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Cette demande d'augmentation est justifiée par la création d'un service spécial chargé de procéder à la reconnaissance et à la délimitation du sol forestier de l'Algérie en se conformant au programme résumé dans un rapport dressé en 1872, par M. Tassy, conservateur des forêts, délégué à cet effet par M. le ministre des finances.

Ce rapport, après avoir fait ressortir l'état déplorable dans lequel se trouvent les forêts de l'Algérie, en indique les causes et donne les moyens de les combattre, dans les paragraphes suivants.

Ces causes sont :

«< 1° L'incertitude qui règne sur l'étendue des forêts, leurs noms, leurs limites, leur consistance, leurs ressources, les servitudes qui les grèvent ;

« 2o Les principes suivis par les commissions chargées de l'application du sénatus-consulte du 22 avril 1863, en matière de droits d'usage, la création de bois communaux et l'application aux tribus, considérées comme personnes collectives, des lois sur la propriété individuelle des melks;

« 3o Les nombreuses enclaves qui existent au milieu des massifs;

« 4° L'impuissance de l'administration en ce qui concerne la surveillance des bois appartenant aux tribus;

«5° L'ignorance des indigènes sur ce qu'il leur est permis ou défendu de faire dans les forêts;

« 6o Les délits ou contraventions, les défrichements, le pâturage notamment et les incendies;

« 7o La non-réglementation de l'exercice des droits d'usage;

« 8° L'insuffisance du service forestier résultant du défaut d'unité dans la direction de ce service, du trop petit nombre du personnel qui le compose, et de sa subordination complète au commandement militaire.

<< Indiquer les causes du mal, c'est indiquer en même temps les moyens de le combattre; il faudrait :

« 1° Dresser la statistique complète des forêts, déterminer leur étendue, fixer leurs limites, étudier leurs ressources, régler leur exploitation au moins d'une manière sommaire, en désignant les parties dans lesquelles les coupes devront être concentrées pendant une certaine période de temps; définir les droits d'usage de façon à ce que leur maintien devienne compatible avec la conservation des bois;

« 2o Supprimer le cantonnement des droits d'usage, le remplacer par l'opéra

tion connue autrefois sous le nom d'aménagement, et qui consistait à circonscrire l'exercice des droits dans certaines forêts ou parties de forêts, à l'exclusion des autres; interdire, sous quelque prétexte que ce soit, l'abandon aux tribus des terrains boisés, sauf plus tard à livrer ces terrains à la colonisation, s'il est reconnu qu'ils conviennent mieux à la culture des céréales qu'à celle des bois ; << Poser en principe que les bois dont jouissent les tribus à titre collectif, ne sauraient être assimilés aux propriétés melk, et profiter du séquestre pour reprendre aux indigènes la propriété des fonds boisés qu'on leur a imprudemment abandonnée;

«3° Racheter par application de la loi pour cause d'utilité publique, les enclaves qui constituent réellement un danger pour le sol forestier, si on ne peut s'en emparer en vertu de la loi sur le séquestre ;

<< 4o Faire une loi qui rende le Code forestier de 1827 applicable aux bois des tribus, dont l'Etat n'aura pu reconquérir la propriété, et décider en conséquence que toutes les questions de propriété qui pourraient être soulevées au sujet de ces lois, seront déférées à la juridiction française;

«< 5° Publier en langue arabe la nomenclature des principales défenses que les indigènes ne pourront enfreindre sous peine de l'amende et même de la prison interdiction de coupes de bois sans autorisation, d'allumer du feu dans l'intérieur et à une certaine distance des forêts, d'extraire des écorces, de la résine, et de conduire leurs troupeaux dans les cantons non défensables, d'ébrancher les arbres pour procurer du fourrage aux bestiaux, etc., etc.

« 6° Organiser une surveillance incessante, se préoccuper plutôt de prévenir les délits et contraventions que de les réprimer; donner aux chefs du cantonnement le droit de transiger, dans certaines limites, avec les délinquants; « Dispenser les procès-verbaux de l'affirmation;

Faire dresser l'état des bois melk dont le défrichement devrait être interdit, soit parce qu'ils sont situés sur des pentes rapides, soit parce qu'ils sont nécessaires à la conservation des sources;

<< Prohiber l'entrée des chèvres en forêt et interdire le pâturage des autres bestiaux dans les cantons en exploitation, ainsi que dans les parties incendiées;

« Débroussailler les forêts qui, par la nature des essences qui les peuplent, sont exposées aux incendies, les fractionner en massifs de peu d'étendue, séparés par de larges tranchées;

« 7° Régler l'exercice des droits d'usage;

« 8° Organiser un personnel assez nombreux pour assurer l'exécution des dispositions qui auraient été arrêtées; soumettre ce service à une direction centrale spéciale et le soustraire à l'omnipotence des bureaux arabes.

« Ce travail sera long, difficile et coûteux, il exigera des hommes spéciaux; mais on ne saurait évidemment se dispenser d'y procéder, car, sans lui, l'organisation d'un service normal pour les forêts est impossible à réaliser. »

Le programme des travaux qui nous a été communiqué établit que les opérations de reconnaissance définitive et de délimitation devront porter, pour l'année 1878, dans les trois départements, sur 194,853 hectares.

Nous vous proposons d'accorder toutes les sommes qui sont réclamées pour la création de ce nouveau service qui, s'il fonctionne convenablement, est appelé à augmenter dans une très-large proportion les revenus de l'Algérie.

M. Tassy déclare en effet que ces forêts qui jusqu'à présent n'ont occasionné que des dépenses, pourront, lorsqu'elles auront été amenées à l'état où se trouvent celles de la métropole, rapporter de 80 à 100 millions.

