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nouveau Code civil allemand, lequel l'interdit en outre expressément à quiconque ne sait pas lire. Le Code espagnol exige encore aujourd'hui, également, l'indication de l'année, du mois et du jour.

Il était excessif, à notre avis, d'exiger, pour la validité d'un testament olographe, qu'il fût libellé sur un papier timbré correspondant à l'année de sa confection, et même sur un papier timbré quelconque: outre que le timbre est une mesure fiscale à laquelle il nous paraît préférable de refuser une influence quelconque sur la validité civile d'un acte sous seing privé, le Code espagnol de 1889 apportait ainsi une véritable entrave à la liberté de tester dans tous les cas urgents, car beaucoup de personnes ne possèdent pas couramment de papiers timbrés, et il peut être très difficile de s'en procurer rapidement, principalement dans les campagnes; nous verrons s'il n'existe pas d'autre moyen, même plus efficace, d'assurer le contrôle de la date, ou de déjouer la fraude qui consisterait, par exemple, dans l'antidate du testament, réel ou apocryphe, d'une personne en état d'insanité d'esprit, afin de le rapporter à une époque où elle jouissait encore de la plénitude de ses facultés.

V. Clunet, Tables générales, IV, vo Testament, p. 865, les nos indiqués à l'Index des Pays (Espagne), p. 871.

ALLEMAGNE. Le Landrecht prussien et la plupart des lois modernes allemandes, pas plus que l'ancien droit commun allemand, qui n'était cependant autre que le droit romain après sa réception en Allemagne, mais développé par la science et la pratique, n'admettaient, en aucun cas, notre testament olographe; il faut noter, cependant, que le document que le testateur présentait à la signature des témoins, sous l'ancien droit, devait être écrit et signé par lui.

Le nouveau Code civil allemand, promulgué en 1896, en vigueur donc depuis le 1er janvier 1900, reconnaît expressément la faculté de tester par une déclaration du testateur écrite et signée de sa main, indiquant la date du jour et le lieu (art. 2231, 2o). L'indication du lieu peut être considérée comme faisant partie de la date, et nous avons apprécié précédemment l'importance de cette prescription: c'est donc bien là, en somme, le testament olographe du droit français.

Cependant, d'après les auteurs du Code allemand annoté par le Comité français de législation étrangère, la présence de témoins pour attester l'authenticité de la signature du testateur, bien qu'elle ne soit pas exigée, n'est pas une cause de nullité. Il n'en serait pas de même chez nous : « dès qu'un tiers, dit Laurent (t. XIII, no 172), écrit (au su du testateur, bien entendu), ne fût-ce qu'un mot dans le testameut, cela prouve qu'il y est intervenu; le testateur est-il resté libre malgré cette intervention ? La chose est douteuse. Or, dès qu'il y a doute sur ce point, la loi ne peut plus reconnaître l'écrit comme l'expression de la volonté du défunt. »>

Il est vrai que la jurisprudence a varié suivant les espèces, mais un testament écrit, daté et signé de la main du testateur, et révélant, en outre, matériellement, le concours de témoins à sa confection, est-il encore bien un testament olographe ? Ce n'est plus là l'œuvre exclusivement personnelle du testateur, et il n'y a plus de garantie, même apparente, que le testament soit l'expression de sa libre volonté en reconnaissant, en tout cas, d'une façon générale, la validité d'une disposition semblable, la doctrine et la jurisprudence créeraient, pensons-nous, une nouvelle espèce de testament.

:

L'opinion émise par le Comité français de législation étrangère nous étonne d'autant plus que, d'après les mêmes auteurs, c'est notamment ponr éviter autant que possible les chances d'une influence étrangère, que la Commission du Reichstag (la seconde) a interdit la forme olographe au testateur mineur d'âge ou à celui qui ne sait pas lire.

L'art. 2248 du Code allemand dit que le testament dont nous venons de nous occuper doit être reçu dans un dépôt public sur la demande du testateur. On doit délivrer à celui-ci, sur sa demande, un certificat de dépôt (art. 2246, § 2).

Il est à remarquer que ce dépôt n'est pas obligatoire, et, dès lors, s'il y a recouru, le testateur peut, en tout temps, retirer la pièce sans porter par là aucune atteinte à sa validité (art. 2256, § 3). C'est absolument logique.

C'est pour assurer la conservation du testament et le préserver contre les falsifications, disent les auteurs français déjà cités, que cette faculté de le déposer a été accordée au testateur par la loi allemande. On peut se demander si semblable disposition était bien nécessaire pour assurer l'exercice d'une simple faculté, assurément recommandable d'ail

leurs nous n'imaginons pas qu'un dépôt volontaire soit prohibé par une législation quelconque. C'est ainsi qu'à propos du testament olographe italien nous lisons dans le Répertoire général de Fuzier-Herman : « Le Code italien autorise, mais n'exige pas le dépôt de la pièce, soit chez un notaire, soit au greffe d'un tribunal » ; cependant la loi italienne, pas plus que les Codes français ou belge, ne contient de disposition spéciale relative à la faculté de déposer un testament olographe: c'est là l'application pure et simple du droit commun.

Il y a, dans la loi allemande, une disposition originale et intéressante à signaler un testament commun peut exceptionnellement être fait par des époux, et pour la confection d'un testament semblable, dans la forme ordinaire, mais sans juge ni notaire, il suffit que l'un des deux fasse un testament olographe, et que l'autre y ajoute sa déclaration que le testament doit valoir comme le sien propre. Cette déclaration doit nécessairement être écrite de sa main, datée, indiquer le lieu où elle est faite et signée par lui.

De la part de celui des deux époux qui se borne à tester de la sorte, il y a réellement testament par relation, avec cette circonstance, anormale pour, nous, que l'écrit auquel il se réfère n'est pas écrit de sa main.

