Page images
PDF
EPUB

Fin de la première période. 1756.

Le 1er mai 1756, il obtenait un octroi, pendant trente ans, pour la recherche et l'extraction de cette terre et des minéraux de couleurs propres à sa fabrique, dans la province de Namur, (1) et il en fit revenir de grandes quantités, ainsi que nous le voyons par une requête de 1761, dans laquelle il dit en avoir fait voiturer quelques cent mille livres, pendant les années 1756, 1757 et 1758. (2)

Puis ce fut avec la ville de Gand, toujours au sujet du droit de barrière, sur les ingrédiens que Peterinck faisait venir de Hollande pour sa fabrique (31 décembre 1756). Un décret du gouverneur, du 25 août 1757, les exempta de droits de douane et de barrière. (3)

Il fut même décidé que ces ingrédiens ne seraient visités qu'à leur arrivée à Tournay, et dans la manufacture, où ils seraient transportés accompagnés d'un garde, et non dans les villes frontières et au bureau des Droits de Sa Majesté, comme d'usage.

Ces contestations ne furent pas les dernières. Nous verrons Peterinck aux prises avec une foule de difficultés, adressant au gouvernement requête sur requête et s'arrêtant victorieux, mais tout meurtri de la lutte pour l'existence et la prospérité de son usine.

En 1756, expire la première période de fonctionnement de la manufacture; il ne sera donc pas inutile de jeter un coup d'œil sur sa situation à cette époque.

(1) Arch. du royaume. Cons. des finances. Farde 2029.
(2) Ibid.
(3) Ibid.

Saluée avec enthousiasme à son apparition, cette belle, cette importante fabrique comme le qualifient les mémoires du temps, ne fut jamais, au point de vue financier, bien florissante; au contraire, elle végéta toujours, plus d'une fois même elle périclita; mais au point de vue artistique et manufacturier, elle mérite d'être rangée parmi les usines d'Europe les plus fameuses, et elle supporte avantageusement la comparaison avec la célèbre manufacture de Sèvres qui, comme elle, s'adonna à la fabrication de la pâte tendre.

Les frais de premier établissement furent considérables, et après six années de marche, Peterinck y avait perdu, à ce qu'il affirma plus tard, cent cinquante mille florins. La dépense annuelle, pour le paiement des ouvriers et l'achat des matières premières, monta en moyenne pendant les six années à vingt mille florins, et la vente des objets fabriqués à vingt-cinq mille florins, dit-il encore. (1) Peterinck ne disposait que de ressources très limitées. Aussi trouve-t-on dans le rapport des commissaires délégués des Consaux qu'en janvier 1775, il n'avait pas même les fonds nécessaires pour payer ses ouvriers, et qu'il y avait urgence de lui remettre de suite huit cents florins, sauf à faire compte. plus tard; dans leur rapport du 16 mars 1756, il est . dit que la vente de l'année qui vient d'expirer a été de vingt-huit mille huit cent soixante-douze florins, « dont » une bonne partie excédant les dépenses de la maison et de la manufacture a été employée à acquitter

(1) Arch. du royaume. Cons. des finances. Farde 2030.

Frais de premier établissement.

Produits.

"

» d'anciennes dettes,

» et il ajoute que « celles actives » à rentrer surpassant de quelque chose celles encore

[ocr errors]

le

à payer dans peu, les unes pourraient faire face aux autres,» si l'on pouvait compter sur une prompte rentrée. On voit que les avances de fonds faites par gouvernement et la ville avaient amélioré la situation de la fabrique; mais, continue le rapport, pour régler avec ses créanciers, Peterinck devra tirer un certain nombre de lettres de change, et comme « son crédit » n'est pas encore assez bien rétabli pour le mettre en » état de trouver ces lettres sur son seul nom, on pourrait autoriser le sieur fiscal d'y servir de caution. » (1)

"

"

"

On trouve peu de documents relatifs aux produits fournis au commerce par la manufacture, pendant ses premières années. Nous verrons cependant plus loin un rapport du conseil des finances, du 18 septembre 1756, appréciant leurs qualités et leurs défauts. (Chapitre IV.)

