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des citoyens prêts à être submergés par la tempête.

«Art. 2. Il sera aussi payé des deniers de l'Etat, à la veuve Gravée, qui a perdu aussi un fils dans la même action, une pension viagère de 200 livres, dont la moitié sera reversible au deuxième fils qui lui reste.

"Art. 3. Jean Malosquer, Bartelet, Charles..., Louis Deroteux, Le Gros et Barthélemy Desvaux ont bien mérité de la patrie, en sauvant du naufrage vingt-six de leurs concitoyens ; et il sera payé par le Trésor public à chacun de ces six braves marins 300 livres de gratification.

« Art. 4. Le directoire du département de Pasde-Calais accordera, sur l'avis de la municipalité et du district de Calais, aux familles des marins qui ont péri sur la charpente de la balise où ils étaient réfugiés, les secours qu'ils trouveront convenables, sur les sommes allouées chaque année aux départements pour cet usage.

« Art. 5. Expédition du décret sera remise à chacun des ci-dessus nommés par le maire, en présence du conseil général de la commune, et ce dans une séance publique qui se tiendra à cet effet. »

Plusieurs membres : Le renvoi au comité des secours publics!

D'autres membres : Le renvoi au comité de liquidation.

M. Carnot-Feuleins jeune. Je demande l'impression et l'ajournement à samedi.

M. Goujon. Le comité des pétitions n'a autre chose à faire que de présenter l'analyse des pétitions et d'en préparer le renvoi aux divers comités.

Un membre: Je repousse les objections qui ont été faites par M. Goujon et j'appuie la demande de l'impression et de l'ajournement.

Plusieurs membres : Fermez la discussion! (L'Assemblée ferme la discussion.)

M. Crestin. Aux termes de l'Acte constitutionnel, c'est au pouvoir exécutif à faire dresser la liste des pensions et gratifications; je demande le renvoi au pouvoir exécutif!

M. le Président établit l'état de la délibération.

Plusieurs membres: La priorité pour le renvoi au pouvoir exécutif:

(L'Assemblée accorde la priorité au renvoi au pouvoir exécutif.)

M. le Président. Je mets aux voix le renvoi au pouvoir exécutif.

(Une première épreuve a lieu; elle est douteuse.) (Après une seconde épreuve, l'Assemblée décrète le renvoi au pouvoir exécutif.)

M. le Président. MM. Champion, Crestin, Charlier et Chassagnac sont nommés commissaires pour porter plusieurs décrets à la sanction du roi.

L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret de la troisième section du comité de législation, concernant les troubles occasionnés par les prêtres non assermentés.

M. le Président. Avant de passer à l'ordre du jour, je demande à l'Assemblée si elle veut m'autoriser à donner la parole à plusieurs membres qui proposent des articles additionnels au premier article du projet de décret de M. François de Neufchâteau ?

M. Thuriot. Lorsque l'on a lu le projet qui a été soumis à la discussion, on y a trouvé une harmonie parfaite. Proposer des articles addition

nels, c'est pour ainsi dire vouloir détruire à l'instant cette harmonie qu'il faut y conserver.

Je propose à l'Assemblée, pour ne pas perdre de temps en débats inutiles, de vouloir bien arre ter que l'on discutera successivement article pa article, et que, lorsque le dernier sera décrété o rejeté, on pourra alors proposer des articles addi- . tionnels. (Applaudissements.)

(L'Assemblée adopte la motion de M. Thuriot.

Un membre: Je propose à l'Assemblée de decider que le projet dont on va lui continuer la lecture sera décrété sans désemparer. (Non! non"

Plusieurs membres: La question préalable! (L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette motion.)

M. François de Neufchâteau, rapporteur, donne lecture de l'article 2 ainsi conçu :

Art: 2.

"A l'expiration du délai ci-dessus, chaque municipalité fera parvenir au directoire du dépar tement, par la voie du district, un tableau des ecclésiastiques domiciliés dans son territoire, en distinguant ceux qui auront prêté le serment civique et ceux qui l'auront refusé. Ces tableaux serviront à former les listes dont il sera ci-après parlé. »

Un membre: Au lieu du mot refusé, je propose de mettre « ceux qui ne l'auront pas prêté », car il faudrait constater le refus.

