Page images
PDF
EPUB

semblée nationale l'état nominatif de tous les militaires qui ont abandonné leur poste sans congé ou démission, avec désignation du corps où ils servaient, du grade qu'ils occupaient, et de l'époque de leur départ; il lui fera parvenir aussi l'état nominatif de ceux qui sont et seront admis au remplacement, avec la date de leur admission, et les originaux des certificats qu'ils ont produits. »

M. Brissot de Warville. Je combats cet article, car je soutiens qu'une pareille liste, qui ne manquera pas d'être imprimée, sera un véritable signe de proscription, et un moyen de perpétuer les haínes et les divisions. (Applaudissements.)

Un membre: Je demande l'ajournement de la discussion, d'autant plus que nous ne sommes pas en nombre suffisant pour rendre un décret. (L'Assemblée prononce l'ajournement de la discussion.)

(La séance est levée à dix heures.)

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

Séance du mercredi 23 novembre 1791. PRÉSIDENCE DE M. VIÉNOT-VAUBLANC.

La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture des procèsverbaux des séances du mardi 22 novembre, au matin et au soir.

Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une adresse de Louis Alexandre Roger, ci-devant grenadier du 6o régiment d'infanterie, qui se plaint de n'avoir pu encore obtenir justice d'une tentative d'assassinat commise sur sa personne par un officier du même régiment, pendant qu'il était de service et en faction dans la place de Charlemont. (L'Assemblée renvoie cette adresse au comité militaire.)

L'Assemblée ajourne à la séance de samedi soir la discussion du projet de décret présenté par M. Koch, au nom du comité diplomatique, dans la séance d'hier, discussion qui avait été primitivement renvoyée à la séance du vendredi (1).

M. Fauchet. Messieurs, dans plusieurs villes, on n'a pas fait de circonscriptions de paroisses; cependant, il a été nécessaire que les évêques se conformassent aux décrets et organisassent leur conseil; moi, par exemple, j'ai dù nommer, avant de venir ici, un premier vicaire pour tenir ma place. Je propose, en conséquence, le projet de décret suivant pour première lecture:

L'Assemblée nationale, considérant que les évêques, pour obéir au décret, ont dù ne pas négliger l'organisation de leur conseil, décrète qu'à défaut de circonscriptions et de réunions de paroisses des villes épiscopales, dans les trois premiers mois, depuis la nomination légale des évêques, les premiers et seconds vicaires nommés par eux, et légalement installés, conserveront leurs places, sans que les curés dont les paroisses seront réunies dans la suite à celle de la cathédrale puissent requérir dans le conseil

(1) Voir ci-dessus, séance du 22 novembre 1791.

de l'évêque, que celles qui s'y trouveraient vacantes lors de cette réunion. »

Plusieurs membres: C'est juste! C'est juste! D'autres membres: Le renvoi au comité de division !

(L'Assemblée renvoie ce projet de décret au comité de division.)

M. Barris fils. Les nouvelles des provinces méridionales nous annoncent qu'il y règne la plus affreuse misère. Les récoltes ont totalement manqué. Les denrées de première nécessité y sont déjà à un prix inoui, beaucoup au-dessus de la fortune de quantité de familles indigentes, on est même près d'en manquer. Les ennemis de la Révolution profitent de cette circonstance pour rendre odieuses au peuple les lois qui régissent l'Empire. Ils leur disent: Autrefois les prêtres vous faisaient des aumônes, autrefois les gens riches vous fournissaient un travail qui suffisait à votre subsistance; on les a dépouillés les uns et les autres, on leur a ôté les moyens de soulager vos besoins; ils ne peuvent plus rien pour vous; accusez donc de vos malheurs les nouvelles lois, et jugez la Constitution.

Il est temps, Messieurs, de fermer la bouche à ces ennemis perfides et de faire cesser ces insinuations calomnieuses. Il est temps que l'Assemblée nationale montre à ce peuple qu'elle veut s'occuper efficacement de la classe indigente et infirme.

