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prisonniers que cette mesure eût été prise. (Applaudissements.)

M. Dubois-de-Bellegarde. Quant aux citoyens qui étaient détenus dans la ville d'Angoulême et dans la ville de Périgueux, voilà une lettre du département qui m'annonce qu'ils ont été mis en líberté. (Applaudissements.)

M. Isnard. Je demande l'impression du projet de décret lu par M. François de Neufchâteau au nom de la troisième section du comité de législation.

(Cette motion est adoptée.)

M. le Président. J'invite l'Assemblée à se rendre dans les bureaux pour procéder à un deuxième scrutin pour l'élection du vice-président.

La séance est levée à quatre heures.

PREMIÈRE ANNEXE

A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE DU MERCREDI 16 NOVEMBRE 1791.

NOUVELLE PROCLAMATION DU ROI
concernant les émigrants.

Le roi n'a point attendu jusqu'à ce jour pour manifester son improbation sur le mouvement qui entraîne et qui retient hors du royaume un grand nombre de citoyens français.

Mais après avoir pris les mesures convenables pour maintenir la France dans un état de paix et de bienveillance réciproque avec les puissances étrangères, et pour mettre les frontières à l'abri de toute invasion, Sa Majesté avait cru que les moyens de la persuasion et de la douceur seraient les plus propres à ramener dans leur patrie des hommes que les divisions politiques et les querelles d'opinion en ont principalement écartés.

Quoique le plus grand nombre des Français émigrés n'eût point paru changer de résolution depuis les proclamations et les demarches du roi, elles n'avaient cependant pas eté entièrement sans effet; non seulement l'émigration s'était ralentie, mais déjà quelques-uns des Français expatriés étaient rentrés dans le royaume, et le roi se flattait de les voir chaque jour revenir en plus grand nombre.

Le roi, plaçant encore son espérance dans les mêmes mesures, vient de refuser sa sanction à un décret de l'Assemblée nationale, dont plusieurs articles rigoureux lui ont paru contrarier le but que la loi devait se proposer, et que réclamait l'intérêt du peuple, et ne pouvoir pas compatir avec les mœurs de la nation et les principes d'une Constitution libre.

Mais Sa Majesté se doit elle-même, et à ceux que ces actes de la prérogative royale pourrait tromper sur ses intentions, d'en renouveler l'expression positive, et de remplir, autant qu'il est en elle, l'objet important de la loi dont elle n'a pas cru devoir adopter les moyens.

Le roi déclare donc à tous ceux qu'un espri d'opposition pourrait entrainer, rassemb retenir hors des limites du royaume ri non seulement avec douleur, mais fond mécontentement, une cÓDCLIP M la tranquillité publique, objet 2 min efforts, et qui parait avoir pour dem

les lois qu'il a consacrées par son acceptation solennelle.

Ceux-là seraient étrangement trompés, qui supposeraient au roi une autre volonté que celle qu'il a publiquement manifestée, et qui feraient d'une telle erreur le principe de leur conduite et la base de leur espoir, de quelque motif qu'ils aient pu la couvrir à leurs propres yeux. Il n'en existe plus aujourd'hui. Le roi leur donne, en exerçant sa prérogative sur des mesures de rigueur dirigées contre eux, une preuve de liberté, qu'il ne leur est permis ni de méconnaître, ni de contredire; et douter de la sincérité de ses résolutions, lorsqu'ils sont convaincus de sa liberté, ce serait lui faire injure.

Le roi n'a point dissimulé la douleur que lui ont fait éprouver les désordres qui ont eu lieu dans le royaume, et il a longtemps cherché à croire que l'effroi qu'ils inspiraient pouvait seul retenir hors de leurs foyers un si grand nombre de citoyens; mais on n'a plus le droit d'accuser les troubles de sa patrie, lorsque, par une absence concertée et par des rassemblements suspects, on travaille à entretenir dans son sein l'inquiétude et l'agitation. Il n'est plus permis de gemir sur l'inexécution des lois et sur la faiblesse du gouvernement, lorsqu'on donne soi-même l'exemple de la désobéissance, et qu'on ne veut pas reconnaître pour obligatoires les volontés réunies de la nation et de son roi.

