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plan pour écrire l'HISTOIRE DE L'ASSEMBLÉE CONSTITUANTE. C'est après l'exécrable attentat du 13 février 1820, que je me suis livré à ce travail; je l'ai continué au bruit des quatre révolutions militaires et démagogiques qui se sont opérées dans le midi de l'Europe, et au bruit des menaces séditieuses qui retentissaient dans nos murs. Au moment où je termine mon travail, ces menaces ont été reconnues impuissantes; deux de ces révolutions sont déjà terminées et réprimées. Mais les leçons de l'histoire sont plus que jamais utiles, et surtout aux jeunes gens qui, n'ayant point participé à nos plus effroyables malheurs, pourraient être amenés à des illusions fatales.

Je me propose de développer ensuite le Précis historique de la Révolution, afin qu'il serve à la continuation de l'Histoire de France pendant le dix-huitième siècle.

DE

FRANCE

PENDANT LE XVIII. SIÈCLE.

ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

de la France

avant la révolution.

AVANT la révolution et les deux années qui Situation lui servirent de prélude, la France jouissait de plusieurs genres de bonheur dont l'homme abuse et se fatigue. On regardait, comme un fléau pour jamais aboli, les guerres civiles dont si souvent notre histoire est souillée, et qui, plus ou moins atroces, s'y reproduisent une ou deux fois par siècle, et jusqu'à dix fois dans le court intervalle du règne de Charles IX au règne de Henri IV. A l'exception de la révolte des Cévennes, il n'y avait eu, depuis cent cinquante ans, que de rares émeutes réprimées en quelques heures. Le Roussillon, la Flandre, l'Artois,

1789. l'Alsace, ces belles provinces, écoles d'a

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griculture et d'industrie; la Franche-Comté, excellente par ses pâturages; la Lorraine, par le mélange heureux de ses productions; la Corse, utile comme un poste important dans la Méditerranée la colonie de SaintDomingue, la Martinique, la Guadeloupe, dont les produits étaient devenus presque équivalens à ceux du Mexique, les Iles-deFrance et de Bourbon, favorisées du ciel et stations heureuses dans la mer des Indes; le comptoir de Pondichéry; toutes ces acquisitions ou conquêtes attestaient la puissance de nos armes, la sagesse de notre politique et l'impulsion heureuse de notre industrie. La marine française, créée sous Louis XIV avec plus de promptitude et d'éclat que toutes les autres merveilles de ce règne, abaissée dès le déclin de ce monarque, deux fois relevée et deux fois anéantie sous Louis XV, devait au gouvernement de Louis XVI un nouvel essor, qui, sans être toujours victorieux, avait forcé les Anglais à reconnaître des rivaux dans l'empire des mers. Tranquilles sous la protection des Alpes, des Pyrénées, et par l'alliance fidèle de l'Espagne et de la Suisse, retranchés au nord et à l'est derrière une triple enceinte

de forteresses imposantes, nous pouvions 1789. à la fois éviter la guerre et maintenir la paix chez nos voisins. Les revenus publics s'étaient triplés dans un espace de quatrevingts ans. Turgot avait tenté pour notre agriculture ce que Sully avait eu le bonheur: d'opérer. La prompte disgrâce de ce ministre n'avait pas fait cesser ce mouvement. heureux; des seigneurs bienfaisans le continuaient avec la plus judicieuse libéralité. Notre littérature qui, dès sa première aurore, avait été piquante, naïve, gracieuse, était devenue classique depuis deux siècles; elle avait rendu l'empire de notre langue aussi étendu et plus général que ne le fut autrefois l'empire de la langue des Grecs vainqueurs de l'Asie, et de celle des Romains vainqueurs du monde connu. Que de splendeur, que de majesté dans les divers monumens de notre Capitale! partout, que d'établissemens judicieux! quel mouvement dans les ports de Nantes, de Bordeaux, de Marseille, dans les fabriques de Lyon, de Rouen, de Reims, de Sedan, de Louviers! Ici, quel fracas, quel luxe! ailleurs, quelle douce paix! Que de fêtes rendues plus agréables par le mélange piquant des anciennes et des nouvelles habitudes! quel air d'allé

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