Je fais donc la motion expresse, que votre comité de secours publics et de mendicité, soit chargé de vous présenter d'ici au 1er janvier prochain, un projet de décret, qui prouve enfin à ce peuple, que les besoins de la classe indigente et infirme sont chers et sacrés à ses législateurs. (Applaudissements.)

M. Beauvais, au nom du comité des secours publics. J'ai l'honneur d'observer au préopinant que le comité des secours s'occupe de cette importante matière. Il a examiné les projets et les plans conçus par le comité de mendicité de l'Assemblée constituante, et il vous présentera bientôt un rapport pour venir au secours des mendiants.

M. Tenon. Si le comité des secours publics n'avait considéré les moyens de soulagement que sous le rapport d'une bienfaisance individuelle, il ne les verrait pas sous le jour qui convient aux administrateurs des fonds qui appartiennent à la caisse nationale. C'est moins encore des moyens de soulager les indigents, que le comité doit s'occuper, que de ceux de diminuer leur nombre. Ce ne peut être l'ouvrage d'un moment. Aussitôt que ce travail sera prêt, nous vous le présenterons. Au surplus, que les départements qui sont en souffrance s'adressent au ministre de l'intérieur. L'Assemblée constituante a décrété des fonds qui sont actuellement entre les mains de ce ministre, et qui peuvent aller jusqu'au mois d'avril prochain.

Un membre: Je demande que l'Assemblée charge aussi le comité de commerce de chercher les moyens les plus prompts pour tirer des subsistances de chez l'étranger.

Quelques membres: Il s'en occupe!

D'autres membres: L'ordre du jour !

M. Delacroix. Passer à l'ordre du jour, c'est désoler l'indigence. Je demande un ajournement prochain.

(L'Assemblée renvoie ces diverses propositions

aux comités des secours publics et de commerce réunis, pour lui présenter, d'ici au 15 décembre prochain, un rapport sur ces objets.)

M. Desbois. Je prie l'Assemblée nationale de vouloir bien ordonner qu'il sera adjoint au comité des secours, 6 commis que la quantité des travaux rend nécessaires.

Je lui demande aussi de vouloir bien avoir égard à la situation d'un malheureux qui s'est déjà recommandé à sa bienfaisance par une adresse, et qui, privé de l'usage de ses bras, est parvenu par un effort de patience et d'énergie à écrire avec sa bouche. Le comité vous prie de décréter qu'on y admettra ce jeune homme comme suppléant. Vous secourerez en cela un individu malheureux et votre bienfaisance ne sera pas stérile.

(L'Assemblée accorde ces deux demandes.)

M. Brua. Voici, Messieurs, un projet de décret à renvoyer au comité de législation :

«L'Assemblée nationale, instruite que quelques administrateurs de département et de district se permettent de déclarer qu'ils ne concourront pas à l'exécution de certaines lois, considérant que, dans un aucun cas, un administrateur qui a juré de remplir ses fonctions, ne peut, sous aucun prétexte, se refuser de les remplir sans entraver la marche de la chose publique,

« Décrète que tout membre des corps administratifs, municipalités et tribunaux, qui déclarerait ou aurait déclaré ne vouloir concourir à l'exécution des lois quelconques, ainsi que ceux qui, après réquisition, et sans cause légitime, jugée par leurs corps, affecteraient de ne point paraître aux délibérations ou de s'en retirer, seront censés avoir renoncé à leurs fonctions'; en conséquence, le directoire du département est autorisé à les suspendre de leurs fonctions, jusqu'à remplacement définitif, à charge d'en rendre compte, sur-le-champ, au pouvoir exécutif.

(L'Assemblée renvoie ce projet au comité de législation.)