Aucun gouvernement ne peut exister, si chacun ne reconnaît l'obligation de soumettre sa volonté particulière à la volonté publique. Cette condition est la base de tout ordre social et la garantie de tous les droits; et, soit qu'on veuille consulter ses devoirs et ses intérêts, peut-il en exister de plus réels pour des hommes qui ont une patrie, et qui y laissent dans son sein leur famille et leur propriété, que celui d'en respecter la paix, d'en partager les destinées, et de prêter son secours aux lois qui veillent à sa sûreté ?

La Constitution qui a supprimé les distinctions et les titres, n'a point exclu ceux qui les possédaient des nouveaux moyens d'influence et des nouveaux honneurs qu'elle a créés; et si, loin d'inquiéter le peuple de leur absence et par leurs démarches, ils s'empressaient de concourir au bonheur commun, soit par la consommation de leurs revenus au sein de la patrie qui les produit, soit en consacrant à l'étude des intérêts publics, l'heureuse indépendance des besoins que laps assure leur fortune, ne seraient-ils pas angi à tous les avantages que peuvent départi time publique et la confiance de toyens ?

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Qu'ils abandonnent donc les prouvent la raison, le devi leur avantage personne, cessé de publier cet a*** c'est lui qui vous re vous promet la ten de la loi don

il vous les 2 quede i

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Il a notifié ses intentions aux princes, ses frères; il en a donné connaissance aux puissances sur le territoire desquelles se sont formés des rassemblements de Français émigrés. Il espère que ces instances auront auprès de vous le succès qu'il a le droit d'en attendre; mais s'il était possible qu'elles fussent vaines, sachez qu'il n'est aucune réquisition qu'il n'adresse aux puissances étrangères; qu'il n'est aucune loi juste, mais rigoureuse, qu'il ne soit résolu d'adopter plutôt que de voir sacrifier plus longtemps à une coupable obstination le bonheur de vos concitoyens, le vôtre et la tranquillité de votre pays. Fait à Paris, le 12 novembre 1791.

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Lettre du roi à Louis-Stanislas-Xavier, prince français, frère du roi.

Paris, le 11 novembre 1791. Je vous ait écrit, mon frère, le 16 octobre dernier, et vous avez dù ne pas douter de mes véritables sentiments. Je suis étonné que ma lettre n'ait pas produit l'effet que je devais en attendre. Pour vous rappeler à vos devoirs, j'ai employé tous les motifs qui devaient le plus vous toucher. Votre absence est un prétexte pour tous les malveillants, une sorte d'excuse pour tous les Français trompés, qui croyent me servir en tenant la France entière dans une inquiétude et une agition qui font le tourment de ma vie. La Révolution est finie, la Constitution est achevée; la France la veut, je la maintiendrai; c'est de son affermissement que dépend aujourd'hui le salut de la monarchie. La Constitution vous a donné des droits; elle y a mis une condition que vous devez vous håter de remplir. Croyez-moi, mon frère, repoussez les doutes qu'on voudrait vous donner sur ma liberté. Je vais prouver par un acte bien solennel, et dans une circonstance qui vous intéresse, que je puis agir librement. Prouvez-moi que vous êtes mon frère et Français, en cédant à mes instances. Votre véritable place est auprès de moi. Votre intérêt, vos sentiments vous conseillent également de venir la reprendre ; je vous y invite, et, s'il le faut, je vous l'ordonne. Signé LOUIS.

TROISIÈME ANNEXE

A LA SÉANCE de l'assemblÉE NATIONALE LÉGISLATIVE DU MERCREDI 16 NOVEMBRE 1791.

Lettre du roi à Charles-Philippe, prince français, frère du roi.

Paris, 11 novembre 1791. Vous avez sûrement connaissance du décret que l'Assemblée nationale a rendu relativement

aux Francais éloignés de leur patrie; je ne crois pas devoir y donner mon consentement, aimant à me persuader que les moyens de douceur rempliront plus efficacement le but qu'on se propose, et que réclame l'intérêt de l'Etat. Les diverses démarches que j'ai faites auprès de vous ne peuvent vous laisser aucun doute sur mes intentions ni sur mes vœux. La tranquillité publique et mon repos personnel sont intéressés à votre retour. Vous ne pourriez prolonger une conduite qui inquiète la France et qui m'afflige, sans manquer à vos devoirs les plus essentiels. Epargnezmoi le regret de concourir à des mesures sévères contre vous; consultez vos véritables intérêts; laissez-vous guider par l'attachement que vous devez à votre pays, et cédez enfin au vou des Français et à celui de votre roi. Cette démarche de votre part sera une preuve de vos sentiments pour moi, et vous assurera la continuation de ceux que j'ai toujours eus pour vous. Signé: Louis.