M. François de Neufchâteau, rapporteur. Nous avons mis le mot refusé parce que nous avons pensé que les municipalités auraient le soin d'avertir les ecclésiastiques de prêter leur

serment.

Un membre: Au lieu des tableaux dont il est parlé dans l'article et qui doivent être envoyés par les municipalités aux directoires de département, je désirerais que les municipalités fussent tenues d'envoyer les minutes originales ou des expéditions de leurs procès-verbaux.

M. Albitte arně. Je demande que, par l'article, il soit indiqué un délai, dans lequel la municipalité fera parvenir les tableaux dont il est question.

Plusieurs membres: La discussion fermée ! (L'Assemblée ferme la discussion.)

Plusieurs membres: La question préalable! (L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur les amendements et adopte l'article 2.) M. François de Neufchâteau, rapporteur, donne lecture de l'article 3 qui est ainsi conçu :

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les prêtres légalement nommés à des places vacantes et qui ont pu en prendre possession à raison des troubles qui ont existé. En conséquence je propose d'ajouter,aux aux mots : « dans les places qu'ils occupent» ceux-ci : « ou auxquelles ils ont été légalement nommés. »

Plusieurs membres : C'est juste! c'est juste!

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M. François de Neufchâteau, rapporteur. Alors, je propose de substituer aux mots : « dans les places qu'ils occupent et dans les traitements dont ils jouissent» ceux-ci : « Dans les places auxquelles ils ont été nommés et dans les traitements dont ils doivent jouir.

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(L'Assemblée adopte cet amendement.)

M. Lagrévol. Pourvu, toutefois, qu'ils ne se soient pas rétractés.

M. Richard. Je demande la question préalable sur l'article, et voici comment je la motive. Cet article contient deux dispositions: la première n'est qu'une répétition de la disposition contenue dans l'article 1er que vous avez voté, qui exempte de la formalité du serment ceux qui l'ont déjà prêté. Pour cette raison elle doit être écartée, car la loi ne doit pas se répéter. Par la seconde disposition, cet article confirme la jouissance des ecclésiastiques nommés par le peuple dans les places et traitements dont ils jouissent. Cette deuxième disposition ne fait que confirmer une disposition de la Constitution, et vous n'avez pas le droit de confirmer des dispositions contenues dans l'Acte constitutionnel. Je demande donc la question préalable sur l'article. (Appuyé ! appuyé!)

M. François de Neufchâteau, rapporteur. La question préalable est demandée sur les deux dispositions de l'article; sur la première, comme inutile, et étant comprise dans l'article 1er, sur la deuxième comme étant comprise dans la Constitution et se trouvant surabondante. Certainement, Messieurs, lorsque le comité s'est déterminé à adopter l'ensemble et le système du décret, il s'est fait cette objection et voici les raisons qui l'ont déterminé cependant à insérer l'article 3.

Il est bien vrai qu'au moyen du premier article, il semble qu'il deviendrait superflu de dispenser de formalités nouvelles ceux qui ont prêté ce serment. Mais comme les deux serments ne sont pas les mêmes, aux yeux de quelques gens, comme l'intention du présent décret est de substituer, pour la tranquillité publique, le serment civique au serment provisoire qui est exigé par la loi du 27 novembre et qui a excité tant de réclamations dans le sein même de l'Assemblée constituante, on a cru qu'en exigeant des ecclésiastiques qui n'ont pas prêté le premier serment, le serment civique seulement, il pourrait rester des doutes, soit dans quelques municipalités, soit dans quelques administrations, sur ce qui concerne les ecclésiastiques qui ont donné la première preuve de l'attachement aux lois et de l'attachement à leur partie, dans des circonstances difficiles. Votre comité a pensé en outre qu'il était de son devoir, à cause de l'exemple donné par ces bons patriotes, de rappeler de la manière la plus précise, l'obligation que l'Assemblée nationale avait prise envers eux, et que le silence sur cet objet serait un acte d'ingratitude (Applaudissements.); que quand même l'article pourrait paraître superflu, il était nécessaire, indispensable de le dire. (Applaudissements.)

(L'Assemblée, consultée, rejette la question préalable.)

Plusieurs membres : Aux voix, l'article !

