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je tenais de vous, a cru devoir sévir contre MM. Varnier, Noireau et Tardy. Ces trois hommes « sont mis en état d'accusation, et conséquem« ment décrétés de prise de corps pour être livres « à la haute cour nationale qui va être convoquée incessamment. M. Varnier est déjà en prison, « et tous ses papiers ont été saisis. On est à la poursuite de MM. Noireau et Tardy. Cette af« faire fait la plus grande sensation dans Paris. M. Varnier a manqué plusieurs fois d'être mas« sacré.

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"On soupçonne ses complices d'avoir voulu s'en défaire par ce moyen, dans la crainte d'être compromis dans la procédure; mais « l'Assemblée nationale, la municipalité et la garde citoyenne de Paris ont su mettre ses "jours en sûreté. Il est actuellement détenu à « l'abbaye Saint-Germain qui est une prison. Je " ne sais si l'on pourra s'emparer de MM. Noireau " et Tardy; mais, quoi qu'il en soit, leur complot « est découvert, et dès lors il est anéanti.

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Votre nom n'est point sorti de ma bouche; je « n'ai jamais voulu déclarer comment la lettre « de M. Varnier m'était parvenue. J'ai seulement déposé cette pièce intéressante, en disant qu'il « était facile de confronter l'écriture. On l'a fait, « et toutes les apparences sont contre l'accusé. « Voilà la conduite que j'ai tenue à cet égard, « dans la crainte de vous compromettre. La lec«<ture des journaux pourra vous en convaincre. Si vous venez à apprendre quelque chose de nouveau sur cet objet, je vous prie instamment « de m'en instruire.

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« Recevez nos remerciements, bon citoyen, de « ce que vous avez bien voulu me mettre à même «de détruire une aussi infernale conspiration «contre ma patrie. Quand on pense qu'il y avait « autrefois plus de 80,000 employés dans les fermes, que ces hommes étaient pour la plupart, robustes et exercés à faire la guerre à leurs concitoyens, que l'on avait conçu le projet de les rassembler presque tous sur les fron«tières pour renforcer l'armée des princes, l'on doit bénir à jamais l'excellent patriote qui l'a déjoué. Je vous en félicite, et je vous invite à persister dans vos bons sentiments.

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M. Crestin. Messsieurs, l'Assemblée nationale commettrait à mon avis une grande imprudence si elle ne fixait pas un instant ses regards sur les nouveaux incidents que lui présente l'accusation portée contre le sieur Varnier. Il n'est pas douteux que le fil de cette accusation, s'il est bien conduit, devant produire de grandes découvertes et produire de grands exemples, il doit naturellement s'être formé une coalition entre tous les agents qui ont à en redouter les suites, pour sauver non seulement Varnier, mais encore pour jeter un voile sur les yeux dé

la justice. 20 ans de mon expérience m'ont appris que les grands coupables mettaient tout en œuvre pour se tirer d'affaire et plus d'un exemple atteste qu'ils se servaient de l'intermédiaire d'autres grands criminels, qui, n'ayant plus rien à risquer, se chargeaient de leurs crimes. Ne serait-il pas bien naturel dès lors que l'on eût trouvé dans les prisons de l'Abbaye un homme assez criminel pour avoir perdu toute espérance d'absolution et qui eût prêté son nom à Varnier pour assurer que c'est lui-même qui a fait la lettre dont Varnier a reconnu la similitude d'écriture avec la sienne? J'applique cette maxime à la lettre de M. Poupart de Beaubourg. A cet égard, je crois qu'il y a un parti sage à prendre et que l'Assemblée nationale doit adopter sur-lechamp c'est d'envoyer quatre commissaires de l'Assemblée dans les prisons de l'Abbaye afin de faire vérifier 1° S'il y a un M. Poupart de Beaubourg à l'Abbaye: 2° S'il a écrit la lettre qui vient de vous être lue. (Murmures.)

Messieurs, vous ne pouvez disconvenir du principe que vous pouvez entendre tous les témoins et tous les accusés à la barre, lorsqu'il est question de porter un décret d'accusation; vous ne pouvez disconvenir aussi que, lorsque l'accusation est portée, et avant qu'elle soit poursuivie, s'il était possible qu'elle eût été portée mal à propos, la justice ne vous ôte pas le pouvoir, je ne dis pas de la révoquer, mais du moins de la fixer sur les vrais coupables. Il en résulte donc que vous seriez en droit pour vous assurer de la vérité de l'accusation et des personnes, de vous faire amener à la barre ce prisonner prétendu ou véritable, qui, sous le nom de Beaubourg vient de s'accuser lui-même du crime imputé à Varnier. Pour moi, je crois que c'est encore une suite des manœuvres pratiquées par de grands coupables, pour tirer Varnier d'affaire, et pour se mettre eux, derrière la loi. Je suis persuadé par la la longue expérience que j'ai de cette partie que le nommé Vollon qui a dénié son écriture à la municipalité d'Auxonne, ou au moins, qui a dénié l'envoi qu'il a fait à M. Basire de la lettre signée Varnier, est probablement un homme corrompu, séduit, ou bien qu'il existe un autre Vollon qui a véritablement envoyé la lettre.

