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La même difficulté se reproduisait encore relativement au refus, fait par le commissaire, d'entendre les témoins sur faits de provocation, et autres circonstances propres à justifier le mari des inculpations contenues dans la plainte.

La preuve contraire qui est de droit comprend essentiellement la faculté d'établir la justification du défendeur en enquête.

Dans une demande en séparation de corps ou en divorce, les sévices ou mauvais traitemens, qui ont pour cause immédiate l'inconduite ou une faute grave de la femme, sont considérés comme l'effet naturel de l'autorité offensée; c'est une aggression qui provoque une correction maritale: on ne juge pas d'après le fait matériel, mais par les circonstances qui. l'ont occasionné. Le commissaire aux enquêtes commettait donc une faute en refusant d'ouïr les témoins sur les interpellations du mari, puisqu'elles portaient sur des circonstances attenuantes, et il excédait en même temps son pouvoir, en se constituant juge de la contestation; mais les parties l'avaient, pour ainsi dire, établi arbitre, et de plus le sieur D., en signifiant ses moyens de nullité, n'y avait pas compris celui du refus du commissaire ainsi s'élevait contre lui une fin de non-recevoir, qui s'opposait à ce qu'il fût écouté en cause d'appel. On lui en opposait encore une autre, motivée sur ce qu'il avait signé les procès verbaux d'enquête; mais la signature des parties, commandée par l'article 275 du code de procédure civile, couvre-t-elle les nullités? elle ne sert qu'à constater que les choses se sont passées telles qu'elles sont écrites.

Le sieur D. semblait avoir partagé l'erreur du commissaire, car il proposait, devant la Cour, de l'admettre à prouver les faits d'inconduite et de pro vocation, comme s'il pensait lui-même que la réserve de la preuve contraire ne l'avait suffisamment autorisé à en administrer la preuve, en vertu du jugement du 30 juillet.

Sa proposition, indépendamment de toute fin de non-recevoir, n'eût-elle pas été écartée, si la délibération en eût rendu l'examen nécessaire ?

On ne se défend pas, par forme d'inquisition, sur la conduite d'une épouse; il faut que les faits justificatifs tombent sur les faits d'aggression: on ne revient pas sur des événemens oubliés ou dont le temps a fait remise. Voilà, ce semble, la distinction à faire dans ces sortes de cause.

Une difficulté sérieuse consistait à savoir si le juge est tenu de prononcer sur les reproches articulés lors de l'audition des témoins, sans que la partie en fasse un chef de conclusions avant le jugement.

Quel est, à cet égard, le vœu du code de procédure civile ?

L'article 270 exige que les reproches soient proposés avant la déposition du témoin; il exige de-plus qu'ils soient circonstanciés et pertinens, et consignés dans le procès verbal : suivant l'article 282, aucun reproche ne sera proposé après la déposition, s'il n'est justifié par écrit.

Ces articles marquent bien le temps et le lieu où les reproches doivent être proposés, c'est avant la

déposition. Cette mesure a été commandée par les formes, dans lesquelles il est procédé aux enquêtes. Les parties ayant la liberté d'y comparaître ne manqueraient guere de reprocher tous les témoins dont les dépositions leur seraient contraires, s'il leur était encore permis de le faire après la déposition. On verrait donc souvent l'esprit de mécontentement ou de vengeance suggérer des moyens de récusation, faux ou injurieux.

Les reproches proposés, arrive l'époque où il s'agit de les apprécier, de les admettre ou de les re· jeter; n'est-ce pas celle où les parties doivent en faire la demande au tribunal ?

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L'article 287 porte qu'il sera statué sommairement sur les reproches.

Si néanmoins, dit l'article 288, le fond de la cause était en état, il pourra être prononcé sur le tout, par un seul et même jugement.

Il est à observer que, pour cet effet, la cause est ramenée à l'audience sur un simple acte. (Article 286.)

Pourquoi la cause est-elle ramenée à l'audience? est-ce pour qu'un des juges fasse son rapport sur les reproches ? est-ce afin que le tribunal prononce

d'office?

Rien n'a encore été vu ni discuté. L'affaire est donc portée sous les yeux des juges, pour entendre les parties sur les reproches, et ensuite sur les enquêtes s'il y a lieu.

parler

Ainsi les parties sont placées dans l'obligation de sur les reproches, de les indiquer, d'en faire connaitre le mérite pour mettre le juge en état de prononcer, et c'est ce qui fait naturellement la matière d'une demande ou d'une conclusion.

Si elles gardaient le silence, le jugo n'aurait luimême rien à décider.

Il paraît donc évident qu'il ne suffit pas d'avoir proposé les reproches avant l'audition du témoin, et qu'il faut en temps et lieu demander qu'il y soit statué, ainsi qu'il se pratiquait sous l'ordonnance de 1667.

La seule différence qui existe entre l'ancienne et la nouvelle loi résulte de ce que, les enquêtes se faisant autrefois à l'absence des parties, il n'y avait pas même raison d'exiger la proposition des reproches dans le cours de l'audition des témoins; à tous autres égards, les choses restent les mêmes.

Le tribunal de première instance l'avait jugé ainsi.

La Cour d'Appel a implicitement confirmé sa décision; mais elle a trouvé qu'indépendamment du défaut d'emploi des moyens de reproches et de conclusions prises à cet égard, des circonstances particulières et vérifiées venaient atténuer la disposition de quelques témoins.

La preuve administrée par la dame D. lui a paru insuffisante pour légitimer sa demande en séparation de corps, qui a été rejetée par l'arrêt suivant, contre les conclusions de M.r Mercx, S. P. G.

« Attendu que le jugement du 30 juillet, en ad<< mettant la preuve des faits énoncés dans la requête « de l'intimée, a rejeté les exceptions de son mari << sur l'irrélevance et défaut de précision des mêmes « faits;

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Qu'il était ainsi définitif sur l'exception ou fin << de non-recevoir et interlocutoire sur l'admission « de la preuve, et appelable sous ces deux rapports;

«Que si le tribunal de première instance a dé« claré que ce ne serait que par le résultat des preua ves qu'il reconnaîtrait si les faits étaient relevans, « à l'effet d'autoriser la séparation de corps, il n'a << voulu ni entendu dire qu'il ordonnait une en« quête pour savoir s'il y aurait lieu à une enquête, << mais que ses motifs sainement entendus signifient « que la nature et la gravité des faits dépendent « de l'effet de la preuve:

« Attendu que, suivant l'article 255 clairement « expliqué par l'article 260 du code de procédure « civile, les faits doivent être spécifiquement con<< tenus dans le dispositif même du jugement, et « non dans les qualités ou par relation à d'autres « pièces; qu'à cet égard le jugement du 30 juillet « est irrégulier, mais que cette irrégularité a été « couverte par le fait des parties qui ont respec«<tivement fait procéder aux enquêtes, par-où il a « été acquiescé au jugement du 30 juillet;

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Que s'il est vrai que les fins de non-recevoir << sont généralement de peu d'importance dans la a matière, vu que les parties sont dans l'interdit de « se séparer volontairement, et qu'elles ont toujours

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