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dire. Quand l'humilité, quand l'intégrité, quand le mépris des honneurs de la terre, bref quand l'innocence te choque, chrétien, oserois-tu dire que tu n'es pas choqué du Sauveur ? Ignores-tu que sa doctrine n'est pas seulement la lumière de nos esprits, mais qu'elle est le modèle de notre vie? Si Jésus est le scandale de ceux qui errent dans la doctrine, parce qu'ils n'écoutent pas Jésus-Christ comme notre infaillible docteur; ne l'est-il pas aussi de ceux qui sont dépravés dans leurs mœurs, puisqu'ils ne veulent pas le connoître comme l'exemplaire de notre vie? Et qui trouverai-je donc dans le monde qui ne soit pas scandalisé en notre Sauveur? Nous aimons les richesses, et Jésus les a méprisées : nous courons après les plaisirs, et Jésus les a condamnés: nous sommes fous du monde, et Jésus l'a surmonté. Et comment pouvons-nous dire que nous aimons Jésus, nous qui n'aimons rien de ce que nous voyons en sa personne, et qui aimons tout ce que nous n'y voyons pas ? En vivant de la sorte, peux-tu nier que tu ne sois choqué de Jésus? Tu n'en hais pas le nom, mais la chose t'est un scandale. Oui, Jésus t'est un scandale, ô vindicatif, parce qu'il a pardonné les injures. Jésus t'est un scandale, ô ușurier, parce qu'il est le père et le protecteur des pauvres, auxquels ton impitoyable avarice arrache tous les jours les entrailles. Jésus t'est un scandale, hypocrite, parce que tu fais servir sa doctrine de couverture à tes mœurs corrompues. Jésus t'est un scandale, ô misérable superstitieux, qui pour des fantaisies particulières abandonnes la piété solide et la dévotion essentielle du christianisme, qui est la croix du Seigneur Jésus. Jésus t'est un scandale,

à toi qui traites la simplicité de sottise, et la sincère piété de bigoterie; à toi enfin qui par ta vie déréglée fais blasphemer son saint nom par ses ennemis. Cela étant ainsi, chrétiens, à qui est-ce que Jésus n'est pas un scandale ? « Tous cherchent leurs in» térêts et non pas ceux de notre Sauveur >>> disoit autrefois l'apôtre saint Paul (1): O Dieu, que diroitil, s'il revenoit maintenant sur la terre? Voyant la licence qui règne au milieu de nous, y voyant triompher le vice, nous prendroit-il pour des chrétiens, ou plutôt ne nous rangeroit-il pas au nombre des infidèles?

Eh! d'où vient, ô Dieu tout-puissant, d'où vient que vous permettez que votre Fils ait tant d'adversaires, et si peu de vrais serviteurs? J'entends votre dessein, ô grand Dieu vous voulez que dans cette confusion infinie de ceux qui contredisent notre Sauveur, ceux qui l'honorent sincèrement tiennent cette grâce plus chère vous voulez chère vous voulez que leur foi soit plus ferme, et leur charité plus ardente parmi les oppositions de tant d'ennemis ; et que Jésus retrouve dans le zèle du petit nombre, ce qu'il semble perdre dans la multitude innombrable des ingrats et des dévoyés. Par conséquent, mes Frères, augmentons notre zèle pour son service. D'autant plus que nous voyons tous les jours augmenter le nombre de ceux qui blasphêment son Evangile, ou par leurs erreurs, ou par leur mauvaise vie; efforçons-nous d'autant plus à lui plaire, et à étendre la gloire de son saint nom : tâchons de lui rendre l'honneur que ses ennemis lui ravissent. Disons-lui de toute l'affection de nos cœurs : Quoique le Juif enrage, (1) Philip. 11. 24.