M. Isnard, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes:

Lettre de M. Bertrand, ministre de la marine qui demande l'adjonction de deux autres commissaires aux deux commissaires du roi nommés pour se transporter aux les de France et de Bourbon; cette lettre est ainsi conçue :

་་

« Monsieur le Président,

« Lorsqu'il a été question de s'occuper des instructions à donner aux deux commissaires civils dont l'Assemblée constituante a décrété l'envoi aux îles de France et de Bourbon, il a été reconnu que la tâche qu'ils avaient à remplir serait au-dessus des forces de deux personnes qui d'ailleurs ne pourront pas parcourir, en moins de trois à quatre ans, la carrière qui leur est ouverte. En effet, dans le même temps qu'ils s'occuperont de l'arrangement des affaires très compliquées des deux îles, il faudra encore que, profitant de la saison favorable, ils se rendent vers le mois de juillet à Pondichéry, d'où l'un d'eux se transportera à Chandernagor, et qu'après un séjour de trois ou quatre mois dans l'Inde, ils reviennent à l'île de France pour y reprendre la suite des opérations qui les occuperaient très longtemps, s'ils étaient obligés de passer successivement d'une île à une autre, ils pourraient être d'ailleurs dérangés par le seul fait de la mort ou de la maladie grave de l'un des deux commissaires; car à

une grande distance, on ne pourrait y apporter qu'un remède très tardif.

« Ces inconvénients disparaîtraient si, pour une mission qui doit embrasser tous les établissements français du cap de Bonne-Espérance, le nombre des commisaires était doublé. Alors, les quatre commissaires arrivant à l'île de France au mois d'avril examineraient ensemble les objets principaux de leur mission. Deux en partiraient au mois de juin pour aller exécuter dans l'Inde les opérations projetées, pendant que les deux autres s'occuperaient des détails relatifs aux deux îles; ils setrouveraient ramenés à l'île où ils continueraient leurs travaux, et ils seraient de retour après une absence de 18 mois au plus. Je vous príe, Monsieur le Président, de vouloir bien communiquer à l'Assemblée nationale ces observations sur lesquelles il paraît très instant de la déterminer à donner ses intentions, d'autant plus que les dernières nouvelles de l'ile de France annonçaient que les affaires y sont dans une crise qui, chaque jour, devient plus inquiétante. »>

«Je suis avec respect, Monsieur le Président, etc.

[merged small][ocr errors]

Signé: BERTRAND. Plusieurs membres : Le renvoi au comité colonial !

(L'Assemblée renvoie cette lettre au comité colonial.)

Lettre de M. Duport, ministre de la justice, qui annonce l'élargissement des deux personnes arrêtées dans le département de la Côte d'Or, par suite du décret d'accusation contre le sieur Vårnier et ses complices. Cette lettre est ainsi conçue:

« Monsieur le Président,

« Je vous envoie une lettre du procureur-syndic du département de la Côte-d'Or qui m'annonce qu'on a arrêté hier M. Noireau; mais une indisposition assez grave me condamne au lit pour quelques jours, et je ne puis que transmettre à l'Assemblée nationale la copie de cette lettre. Je profite également de cette occasion pour apprendre à l'Assemblée que j'ai expédié dans les 24 heures, par un courrier extraordinaire, à M. le procureur général syndic du même département, le décret rendu dimanche, qui ordonne l'élargissement des citoyens que la conformité des noms avait exposés à faire le sacrifice momentané de leur liberté. »

« Je suis avec respect, Monsieur le Président, etc. »>

[ocr errors]

Signé DUPORT.

[ocr errors]
[merged small][ocr errors][merged small][merged small]
[blocks in formation]

(L'Assemblée renvoie la lettre et le mémoire au comité de la Trésorerie nationale.)

4 Lettre des administrateurs du département du Calvados qui demandent un secours de 200,000 livres pour subvenir à la subsistance et aux besoins des malheureux dont les campagnes abondent.

M. Cambon. Si nous faisons des dépenses partielles, nous n'aurons jamais de comptabilité. Je demande donc le renvoi au pouvoir exécutif.

M. Fauchet. C'est une chose infiniment urgente. Si vous renvoyez au pouvoir exécutif, c'est abandonner le département. Je demande le renvoi au comité des secours publics.

(L'Assemblée, après deux épreuves douteuses, décrète le renvoi au pouvoir exécutif.)

Lettre de M. Pétion, maire de Paris, qui envoie à l'Assemblée nationale l'état des adjudications auxquelles la municipalité a procédé dans le cours de la semaine dernière. Les estimations étaient de 156,533 livres et les adjudications ont été portées à 183,300 livres.