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE. PRÉSIDENCE DE M. VIÉNOT-VAUBLANC, président, ET DE M. LACÉPEDE, vice-président.

Séance du jeudi 17 novembre 1791.

La séance est ouverte à neuf heures du matin. M. Regnault-Beaucaron. J'ai à faire part à l'Assemblée nationale des plaintes qui lui sont adressées par les volontaires de mon département, qui sont aux frontières. Elles sont contenues dans l'adresse suivante :

«Un ministre ira-t-il donc toujours souiller, par d'indignes mensonges, le sanctuaire des lois! Des phrases tournées avec art vous toucheront-elles davantage que le cri impérieux du besoin et de la vérité?

« Nous nous sommes rendus à notre poste, vous le savez. Nous n'avons cessé de demander des armes on nous en a refusé. Nous avons imploré votre appui, et vous avez interpellé le ministre : il vous a répondu qu'il avait donné des ordres; il vous a encore trompés. Nous avons reçu à la vérité 250 fusils, la plupart mal conditionnés ; mais le ministre nous avait annoncé que l'arsenal de Lafère devait nous armer, et le directeur de cet arsenal nous a écrit qu'il n'a reçu aucun ordre. Lisez la lettre du ministre, lisez celle du directeur de Lafère, et vous jugerez de quel côté sont les coupables. Nous vous l'avons dit, nous vous le répétons, la mort n'a rien qui nous effraye, maís la seule pensée de la recevoir sans pouvoir nous défendre nous fait frémir. Encore si nos cadavres entassés pouvaient être un rempart inaccessible aux traitres, nous péririons sans regret.» (Applaudissements.)

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Nous sommes avec respect, etc.

Signé Les volontaires composant le bataillon du département de l'Aube.

(Suivent les signatures de l'état-major, des officiers et sous-officiers de ce bataillon.)

Je pourrais vous faire lecture des deux lettres mentionnées en cette adresse. Par l'une, qui est du ministre de la guerre, vous verriez qu'il annonce aux volontaires de l'Aube, qu'il a donné des ordres au directeur de l'arsenal de Lafère pour qu'il leur soit fourni des armes. Par

l'autre, qui est de ce directeur, vous verriez qu'il annonce n'avoir reçu aucun ordre à cet effet. Je n'abuserai point des moments de l'Assemblée ; je me bornerai donc à demander que cette adresse, contenant une dénonciation précise et motivée contre le ministre de la guerre, et les pièces y jointes, soient renvoyées à votre comité militaire, pour en faire incessamment son rapport.

(L'Assemblée ordonne le renvoi de ces pièces au comité militaire.)

Un membre: Par son décret du 30 juillet dernier, l'Assemblée nationale constituante supprima tous les ordres de chevalerie. Or, de grandes possessions, de grands biens appartiennent à ces ordres, et l'Assemblée constituante n'a rien prononcé, ni sur la propriété, ni sur l'administration de ces biens dans l'étendue du royaume. Une grande partie des baux des domaines qui appartenaient au ci-devant ordre de Saint-Lazare, sont expirés; on demande aujourd'hui par qui ces baux seront renouvelés, et à qui le prix en sera payé? Il est de notre devoir de porter nos regards sur cet objet. Ce que je dis relativement à l'ordre de Saint-Lazare peut s'appliquer à l'ordre de Malte; je propose donc à l'Assemblée de charger son comité des domaines de lui faire un rapport concernant les biens possédés par les ci-devant ordres de chevalerie; et j'offre, en mon particulier, de donner au comité des domaines tous les renseignements nécessaires sur ceux de l'ordre de Saint-La-zare. (L'Assemblée décrète le renvoi au comité des domaines pour en faire son rapport.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture de la lettre suivante annonçant le décès de M. Téalier, député du Puy-de-Dôme.