Pour nous assurer de l'emploi de ces crédits et de ceux qui doivent servir à

la constatation et à la constitution de la propriété indigène qui figurent au chapitre 2 des dépenses sur ressources spéciales, nous vous proposons d'inscrire dans la loi de finances un article dans lequel il sera dit que chaque année le Gouvernement établira et distribuera aux membres des deux Chambres un état des opérations auxquelles il aura été procédé et des résultats obtenus pendant l'année précédente.

Ce sera, ainsi que l'a très-bien dit le rapporteur du budget de 1877, une occasion pour le parlement de suivre avec un intérêt patriotique et d'encourager les efforts de l'administration de sa haute approbation. Les intérêts de la France et de l'Algérie y trouveront une sauvegarde, en même temps qu'une utile publicité. »

La première partie de ce chapitre, celle qui concerne le service ordinaire, indique que parmi les agents compris dans le personnel et qui touchent une indemnité de cheval de 600 francs, il y en a neuf qui sont sédentaires. A la suite d'une observation faite sur ce point au conseil supérieur, M. l'inspecteur des finances s'est élevé contre cette pratique, qui, a-t-il dit, met les chefs de service dans l'obligation de certifier que l'agent sédentaire est monté, ce qui le plus souvent est inexact, et il a demandé que ce supplément de solde soit transformé en une indemnité de fonctions donnée sous un nom qui n'en fasse pas une allocation irrégulière et déguisée.

Après débats et nouveau rapport, il a été décidé que ces 600 francs seraient maintenus et transformés en une indemnité de logement.

Nous ne pouvons approuver cette décision; si les traitements payés aux agents qu'elle concerne sont insuffisants, il faut les augmenter par les voies régulières; le conseil supérieur n'a pas le droit d'y suppléer par des allocations indirectes, et nous vous proposons de retrancher les 5 400 francs qu'il a votés pour le payement de ces indemnités.

Les réductions proposées se montent donc à 5,400 francs, ce qui réduirait le crédit de ce chapitre à 1 183 260 francs.

Dans l'exposé de M. le gouverneur général du 14 novembre 1876 se trouve le paragraphe suivant :

« Dès 1874, j'ai fait étudier un projet de loi qui devait, d'une part, nous armer de moyens exceptionnels, mais légaux, pour préserver les forêts contre les dévastations et l'incendie; de l'autre, nous permettre de revendiquer les droits de l'Etat, en réglant toutes les questions de prise de possession effective tout en respectant les usages, les besoins et les droits acquis des indigènes. La première partie de cette loi seulement a été votée le 17 juillet 1874, et bien que la loi complémentaire ait été déposée il y a deux ans, sur le bureau de l'Assemblée, le pouvoir législatif n'en a point encore doté l'Algérie. »

En effet la commission de l'Assemblée nationale chargée de l'examen de ce projet de loi s'est trouvéc en présence de graves difficultés d'exécution soulevées tant par le Gouvernement que par certains concessionnaires; elle a dû en détacher la partie la plus urgente et la dissolution ayant été prononcée, elle s'est séparée avant d'avoir statué sur la deuxième partie; mais depuis, le Gouvernement n'a pris aucune mesure pour en saisir soit le Sénat, soit la Chambre des députés, ce qui n'est certainement pas un moyen d'arriver à une solution.

SEPTEMBRE 1877.

26

INFLUENCE COMPARÉE

DES BOIS FEUILLUS ET DES BOIS RÉSINEUX

SUR LA PLUIE ET SUR L'ÉTAT HYGROMÉTRIQUE DE L'AIR'.

M. Fautrat a présenté à l'Académie le résultat des observations météorologiques faites depuis 1863 dans les forêts d'Halatte et d'Ermenonville, pour arriver à déterminer l'influence des forêts sur la répartition des pluies et sur l'état hygrométrique de l'air. Le résumé ci-joint fait voir dans quelle mesure les bois résineux et les bois feuillus agissent sur les vapeurs, en les retenant dans leur milieu, en les condensant sous forme de pluie, en arrêtant sur leur cime une partie de l'eau précipitée.

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Il paraît résulter de ces observations que les massifs de pins ont, sur l'état hygrométrique de l'air, une plus grande influence que les autres essences. De sorte que, si les vapeurs dissoutes dans l'air étaient apparentes comme les brouillards, on verrait les forêts entourées d'un vaste écran humide, et, chez les résineux, l'enveloppe serait plus tranchée que chez les bois feuillus.

(1) Note présentée à l'Académie des sciences dans la séance du 6 août 1877.

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Ce résumé est la confirmation des faits que nous avons observés jusqu'à ce jour. Du 1er août 1876 au 1er août 1877, il est tombé au-dessus des pins 848 millimètres d'eau, soit 56 millimètres de plus que dans la plaine; audessus des bois feuillus, 932 millimètres d'eau, soit 31 millimètres de plus qu'en terrain découvert. On peut donc dire que, lorsqu'il pleut, la forêt reçoit plus d'eau que les terres voisines, et que, au-dessus des forêts de pins, ce fait météorologique est plus nettement accusé.

Ce tableau fait voir, en outre, que les pins retiennent sur leur cime. plus de la moitié de l'eau qui leur est versée, tandis que les feuillus laissent arriver au sol les 58 centièmes de l'eau précipitée. Dès lors, pour apporter un obstacle à la chute sur le sol des pluies torrentielles, ne fautil pas, dans les reboisements entrepris pour combattre le fléau des inondations, choisir de préférence les essences résineuses, dont le couvert est plus apte à opposer à l'eau une digue salutaire?

Ne paraît-il pas aussi évident que, pour arriver à transformer le climat de l'Algérie, il serait de grande utilité de créer des massifs de pins, pour donner à ces régions la fraîcheur et l'humidité qui leur font défaut ?

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