M. Thuriot. Je demande qu'on supprime de l'article le mot invariablement, parce qu'il y a un décret précis de l'Assemblée nationale constituante qui porte qu'il y aura des réunions de curés. Je demande qu'il soit dit : « que même en cas de suppression, les ecclésiastiques fonctionnaires publics auront toujours le même traitement jusqu'au remplacement ». (Murmures.)

M. François de Neufchâteau, rapporteur. Il y a un amendement proposé par M. Lagrévol que j'adopte volontiers, c'est d'ajouter les mots : « et qui ne l'on pas rétracté. »

M. Reboul. Cet amendement tend à prévenir la trop dangereuse complaisance des municipalités qui, principalement dans les campagnes, seront enchantées de trouver le plus léger prétexte, afin de comprendre sur les listes, les prètres qui ont prêté le serment, et qui ensuite se sont rétractés. Il n'est pas dans notre esprit de faciliter à ces mauvais citoyens un prétexte pour être payés, tandis que d'autres ne le seront pas. J'appule l'amendement. (Applaudissements.)

(L'Assemblée adopte l'amendement de M. Lagrévol.)

Un membre: J'appuie l'amendement de M. Thuriot qui consiste à retrancher le mot invariablement, et je demande que l'on mette: « ils y seront maintenus, ainsi qu'il est dit dans l'acte constitutionnel.

M. François de Neufchâteau, rapporteur. Voici une nouvelle rédaction de l'article 3:

Art. 3.

« Ceux des ministres du culte catholique qui ont donné l'exemple de la soumission aux lois et de l'attachement à leur patrie, en prêtant le serment de fidélité prescrit par le décret du 27 novembre 1790, et qui ne l'ont pas rétracté, seront dispensés de toute formalité nouvelle. Ils seront invariablement maintenus dans les droits qui leur sont accordés par les décrets précédents.» (Aux voix! aux voix!)

:

M. Richard. Je propose un nouvel amendement infiniment essentiel Je demande que le décret qui défend tous préambules et restrictions soit relaté dans l'article.

Un membre: Il suffit maintenant aux ministres du culte catholique pour avoir éligibilité accordée par la loi, et en même temps pour posséder toute autre place, de prêter le serment civique prescrit par l'article 1; or, je propose d'ajouter à l'article 3 que les ecclésiastiques qui, n'ayant pas prêté le serment, ne sont pas encore remplacés, soient maintenus dans leurs places s'ils se conformentaux dispositions de l'article 1. (Exclamations!)

Plusieurs membres : Non! non! Fermez la discussion !

(L'Assemblée ferme la discussion.) Plusieurs membres La question préalable sur tous les amendements!

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur tous les amendements non compris dans la nouvelle rédaction de l'article 3 et adopte cette nouvelle rédaction.)

M. François de Neufchâteau, rapporteur, donne lecture de l'article 4 qui est ainsi conçu :

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ne pourra désormais toucher, réclamer ni obtenir de pension ou de traitement sur le Trésor public, qu'en représentant la preuve de la prestation du serment civique, conformément à l'ar ticle 1er ci-dessus. Les trésoriers, receveurs ou payeurs qui auront fait des payements contre la teneur du présent décret, seront condamnés à en restituer le montant et privés de leur état. » Plusieurs membres : Aux voix! aux voix!

M. Torné. Messieurs (1), je crois qu'il est nécessaire au repos de l'Etat d'écarter, par la question préalable, l'article 4 du comité, en ce qu'il propose la déchéance de tout traitement ecclésiastique pour peine du refus de prêter le serment civique, même dans le cas où il ne serait pas prouvé que l'insermenté a eu quelque part à des troubles publics. (Bruit.) Il mfaut, sans doute, un grand courage pour lutter ici contre une opinion qui parait être l'opinion dominante de l'Assemblee; mais rien n'ébranlera l'invariable fidélité qui m'attache aux principes.

Si je me trompe, Messieurs, c'est l'erreur de la modération, de l'humanité, de la bienfaisance (Murmures et exclamations.); et votre cœur lui fera grâce.

Enfin, pour la gloire de votre décret, il faut qu'il ait été fortement combattu; il faut que vous m'ayez paisiblement entendu. L'Europe ne pourra vous reprocher alors, ni une précipitation, ni une impatience, ni une horreur des contradictions qui déshonore le législateur, et qui discrédite la loi. (Applaudissements.)

