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à la fabrication de la monnaie, lui qui en est absent depuis plusieurs mois? Les réclamations d'un fonctionnaire public ne doivent jamais se faire entendre que de sa place; et quand M. Souton y sera, à tous égards, on l'entendra. Jusque-là så pétition ne doit pas même être admise, et je demande qu'on passe à l'ordre du jour.

Un membre: Je m'oppose au renvoi au comité, parce que le renvoi pourrait faire croire à M. Souton que l'Assemblée a tacitement suspendu l'exécution de l'ordre du ministre, et qu'il est fondé à rester à Paris. Pour éviter toute difficulté, je demande que l'on passe à l'ordre du jour, mais si l'Assemblée ordonne le renvoi au comité, je demande qu'il soit dit que c'est sans préjudice de l'obéissance que M. Souton doit aux ordres du ministre.

M. Isnard. Je prie l'opinant d'observer que M. Souton, en ce moment, est remplacé à la monnaie de Pau par son père. D'ailleurs, il lui est impossible de s'y rendre d'ici au 25. Il y a 8 jours que M. Souton demande à être entendu relativement à cette intimation de sortir de Paris, et il n'a pu obtenir de vous cette faveur. S'il est encore à Paris, c'est, puisqu'il faut le dire, pour travailler à une dénonciation très détailléé et très constatée contre le ministre. (Exclamations dans l'Assemblée. Applaudissements dans les tribunes.) et celui-ci, pour y répondre, lui ordonne de se retirer. Voilà le fait, et si les ministres renvoient comme cela dans leurs départements et à 200 lieues d'ici, les citoyens assez courageux qui se trouvent à Paris pour faire la guerre aux abus, nous n'aurons jamais de dénonciations en forme. (Applaudissements dans les tribunes.)

M. Dorizy. Je demande que cette dénonciation soit renvoyée au comité des assignats et monnaies, non que je croie y voir quelque importance. Nous savons que M. Souton s'occupe perpétuellement de dénonciations. M. Souton a dénoncé à l'Assemblée constituante son comité des monnaies, il a dénoncé la commission des monnaies, il a dénonce le ministre, et M. Charles Lameth disait à la tribune, peut-être en plaisantant: « Le sieur Souton dénoncerait le Père éternel.» (Rires et applaudissements.) Nous-mêmes deviendrons bientôt l'objet de ses dénonciations. Hier, il a remis sa première et sa seconde tions au comité des assignats et monnaies. Nous devons, Messieurs, éclairer la nation entière sur toutes les dénonciations. Cependant, pour ne pas perdre un temps précieux en d'inutiles discussions, je demande le renvoi au comité qui consentira à sacrifier quelques instants pour faire un rapport, le plus tôt possible, sur cette dénonciation.

M. Gilbert. La vérité est qu'il y a à Paris, en ce moment, beaucoup de directeurs des monnaies, qui se proposent de circonvenir le comité des monnaies et de lui faire faire des opérations qui leur soient très profitables, j'en suis sûr. Le travail des monnaies est ainsi en retard, et je dénonce ce fait à l'Assemblée.

Plusieurs membres: L'ordre du jour!

M. le Président. M. Fauchet a la parole.

M. Fauchet. J'avais demandé la parole pour appuyer la réclamation de M. Souton. M. Isnard m'a prévenu, ainsi je n'ai plus rien à dire.

Plusieurs membres : La discussion fermée! (L'Assemblée ferme la discussion et renvoie la

pétition de M. Souton au comité des assignats et monnaies.)

M. Isnard. Mais je demande qu'au moins l'ordre donné à M. Souton par le ministre, pour se rendre à Pau, soit suspendu. (Rires ironiques et murmures.)