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Paris, le 17 novembre 1791.

"Monsieur le Président,

« J'ai l'honneur de vous prévenir que M. Téalier, mon collègue, âgé de 33 ans, vient de rendre le dernier soupir. Veuillez bien en instruire l'Assemblée nationale.

« Je suis avec respect, etc.

Signé: CUEL, député du département du Puy-de-Dôme. »

(L'Assemblée décrète qu'une députation de 25 membres assistera aux obsèques de M. Téalier.) M. Chaponnet demande un congé d'un mois. (L'Assemblée accorde le congé.)

Un membre: Je demande que tous les membres qui obtiendront des congés, seront privés de leur traitement pendant la durée de leur congé.

M. Léopold. Je demande que l'on puisse s'absenter pendant huit jours, mais que ceux qui voudront s'absenter plus longtemps soient tenus de prendre des congés.

Plusieurs membres : L'ordre du jour!
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

M. Lemontey, secrétaire. Le comité de la marine demande à être autorisé à prendre deux nouveaux secrétaires, qui seront mis sur l'état de ses dépenses. Le comité des contributions publiques vous fait la même demande.

(L'Assemblée donne à ces deux comités l'autorisation demandée.)

M. Torné, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du 16 novembre.

Un membre: Je demande à rectifier la rédaction du procès-verbal sur la manière dont est

annoncé le refus d'entendre la dénonciation de la proclamation du roi.

M. Chabot. Je m'établis moi-même le dénonciateur (Murmures.) de cette proclamation. L'Assemblée ne peut refuser d'entendre des explications, sur une proclamation inconstitutionnelle, et c'est avec les pièces de conviction dans mes mains, que j'appuíerai ma dénonciation. Le ministère vous les a fournies lui-même puisqu'il a eu l'impudence de vous la faire distribuer par votre bureau même. (Murmures prolongés.) Je demande qu'il soit mis dans le procès-verbal que la question a été ajournée.

M. Lacretelle. Je demande que celui qui a pris aussi légèrement le nom de dénonciateur, soit rappelé à l'ordre. On attire ainsi une défaveur sur une qualification qui a été mal entendue jusqu'à ce jour. Il faut bien se garder d'avilir ce qui tient à l'exercice d'une fonction publique et qui est si nécessaire à la sûreté de l'Etat. Il faut désormais que celui qui remplira les fonctions de dénonciateur ne les dégrade point par une fausse démarche.

Un membre Sur le fond de la question j'observe que puisque l'Assemblée n'a pas passé à l'ordre du jour, c'est qu'elle a été ajournée.

Un membre: Voici les faits tels qu'ils se sont passés. M. Brival a demandé lui-même l'ajournement de sa dénonciation, et non seulement l'Assemblée n'a pas voulu prononcer sur cette demande, mais elle a décrété que M. Brival ne serait pas entendu.

Plusieurs membres : La discussion fermée! L'ordre du jour!

(L'Assemblée ferme la discussion et passe à l'ordre du jour.)

M. Laeretelle. Je désirais proposer un changement de rédaction à l'article premier qui fut adopté hier sur les troubles occasionnés par les prêtres non assermentés.. L'Assemblée s'empressa d'éloigner tous les amendements; cependant il en a été fait un qui, je l'avoue, a été proscrit, mais qui est parfaitement dans l'esprit de la loi, et, je ne crains pas de l'affirmer, dans l'esprit de l'Assemblée. Je demande qu'on remplace les mots « tous les ecclésiastiques » par ceux-ci : « les ministres de tout culte. »

Un membre: Si M. Lacretelle veut proposer un changement à l'article d'hier, il faut qu'il attende que tous ceux qui ont voté pour l'article soient ici..

M. Delacroix. L'article a été décrété hier après une longue discussion. Je demande qu'il reste tel qu'il est et que l'on passe à l'ordre du jour.

(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

Un de MM. les secrétaires fait la lecture d'une lettre d'un Député qui renvoie un assignat de 90 livres, qu'il a recu de trop sur son indemnité, pour être restitué à la Trésorerie nationale.