6 Pétition de M. Dubois, entrepreneur de constructions navales, qui demande des secours.

M. Forfait. Cet objet regarde le ministre de la marine; j'en demande le renvoi au pouvoir exécutif.

(L'Assemblée renvoie cette pétition au pouvoir exécutif.)

Lettre des administrateurs du département du Calvados qui se plaignent de la négligence du ministre de la guerre à fournir des armes aux bataillons de volontaires; cette lettre est ainsi conçue :

Caen, le 21 novembre 1791.

« Messieurs,

"Les citoyens du département du Calvados ont manifesté leur zèle, leur patriotisme et leur courage en formant dans leur sein deux bataillons de volontaires qui sont prêts à verser leur sang pour la défense de la patrie, mais ce zèle reste sans effet par la négligence du ministre de la guerre, qui, depuis leur réunion, au 14 octobre dernier, les a laissés sans armes. Le directoire était instruit qu'il existait encore dans l'arsenal de Caen quelques fusils de réforme hors d'état de servir et même d'être réparés; de concert avec la municipalité, il en a fait distribuer 200 aux volontaires du premier bataillon, mais à titre de prêt, et seulement pour les former à l'exercice, en attendant que le ministre ait rempli son devoir.

«Le directoire, à différentes reprises, a fait à ce ministre la demande formelle de 5,597 fusils qui ont été destinés à ce département; mais cette demande a été éludée sous le prétexte que l'arsenal de Caen ayant été pillé en 1789, il devait exister entre les mains des gardes nationales assez de fusils pour armer les bataillons des gardes nationales volontaires. Il est visible que si on eût adopté la mesure proposée de désarmer une partie des citoyens, c'eût été provoquer la résistance d'hommes libres, qui, après avoir renversé le despotisme, n'ont point cessé, dans le cours de la Révolution, de faire le service le

plus assidu pour le maintien de l'ordre et l'achèvement de la Constitution.

[ocr errors]

Le conseil du département est, de plus, informé que les différentes batteries établies le long des côtes composées chacune au moins de 9 pièces de canon de 24 livres de balles, et munies de 200 livres de poudre, sont la plupart confiées à la garde d'un trop petit nombre d'hommes. Celle de Bourg, située dans un poste important, été jusqu'ici confiée à la garde d'un seul homme, qui n'a pu obtenir d'être secondé ni remplacé, et qui vient de nous adresser ses plaintes à ce sujet.

« Le conseil, en rendant justice au directoire, a cru de son devoir, Messieurs, de vous exposer la négligence coupable du ministre de la guerre, qui compromet ainsi une partie essentielle de l'Empire, une de celles où les ennemis de la patrie ont surtout projeté de lui porter les coups les plus funestes. Vous pèserez dans votre sagesse, Messieurs, les observations dictées, non par l'envie d'attaquer aucun des pouvoirs constitués, mais par le désir sincère de concourir à l'exécution des lois, qui seules peuvent assurer le bonheur commun.

"Nous sommes, avec respect, Monsieur le Président, etc... »

(Suivent les signatures.)

Plusieurs membres : Le renvoi au comité militaire !

M. Lacombe-Saint-Michel. J'appuie ce renvoi; j'entends faire tous les jours des plaintes contre la sûreté de l'Etat, et je les crois fondées sur des craintes bien plus raisonnables.

M. Fauchet. Je suis loin de penser comme le préopinant. La demande que vous faite le département du Calvados mérite la plus grande attention. Il y a, en outre, à demander l'armement des deux bataillons de ce département qui sont sur les frontières. Il faut que le ministre fournisse les 5,000 fusils destinés au département du Calvados, et dont il n'a pas fourni un seul.

M. Delaporte. Je demande que, dans huit jours, le comité nous fasse un rapport sur les moyens d'armer et d'habiller les volontaires nationaux des frontières, car ils sont tout nus et il est dérisoire de voir nos frères hors d'état de se défendre. (Applaudissements.)

M. Cambon. Nos gardes nationales sont la dérision de nos ennemis; celles mêmes qui sont armées n'ont que des mauvais fusils qui crèveront entre leurs mains.

