Page images
PDF
EPUB

cipal de ces accusés, Nicotera, se défendit dans un récit publié non à Naples, mais dans les journaux étrangers, d'avoir fait aucune révélation pouvant inculper ses co-accusés. Il soutint au contraire que l'équipage du Cagliari était pur de toute complicité dans la conspiration de Pisacane. Un autre accusé se plaignit durant ces débats si émouvants, qu'en dépit de quelques adoucissements qui leur étaient ménagés en public, on les laissât en proie à toutes sortes de souffrances. Presque à la même époque, on jugeait des individus parmi lesquels le nommé Louis Pellegrini, accusés d'avoir tenté, avec des bandes armées à cet effet, le vol des propriétés privées et publiques, des églises et des finances locales en particulier, enfin d'avoir voulu renverser le Gouvernement. Quoique ces projets criminels n'eussent pas été réalisés, les accusés furent condamnés à des peines temporaires graduées suivant l'énormité des chefs d'accusation.

Le 18 août, sur le bruit répandu d'une prochaine introduction de bombes venant d'Angleterre, défense de laisser entrer tous objets pouvant ressembler aux moyens de destruction que l'on redoutait. Ce système outré de suspicion se faisait sentir d'une manière fâcheuse dans l'armée, où des officiers entraînés par un excès de zèle frappaient jusqu'à entraîner la mort, les infractions. à la discipline. Le Gouvernement sévit nécessairement; mais ces rigueurs impitoyables donnaient lieu à des vengeances meurtrières. Ce qui n'était pas non plus d'une bonne politique, c'était de donner aux gardes ruraux ou urbains les biens des condamnés cette sorte de prime devait produire sur des hommes incultes un effet d'aveugle dévouement. Peut-être (on l'espérait du moins) qu'un événement dynastique considérable, le prochain mariage du duc de Calabre, héritier présomptif de la Couronne, avec une princesse de Bavière, amènerait un adoucissement dans une politique qui ne laissait pas un accès suffisant à des mesures de clémence dont on devait cependant sentir le besoin!

A ces calamités du fait de l'homme, venaient se joindre par intervalles les fléaux naturels : éruptions volcaniques et tremble. ments de terre. Cette dernière sorte de phénomène n'avait pas cessé depuis cinq mois, à partir de ceux qui l'année précédente avaient fait tant de ravages, de troubler le sol et de terrifier les

habitants. Dans la Basilicate surtout rien ne restait debout: les villages de la vallée de l'Agri y restaient en ruines; la crainte de nouveaux désastres empêchait d'y rien réparer. La montagne qui sépare Sala de Marsico-Nuovo, se trouvait toute fendillée; les routes se crevassaient de plus en plus; dans tel endroit, le terrain s'était abaissé d'un mètre. Aux environs de Melfi on voyait des collines abattues et des fossés que les oscillations du sol avaient creusés. Une commune, Saponara, avait été si maltraitée, que l'on n'y voyait plus ni rues ni maisons; rien de ce qui s'y rencontrait autrefois.

A Potenza (principauté citérieure), les secousses eurent un caractère d'une terreur presque indicible. Les oscillations, précédées de rumeurs souterraines et du desséchement instantané des puits et des citernes, s'effectuaient en forme de tourbillons (Vorticoso) et avec une force de projection extraordinaire. Outre Potenza, les localités environnantes furent presque toutes frappées. Malheureusement les victimes ne manquaient pas dans ces commotions du sol. Le Gouvernement fit de louables efforts pour adoucir tant de calamités. Dans un conseil d'Etat tenu à Gaëte (15 mars) à l'occasion des ravages et du fléau dans la Basilicate, il fut décidé qu'on affecterait 20,000 ducats à la reconstruction des églises et maisons religieuses atteintes par ces révolutions du sol. Les victimes ne furent pas non plus oubliées; mais que pouvaient contre un fléau qui entraînait tout, les secours humains nécessairement insuffisants?

Le commerce de la partie continentale du royaume se ressentit sans doute des perturbations de toute nature qui affligeaient le pays; en effet, quoique les ressources naturelles y abondent, les transactions de cette partie du royaume éprouvèrent en 1857 (les tremblements de terre y avaient sévi à la fin de l'année) une diminution de 24 millions et demi sur l'exportation, et de 9 millions et demi sur l'importation. Ajoutez deux autres causes: l'interdiction de sortie des céréales et le ralentissement général du commerce général, par suite de la crise financière. Un résultat, corollaire du précédent, atteignit le commerce: nous voulons parler de la hausse progressive du cours du change.

La récolte de la soie, par suite de la maladie des vers, avait diminué d'environ 700,000 livres (la livre représente 321 grammes). La garance réussissait dans les environs de Salerne et de Pestum. Industrie. On y remarquait depuis quelques années un grand développement. De nombreuses usines s'étaient établies. Les ouvriers venaient en général de l'étranger.

Navigation du port de Naples. Le mouvement total, y compris les opérations de cabotage, présentait pour la dernière année un chiffre de 4,892 navires et de 635,075 tonneaux (entrée et sortie réunies).

TOSCANE.