Plusieurs membres: L'ordre du jour!
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

M. Isnard, secrétaire, donne lecture d'une lettre de M. Bertrand, ministre de la marine, qui fait part à l'Assemblée nationale d'une pétition des marins et ouvriers de l'arsenal de Toulon, tendant à obtenir pour eux et leurs familles une distribution journalière de pain, pareille à celle qu'obtiennent les ouvriers employés dans les arsenaux de Brest et Rochefort; cette lettre est ainsi conçue:

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Monsieur le Président,

J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien engager l'Assemblée nationale à prendre une détermination sur l'objet de cette lettre. Il me parait d'un très grand intérêt pour l'économie des finances de l'Etat, pour la sûreté du service, et pour la tranquillité des ports. Ces importantes considérations méritent assurément toute l'attention de l'Assemblée. Cet objet pourra paraitre, au premier aspect, ressortir uniquement au pouvoir exécutif, mais je pense que les développements dont il est susceptible, et que je vais présenter le plus brièvement qu'il me sera possible, feront sentir la nécessité du concours que je réclame instamment du Corps législatif. J'éviterai constamment et avec le plus grand soin tout ce qui pourrait tendre à la confusion des pouvoirs. Nul motif ne ralentira jamais mes efforts pour donner à l'autorité légitime du roi toute l'énergie qu'elle doit avoir; mais lorsqu'après avoir mesuré la force de mes moyens avec celle de la résistance qu'ils peuvent éprouver, j'aurai reconnu qu'ils seraient insuffisants s'ils agissaient seuls, je recourrai franchement à l'Assemblée nationale, bien persuadé qu'elle rendra pleinement justice à la pureté de ines intentions: c'est, Monsieur le Président, ce que je fais aujourd'hui.

«L'ordonnateur de la marine de Toulon m'a fait passer tout récemment une pétition des marins et ouvriers employés dans cet arsenal, tendant à obtenir pour eux et leurs familles une distribution journalière de pain par le munitionnaire de la marine. Cette pétition est fortement appuyée par la municipalitè qui, en faisant valoir la position touchante de ces marins, l'utilité de leur service, et les difficultés qu'ils éprouvent à pourvoir à leurs besoins, les présente comme ayant autant de droits aux secours du gouvernenient que les marins et ouvriers employés dans les arsenaux de Brest et de Rochefort, auxquels les munitionnaires font effectivement fournir le pain, dont la valeur est acquittée par des retenues périodiques sur la valeur de leurs journées. Au moment où cette pétition m'est parvenue, je m'occupais non seulement de faire cesser les distributions de pain qui se font aux marins et ouvriers de Brest et de Rochefort, mais même toutes celles dont l'usage s'est introduit dans les différents ports, au profit des diverses personnes attachées au service, qui les regardaient en quelque sorte comme des attributions de leurs places; ces dernières ne devaient pas obtenir plus de ménagements que les autres.

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« J'avais été frappé des inconvénients graves et multipliés qu'avait produits cette condescendance de l'administration, et que les circon

stances présentes aggravaient encore. Je voyais le munitionnaire obligé de donner à ses achats une extension dispendieuse pour l'Etat, et souvent alarmante pour le peuple dans les lieux où ils s'opéraient, ces deux abus semblent exiger une répression d'autant plus prompte, que ce n'était réellement pas l'intérêt du service public qu'on pouvait mettre en avant pour les faire tolérer. Il m'avait été démontré qu'il n'avait jamais été possible de porter exactement à sa valeur le pain ainsi distribué, que, conséquemment, la plus-value tombait à la charge de l'Etat, et que la somme en était considérable chaque année. La multiplication des établissements de divers genres, celle des agents que ce service extraordinaire rend nécessaires, sont de nouveaux maux, de nouvelles sources d'abus, dans nos ports, où le local est à peine suffisant aux opérations du service, et où il est si important de ne rassembler que le nombre d'hommes dont la présence peut y être véritablement utile. C'est surtout dans les grands mouvements que ces inconvénients, et ceux que j'ai précédemment indiqués, prennent un caractère infiniment dangereux, qu'ils multiplient les embarras et les inquiétudes de l'administration, qu'ils diminuent sensiblement l'action de la surveillance, et donnent aux dépenses un accroissement incalculable.