M. Delacroix. Pour jeter un grand jour sur les forces de la nation, le comité militaire a demandé au ministre de la guerre l'état des bouches à feu et des fusils qui sont en France. Le ministre de la guerre l'a fait parvenir au comité, à l'exception de l'état des fusils, parce que, comme il désire que le compte qu'il en rendra soit exact, il prend les précautions nécessaires pour constater l'état des armements qui sont dans les arsenaux, et de ceux dont il a ordonné la distribution. Ce dernier état n'est pas encore arrivé, mais le comité militaire a la certitude qu'il y a 132 bataillons qui, depuis les plaintes qui ont été portées à l'Assemblée nationale, ont reçu leurs armes. Le reste les obtiendra incessamment. D'ailleurs vous vous souvenez que dans un des comptes que le ministre de la guerre vous a rendus, il vous a dit publiquement que toutes les gardes nationales une fois armées, il resterait encore dans vos arsenaux de 50 à

60,000 fusils. Je crois que, depuis ce temps-là, le ministre a pris des arrangements pour repeupler les arsenaux. Il a offert au comité militaire le détail des marchés et des frais qu'il a faits, et il croit qu'il serait impolitique, peut-être imprudent, de les soumettre à l'Assemblée nationale, parce que, comme il est obligé de les tirer des puissances voisines, il pourrait fort bien arriver que la publicité de ces traités en empêchât l'exécution. Je demande le renvoi de la pétition des administrateurs du Calvados au comité militaire.

Un membre: Renvoyer au comité militaire, c'est s'exposer à des longueurs malheureuses. Je demande que la lettre qui vous est adressée soit renvoyée sur-le-champ au pouvoir exécutif.

(L'Assemblée, consultée, renvoit la lettre des administrateurs du département du Calvados au comité militaire.)

M. Isnard, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes :

1o Lettre de M. Bertrand, ministre de la marine, qui demande qu'on règle le sort des anciens officiers des classes de la marine; cette lettre est ainsi conçue :

[ocr errors]

« Monsieur le Président,

« Je crois devoir fixer l'attention de l'Assemblée sur une position vraiment intéressante des officiers militaires des classes qui, se trouvant supprimés, ne jouissent plus depuis le 1er avril des mêmes traitements, et dont les pensions qu'ils avaient obtenues par leurs précédents services à la mer, se trouvent suspendues, de sorte que la plupart sont dénués des ressources nécessaires à leur subsistance. Le ministre avait proposé un moyen provisoire de venir à leur secours, en attendant que leur sort fût définitivement réglé. Je joins ici copie d'une lettre qu'il écrivit le 10 juillet, à ce sujet, au président du comité de la marine, et qui est restée sans réponse. Je vous prie de la mettre sous les yeux de l'Assemblée.

« Je suis, avec respect, etc.

[ocr errors][merged small][merged small][merged small]

«Le directoire du département de l'Hérault, ayant été instruit par la municipalité de Lunel qu'il y avait une grande fermentation dans cette ville, s'est déterminé à y transporter momentanément ses séances. Il a pris, le 6 de ce mois, un arrêté par lequel le maire, les officiers municipaux et le procureur-syndic de la commune, sont provisoirement suspendus de leurs fonctions. Il a sursis en même temps à la prochaine nomination des officiers municipaux et à ordonné que les fonctions municipales seraient provisoirement exercées par des commissaires civils qu'il a nommés. Sur le compte que j'en ai rendu au roi, Sa Majesté a pensé que les états qui étaient annexés aux procès-verbaux et les détails envoyés par le directoire n'étaient pas suffisants, elle a désiré savoir ce qui s'est passé à Lunel avant le transport du directoire du département

en cette ville les motifs qui ont déterminé la suspension de la municipalité, et la relation des faits que les officiers municipaux ont dressée, furent déposés au directoire, ainsi qu'ils l'ont assuré. J'écris au directoire pour le lui demander, et cependant pour satisfaire à l'article 37 de la loi du 27 mars, le roi m'a chargé d'instruire l'Assemblée nationale de la suspension de la municipalité.

« Je suis avec respect, etc.