Libéral au fond, surtout quant aux institutions civiles, le Gouvernement du Grand-Duc, cédant à des appréhensions politiques, faisait à la presse une guerre qui n'était pas toujours opportune. Il est vrai de dire que les Toscans manifestaient leur réprobation du régime établi dans d'autres parties de la Péninsule. Ces sentiments se produisaient au théâtre par les allusions et les applaudissements donnés aux pièces, où, par exemple, on s'attaquait aux Gouvernements de Rome ou de Naples, et dans les journaux, par des articles d'une opposition plus ou moins déguisée. On en suspendit quelques-uns, tels que le Commercio, Imparziale Fiorentino, enfin il Passa-tempo. Cependant le pays était calme et même prospère. Le 12 avril, le Moniteur toscan publia en français (avec le texte italien en regard), la double déclaration, en date à Florence du 10 du même mois, et signée par M. Lenzoni, ministre des Affaires du Gouvernement Grand-Ducal, et par M. Wachtmeister, Chargé d'affaires du Roi de Suède, ayant pour but de contribuer au développement de la navigation et du commerce des deux États respectifs par une complète réciprocité dans le traitement des navires appartenant aux sujets des deux hautes parties contractantes, dans leurs ports respectifs.

D'un tableau comparatif publié le 17 mai par le journal officiel, il résultait que le produit de l'administration générale des douanes, pendant le premier trimestre de l'année, avait été

de 3,061,902,17. Comparativement à la même période de 1857, il y avait une augmentation de 131,771. Cette augmentation était due en partie aux sages dispositions du Gouvernement et à l'élévation du droit sur les céréales à l'entrée, établie par ordonnance spéciale.

Une autre mesure utile, adoptée par le Grand-Duc, avait trait aux monnaies d'espèces différentes ayant cours en Toscane. Un décret du 26 avril ordonna le retrait de 10 espèces de monnaie provenant toutes de l'ancien duché de Lucques. Continueraient à avoir cours les pièces d'argent de cette Principauté, et connues sous le nom de scudi et demi-scudi de SaintMartin. Demeuraient provisoirement en circulation les soldi et quattrini, frappés à Lucques de 1826 à 1844.

Diverses branches de commerce étaient dans un état de prospérité satisfaisant. La Toscane fournit annuellement au commerce pour 35 millions de lire (11,884,000 kilog.) de chiffons, dont 15 millions provenant du pays même et 20 millions de la Lombardie, du Piémont, de l'Égypte, de Tunis et autres États barbaresques. Quant aux draps, autre mouvement commercial considérable: Livourne expédiait des draps de Prusse et de Saxe à destination de l'Égypte, de Tunis et de Maroc. Cette exportation était évaluée annuellement à un million et demi de francs. Et, détail assez curieux, la Toscane envoyait à Constantinople pour 1,500,000 francs d'habits confectionnés. Une preuve que la Turquie se civilisait. Et encore ne pouvait-on donner que le chiffre approximatif de toutes ces industries, les statistiques douanières n'étant pas rendues publiques. La récolte de la soie était remarquablement productive. En y comprenant le pays de Lucques, on trouvait en moyenne un produit annuel de 1,200,000 kilogr., avec un prix de vente de 4 à 5 fr. le kilogr., et même de 7 à 8 fr. (chiffre de 1857). Quant à la graine, elle se vendait (en 1857), vu la maladie des vers à soie dans certains pays, au prix excessif de 300 à 540 fr. le kilogr.

Autre branche de commerce, et qu'il convient de ne pas omettre il s'agit de la préparation des écorces d'oranges et surtout des cédrats confits qui prenait, à Livourne en particulier, un développement considérable. On évaluait à 3 millions

de livres ou 1,020,000 kilogr., représentant une valeur de 1,260,000 fr., l'exportation annuelle de ce fruit, par les trois fabriques de Livourne, pour la Grande-Bretagne, les ÉtatsUnis, la Russie et la Hollande. Quant aux écorces d'oranges, elles étaient dirigées presque exclusivement sur l'Allemagne.

PARME.

Par suite de la dénonciation de la convention douanière existante entre le Duché et l'Autriche (voyez Annuaire, 1857), les douanes furent rétablies à la frontière. C'est que la Régente tenait à se montrer affranchie de toute dépendance vis-à-vis d'une puissance alliée sans doute, mais dont l'influence eût pu peser sur elle. Autre mesure libérale : la réduction du droit d'entrée à payer par les journaux étrangers. Toutefois, par un motif qui se devinait de reste, les suppléments, jusqu'alors exempts de droit, y furent astreints: or, il convient de remarquer que cette exception atteignait les journaux qui publiaient, au moyen de suppléments, les débats des Chambres piémontaises. A part cet embargo sur la presse, en vue d'un pays dont le voisinage pouvait être considéré comme redoutable, le gouvernement de la Régente adoptait maintes décisions utiles et empreintes d'un cachet libéral. Le 13 avril, approbation de l'institution et des statuts d'une banque pour les Etats parmesans, fondée par une Société anonyme. La durée en était fixée à vingt ans, et elle avait le privilége d'émettre des billets de banque qui seraient reçus comme numéraire effectif par les caisses publiques. Décidé aussi que la valeur totale des billets émis ne pourrait excéder 50% du montant des actions, dont moitié serait versée en numéraire dans les caisses de la Banque.

Le 2 septembre, autre décret qui fixe à 84 centimes de livre. de Parme, la valeur légale d'une monnaie autrichienne, le zvanziche, ou pièce de 20 carenoni. Cette décision faisait cesser une cause d'embarras pour le commerce.

Le 22 février précédent, le Gouvernement avait augmenté de 50,000 livres la dotation de l'amortissement de la dette publique de 1827.

1858

383

« PreviousContinue »