On peut considérer l'ecclésiastique insermenté sous trois rapports: comme simplement insermenté, comne suspect de conjuration contre 'a patrie, à raison seulement de son état, ou comme ayant donné lieu à une accusation légale par son influence sur des troubles portés à l'ordre public. Je ne le considère maintenant que sous le premier rapport.

Ceci entendu, si je ne me fais illusion sur la Constitution française, elle distingue le régnicole du citoyen actif. On est régnicole quoiqu'on n'ait pas prêté le serment civique. (Murmures.) Plusieurs membres : C'est faux!

M. Torné. Mais de cela seul qu'on ne l'a pas prêté, on n'est pas citoyen actif.

Voilà précisément ce que sont, sous le premier rapport, les ecclésiastiques insermentes. Aux yeux de la Constitution, ils ne sont pas, il est vrai, citoyens actifs; mais de droit, ils sont régnicoles...

Plusieurs membres : C'est faux!

Un membre: Je deman le à lire la Constitution.

M. Torné... et la patrie, les assimilant à des étrangers, leur refuse, à la vérité, l'honneur de la servir, mais sans les bannir de son sein. Toute autre peine serait, pour l'insermenté, une peine ajoutée à celle prononcée par la Constitution, sans qu'il y eût, de sa part, aucun accroissement de délits ou de crimes.

Oui, Messieurs, si la Constitution propose à des Français le serment civique, c'est seulement pour les soumettre à une épreuve, sans laquelle ils ne peuvent acquérir les droits de citoyen actif; et voilà où s'arrête la sévérite de la loi, à l'égard de ceux qui ne se sont pas présentes

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pour prêter ce serment; c'est donc là où votre sévérité doit s'arrêter nécessairement. (Bruit.)

Le refus du serment proposé par la Constitution n'est pas un délit, puisque ce serment n'est pas ordonné. Ce n'est donc pas la vengeance de la loi que ce refus appelle, mais seulement défiance. Le citoyen qui ne se présente pas pour prêter le serment civique (Murmures et exclamations.)... (1)

M. Hilaire. Je demande que Monsieur soit rappelé à l'ordre pour avoir transgressé un article de la Constitution. (Oui! oui!)

Un membre: Il est dangerereux d'entendre d pareils discours.

Un membre: Monsieur le Président, l'opinan qui est à la tribune ne fait que prêcher les heresies constitutionnelles, des principes parfaitement contraires à la Constitution; il est de notre devoir de le rappeler à l'ordre dès qu'il s'en écarte.

Pulsieurs membres à droite C'est intolérable respectez la liberté des opinions!

(L'Assemblée est dans une vive agitation.)

M. le Président. Les interruption continuelles font perdre un temps considérable à l'Assemb ée. Je prie les membres qui interrompent de considérer que le silence de l'Assemblée n'est pas une preuve d'approbation de ce que dit l'opinant. Lorsqu'un membre a la parole, il faut l'entendre jusqu'à la fin; s'il a eu le malheur de s'écarter de la Constitution, après qu'il aura terminé soz opinion, la question préalable sera certainemen invoquée sur-le-champ contre ses principes, et je crois qu'alors il faudra le rappeler à l'ordre (Murmures prolongés.)

(Le tumulte recominence.)

Plusieurs membres demandent que M. le Président soit rappelé à l'ordre.

Un membre: Monsieur le Président, vous deve rappeler l'opinant à l'ordre; faites votre devoir. Nous avons tous juré de ne rien proposer de contraire à la Constitution. Je demande la parole contre vous.

M. le Président. Messieurs, on demande la parole contre moi, je l'accorde. (Vives réclamations.

Le même membre: M. le Président vient de nous dire que lorsqu'un membre avait la parole, s'écartat-t-il même des principes de la Constitution, il fallait le laisser parler jusqu'à la fia, sauf ensuite à invoquer la question préalable contre lui. Il résulterait de ce princípe, Messieurs, que l'Assemblée serait tenue de perdre toutes ses séances pour entendre, du soir au matin, des hérésies continuelles contre la Constitution, et certainement nous ne sommes pas ici pour cela. Je dis donc que lorsqu'un opinant a pose à la tribune des principes anticonstitutionnels, il ne faut pas l'entendre jusqu'au bout, mais il faut le rappeler à l'ordre.

Plusieurs membres : L'ordre du jour! l'ordre du jour!

