! »>

Le procureur du Roi charge un juge d'instruction d'instruire à charge d'inconnus. Le magistrat instructeur ne peut guère songer à s'adresser à la police locale dont le caractère administratif paralyse trop fréquemment la bonne volonté dans l'accomplissement de ses devoirs judiciaires et dont la compétence dans une matière d'une nature si spéciale et si délicate est fort contestable.

Chargée d'une enquête discrète, la police locale se borne à transmettre, la plupart du temps, au juge d'instruction un procès-verbal de carence. Les rapports qu'elle envoie sont négatifs certes, les chansons sont grivoises, mais ne semblent pas, à son avis, exiger une intervention du Parquet. La police hésite à assumer une responsabilité qui, dans l'état actuel de son organisation, peut lui occasionner des ennuis sans nombre.

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