Un grand nombre de membres : L'ordre du jour ! L'ordre du jour!

M. Crestin. Eh bien, je me rallie à la demande de l'ordre du jour.

M. Delacroix. J'appuie la demande de passer à l'ordre du jour!

M. Dehaussy-Robecourt. Je m'oppose au passage à l'ordre du jour. Lorsque vous avez rendu le décret d'accusation contre le sieur Varnier, vous l'avez rendu sur les indices d'une simple lettre, et je ne vois pas pourquoi on veut passer à l'ordre du jour, lorsque des indices semblables... (Des murmures couvrent la voix de l'orateur.)

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M. Guadet, secrétaire. Voici cette lettre :

« Monsieur le Président.

« J'ai l'honneur de vous adresser une pièce essentielle, sur l'affaire de MM. Varnier, Tardy et Noireau. En conséquence des ordres du département de la Côte-d'Or, 4 personnes ont été arrêtées le mercredi 16 de ce mois et jours suivants : MM. Tardy père, Tardy fils, Noireau, maire de Pontailler, mon mari, et Noireau, receveur à Auxonne, témoin de l'arrestation de mon mari, dont je connaissais l'innocence. Je ne saurais vous peindre quelle fut ma surprise; mais les papiers publics m'ont éclairée, et il est manifeste que MM. Noireau et Tardy fils n'étaient point compris dans le décret du 12, ce qui me fait croire que je ne serai point trompée dans mon espérance, et que le courrier apportera des ordres pour le prochain élargissement de mon mari.

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« Je n'étais pas moins sûre de l'innocence de M. Noireau, receveur à Auxonne, mon beau-frère; et ce qui m'en donna la preuve, c'est le bruit qui se répandit alors qu'un nommé Vollon, serrurier à Auxonne, disait publiquement au reçu d'une lettre de M. Basire, deputé à l'Assemblée nationale, qui le félicitait d'avoir découvert la conspiration de M. Varnier, qu'il était dans le grand étonnement d'avoir reçu une pareille félicitation n'ayant jamais reçu ni envoyé une lettre à M. Basire, député. Aussitôt que ce bruit a été répandu à Dijon, j'ai envoyé à Auxonne une personne de confiance; elle a vu le sieur Vollon, serrurier, qui lui a remis l'extrait de l'acte qui constate le dépôt de la lettre du sieur Basire, et la déclaration qu'il a faite sur le registre de la municipalité d'Auxonne de n'avoir jamais écrit ni envoyé de lettres à M. Basire, député. J'ai déposé cet extrait chez un notaire, afin d'en avoir plusieurs copies. J'ai l'honneur de vous en envoyer une, et je vous prie d'en donner connaissance à l'Assemblée nationale.

« Je suis avec respect, etc...

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Signé COLLIN, femme NOIREAU. »

M. Basire jeune. J'ai déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, non seulement la lettre de M. Varnier, vraie ou supposée, mais encore la lettre de M. Vollon, mon correspondant, lettre qui est actuellement au comité de législation ou aux archives de l'Assemblée nationale: elle est écrite et signée de la même main. Voilà un incident qui ne jette, il faut le dire, aucun trait de lumière dans l'affaire. En effet, les uns peuvent regarder cet incident comme une preuve de l'innocence des accusés, d'autres peuvent le considérer comme une nouvelle preuve contre eux.

La lettre du sieur Poupart est, dans mon opinion, à moi, s'il m'est permis de la développer à l'Assemblée, la plus grande preuve de conviction contre M. Varnier. Je crois que le particulier qui est détenu à l'Abbaye pour avoir fabriqué de faux assignats, et qui se charge du crime dont M. Varnier est accusé, doit être regardé comme un homme qui, n'ayant plus rien à craindre, a pu se laisser séduire; mais c'est à la haute cour nationale qu'appartient le jugement de tout ce qui a rapport à cette affaire; c'est à elle qu'il appartient de vérifier les écritures. La lettre de M. Vollon, que j'ai déposée sur le bureau le 12 de ce mois, est désavouée. Si vous voulez en entendre la lecture?... (Oui! oui!). La voici,

"... Mon compagnon courtise la fille de la veuve Dumont, aubergiste à Auxonne. Il a été la

voir hier soir, elle faisait le lit de M. Noireau qui est parti pour Pontailler. Il a vu sur une table qui est à M. Noireau la lettre jointe à celle-ci. Voyant qu'elle était pour la contre-révolution, il l'a mise dans sa poche, sans rien dire à la fille de la veuve Dumont. J'en ai pris le soir lecture, et j'ai décidé de vous la faire tenir, pour que vous empêchiez l'enrôlement des employés. La lettre a été envoyée par M. Varnier, le receveur de notre grand bureau. Je me suis informé de sa demeure à Paris, afin que vous lui parliez. Il loge à l'hôtel du Grand-Louis, rue de GrenelleSaint-Honoré!