«Enfin, et c'est la première réflexion que j'avais faite, j'avais senti que ces distributions de pain par les munitionnaires de la marine étaient autant d'atteintes portées aux droits des boulangers établis dans les villes où existent nos ports; qu'il était injuste que le gouvernement les dépouillat du bénéfice qu'ils avaient dù attendre en formant des établissements dans des lieux où ils savaient que le service public attirait un grand nombre de consommateurs; que c'était entraver la liberté du commerce, à laquelle il est essentiel de n'apporter aucune restriction, surtout à l'égard des objets de subsistance; j'ai donc vu avec peine arriver la pétition de Toulon. Ma première intention était de répondre négativement, en développant les motifs que je viens d'exposer, et en observant que les ouvriers des ports pouvaient également assurer leur subsistance par la fourniture des boulangers, et qu'ils leur présenteraient les billets de l'administration, qui deviendrait aussi garante des payements et les effectuerait au moyen des retenues sur le montant des journées; mais réfléchissant ensuite à la disposition actuelle des esprits, pensant que l'intervention de la municipalité et l'exemple de ce qui se pratique à Brest ainsi qu'à Rochefort, prêtait une nouvelle force à cette réclamation, j'ai craint, je l'avoue, d'exposer l'autorité à une démarche inefficace et conséquemment dangereuse; j'ai senti que j'agirais plus sûrement, si je pouvais me fonder sur une loi expresse, et c'est pour l'obtenir, que j'ai l'honneur, Monsieur le Président, de vous prier de soumettre l'objet de cette lettre à la délibération de l'Assemblée; je désirerais qu'elle voulût bien rendre un décret qui défendit formellement aux munitionnaires de la marine toute fourniture de pain qui n'aurait pas pour objet direct le service dont il est et doit être chargé. Ce serait ensuite à moi à prendre, pour l'exécution de cette loi, les mesures de prudence et de ménagement que je croirai convenables pour éviter les inconvénients d'un changement trop subit, et prévenir des réclamations justes.

«Je suis, Monsieur le Président, etc.
Signé BERTRAND. »

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M. Guyton-Morveau. Je crois devoir annoncer à l'Assemblée que j'ai reçu une lettre du procureur général syndic du département de la Côte-d'Or, qui me marque que M. Noireau, le véritable accusé, vient d'être arrêté; qu'il est transféré dans ce moment dans les prisons de la Conciergerie à Dijon, et qu'il y est mis au secret. En même temps, il m'envoie copie d'une adresse à l'Assemblée nationale des citoyens notables de Pontarlier. L'Assemblée trouvera peut-être nécessaire qu'elle soit lue.

M. Isnard, secrétaire, fait lecture de cette adresse qui est ainsi conçue:

« Les citoyens de Pontarlier soussignés, qui ont toujours été animés du plus pur patriotisme, et pénétrés d'admiration et de soumission pour notre sublime Constitution, qu'ils soutiendront jusqu'à la dernière goutte de leur sang, de même que les décrets qu'il plaît à votre sagesse de rendre, croient ne point manquer à leur serment, en vous exposant avec sensibilité l'extrême étonnement qu'ils ont éprouvé en voyant enlever nuitamment, comme criminel de lèsenation, au milieu d'une famille désolée, François Noireau, leur maire. Leur étonnement a été d'autant plus grand, qu'ils ne lui ont jamais vu commettre aucune infraction à la loi, et qu'ils l'ont considéré comme un zélé patriote, au point qu'ils l'ont réélu maire de Pontarlier. Nos vœux et nos espérances se portent à le croire innocent. Puissiez-vous, Messieurs, le juger tel.

« Fait et rédigé à Pontarlier, le 18 novembre 1791, l'an troisième de la Liberté. » (Suivent les signatures.)

M. Isnard, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes :

1° Lettre de M. Bertrand, ministre de la marine, qui remet à l'Assemblée les copies des traités de la nation avec la régence d'Alger; cette lettre est ainsi conçue :

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(L'Assemblée renvoie cette lettre au comité de liquidation.)

4° Deuxième lettre de MM. les commissaires de la Trésorerie nationale, renfermant un mémoire sur les difficultés résultant des erreurs ou défaut de forme qui arrêtent les payements, la transmission ou la conversion des titres des diverses créances sur l'Etat, ainsi que toutes les opérations nécessaires pour la règle de la comptabilité. (L'Assemblée renvoie cette lettre au comité de liquidation.)