M. Gossuin. Le seul reproche qu'on puisse faire au Président, c'est de ne pas rappeler à l'ordre ceux qui prennent la parole sans cesse, et n'interrompent que pour reculer la délibération.

M. Torné. Messieurs, mon intention n'était

(1) Voir ci-après, mème séance, page 121, la suite de discours de M. Torné.

pas de jeter le trouble dans l'Assemblée; je me suis trompé et je me rappelle moi-même à l'ordre.

M. Delacroix. Je demande que l'on passe à l'ordre du jonr.

(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

M. Basire jeune. Voilà la cinquième ou la sixième fois qu'on discute cette matière; je demande que la discussion soit fermée.

Plusieurs membres à droite: Non! non! elle n'est pas encore ouverte.

Un membre à droite Je demande que tout membre qui interrompit l'opinant soit rappelé à l'ordre. (Cette proposition est accueillie par des huées de la part des tribunes du coté droit.) Plusieurs membres à droite: Monsieur le Président, réprimez l'insolence des tribunes!

M. Jahan. Levez la séance!

Un membre: Je demande qu'on maintienne la parole à chaque orateur, afin qu'il puisse émettre librement son opinion. Si l'on propose quelque chose qui soit contraire à la Constitution, eh bien, Messieurs, vous ne l'a lopterez pas. (Murmures.) Je demande à l'Assemblée elle-même, comment elle peut décréter librement un article si l'on n'a pas la liberté de proposer les raisons qui peuvent le combattre. (Bruit.)

M. Delacroix. Sur les réclamations qui se sont elevées à l'occasion de ce que l'opinant avait dit d'inconstitutionnel, l'Assemblée nationale a passé à l'ordre du jour, d'après l'aveu de l'opinant qu'il s'était trompé. Je demande pourquoi on n'exécute pas ce décret, et pourquoi il y a eu tant de tumulte dans le côté que je ne veux pas appeler le côté droit? (Murmures à droite.)

Plusieurs membres: A l'ordre! à l'ordre ! D'autres membres : Cela vient des tribunes. M. Delacroix. Je prends l'Assemblée à témoin que ce sont ces Messieurs qui, par leur tumulte, nous ont fait perdre un temps précieux. (Applau dissements.)

Comme nous ne devons point mettre notre volonté à la place de celle de l'Assemblée, je demande que vous mettiez aux voix si l'Assemblée fermera la discussion, nonobstant la proposition contraire du préopinant. (Murmures.) C'est le seul moyen de nous faire sortir de ce tumulte. (Appuyé! appuyé!)

M. Quesnay. Je suis fâché de la dépense de poumons que M. Delacroix vient de faire, sur un fait dont probablement il n'était pas informé. Il s'est imaginé que le tumulte qui se faisait de ce

était occasionné par l'improbation de ce que vient de décréter l'Assemblée; mais point du tout, ce n'est pas ça. Le tumulte a eu lieu parce qu'un membre du côté droit ayant fait une proposition, la tribune de droite l'a hué. C'est là-dessus que nous nous sommes élevés pour vous demander de rappeler cette tribune à l'ordre, et non pas les tribunes, parce qu'il n'y en a qu'une qui ait insulté l'Assemblée.

M. Basire jeune. Monsieur le Président, je demande la parole contre vous; vous entretenez le tumulte, en ne cédant pas au vœu de la majorité. J'ai demandé que la discussion soit fermée; il y a longtemps que ma proposition est appuyée; vous ne devez pas livrer l'Assemblée à l'agitation en refusant de la mettre aux voix.

M. Chabot. Monsieur le Président, mettez donc la motion aux voix !

M. le Président. Je déclare à M. Chabot qu'un président n'est tenu à mettre une proposition aux voix, que lorsque l'Assemblée est dans le silence. On ne peut pas exiger de lui qu'il fasse des efforts contre nature pour surmonter le tumulte. Depuis un quart d'heure je déclare que j'attends le silence. Je rappelle M. Chabot à l'ordre. (Applaudissements et murmures.)

MM. Merlin et Chabot. Vous n'en n'avez pas le droit !

M. Basire jeune. Vous êtes juge et partie ! Un membre: Je demande la parole contre vous, Monsieur le Président!

M. le Président. Avant de mettre aux voix si la discussion est fermée, je prie l'Assemblée d'écouter Monsieur qui demande la parole contre moi.