« Je n'ai pas parlé à nos municipaux de la lettre que mon compagnon m'a donnée, dans la crainte qu'ils n'avertissent M. Noireau de cacher ses papiers, que vous ferez bien de faire prendre par le district. Cela vous apprendra les idées de ceux qui sont intéressés à la contre-révolution. Je ne savais pas votre demeure: il a fallu que j'envoie ma lettre à un de mes cousins, qui est un bon patriote. Je lui ai dit qu'il vous la remette à vous-même, en personne. J'ai mieux aimé qu'il m'en coûte quelques sous pour affranchir ma lettre et être sûr qu'elle vous sera apportée, car la lettre de M. Varnier est bien traitre à la nation.

J'ai l'honneur, d'être, etc.

Signé VOLLON. »

A la lecture de cette lettre, j'ai mûrement réfléchi et je me suis demandé pourquoi un homme se serait exposé à porter sa tête sur l'échafaud pour le plaisir de susciter quelque embarras à M. Noireau. J'ai trouvé dans tous les détails de cette lettre un caractère de vérité qui m'a fait regarder la chose comme certaine, au point de la dénoncer à l'Assemblée nationale. Jusqu'à présent, tous les incidents qui sont survenus dans cette affaire ne détruisent pas ce qui a été dit et ne m'ont pas encore fait changer d'opinion. Je demande que l'Assemblée maintienne son décret et que l'on passe à l'ordre du jour. La justice fera connaître s'il y a un coupable ou non.

M. Guadet. Je demande à faire une observation. Il semble, d'après la lettre du sieur Vollon, qu'il y a doute que la lettre qui a servi de base à l'accusation, ait pu être trouvée chez le sieur Noireau. Mais cet incident ne change pas l'état des choses, puisque le prisonnier de l'Abbaye reconnaît dans sa lettre avoir été en correspondance avec le sieur Noireau. Il ne peut donc rester de doute que cette lettre n'ait été trouvée chez M. Noireau. Je demande que ce mystère soit éclairci par la haute cour nationale et qu'à cet effet toutes les pièces, après avoir été paraphées par le président et les secrétaires, soient déposées aux archives pour qu'elles soient ensuite remises au greffe de la haute cour.

Plusieurs membres: La discussion fermée ! (L'Assemblée ferme la discussion et adopte la motion de M. Guadet.)

M. Voysin de Gartempe, au nom du comité de législation. Messieurs, vous avez ordonné à votre comité de législation de vous présenter la proclamation destinée à annoncer la formation de la haute cour nationale, et de dresser l'acte d'accusation contre les sieurs Varnier, Noireau et Tardy que vous avez mis en état d'accusation.

Le comité a pensé que la proclamation devait être simple et concise pour en indiquer seulement les motifs et rassurer nos concitoyens sur

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notre surveillance contre les conspirateurs. C'est sur cet acte que les hauts jurés doivent juger le fait, et que les juges doivent appliquer la loi. Le crime reproché au sieur Varnier et à ses complices est d'avoir cherché à enrôler des citoyens pour les armer contre la patrie. Votre comité l'a qualifié de crime commis contre la sûreté intérieure du royaume, dont la peine est la mort. C'est d'après ces considérations que le comité a rédigé son projet de proclamation. Le voici :

Proclamation de l'Assemblée nationale pour annoncer la formation de la haute cour nationale.

"Français, l'Assemblée nationale, fidèle au dépôt que vous lui avez confié, veille constamment à la sûreté de l'Etat. Un complot formé contre la liberté publique lui a été dénoncé; 3 hommes nommés Claude Varnier, ci-devant receveur des fermes, Tardy, receveur des douanes aux frontières, et Noireau, de Pontailler, ci-devant receveur du grenier à sei, à Auxonne, sont prévenus d'avoir fait et favorisé des enrôlements des ci-devant employés des fermes, pour aller au delà du Rhin former une armée destinée à porter la guerre dans le royaume. L'Assemblée nationale a décrété qu'il y avait lieu à accusation contre ces 3 particuliers; en conséquence, elle proclame la formation de la haute cour nationale, qui s'assemblera à Orléans le...