50 Troisième lettre de MM. les commissaires de la Trésorerie nationale; elle est ainsi conçue :

« Nous avons l'honneur d'adresser à l'Assemblée nationale un mémoire énonciatif des opérations que nous avons faites depuis le commencement de notre administration jusqu'au 1er novembre, relativement à l'achat du numéraire. A l'appui de ce mémoire sont des états détaillés qui indiquent la nature, le montant et le prix des matières.

« Nous sommes, etc."

(Suivent les signatures.)

M. Guyton-Morveau. Je demande le renvoi de la lettre et du mémoire au comité de la Trésorerie nationale.

(L'Assemblée renvoie la lettre et le mémoire au comité de la Trésorerie nationale.)

Un membre: Je demande que l'on fasse imprimer cet état, afin de connaitre l'influence que ces achats peuvent avoir sur le prix de l'argent.

M. Dorizy. Je crois qu'on ne peut décréter cette impression, qu'après que le comité de la Trésorerie nationale vous aura fait un rapport à ce sujet. Ainsi, je demande l'ajournement de la proposition du préopinant.

M. Lecointre. Les représentants du peuple doivent toujours connaître, par la voie de l'impression, le prix de l'argent. Il est infiniment intéressant que l'impression proposée soit décrétée, alors nous verrons les comptes des ministres... (Murmures.)

(L'Assemblée adopte la motion de M. Dorizy tendant à l'ajournement de l'impression jusqu'après le rapport du comité de la Trésorerie nationale.)

Un membre: Messieurs, la dame Jeanne-Luce Antoinette Marsac, ci-devant religieuse à Limoges et relevée de ses voeux par sentence du tribunal, se plaint du retard de liquidation d'une créance de 2,800 livres qu'elle a sur le Trésor public. Les directeurs de la liquidation ont trouvé une légère difficulté dans le remboursement de sa dette. Mariée aujourd'hui au sieur Jean Dubrouillet de la Boissière, elle est mère de famille et prie l'Assemblée d'avoir égard à sa qualité de mère. (Applaudissements.)

(L'Assemblée renvoie cette pétition au comité de liquidation.)

Un membre Une dame religieuse, dans le département d'Indre-et-Loire, rentrée dans le monde, se plaint de la modicité de sa pension. (L'Assemblée renvoie cette demande au comité des pétitions.)

M. Isnard, secrétaire, donne lecture d'une adresse de la ci-devant communauté des Procureurs de la sénéchaussée de Villefranche, département de Rhône-et-Loire, relative à des liquidations d'office.

(L'Assemblée renvoie cette adresse au comité de liquidation.)

M. Isnard, secrétaire, donne lecture d'une lettre des administrateurs composant le directoire du département du Nord, par laquelle ils rendent compte des divers arrêtés pris relativement à la circulation des grains.

« Monsieur le Président.

« Nous n'avons négligé aucun des moyens qui pouvaient assurer la libre circulation des grains, et empêcher que l'on ne puisse en porter à l'étranger; les mesures que nous avions adoptées semblaient ne devoir laisser aucun sujet d'inquiétude; cependant, nous avons vu avec douleur, qu'elles n'ont pas toujours suffi à dissiper les alarmes qui s'étaient emparées des esprits et se renouvellent en ce moment. Elles semblent se fortifier par le renchérissement survenu dans le prix des grains. Il est déjà résulté des désordres tant dans le département du Pas-de-Calais que dans le nôtre, et ils auraient certainement des suites funestes si nous ne cherchions à les arrêter dans leur principe. Ce sont ces considérations qui nous ont portés, Monsieur le président, à nous réunir à l'administration du département du Pasde-Calais, pour solliciter l'Assemblée qu'elle veuille bien nous autoriser à adjoindre un second commissaire à celui qui a été établi à Dunkerque pour surveiller le transport des grains dans l'intérieur du royaume, et empêcher qu'il ne puisse s'en exporter à l'étranger; indépendamment de ces commissaires, il nous a paru aussi nécessaire d'en établir dans quelques autres villes. Ces précautions, et celles qui sont indiquées par les arrêtés dont nous joignons ici copie, sont indispensables pour ramener la tranquillité; nous avons lieu d'espérer, M. le Président, que vous les approuverez, et que vous voudrez bien engager l'Assemblée nationale à s'occuper de cet objet important, et à rendre le plus tot possible le décret que nous sollicitons à cet égard.