M. Delacroix. La séance ne peut pas être employée en contestations personnelles.

Le même membre: Je demande la parole contre vous, Monsieur le Président!

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Voix diverses L'ordre du jour! donc parler! La question préalable! Un membre: Monsieur le Président, consultez l'Assemblée pour savoir si on sera entendu contre

vous.

L'Assemblée, consultée, décide à une très grande majorité que le membre qui a demandé la parole contre le président ne sera pas entendu.)

M. le Président. Je vais mettre aux voix si la discussion sera fermée.

MM. Hua, Léopold et plusieurs autres membres demandent à parler contre la clôture de la discussion.

M. Quatremère-Quincy. Je ne crois pas que ce soit sérieusement que M. Delacroix ait proposé de fermer la discussion, puisqu'elle n'a pas été ouverte.

Plusieurs membres: Consultez l'Assemblée pour savoir si Monsieur sera entendu.

M. Basire jeune. Je vais demander un autre président, si vous ne marchez pas.

M. le Président. On a demandé que la discussion soit fermée, j'allais mettre cette proposition aux voix. Plusieurs membres ont demandé la parole contre la clôture de la discussion. Je vais consulter l'Assemblée pour savoir si les membres qui ont demandé la parole contre la proposition de fermer la discussion, seront entendus.

(L'Assemblée décrète que ces membres seront entendus.)

Plusieurs membres : Non! non! il y a doute; une seconde épreuve !

(Après une seconde épreuve, l'Assemblée décrète qu'ils seront entendus.)

M. Quatremère-Quincy. Il ne me paraît pas soutenable de proposer de fermer la discussion sur un article qui est le plus important de tous ceux du projet de décret, lorsqu'il est notoire que cette discussion n'a pas même été ouverte. M. Torné a commencé à ouvrir cette discussion. Quelques-uns de ses arguments ont déplu à une grande partie de l'Assemblée. On a demandé qu'il soit rappelé à l'ordre. Beaucoup de membres ont pensé qu'il était beaucoup plus dans les usages d'une Assemblée, qui connaît

l'ordre et qui le veut, d'attendre que M. Torné ait fini son discours. Toute la partie de l'Assemblée... (L'orateur montre la droite. Murmures et exclamations.) Toute la partie de l'Assemblée où j'étais a désiré que M. Torné fût entendu jusqu'au bout, afin que l'on pût lui répliquer plus victorieusement; et l'Assemblée l'a ainsi décidé. Ainsi je demande que M. Torné continue son discours, sauf à lui répondre lorsqu'il aura terminé, sur les objets qui ont paru inconstitutionnels à l'Assemblée. Mon væù, en outre, est que la discussion soit continuée sur l'objet principal du quatrième article du comité, et je pense que c'est une plaisanterie que de demander de fermer la discussion, quand elle n'a pas été ouverte.

(L'Assemblée, consultée, décrète que la discussion sera continuée.)

M. le Président. Voici le résultat du scrutin pour l'élection du vice-président. Sur 225 votants dont la majorité absolue est 113, M. Lacépède a obtenu 114 voix. Je le proclame viceprésident.

M. Guadet, secrétaire. Voici une lettre des députés des citoyens actifs de la ville de Bordeaux, actuellement à Paris; Cette lettre, relative aux troubles de Saint-Domingue, est ainsi conçue : Paris, le 17 novembre 1791. Monsieur le Président,

« Nous recevons, dans l'instant, un courrier extraordinaire qui nous apprend l'arrivée, à Bordeaux, du navire La Basse-Pointe, parti du Cap le 9 octobre, et qui nous apporte diverses pièces relatives aux désastres arrivés à Saint-Domíngue, dans la partie du Nord. Nous sommes chargés de remettre ces pièces sous les yeux de l'Assemblée, et nous vous prions de nous transmettre, à cet égard, ses ordres.

« Nous sommes avec respect, etc...

:

« Signé Les députés des citoyens actifs de la ville de Bordeaux. »

A cette lettre est jointe une adresse de la municipalité de Bordeaux.