266 SUR JÉSUS-CHRIST COMME OBJET DE SCANDALE. que le gentil raille, que l'hérétique s'écarte, que le mauvais catholique se joigne au parti de vos ennemis; nous confessons, ô Seigneur Jésus, que vous êtes celui qui devez venir : vous êtes ce grand Sauveur qui nous est promis depuis l'origine du monde : vous êtes le médecin des malades, vous êtes l'évangéliste des pauvres et en cela que vous paroissez comme le scandale des orgueilleux, vous êtes l'amour des simples, et la consolation des fidèles. Vous êtes celui qui devez venir; nous n'en connoissons point d'autre que vous, nous n'en attendons point d'autre que vous: « Il n'y a point d'autre nom sous » le ciel par lequel nous devions être sauvés (1) ». Par conséquent, fidèles, puisque nous n'en attendons point d'autre que lui, mettons notre espérance en lui seul. S'il est vrai que nous n'attendions plus un autre maître que lui pour nous enseigner, observons fidèlement ses préceptes. Si nous n'attendons point un autre pontife qui vienne purger nos iniquités, gardons soigneusement l'innocence. Et d'autant que le même Jésus, qui est venu en l'infirmité de la chair, viendra encore une fois glorieux pour juger les vivans et les morts; «vivons justement » et sobrement en ce monde; attendant la bien» heureuse espérance, et la triomphante arrivée de » notre grand Dieu et rédempteur Jésus-Christ (2) », qui détruisant la mort pour jamais nous rendra compagnons de son règne et de sa bienheureuse immortalité. Ainsi soit-il.

(1) Act. IV. 12. — . (2) Tit. 11. 12, 13.

EXORDE

D'UN SERMON SUR LE MÊME TEXTE (*), PRÉCHÉ DEVANT DES RELIGIEUSES.

Si nous apprenons des Ecritures divines que notre Seigneur Jésus-Christ a toujours été l'unique espérance du monde, la consolation et la joie de tous ceux qui attendoient la rédemption d'Israël; à plus forte raison, chrétiens, devons-nous être persuadés que Jean-Baptiste son bienheureux précurseur n'avoit point de plus chère occupation que celle d'entretenir son esprit de ce doux objet. C'est pourquoi je me le représente aujourd'hui, dans les prisons du cruel Hérode, comme un homme qui n'a de contentement que d'apprendre ce que son maître fait parmi les hommes, et comme par ses prédications et par ses miracles il se fait reconnoître à ses vrais fidèles, pour le Fils du Dieu tout-puissant. C'est ce qu'il me semble que saint Matthieu nous fait conjecturer en ces mots de notre Evangile : « Jean >> entendant dans les liens les grandes œuvres de » Jésus-Christ, il lui envoie deux de ses disciples, » pour lui faire cette demande : Êtes-vous celui qui » devez venir, ou si nous en attendons quelque

(*) Cet exorde est écrit à la suite du discours qu'on vient de lire.

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268 EXORDE POUR LE II. DIMANCHE DE L'AVENT. » autre (1) » ? Pour moi, je m'imagine, fidèles, que le fruit qu'il espéroit de cette ambassade, c'est que ses disciples lui rapportant la réponse de son bon maître, il ne doutoit nullement que sa parole ne dût être pleine d'une si ineffable douceur, que seule elle seroit capable non-seulement de chasser les maux d'une dure captivité, mais encore d'adoucir les amertumes de cette vie. Chères Sœurs, dans cette prison volontaire où vous vous êtes jetées pour l'amour de Dieu, dites-moi, que pourriez-vous faire sans la douce méditation des mystères du Sauveur Jésus? Et n'est-ce pas cette seule pensée qui fait triompher en vos cœurs une sainte joie dans une vie si laborieuse? Oui certes, il le faut avouer, Dieu a répandu une certaine grâce sur toutes les paroles et sur toutes les actions du Seigneur Jésus; y penser, c'est la vie éternelle. Oui, son nom est un miel à nos bouches, et une lumière à nos yeux, et une flamme à nos cœurs et lorsque remplis de l'Esprit de Dieu, nous concevons en nos ames le Sauveur Jésus, nous ressentons une joie à peu près semblable à celle que sentit l'heureuse Marie, lorsque couverte de la vertu du Très-haut, elle conçut en ses chastes entrailles le Fils unique du Père éternel, après que l'ange l'eut saluée par ces célestes paroles : Ave, Maria, etc.

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