(L'Assemblée ordonne le renvoi de cet assignat à la Trésorerie nationale.)

M. Dochier, au nom du comité de division. Je demande, au nom du comité de division, d'avoir l'honneur de vous faire la seconde lecture d'un projet de décret, qui a été imprimé et distribué et qui est relatif à la circonscription des paroisses de Romans (Drôme). Voici ce projet de décret (1):

(1). Voy. Archives parlementaires. 1" série, tome XXXIV, séance du 8 novembre 1791, page 689.

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de division sur la suppression et union des paroisses de la ville de Romans, en conformité de la loi du 24 novembre 1790, décrète ce qui suit :

«Art. 1. Les trois paroisses de la ville de Romans appelées Saint-Bernard, Saint-Nicolas et Saint-Romain, sont réunies pour n'en former qu'une seule, qui est celle de Saint-Bernard, suivant les límites désignées au procès-verbal du directoire du district du 30 juin 1791, et annexées au présent décret.

«Art. 2. L'église de Saint-Nicolas et celle des ci-devant Récollets, situées hors l'enceinte de la ville, sont conservées pour oratoires.

Art. 3. La paroisse de Mours, dépendant de la municipalité de Peyrins, est également supprimée, et unie en partie à la paroisse SaintBernard de Romans, suivant les limites désignées au dit procès-verbal et annexées au présent décret. »

Je vous prie, Monsieur le Président, de demander à l'Assemblée qu'elle veuille bien décréter que la seconde lecture du projet de décret dont il s'agit ayant été faite, et la discussion étant ouverte, la troisième lecture est ajournée à huitaine.

(L'Assemblée décrète que la discussion reste ouverte sur cet objet, et que la troisième lecture est ajournée à huitaine.)

M. Deperet, au nom du comité des secours publics, fait un rapport sur les secours à accorder aux Acadiens et Canadiens, et s'exprime ainsi :

Votre comité des secours publics me charge de vous présenter ses réflexions sur les réclamations multipliées que font les Acadiens qui sont en France. Vous fui avez renvoyé plusieurs propositions, et il en a reçu de divers departe

ments.

Vous savez qu'après une guerre de 6 ans, la France céda à f'Angleterie, en 1763, ses possessions du nord de l'Amérique septentrionale. Les officiers civils et militaires du Canada et de l'Acadie revinrent alors en France, ainsi que plusieurs familles attachees aux Français. Un grand nombre d'habitants du pays cede ou conquis, abandonna sa fortune et quitta le sol qu'il cultivait pour suivre des alies ou amis el se Soustraire aux lois d'une puissance etrangère. Ils debarquèrent dans divers ports, à Rochefort, Cherbourg et Morlaix; chacun d'eux obtint un traitement. Les officiers civils et militaires eurent des pensions; les naturels du Canada iurent taxés à la modique somme de 6 sols par jour; les vieillards et les infirmes furent cependant un peu mieux traités.

Dans les premiers moments, les fonds de ces pensions et traitements furent confies au ministre de la marine; mais bientot, sous le prétexte que son département etait plus chargé de dépenses, il fit porter sur le Trésor royal les fonds affectes au traitement des Canadiens, et il obuint un bon de 50,000 livres pour les pensions des officiers civils et militaires et leurs familles, tous gens distingués dans ce temps-là, et par cela meme privilegies. Aussi ne se presente-t-il aucune reclamation sur le paiement de ces pensions.

Les pauvres habitants de l'Amerique septentrionale, devenus Fran ais pour leur malheur, ont ete bien differemm nt traites. Plusieurs ont été envoyés pour defricher des landes dans le Poitou. Sans Torce pour un travail si p.nible et si ingrat, plusieurs y ont peri de faim et de fati

gue. Quelque temps après, il en fut embarqué pour la Louisiane, dans l'intention sans doute de diminuer le nombre de ces habitants. Ce second calcul perfide et barbare coùta la vie à la plus grande partie de ces malheureux Acadiens, et n'améliora pas le sort de ceux qui restèrent en France leur solde fut même réduite à moitié; et ceux qu'un âge plus avancé et des infirmités avaient du mettre à même d'obtenir un meilleur sort se virent réduits à la plus étroite subsistance. Plusieurs, depuis 1774, n'ont rien touché, et par l'etat nominatif que m'a remis la municipalite du Havre, il est du aux familles acadiennes de cette ville, depuis cette époque jusqu'au 1er juin 1790, une somme de 99,684 livres 6 sols d'arrérages, à raison de la modique somme de 6 sols par jour.