-V. Clunet, Tables générales, IV, vo Testament, p. 865, les nos indiqués à l'Index des Pays (Allemagne), p. 871.

DE LA TRAITE NATIONALE ET INTERNATIONALE DES BLANCHES

AUX ETATS-UNIS.

Maisons de jeux. Prostitution. Associations. Immigration.

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SOURCE:
Georges Nestler TRICOCHE : Le trafic des esclaves
blanches par la municipalité tammanyste de New-York City.
Le Courrier européen, Paris, 25 décembre 1909, p. 736. (Direct.
G. Séailles, J. Novicow, G. Serge, Ch. Seignobos, Bjornstjerne,
Bjornson.)

V. Clunet, Tables générales, III, vo Immigration, p. 1003; — et IV, vo Outrage aux bonnes mœurs, p. 378; vo Refoulement des étrangers, p. 562; v° Traite des Blanches, p. 912. V. les mêmes mots dans les Tables annuelles de 1905 à 1909.

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... « Une institution aussi corrompue que Tammany Hall a pu conserver le contrôle de New-York presque sans inter

ruption pendant soixante-dix ans. Le tammanysme devint une profession, et une profession lucrative, car le club de la XIVe rue ne se bornait pas à s'attribuer les positions municipales et à créer pour son usage personnel des sinécures aussi variées que grassement payées, il vendait chèrement ses faveurs, comme le droit de faire des travaux pour la ville, et celui de tenir des maisons de jeux. Bientôt, cette dernière source de revenus forme le plus clair des bénéfices de ce qu'on appelle les slum-politicians, le menu fretin des tripoteurs, trop loin du soleil pour profiter suffisamment des grosses aubaines dont les grands chefs de l'institution se réservaient la part du lion.

Lorsqu'il y a environ dix ans, il se produisit contre le pullulement des maisons de jeu un de ces courants d'opinion auxquels rien ne résiste dans ce pays, et que les établissements en question se fermèrent en masse, les bas fonds de Tammany durent se rabattre sur une autre source de revenus les prostituées. Ils n'avaient guère d'autre choix, car, personnellement, ils étaient trop accoutumés à pêcher en eau trouble pour pouvoir, ou vouloir, se procurer une occupation décente, et de plus, on devait, sous peine de perdre des voix nombreuses aux élections, trouver de l'ouvrage à la multitude d'employés de tripots mis sur le pavé. Il était tout indiqué de faire de ces genslà des racoleurs de femmes, des souteneurs, ou des directeurs de maisons de prostitution et de leur vendre la protection de la police municipale. La combinaison était d'autant plus heureuse que l'on n'avait pas à craindre ici les mêmes influences qui avaient produit la croisade contre les établissements de jeu, le pari aux courses, etc. Ce serait en effet une erreur de croire que la campagne de ces dernières années contre les jeux de hasard fût due à un réveil du puritanisme : si tel eût été le cas, il est probable que le mouvement aurait fait long feu ! La raison pour laquelle ce mouvement fut mené avec une vigueur et un ensemble si étonnants pour les non initiés est simplement qu'il était inspiré par l'intérêt personnel des commerçants, industriels, hommes d'affaires de tous les partis. Le mal était si profond, que les malversations des employés de commerce, des caissiers, etc., pour couvrir leurs pertes au jeu, devenaient d'une fréquence qui com promettait les affaires des patrons. Rien de semblable à craindre de la multiplication et de la prospérité des maisons de tolé

rance ou de l'augmentation du nombre des prostituées en chambre.

Il résulte de ce changement de tactique des slum-politicians que les souteneurs ou les racoleurs, déjà assez forts en 1897 pour former une véritable fédération (affiliée d'ailleurs plus ou moins avec la « Max Hochstim Association », une ramification louche de Tammany, connue depuis un certain scandale sous le nom expressif de « Essex Market Court Gang »

que les souteneurs, dis-je, devinrent une puissance dans les quartiers pauvres de New-York, tout juste comme les chefs de tripots l'étaient auparavant dans les districts d'ordre plus relevé. Aujourd'hui le pimp, qui n'était, il y a une quinzaine d'années, qu'une édition américaine du vulgaire « maquereau » parisien, s'est transformé presque en un homme d'affaires. I opère systématiquement, avec infiniment de soin et d'habileté ; et son commerce s'étend bien au delà des limites de New-York City. D'ordinaire bien vêtu, beau parleur, il visite les grands magasins, les places d'amusement populaires, à la recherche d'un minois attrayant : il est assidu aux Académies ou Maisons de danse populaire à cinq sous le cachet, rendez-vous des bonnes d'enfants et des petites modistes; on le voit plastronner aux alentours des manufactures, guettant une proie, pas très difficile à trouver, parmi les ouvrières mal payées, piètrement nourries des « tenements ». Son choix fait, il éblouit peu à peu sa victime en lui faisant entrevoir les jouissances d'une condition sociale différente de celle d'où la pauvre fille ne voit guère de chances de

sortir.

Il achève son œuvre de destruction dans quelque garni, souvent dans un de ces Raine's Law Hotels qui, eux aussi, sont des institutions quasi politiques elles constituent en effet une annexe du cabaret, et le cabaretier joue un grand rôle dans les affaires municipales. Le « Cadet » - c'est le nom qu'on donne maintenant à ces personnages spécule avec adresse sur l'état d'âme de sa proie. Il n'ira pas perdre son temps avec une femme sur laquelle la honte d'une faute n'a pas de prise, que la chute n'amènerait pas, par désespoir

1. Cf. la pièce intéressante de MM. Nozière, Muller et Reboux, « la maison des danses », représentée au théâtre du Vaudeville, à Paris (Direct. M. Porel) en novembre et décembre 1909.

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