"Nous sommes, avec respect, Monsieur le Président, etc.

Signé Les ADMINISTRATEURS Composant le directoire du département du Nord. »

M. Gossuin. Je demande le renvoi aux comités de commerce et d'agriculture réunis pour qu'ils nous fassent à jour fixe, un rapport, sur les subsistances.

M. Laureau. Ces mesures ont besoin d'une extension assortie à l'importance de la demande, et à l'intérêt du sujet, car il s'agit de l'approvisionnement des villes et des provinces, situées sur les côtes de la mer. Le ministre dans son rapport vous a exposé que les provinces du Midi étaient dans un grand état de disette, que celles du Nord étaient dans l'abondance'qui résulte d'une riche récolte, et que l'intérieur du royaume était dans un état tel qu'il pouvait se passer des secours des deux autres parties. Dunkerque, cet entrepôt des grains des provinces du Nord, effrayé de la multiplicité des demandes qui lui venaient du Midi, et sentant l'impuissance d'y satisfaire, a eu recours à vous, et a imploré les moyens dont se servent la sagesse et la prévoyance pour multiplier les subsistances, et les concentrer dans un pays qui est menacé d'en manquer, et que les craintes agitent, il vous a proposé de donner des primes. On vous a proposé, il y a deux jours, de renvoyer aux comités d'agriculture et de commerce une motion qui avait été faite au sujet de la ville de Nantes: elle tendait, comme celle du département du Nord, à aviser aux moyens de rétablir l'abondance des grains dans le royaume, par le moyen des primes, on sait que c'est le seul moyen d'attirer les grains de l'étranger, d'établir l'équilibre des grains entre les différentes contrées maritimes, et de les faire concourir à leur prospérité et au bien du genre humain. Ainsi j'appuie la motion du renVoi aux comités d'agriculture et de commerce, pour qu'ils aient à nous présenter un projet de décret dont la prudence fasse cesser nos inquiétudes et ramène l'abondance dans tous les pays de disette.

M. Broussonnet. Vos comités d'agriculture et de commerce se sont réunis pour cet objet, et ils vous en feront le rapport général incessamment.

(L'Assemblée décrète le renvoi de la lettre du directoire du département du Nord aux comités de commerce et d'agriculture réunis.)

Un membre: Je propose que tous les marchés de blés soient prohibés à la distance de trois lieues des frontières.

(L'Assemblée renvoie l'examen de cette motion aux mêmes comités.)

M. le Président. D'après votre décret d'hier, le roi a nommé deux commissaires pour assister au tirage des quatre grands juges du tribunal de la haute cour nationale (1). Ils sont arrivés et attendent vos ordres. Voulez-vous que je les fasse entrer. (Oui! oui!)

(L'Assemblée décide que les commissaires seront introduits.)

MM. Duveyrier et Bertholio, commissaires du roi, sont introduits. Ils remettent leurs pouvoirs et prennent place sur les sièges des mínistres.

M. Lemontey, secrétaire, fait lecture de leurs pouvoirs.

"Commission de M. Duveyrier.

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sieur Duveyrier, secrétaire général du département de la justice, salut:

« L'Assemblée nationale, ayant par son décret du 12 novembre, décrété que dans la séance du lundi suivant, il serait procédé en présence de vos commissaires à la nomination des quatre juges du tribunal de cassation qui doivent remplir les fonctions de grands juges, il est nécessaire que nous fassions choix de deux personnes.

"A ces causes, connaissant votre zèle, et bien informé que vous êtes digne de notre confiance, nous vous avons commis et député, vous nommons, commettons et députons pour, conjointement avec le sieur Bertholio, être présent à la nomination des 4 juges du tribunal de cassation qui doivent remplir les fonctions de grands juges. Vous donnons à cet effet pouvoir et mandement spécial par ces présentes. En foi de quoi nous avons signé et fait contresigner les présentes, auxquelles nous avons fait apposer le sceau dé l'Etat.

« Donné à Paris, le vingtième jour de novembre, l'an de grâce 1791, et de notre règne le dixhuitième.

Par le roi :

Signé LOUIS.