Bordeaux, le 14 novembre 1791. "Messieurs,

« Le navire La Basse-Pointe, appartenant à MM. David Granis et fils, négociants de cette ville, parti du Cap-Français le 9 octobre dernier, et entré aujourd'hui dans la rivière de Bordeaux, apporte la confirmation des nouvelles désastreuses des colonies. Nous vous adressons, Messieurs, la déclaration du capitaine. Diverses autres pièces seront mises sous vos yeux par les députés de l'assemblée particulière des citoyens actifs qui sont allés déposer dans votre sein les alarmes que les Bordelais avaient si justement conçues sur le sort de nos frères. Non, Messieurs, les vœux que nous formons pour eux ne seront pas stériles. Nous en avons pour garants votre respect pour l'humanité, votre amour pour la patrie, et votre zèle pour la gloire de la nation.

Nous sommes avec respect, etc...

« Signé LES MAIRE ET OFFICIERS MUNICIPAUX DE BORDEAUX. »

Voici le procès-verbal...

M. Vergniaud. Je demande la parole relativement à la lecture de ce procès-verbal. Il contient la déclaration qui a été faite par le capitaine du vaisseau La Basse-Pointe, entré dans la rivière

de Bordeaux. Cette déclaration, quoique conforme en beaucoup de points aux diverses lettres qui ont été écrites par plusieurs habitants du Cap, à des négociants de Bordeaux, et dont copies ont été envoyées et doivent vous être remises par les députés des citoyens actifs de Bordeaux, plusieurs de ces lettres donnent des espérances que ne donne pas cette déclaration. Je crois, Messieurs, que si vous vous déterminez à entendre la lecture de ce procès-verbal, il faut que vous entendiez aussi sur-le-champ à la barre les députés des citoyens actifs de Bordeaux qui nous feront la lecture de leurs pièces, afin que ce procès-verbal ne laisse pas des impressions plus fâcheuses qu'il n'en doit laisser. Sinon, je demande que ce procès-verbal et les diverses pièces dont les députés de Bordeaux sont chargés soient renvoyés aux comités colonial et de commerce réunis, pour en être fait demain matin un rapport détaillé (Murmures.) et que tous les députés des villes maritimes, qui sont actuellement à Paris, soient invités à sé rendre au comité, pour y apporter tous les renseignements qu'ils peuvent avoir. Alors vous ne donnerez pas aux citoyens qui vous entendent, et vous ne recevrez pas vous-mêmes des impressions fâcheuses.

Plusieurs membres : Le renvoi aux comités réunis !

Un membre: Nous demandons ici la lecture d'une pièce annoncée, et, ensuite, on verra ce qu'il nous restera à faire.'

M. Gensonné. J'appuie la motion de M. Vergniaud. Les deux comités vous rendront compte de faits qui ne seront pas douteux, et je crois, Messieurs, qu'il est très important de ne pas laisser circuler des nouvelles qui pourraient ne pas paraître parfaitement authentiques. L'Assemblée doit prendre toutes les précautions possibles pour éclairer l'opinion publique d'une manière bien positive et ne pas perdre son temps à la lecture de pièces dont la véracité peut être contestée. Je demande le renvoi aux comités colonial et de commerce réunis.

Un membre: Les deux préopinants vous ont dit précisément tout ce qu'il fallait pour procéder sur-le-champ à la lecture. Je prends d'abord les motifs de M. Vergniaud. D'après lui, il est à craindre que de la lecture du procès-verbal, il ne résulte des impressions fàcheuses. Voilà déjà une raison pour en faire la lecture, car l'allégation apportée à la tribune par M. Vergniaud est suffisante pour produire l'impression fâcheuse dont il a parléet qui a déjà été ressentie dans l'Assemblée.

En ce qui concerne M. Gensonné, il vous observe que la lecture des pièces ferait perdre un temps précieux à l'Assemblée, et moi, je maintiens que ses soins les plus importants sont de veiller sur le sort de nos colonies.

Plusieurs membres : Fermez la discussion!
(L'Assemblée ferme la discussion.)

Plusieurs membres: La question préalable sur le renvoi aux comités !

(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il y a lieu à délibérer sur la proposition de M. Vergniaud et renvoie les pièces aux comités colonial et de commerce réunis pour en faire le rapport demain.)

M. le Président. M. le ministre de l'intérieur demande la parole pour remettre une dépêche des commissaires envoyés dans le ci-devant pays d'Avignon et Comtat Venaissin, pour en opérer la réunion à la France.

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