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fidèles services. Dieu sait sur ce sujet les vœux de mon cœur. Mais, Sire, je trahis votre Majesté et je lui suis infidèle, si je borne mes souhaits pour vous dans cette vie périssable. Vivez donc heureux, fortuné, victorieux de vos ennemis, père de vos peuples. Mais vivez toujours bon et toujours juste; vivez toujours humble et toujours pieux, toujours prêt à rendre compte à Dieu de cette noble partie du genre humain qu'il vous a commise. C'est parlà que nous vous verrons toujours Roi, toujours auguste, toujours couronné, et dans la terre et au ciel; et c'est la félicité que je souhaite à votre Majesté, au nom du Père, et du Fils, et du SaintEsprit. Amen.

EXORDE

D'UN AUTRE SERMON

POUR LE MÊME DIMANCHE.

Gloire qui doit suivre les humiliations volontaires du Sauveur.

Tunc videbunt Filium hominis venientem in nube, cum potestate magnâ et majestate.

Alors ils verront le Fils de l'homme venir sur une nuée, avec une grande puissance et une grande gloire. Luc. XXI. 27.

IL

y a cette différence, parmi beaucoup d'autres, entre la gloire de Jésus-Christ et celle des grands du monde, que la bassesse étant en ceux-ci du fond même de la nature, et la gloire accidentelle et comme empruntée, leur élévation est suivie d'une chute inévitable et qui n'a point de retour au lieu qu'en la personne du Fils de Dieu, comme la grandeur est essentielle et la bassesse empruntée, ses chutes qui sont volontaires, sont suivies d'un état de gloire certain et d'une élévation toujours permanente. Ecoutez comme parle l'Histoire sainte de ce grand roi de Macédoine, dont le nom même semble respirer les victoires et les triomphes. En ce temps, Alexandre, fils de Philippe, défit des armées pres

que invincibles, prit des forteresses imprenables, triompha des rois, subjugua les peuples, et toute la terre se tut devant sa face, saisie d'étonnement et de frayeur (1). Que ce commencement est superbe, auguste! mais voyez la conclusion. Et après cela, poursuit le texte de l'historien sacré, il tomba malade, et se sentit défaillir, et il vit sa mort assurée ; et il partagea ses Etats que la mort lui alloit ravir, et ayant régné douze ans il mourut. C'est à quoi aboutit toute cette gloire: là se termine l'histoire du grand Alexandre. L'histoire de Jésus-Christ ne commence pas à la vérité d'une manière si pompeuse; mais elle ne finit pas aussi par cette nécessaire décadence. Il est vrai qu'il y a des chutes. Il est comme tombé du sein de son Père dans celui d'une femme mortelle, de là dans une étable, et de là encore par divers degrés de bassesse jusqu'à l'infamie de la croix, jusqu'à l'obscurité du tombeau. J'avoue qu'on ne pouvoit pas tomber plus bas : aussi n'est-ce pas là le terme où il aboutit; mais celui d'où il commence à se relever. Il ressuscite, il monte aux cieux, il y entre en possession de sa gloire; et afin que cette gloire qu'il y possède soit déclarée à tout l'univers, il en viendra un jour en grande puissance juger les vivans et les morts.

C'est cette suite mystérieuse des bassesses et des grandeurs de Jésus-Christ, que l'Eglise a dessein de nous faire aujourd'hui remarquer, lorsque dans ce temps consacré à sa première venue dans l'infirmité de notre chair, elle nous fait lire d'abord

(1) 1. Machab. 1.

202 EXORDE SUR LES HUMILIATIONS DE J.-C.

l'Evangile de sa gloire et de son avénement magnifique; afin que nous contemplions ces deux états dissemblables dans lesquels il lui a plu de paroître au monde; premièrement le jouet, et ensuite la terreur de ses ennemis : là jugé comme un criminel; ici juge souverain de ses juges mêmes. Suivons, Messieurs, les intentions de l'Eglise avant que de contempler combien Jésus-Christ est venu foible, considérons aujourd'hui combien il apparoîtra redoutable; et prions la divine Vierge, dans laquelle il s'est revêtu miséricordieusement de notre foiblesse, de vouloir nous manifester le mystère de sa grandeur, en lui disant avec l'ange: Ave.

E

III. SERMON

POUR

LE I.ER DIMANCHE DE L'AVENT.

Fondemens de la vengeance divine. Le pécheur accablé par la puissance infinie contre laquelle il s'est soulevé, immolé à cette bonté étonnante qu'il a méprisée, dégradé et asservi à une dure et insupportable tyrannie, par cette majesté souveraine qu'il a outragée.

Justus es, Domine, et rectum judicium tuum.
Seigneur, vous étes juste, et votre jugement est droit.
Ps. CXVII. 137.

La crainte précède l'amour, et Dieu fait marcher devant sa face son esprit de terreur avant que de répandre dans les cœurs l'esprit de charité et de grâce. Il faut que l'homme apprenne à trembler sous sa main suprême et à craindre ses jugemens avant que d'être porté à la confiance: autrement cette confiance pourroit dégénérer en témérité et se tourner en une audace insensée.

9

Le Sauveur paroîtra bientôt plein de vérité et de grâce. Il vient apporter la paix, il vient exciter l'amour, il vient établir la confiance. Mais l'Eglise qui est occupée, durant ce temps de l'Avent, à lui préparer ses voies, fait marcher la crainte devant

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