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Cette règle a toujours été observée en jurispru dence, et personne n'ignore que, depuis l'ordonnancede 1629, les héritiers étaient admis à prouver le concubinage et même le commerce adultérin qui avait existé entre le donateur et le donataire.

Pour écarter cette règle, il faudrait nous prouver que l'article 340 est applicable à l'héritier; mais cette preuve conduirait à rendre illusoires les dispositions des articles 762 et 908 du Code Napoléon, ce qui paraît absurde.

On oppose un principe de morale publique; mais n'est-ce pas aussi dans l'intérêt des mœurs que les droits des enfans nés hors mariages sont restreints.

Dans le systême de Jeanne Storms, le vice de la naissance équivaudrait à une naissance légitime. Il serait quelquefois plus favorable, puisque le père naturel ou mème adultérin pourrait disposer au profit de son enfant illégitime d'une quotité supérieure à celle qui est réservée à ses enfans légitimes.

N'est ce pas là flétrir l'état respectable du mariage, offrir une récompense au vice, et détourner les citoyens de leurs devoirs envers la société, en leur facilitant les moyens de transmettre leurs successions à des enfans nés d'une conjonction reprouvée ?

C'est ainsi que, sous prétexte de ménager la décence publique, Jeanne Storms propose le moyen d'étouffer une vérité qui outrage les mœurs, et de couvrir, du voile officieux du mensonge, la fraude faite à la loi.

Ce qui prouve que l'article 340 n'est pas absolu,

c'est que l'article 317 et l'article 339 admettent les héritiers à contester l'état de l'enfant 300 jours après le mariage, et la reconnaissance d'un enfant naturel. Ce qui le prouve, c'est l'article 342 qui limite à l'enfant seul l'interdiction de la recherche.

L'article 339 ne distingue pas entre la forme de Pacte de reconnaissance et le fonds du droit.

Il paraît donc incontestable que, si l'enfant né d'un commerce adultérin était reconnu par son père comme enfant naturel, au mépris de l'article 335, les héri tiers seraient reçus à prouver qu'il est adultérin donc à prouver la paternité.

Quel grief fait au surplus à Jeanne Storms le ju gement dont elle est appelante?

La preuve n'est pas ordonnée. Le premier juge a voulu, avant de l'admettre, s'assurer de la probabilité des faits, du mérite des documens domestiques que l'on produisait. Cette circonspection fait honneur à son discernement, et ne porte préjudice à personne. C'est une disposition purement préparatoire et qui n'est pas sujette à l'appel.

En dernière réflexion, la recherche de la paternité suppose une action afin de donner le titre de père, et l'exception de l'héritier tend à prouver que le donataire est fils adultérin du donateur; et outre que les cas d'exceptions sont infiniment rares, la preuve n'est ni aussi difficile ni aussi incertaine que dans le cas de l'action, parce qu'elle est. toujours aidée d'indices et de documens qui démontrent la vérité sans grands efforts.

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En un mot, elle n'est point interdite, et la ne cessité de l'admettre résulte de la disposition prohi bitive de la loi, ou il faut en supprimer les articles 762 et 908.

La principale objection du sieur Walckiers est que, dans les raisonnemens de Jeanne Storms, les articles 62 et 908 resteraient sans exécution: mais c'est une erreur, disait Jeanne Storms; car je ne prétends pas exclure les preuves faites et consignées dans des actes authentiques et formels, mais seulement les preuves à faire et qui formeraient une véritable re. cherche de paternité.

On pourrait rassembler plusieurs exemples dans l'ordre desquels la disposition prohibitive aurait naturellement son effet.

Le premier est celui d'un enfant dont la légiti mité est contestée avec succès, aux termes du chapitre premier de la loi du 23 mars 1803, faisant partie du code civil: cet enfant est adultériu.

2o. Si le ravisseur est engagé dans les liens du mariage, l'enfant qui naîtra par suite de l'enlévement sera adultérin au regard du père, parce que la recherche de la paternité est admise dans ce cas. (Article 340.)

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3o. Une fille accouche dans une commune éloignée de celle de son domicile, elle est accompagnée d'un individu qui se dit faussement être son mari. L'enfant est inscrit sous le nom de ces deux personnes, en qualité d'époux, et le père signe; cependant le père est dans les liens d'un véritable mariage. L'acte de naissance sera la preuve de l'adultère.

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4o. Celui qui reconnaîtrait authentiquement un enfant naturel, dont la naissance correspondrait à l'état du mariage de son père, fournirait la preuve que cet enfant est adultérin.

5o. Les enfans nés d'un bigame sont, à son égard, adultérins.

6o. Deux Français, parens au degré prohibé par le Code-Napoléon, vont s'unir en pays étranger, et font constater leur mariage par acte public. Leurs enfans sont incestueux aux yeux de la loi française.

7°. Sous l'empire de la loi du 12 brumaire an 2, la reconnaissance des enfans incestueux ou adultérins n'était pas interdite.

Ceux qui se trouvant entachés de ce vice de naissance ont été reconnus à cette époque sont aujourd'hui sous le coup de la loi.

Il n'est donc pas vrai que les articles 762 et 908 resteraient sans application en rejetant la preuve de l'héritier, car dans tous les exemples proposés [ etil en est sans doute beaucoup d'autres] l'état de l'enfant résulte d'actes formels qui le soumettent aux dispositions de ces articles.

Il est possible, répliquait le sieur Walckiers, que la preuve soit plus facile dans un cas que dans un autre; c'est tout ce qui peut résulter des suppositions que l'on vient d'établir; mais il n'en faut pas conclure qu'elle doive être rejetée, parce qu'elle n'est pas encore complettement acquise: le vœu de la loi est toujours le même, quant à l'incapacité.

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Le sieur Walckiers observait que de toutes les hy. pothèses, avancées par Jeanne Storms, il n'en est pas une seule qui ne soit susceptible d'être contredite, et dès-lors même sujet de scandale dans la dis

cussion.

1.er cas. La loi ne déclare pas adultérin l'enfant dont la légitimité est efficacement contestée. Le désaveu du père a cet effet que l'enfant n'est pas son - héritier; mais une naissance précoce ou tardive n'est pas une preuve irréfragable d'adultère: dans ce cas il n'existe qu'une présomption de droit.

2. cas. L'enfant conçu par la circonstance de l'enlévement de sa mère, ne peut jamais être réputé adultérin àl'effet d'être déclaré incapable de recevoir, car celui qui peut être condamné à donner, peut de lui-même donner ce que l'on a droit d'exiger de lui.

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3. et 4. cas. L'aveu de paternité d'un enfant né hors mariage nuit-il à l'enfant ?

est la preuve de cette paternité? Peut-être dans le caprice ou l'aveuglement du soi-disant père.

La loi autorise le père naturel à reconnaître son fils; mais c'est dans l'intérêt de l'enfant, et ici l'aveu rendrait sa condition plus défavorable. Ne pourrait-il pas lui-même désavouer l'aveu?

5.e cas. L'enfant né d'un mariage putatif est-il incapable de libéralité ?

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6., cas. Le commerce incestueux, dont parle la loi, est celui qui n'est coloré d'aucun titre, et qui attaque les mœurs domestiques.

Supposons

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