Telle est, Messieurs, la position où se trouvent depuis longtemps les infortunés Acadiens que de longues vexations et un oubli impardonnable n'ont cependant pas entièrement decourages. Ils se sont adressés à l'Assemblée constituante qui, frappée de leurs justes reclamations, a rendu, le 21 fevrier 1790, un décret en leur faveur.

Qui croirait, cependant, que, malgré ces dispositions et ces titres, il est un grand nombre d'Acadiens et de Canadiens, qui sont dans ce moment reduits à la plus affreuse indigence. Le directoire du département de l'Ille-et-Vilaine, le di trict de Saint-Malo et plusieurs autres municipalités demandent que vous veniez au secours de ces infortunes. Ils réclament l'exécution de la loi; et, certes, les secours qu'ils demandent sont bien modiques. Messieurs, abandonneronsnous des malheureux qui se sont donnes à nous, qui nous aiment malgré notre oubli, malgré notre ingratitude, lorsque nous avons payé pendant si longtemps des Français qui nous haïssent et qui conjurent notre perte. Le comité des secours publics vous présente le projet de décret suivant :

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« Le ministre de l'intérieur rendra compte, dans trois jours, des causes et des motifs qui ont retardé et suspendu l'exécution du décret du 21 fevrier 1790, qui conserve aux Acadiens et Canadiens les secours qui leur avaient été ci-devant accordés. »

Un membre: Jedemande que, préalablement, on fasse des fonds pour faire payer ces traitements et pensions.

Un membre: Il est révoltant qu'une disposition de bienscaace si légitime soit restée si longtemps sans execution. Soit que cette inexécution tienne à la negligence des corps administratiis, soit qu'elle tienne à la negligence du pouvoir exécutif, elle n'en est pas moins blamable, et l'Assemblee doit s'empresser d'en connaitre les causes afin de les faire cesser, j'appuie donc la proposition du comite.

Un membre: Je suis Acadien moi-même, et intéresse au sort de mes concitoyens, quoique je n'aie point de traitement. J'ai rempli, pour un grand nombre d'entre eux, les formalites prescrites par le decret de l'Assemblee constituante; les fonds n'ont pas été faits: je demande qu'au lieu de trois jours l'Assemblee ordonne que, sous 24 heures, le ministre de l'interieur soit tenu de rendre compte des causes du retard apporté à la loi.

(L'Assemblée adopte le projet de décret du comité de secours publics.)

Un membre: J'observe que l'urgence doit nécessairement être décrétée.

Un membre: J'insiste pour que le ministre soit entendu dans les 24 heures.

(L'Assemblée rejette cette motion.)

M. Dupertuis, au nom du comité des contributions publiques, fait un rapport sur une demande d'emprunt de 600,000 livres par la ville de Nantes, pour achat de grains, et s'exprime ainsi :

Je viens, au nom de votre comité des contributions publiques, vous proposer un décret d'autant plus nécessaire, qu'il doit en dépendre l'existence et la tranquillité d une de vos principales villes commerçantes. Le conseil général de la commune de Nantes, justement alarmé de la disette de grains qui s'est manifestée dans le département de la Loire-Inférieure, s'est occupé sans relâche des moyens d'approvisionner la ville de Nantes et les environs. Il a envoyé deux de ses membres à Orléans, pour suppléer par de nouveaux achats à ceux qu'il a faits dans le voisinage. Les envoyés ont rempli leur commission; mais la municipalité, épuisée par des dépenses de tout genre, et essentielles depuis la Révolution, privée d'une branche considérable de ses revenus, par la suppression de ses octrois, se voit hors d'état de subvenir à ce nouveau fardeau, et d'empêcher les horreurs de la famine; et les désordres qu'elle entraîne après elle, si le Corps législatif ne vient à son secours.