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:

M. le secrétaire donne lecture d'une commission analogue de M. Bertholio, substitut du commissaire du roi.

M. le Président. Je crois, Messieurs, d'après le décret de l'Assemblée constituante, que l'Assemblée doit être présidée par son doyen d'âge.

"

M. Guadet. Je demande la permission de donner là-dessus une explication. Il avait paru douteux, d'après le texte de la loi, si ces mots : doyen d'âge », se rapportaient ou au doyen d'âge de l'Assemblée nationale, ou au doyen d'âge des quatre juges du tribunal de cassation. M. Camus est venu hier au comité de législation avec le manuscrit original de la loi, qui porte que le doyen d'âge des 4 grands juges sera le président de la haute cour nationale. Il est arrivé cependant, Messieurs, que, lorsqu'on a imprimé le décret, on lit seulement les mots « le doyen d'âge présidera». Vous voyez que, d'après le texte original, il n'y a pas de doute que ce ne soit le doyen d'âge des 4 grands juges. (Oui! oui!)

Un membre: Je demande que l'on procède au tirage, parce que l'on ne peut pas continuer la délibération en présence des commissaires du roi, qui sont ici seulement pour le tirage.

(L'Assemblée décrète qu'elle va procéder au tirage, et qu'elle suspend toute délibération.)

(Un huissier apporte sur le bureau une boîte de carton, percée au-dessus, et disposée en forme de tronc.)

M. Lemontey, serétaire. Messieurs, le tribunal de cassation est composé de 42 juges nommés par les départements, qui ont été tirés au sort dans l'Assemblée constituante. Nous n'avons pas sous les yeux la liste nominale de ces 42 juges, mais nous avons celle des départements. En conséquence, au lieu de mettre le nom des juges fournis par chacun des départements, on a mis le nom du département lui-même. Le résultat sera parfaitement égal.

M. Fauchet. Monsieur le Président, voulezvous demander à MM. les commissaires s'ils n'ont pas d'objections à faire sur cette façon de procéder.

19

M. le Président. Messieurs les commissaires, avez-vous des réclamations à faire sur ce mode? M. Duveyrier, commissaire du roi. Je demanderai à l'Assemblée si son intention est de faire participer au tirage au sort ceux des juges du tribunal de cassation qui siègent aujourd'hui dans l'Assemblée.

Un membre: J'observe que ceux des membres de l'Assemblée qui font partie du tribunal de cassation sont en état de suspension tant qu'ils ont le titre de représentants du peuple français. Ils ont d'ailleurs des suppléants.

Plusieurs membres : Consultez l'Assemblée.

(L'Assemblée décide que si le sort appelle à la place de grand juge un juge du tribunal de cassation, qui se trouve membre de l'Assemblée nationale, il sera remplacé, dans ses fonctions de grand juge, par son suppléant à la place de juge du tribunal de cassation.)

Un membre: Nous venons d'entendre que M. Berholio est l'un des commissaires; je demande si, d'après la Constitution, un ecclésiastique peut être nommé commissaire du roi... (Murmures.)

Voix diverses: Oui! oui! - Non! non! L'ordre du jour !

Un membre: J'observe que ce choix du roi ne contredit aucune loi constitutionnelle.

(L'Assemblée, consultée, passe à l'ordre du jour.)

M. Gundet, secrétaire, compte les 42 bulletins et les met dans la boîte.

M. Lemontey, secrétaire, tire par l'ouverture de la boite quatre bulletins.

MM. les commissaires du roi examinent successivement les bulletins.

M. le Président. Voici les noms des départements sortis La Vienne, la Meuse, l'Aude et la Manche.

En conséquence, je proclame pour grands juges de la haute cour nationale :

MM. Creuzé de la Touche, pour le département de la Vienne,

Marquis, pour le département de la Meuse,
Albaret, pour le département de l'Aude,
Caillemer, pour le département de la
Manche.

M. le Président, s'adressant aux commissaires du roi. Messieurs, vous pouvez vous retirer. On dressera procès-verbal du tirage au sort, et on vous avertira du moment où vous pourrez le signer.

(MM. les commissaires du roi se retirent.)