་་

Signé. DELESSART. » M. Cambon. Cette affaire de suspension de la municipalité de Lunel mérite l'attention de l'Assemblée. Le département de l'Hérault est travaillé par le fanatisme; il ne se passe pas de semaine qu'il n'éclate quelque insurrection, tantôt dans une ville, tantôt dans une autre.

Consultés par le département sur les moyens à prendre pour faire cesser les troubles, nous avons répondu que le seul moyen était dé faire exécuter les lois.

A Montpellier, le directoire du département adopta et voulut faire exécuter un arrêté analogue à celui du département de Paris pour la liberté du culte. Cet arrêté a produit un effet incroyable dans le département. La municipalité de Lunel affecta les sentiments les plus aristocratiques, elle ajouta des lauriers à son écharpe, et insulta aux gardes nationales du département du Gard.

Il est parvenu à votre secrétariat une adresse des volontaires du département du Gard destinés pour les frontières, qui se plaignent de la municipalité de Lunel. C'est une affaire très importante. Il s'agit de décider si le département à eu le droit de suspendre les élections qu'on y devait faire le 11 novembre. Je demande qu'on en fasse le renvoi au comité de division afin qu'il nous en fasse incessamment le rapport.

M. Daverhoult. Le ministre n'a point encore été suffisamment instruit; et je demande si, avant que le ministre ait obtenu les renseignements qu'il demande, nous pouvons ordonner un renvoi qui serait par là même inutile. Je demande donc que le comité ne soit chargé de cette affaire, que lorsque le ministre aura rendu le compte ultérieur qu'il doit à l'Assemblée.

M. Delacroix. Le renvoi n'a aucun inconvénient, car en supposant qu'il n'ait pas tous les éclaircissements nécessaires, il ne nous fera pas son rapport avant que de se les être procurés.

(L'Assemblée décrète le renvoi au comité de division.)

Un membre: Il est malheureux qu'on employe un temps aussi considérable à des lectures dont le résultat est absolument nul. Il faudrait que MM. les secrétaires nous donnassent connaissance de ces objets seulement par extrait.

M. Isnard, secrétaire. Le député nommé par l'ile Bourbon à l'Assemblée nationale, M. Bertrand, réclame contre le délai de l'Assemblée qui ne l'a pas admis, quoique ses pouvoirs eussent été déclarés valables. Il demande à être entendu à la barre pour présenter une pétition et, en outre, un ajournement fixe sur la question de son admission dans le sein de l'Assemblée.

(L'Assemblée ajourne le rapport à dimanche.) Un membre: Je fais la motion que M. Bertrand soit admis à la barre pendant la discussion. (L'Assemblée adopte cette motion.)

M. Isnard, secrétaire, donne lecture d'une let

tre de M. Lafreté qui fait hommage à l'Assemblée d'un manuscrit sur la pétition de M. Clavière (1).

(L'Assemblée ordonne le renvoi de la lettre et du manuscrit au comité de la dette publique.) L'Assemblée se retire à midi dans les bureaux pour procéder au troisième tour de scrutin pour la nomination des grands procurateurs de la nation; à midi et demie l'Assemblée rentre en séance. (Voir le résultat ci-après, p. 313.)

M. Guadet, secrétaire. M. le Président a reçu une lettre apostillée de ces mots : « Affaire instante et de la plus grande importance: affaire

Varnier. » En voici le contenu :

«Monsieur le Président de l'Assemblée nationale,

"

« Le temps d'une grande révolution est la saison du crime. Celui de la vengeance est arrivé, mais le sang innocent ne criera pas contre moi dans le sépulcre constitutionnel, où je suis enterré depuis six mois. J'entends crier une espèce de jugement contre M. Varnier. J'ai frémi! les oracles imposteurs l'auraient-ils déjà condamné! S'il s'agit, comme je le crois fermement de lettres écrites sous le nom Varnier, d'une correspondance avec quelques émigrés au delà du Rhin, et d'un embauchement d'hommes sur les terres de France; connaissez le coupable, je vous le livre, c'est moi-même, c'est moi, législateurs, c'est moi-même qui ne pouvant suffire à tout dans l'exécution des différents grands projets que l'on m'a connus contre la Constitution, j'ai mis tout en œuvre il y a sept ou huit mois, pour égarer la main de l'individu qui m'a représenté constamment sous le nom de Varnier.