Quels étaient ces produits? Des statues, des vases, de la vaisselle de table, des biscuits.

En 1756, Gillis modelait une statue de sainte Thérèse, destinée à être faite en porcelaine et offerte à l'impératrice.

A peine installé, Peterinck émerveillait les magistrats de Tournay, en leur montrant un lustre de porcelaine de sa fabrication. Le 22 juin 1751, les ouvriers de la manufacture offraient aux Consaux deux pots de faïence à bouquets de porcelaine. On les fit placer

(1) Arch. de Tournay. Consaux. Vol. 267. fol. 198.

à la chapelle de l'hôtel-de-ville, et les ouvriers reçurent cinq tonnes de bière pour les remercier et pour les encourager à faire des progrès dans cette » manufacture. (1) »

[ocr errors]

Un an plus tard, à l'occasion de la Saint-Antoine de Padoue, leur patron, les mêmes ouvriers offrirent encore aux Consaux deux bouquets de porcelaine, et reçurent de nouveau pour récompense deux tonnes de bière. (2)

Enfin la fabrique produisit des groupes en biscuit, servant de garniture de dessert, comme portent les titres anciens, en quoi elle excella; tellement que, voulant faire un présent à M. Bonnaert, receveur général du pays rétrocédé, qui avait rendu de grands services à la ville, les Consaux crurent ne pouvoir lui offrir » rien de mieux qu'une garniture de dessert de figures » de porcelaine de la manufacture de cette ville, » savoir: trois groupes et huit petites figures dont le prix s'élevait à une centaine de florins. (3)

[ocr errors]

Nous reparlerons des produits remarquables de notre manufacture dans le chapitre qui leur est spécialement

consacré.

Association entre Pete

Le grand obstacle au développement de la manufac- 2me Période. ture, consistait dans le manque de capitaux. Peterinck, pour se les procurer, chercha des associés, et le 19 no- rinck, Caters vembre 1756, par acte passé devant les Consaux de

(1) Arch. de Tournay. Consaux. Vol. 264, fol. 120.

(2) Ibid. Vol. 265, fol. 281.

(3) Ibid. Vol. 267, fol. 319, 31 décembre 1756.

MÉMOIRES. XVIII.

3

et Van

Schoor

Tournay et agréé par le gouverneur des Pays-Bas, le prince de Lorraine, fut contractée une association entre lui, Guillaume Caters d'Hensrode et Jean-Baptiste Van Schoor de Bruxelles. En voici les principales stipulations:

Le fonds social est porté à soixante mille florins, dans lequel Peterinck demeure intéressé pour un tiers, qu'il fournira en ustensiles et bâtiments. Les deux autres tiers du fonds social, versés en argent par Caters et Van Schoor, serviront à payer les dettes de la manufacture.

Peterinck et sa femme « continuent à prêter leurs soins, industrie, secret, et direction de la fabrique, - pour laquelle il leur est alloué le sixième du bénéfice > annuel qu'elle produira. "

[ocr errors]

Peterinck cède à la société le privilège qu'il a obtenu du gouvernement. Il s'engage à faire, en présence des associés, toutes les expériences qu'ils requerront et à leur dévoiler les secrets de la fabrication; tous trois s'engagent à ne pas les révéler.

Chaque année, il sera fait un inventaire des deniers et effets de la manufacture. Enfin s'il plaît au Seigneur de la bénir, et qu'il soit trouvé conve»nable d'augmenter le fonds de la dite société, les

[ocr errors][merged small]

"

intéressés y jouiront chacun à concurrence de son contingent; si au contraire et contre toute attente,

99

il y avait perte dans la fabrique, chacun des mêmes » associés intéressés devra en supporter sa part. Les associés ont la préférence pour le rachat des actions de celui d'entre eux qui voudrait vendre les siennes.

« PreviousContinue »