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La clause d'un testament, par lequel une mère lègue à un tiers la moitié de ses biens en propriété, sous la condition que, si sa fille unique parvient à l'âge de majorité, la propriété léguée demeurera convertie en simple usufruit, contientelle une substitution annullée par l'article 896 du Code Napoléon?

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MARIE-THÉRÈSE ROSERY, veuve de Henri Massart,

fait, le 9 brumaire an XIV, un testament par acte public: elle lègue à Jean-Joseph Massart, son beaufrère, en récompense des services qu'il lui avait ren-` dus jusqu'à ce jour, et qu'elle espérait qu'il lui rendrait encore à l'avenir, la moitié de tous les biens, meubles et immeubles, qu'elle posséderait au jour de son décès, pour, par lui, en jouir et disposer audit jour, sous la réserve ci-dessus.

L'article, relatif à cette réserve, est ainsi conçu : Dans le cas où Henriette Massart, ma fille, viendrait à atteindre son âge de majorité, le legs cia dessus fait de la propriété de la moitié de mes biens sera converti en simple usufruit à son profit, et la propriété en appartiendra à ladite Hen riette Massart, ma fille. ».

Henriette Massart survécut peu de temps à sa mère, et mourut avant l'âge de majorité.

Les héritiers de celle-ci ont prétendu que le tegtament prémentionné contient une substitution fidéicommissaire, en ce que J. J. Massart, auquel la pro. priété de la moitié des biens de la testatrice avait été léguée, avait été chargé de la restituer à Henriette Massart, si celle-ci parvenait à son âge de majorité.

Ils ont invoqué le § 2 du titre 23, livre a des institutes, et plusieurs autres lois romaines.

Ils ont dit que les mots : sera converti en simple usufruit, sur lesquels Jean-Joseph Massart s'ap puyait pour prétendre qu'il n'avait été légataire que de l'usufruit, établissaient précisément le contraire, puisque l'expression sera converti dénote clairement que ce n'était que dans le cas de l'événement de la condition prévue par la testatrice qu'il aurait été réduit à la simple qualité d'usufruitier; que, pendant l'intervalle du temps qui se serait écoulé depuis le décès de ladite testatrice jusqu'à l'époque où Henriette Massart aurait atteint sa majorité, il fallait bien que la propriété des biens légués résiđât sur son chef; qu'en supposant le contraire, il faudrait admettre que cette propriété serait demeurée en suspens, ce qui est absurde. Ils se sont particulièrement appuyés sur les lois 15, ff de auro et arg., et sur la loi 12, ff de ususf. ear. rer. quæ

usu consumuntur.

Ils ont ajouté que, la disposition testamentaire dont s'agit, ne pouvant être considérée que comme un fideicommis, il était certain, aux termes de l'ar

ticle 896 du Code Napoléon, qu'elle devait être annullée; que cette annullation ne devait point être restreinte à la substitution, mais qu'il fallait l'étendre à l'institution même ; que ce systême était consacré par la jurisprudence des cours, et, entr'autres, par un arrêt de la cour de cassation, du 18 janvier 1808.

Enfin, ils ont dit que, dans cet état de choses, l'on devait décider que Marie-Thérèse Robert était décédée ab intestat; que sa succession avait été accueillie à ce titre par Henriette Massart; sa fille, et que, celle-ci étant décédée sans laisser d'ascendans ou descendans son hérédité devait être divisée en deux portions égales, conformément aux articles 733 et 750 du Code Napoléon.

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De son côté, le sieur Jean - Joseph Massart a prétendu que la disposition du testament, que les demandeurs veulent faire annuller, ne contient point une substitution fidéicommissaire; qu'il est facile, au contraire, de reconnaître que les expressions employées par la testatrice renferment deux dispositions en une seule la première, qui est positive et indépendante de toute condition, contient le legs fait, dans tous les cas possibles, à lui Jean-Joseph Massart, de l'usufruit de la moitié des biens de ladite testatrice; la seconde renferme le don qui lui est fait de la propriété des mêmes biens, dans le cas que Henriette Massart n'atteigne point son âge de majorité. L'on voit, a-t-il ajouté, que l'usufruit est légué à l'un, et que la propriété est donnée à l'autre; or, cette disposition est autorisée par l'article 899 du Code Napoléon.

Il a prétendu, en outre, que la disposition testamentaire, dont il est question, ne renferme qu'un legs conditionnel qui est validé par l'article 1041 du

même code.

Par jugement du 10 janvier 1809, le tribunal civil de l'arrondissement de Nivelles a déclaré nulle toute la disposition faite en faveur de Jean-Joseph Massart.

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« Considérant, dit ce tribunal, que cette institution directe, faite à Jean - Joseph Massart, « qui lui défère la propriété de la moitié des biens,

meubles et immeubles, pour en jouir et disposer « au jour du décès de la testatrice, sous la con«dition néanmoins que, si Henriette Massart parvenait à l'âge de majorité, cette propriété serait convertie en usufruit, pour la propriété appartenir à ladite Henriette Massart, constitue une substitution fidéicommissaire, puisque, s'il y avait lieu « d'attendre l'événement de cette condition, la propriété reposerait pendant ce temps sur le chef de la première personne qualifiée, et qu'elle devrait ensuite retomber sur le chef de la seconde personne qualifiée.

• Considérant que, par l'article 896 du Code Napoléon, toute disposition de cette nature est prohibée et annullée.

. Considérant que, dans le sens de cet article, • la substitution n'est pas seulement annullée, mais « aussi l'institution, qui ensemble ne font qu'une même libéralité.

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Que, si le législateur n'avait en effet voulu an nuller que les substitutions, il aurait dit simplement: les substitutions sont prohibées.

« Considérant que si la substitution et l'institution sont nulles, aux termes dudit article 896, a il s'ensuit que le legs d'usufruit conditionnel des • mêmes biens est également nul, cette dernière vo«lonté étant exprimée et coordonnée avec l'institution fideicommissaire qui ne fait qu'un seul tout,

• Considérant qu'il résulterait, du systême con« traire, qu'une institution serait annullée pour une « partie et maintenue pour l'autre, ce qui répugne • aux principes, particulièrement quand il s'agit des mêmes biens

« Déclare pour droit que le testament de feue « Marie-Thérèse Robert, veuve de Henri Massart, « recu le 9 brumaire an XIV, par N. a tient une substitution fideicommissaire;

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con.

« Annulle ladite substitution, ainsi que l'institu tion faite en faveur de Jean-Joseph Massart. »

Ce jugement, déféré à la connaissance de la Cour d'Appel, a été réformé d'après les motifs suivans:

« Attendu que le testament dont s'agit contient; ◄ dans son premier article, une institution pleine « et entière de l'appelant dans la moitié des biens

de la testatrice, et ne la subordonne à d'autre res«triction que celle qui est établie à l'article 3.

« Que cet article 3 renferme deux dispositions

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