D'après cet aveu très positif qui n'a pas besoin de commentaire, j'espère que l'on n'exigera pas que je fasse connaitre l'agent purement passif. Il y aurait de ma part lâcheté, et un homme de mon caractère n'est ni un lâche ni un perfide. Je suis seul criminel envers la loi. Cessez donc de balancer sur des têtes innocentes le glaive de ses vengeances. Ouvrez son livre sacré fermé pour moi depuis si longtemps. Prononcez, commandez à vos bourreaux. Plusieurs apprendront de moi comment il faut mourir.

a Signé Jean-Baptiste POUPART DE BEAU

BOURG. »

Et plus bas :

Bastille nationale, dite prison de l'Abbaye, le 23 novembre 1791. »

M. Lecointe-Puyraveau. Ce qui est contenu dans cette lettre est si extraordinaire, que bien des membres de cette Assemblée, qu'on me passe le terme, ont cru rêver en entendant lire ce qu'elle contient. Je demande donc qu'on en donne une nouvelle lecture. (Non! non!)

M. Basire jeune. Je viens d'apprendre qu'il arrive de mon département des nouvelles qui se lient beaucoup à la lettre que vous venez de recevoir. Je vous prie de suspendre votre délibération sur cette lettre, jusqu'après la lecture des nouvelles qui sont arrivées d'Auxonne. Elles sont arrivées d'hier; j'en reçois l'avis à l'instant. Elles sont entre les mains de la députation de la Côte-d'Or.

M. Navier. Je croyais que M. le Président

(1) Voir aux annexes de la séance, page 319, les observations sur la petition de M. Clavière, par M. Lafreté.

avait déjà reçu les pièces dont M. Basire vient de parler. La vérité est que deux personnes sont arrivées ce matin de Dijon et ont apporté un extrait en forme dont j'ai une expédition. C'est l'extrait d'une déclaration faite à la municipalité d'Auxonne par le particulier qui aurait remis à M. Basire la lettre signée Varnier. Je remets cet extrait sur le bureau. L'objet est d'une telle importance, qu'il me paraît au moins de la justice de l'Assemblée de s'en faire donner lecture. (Oui! oui!)

(L'Assemblée décrète qu'il sera fait lecture des pièces.)

M. Guadet, secrétaire, donne lecture des pièces.

« Par-devant les notaires de Dijon soussignés, est comparu M. Jean Collin, prêtre de cette ville, y demeurant, lequel a déposé pour minute, et pour demeurer ci-joint, l'extrait du registre des délibérations de la maison commune de la ville d'Auxonne, en date du jour d'hier, signé Roussel, secrétaire-greffier; requérant lesdits notaires de lui donner acte dudít dépôt, et de délivrer à qui il appartiendra l'expédition de ladite déclaration, dont acte lui a été octroyé.

Fait et passé à Dijon, le 20 novembre, l'an 1791 après-midi, et a signé avec les notaires soussignés, sur minute des présentes, restée à M. Chenard, l'un d'eux.

"Signé Jean COLIN, prêtre; CHENARD, DILLON, notaires. Enregistré à Dijon. »

[merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]
[ocr errors]
[ocr errors]

« A Monsieur Vollon, serrurier, rue du Bourg, à « Auxonne.

«Ladite enveloppe cachetée d'un cachet aux « trois fleurs de lys, surmontées d'un soleil, ainsi timbrée en rouge: Port payé, Paris. Laquelle lettre et enveloppe j'ai cotées et paraphées en présence dudit sieur Vollon, ne varietur, déclarant ledit sieur Vollon n'avoir aucune connaissance des faits énoncés dans la lettre de mondit sieur Basire, sur tout quoi il m'a requis acte à lui octroyé, pour servir et valoir ce qu'il appartiendra. Ce fait, a signé avec moi, secrétaire-greffier.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

"

[merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][merged small]
« PreviousContinue »