Dans cet état de choses, le conseil général de la commune de Nantes, extraordinairement assemblé, le 23 septembre dernier, a pris une délibération par laquelle il charge la municipalité d'obtenir en forme de prêt, de la caisse patriotique de Nantes, une somme de 600,000 livres pour subvenir à l'achat des grains dont elle a absolument besoin. Cette délibération a été adressée au directoire du département, par l'intermédiaire de celui du district; et l'un et l'autre ont approuvé la sollicitude du conseil général, et la démarche qu'elle lui dictait.

Quant à votre comité des contributions publiques, il s'est convaincu par l'examen des pièces, par les conférences qu'il a eues avec les députés de la commune de Nantes, et avec des citoyens de Nantes, que la demande du conseil général de la commune de Nantes était fondée, urgente, et méritait d'être accueillie avec d'autant moins de difficulté que cette commune, ayant acquis pour plusieurs millions de biens nationaux, offrait un gage plus que suffisant pour ses créanciers, dans le seizième de la vente qui doit lui revenir. Il a cru devoir vous proposer le décret d'urgence. Dans la circonstance où nous sommes, la commune n'a pas un moment à perdre pour compléter ses approvisionnements. Voici le projet de décret :

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DEUXIÈME PROJET DE DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, vu la délibération du conseil général de la commune de Nantes, du 23 septembre dernier, les avis des directoires du district de la même ville et du département de la Loire-Inférieure, des 14 et 24 octobre suivant; ouï le rapport de son comité des contributions publiques; et après avoir rendu le décret d'urgence:

«Autorise la municipalité de Nantes à emprunter la somme de 600,000 livres pour l'achat des grains nécessaires à la subsistance de ses habitants, sous la garantie du seizième, qui lui reviendra dans le prix des reventes des biens nationaux, pour lesquels elle a fait sa soumission, à la charge par elle de rembourser au fur et à mesure de la rentrée des fonds empruntés, et de rendre compte du tout au directoire du département. »

Un membre: Je demande que conformément au règlement, l'Assemblée ordonne l'impression du projet du comité et ajourne la discussion.

(L'Assemblée décrète l'impression et ajourne la discussion à samedi.)

Un membre fait une motion tendant à faire décréter si les députés seront payés depuis la date de leur enregistrement aux archives, ou seulement depuis le 1er octobre.

(Cette motion n'a pas de suite.)

Un membre: La commune de Toulouse, qui a donné tant de preuves de patriotisme et d'amour pour la liberté, ne jouirait qu'imparfaitement des bienfaits de la Révolution, si elle n'avait pris des mesures pour faire exécuter la loi. Par un arrêté autorisé par le conseil général du département de la Haute-Garonne, elle a établi une garde soldée; elle demande que l'Assemblée l'autorise à la conserver. Je demande le renvoi au comité militaire.

(L'Assemblée renvoie la pétition de la commune de Toulouse au comité militaire.)

M. Gossuin, au nom du comité des pétitions, fait un rapport sur les secours à accorder aux marins de Calais, victimes d'événements de mer, et s'exprime ainsi :

L'Assemblée nationale a entendu le récit (1) de la bravoure des marins de Calais qui se sont exposés pour sauver des pêcheurs prêts à périr à bord d'un navire à demi-submergé par une forte tempête, de ceux qui s'étaient attachés à la charpente d'une balise sans cesse couverte par les flots de la mer. Deux de ces citoyens ont péri et laissent leur famille dans le désespoir et l'indigence, et six autres ont réussi par leur courage å en sauver vingt-six d'une mort qui paraissait inévitable. Le comité des pétitions que l'Assemblée a chargé de l'examen des procès-verbaux envoyés par la municipalité de la ville de Calais, pour proposer les recompenses dues à des citoyens qui ont si bien mérité de la patrie, vous présente, Messieurs, le projet de décret suivant :

« L'Assemblee nationale, après avoir entendu le procès-verbal de la municipalité de Calais, en date du 18 octobre 1791, et le rapport de son comité des pétitions, décrète ce qui suit:

« Art. fer Il sera payé une pension viagère de 300 livres à la veuve Maréchal dont le fils unique a péri dans le port de Calais en voulant sauver

(1) Voir Archives parlementaires. 1 Série, tome XXXIV, page 370.

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