M. le Président. Le décret que vous avez rendu hier vous appelle dans vos bureaux pour nommer les deux grands procurateurs de lanation qui doivent remplir les fonctions d'accusateurs publics auprès de la haute cour nationale. (L'Assemblée se retire dans les bureaux et rentre en séance à une heure et demie.)

MM. Koch et Brua demandent la parole. M. le Président. Je vais consulter l'Assemblée pour savoir à qui elle veut accorder la parole.

M. Koch. Le rapport que j'ai à vous lire est aussi court qu'urgent. D'ailleurs, ce que M. Brua doit faire connaitre à l'Assemblée ne servira qu'à démontrer combien il est urgent de prendre les mesures que je vais vous proposer au nom du comité diplomatique. Vous avez chargé votre co

mité diplomatique, par l'article 44 de votre décret sur les émigrés, de vous proposer sous trois jours les mesures à prendre vis-à-vis des puissances étrangères qui souffrent sur leur territoire des rassemblements suspects. Votre comité a répondu avec zèle aux ordres qui vous lui avez donnés; c'est à sa réquisition que vous avez fixé définitivement au 17 de ce mois, le rapport qu'il doit vous faire. Il n'est pas nécessaire de vous dire que la sûreté des frontières et le salut de l'Empire dépendent de la justesse et de la célérité des mesures que vous prendrez à cet égard. Depuis 8 jours, je fais de vains efforts pour obtenir la parole. Je prie l'Assemblée de décider quand elle voudra m'entendre.

(L'Assemblée décide que M. Koch sera à l'instant entendu, et que M. Brua aura la parole après lui.)

M. Koch, au nom du comité diplomatique (1). Messieurs, par l'article 14 de votre décret du 8 de ce mois, vous avez chargé votre comité diplomatique de vous proposer des mesures à prendre relativement aux puissances étrangères limitrophes, qui souffrent sur leur territoire les rassemblements des Français fugitifs.

Le comité a cru mieux remplir vos intentions en vous rendant compte en même temps des renvois que vous lui avez faits par vos décrets antérieurs des 27 et 28 octobre dernier, de l'adresse de la municipalité de Strasbourg, de celle de plusieurs citoyens, amis de la Constitution, de celle du directoire du département du Bas-Rhin, toutes relatives à ces mêmes rassemblements, ainsi qu'aux violences que des Français fugitifs ont exercées sur le territoire de l'Empire contre des Français patriotes.

Il résulte, Messieurs, de ces différentes adresses des procès-verbaux et des pièces justificatives, dont elles sont accompagnées, qu'il existe toujours un foyer de contre-révolution sur nos frontières, qu'il est formé d'une foule de Français transfuges, fomentés et entretenus par quelques princes étrangers, et par les ennemis de la Révolution en dedans; qu'il y a dans les terres de l'évêché de Strasbourg, de l'autre côté du Rhin, un petit corps de troupes d'environ 600 hommes, commandé par le sieur Mirabeau, et connu sous le nom d'armée des noirs; qu'il y a pareillement aux environs de Worms et sur les terres de l'électeur de Mayence de nombreux rassemblements de Français transfuges, sans armes, sous les ordres immédiats du ci-devant prince de Condé; que la même chose s'observe à Coblentz et aux environs de cette ville, dans l'électorat de Trèves, où les princes français ont établi leur siège; que la rage de ces ennemis de la Constitution les porte à des violences de toutes espèces, qu'ils se permettent à chaque instant contre des citoyens français patriotes que le soin de leur négoce et leurs affaires particulières attirent journellement en Empire; que c'est principalement sur les terres dépendant de l'évêché de Strasbourg, de l'autre côté du Rhin, et contre des citoyens de la ville de Strasbourg, connus par leur zèle pour la Constitution française, que ces excès se commettent avec le plus grand scandale et le plus d'audace; qu'ils sont consignés dans les procèsverbaux des 10 et 11 mai, et du 10 octobre dernier, qui se trouvent joints à l'adresse de la municipalité de Strasbourg, et à celle du directoire du département du Bas-Rhin; que, dès le mois de

4) Bibliothèque de la Chambre des Députés : Collection des affaires du temps, Bf. in-8° 16%, tome 148, n" 31.

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