« Français, reposez-vous sur les soins de vos représentants. Ils poursuivront sans relâche tous les conspirateurs; ils maintiendront la Constitution; il assureront la liberté; ils feront respecter la souveraineté du peuple et les lois décrétées par l'Assemblée nationale. » (Applaudissements.) Voici l'acte d'accusation :

« L'Assemblée nationale a reçu, le 12 novembre dernier, la dénonciation qui lui a été faite d'une lettre signée Varnier, datée de Paris, le..... A celle-ci était jointe une autre lettre signée Vollon, maître serrurier à Auxonne, adressée à M. Basire, député à l'Assemblée nationale. Ces deux lettres ont été déposées sur le bureau par M. Basire qui a signé l'acte de dépôt. Lecture faite des lettres, il résulte que le sieur Vollon annonce à M. Basire que la lettre signée Varnier a été écrite par M. Varnier, ci-devant receveur des fermes, logé à Paris, hôtel du Grand-Louis, rue de Grenelle-Saint-Honoré et qu'elle a été adressée à M. Noireau de Pontailler, receveur du grenier à sel à Auxonne. La lettre signée Varner contient les indices d'un complot contre la sûreté de l'Etat dont se rendaient coupables les sieurs Varnier, Noireau et Tardy, enrolant sous différents prétextes les ci-devant employés des fermes pour les envoyer au delà des frontières former une armée destinée à attaquer la patrie et à renverser la Constitution.

« L'Assemblée nationale a entendu à la barre de M. Varnier qu'elle avait fait arrêter et qui a dit se nommer Claude Varnier. L'Assemblée nationale a trouvé dans ses réponses et dans l'identité apparente de la lecture de la lettre écrite par le sieur Varnier et des mots que le sieur Varnier a écrits devant elle, des motifs de prévention contre lui et ses complices: elle a décrété qu'il y avait lieu à accusation contre lesdits sieurs Claude Varnier, ci-devant receveur des fermes; Tardy, receveur des douanes aux frontières et Noireau de Pontailler, ci-devant receveur du grenier à sel d'Auxonne, sont prévenus d'attentat contre la sûreté intérieure de

l'Etat, pour avoir fait ou favorisé des rassemblements d'hommes destinés à porter la guerre dans le royaume. Sur quoi, la haute cour nationale, après que l'instruction, suivant les formes juridiques, aura été faite, devra prononcer si les sieurs Claude Varnier, Tardy de Dijon et Noireau de Pontailler ont trempé dans ledit crime, et appliquer la peine portée en pareil cas.

«L'Assemblée nationale décrète que l'acte d'accusation sera déposé au greffe de la haute cour nationale, avec les lettres signées Varnier et Vollon, les réponses faites à la barre par le sieur Claude Varnier aux interpellations qui ont été faites par le président, et les essais d'écritures qu'il a également faits à la barre, ensemble les pièces qui viennent d'être lues.

M. Delacroix. Je crois qu'il faudrait passer sous silence les détails de ces faits-là, qui ne peuvent servir à conviction. Je crois que d'un autre côté si vous voulez parler dans votre proclamation de la comparution du sieur Varnier à la barre, il faut pour rendre hommage à la vérité, que vous disiez que l'Assemblée nationale avait déjà prononcé contre lui le décret d'accusation, et qu'elle l'a suspendu pour l'entendre à la barre. Il faut mettre de l'exactitude dans la relation des faits ou n'en pas parler. Il me semble qu'il faut renvoyer au comité et la proclamation et l'acte d'accusation et en même temps le charger d'examiner s'il convient de joindre aux pièces de la procédure les signatures que le sieur Varnier a faites dans la salle de l'Assemblée.

M. Gérardin. J'appuie la motion faite de renvoyer au comité la rédaction, et j'ajoute que cet acte contient un fait absolument faux; l'Assemblée n'a point fait arrêter le sieur Varnier, et elle connait trop les formes constitutionnelles pour les avoir violées. L'Assemblée nationale a mandé M. Varnier à la barre or, je demande que ce fait-là soit changé, et je demande l'impression du tout, pour que chacun puisse faire des observations sur un acte tellement important.

(L'Assemblée adopte la proposition de M. Delacroix, et en conséquence, envoie la proclamation et l'acte d'accusation au comité de législation pour présenter une nouvelle rédaction.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse du directoire du département des BassesPyrénées, ainsi concue :

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Chaque jour accroît le danger et échauffe le fanatisme. Les curés remplacés refusent de céder la place aux prêtres constitutionnels: lisez la lettre incendiaire du curé d'Arudy: nous le dénonçons à l'accusateur public. Nos curés n'écrivent pas, mais ils agissent, ils épouvantent les faibles, ils séduisent et effraient les municipalités. Prononcez, Messieurs, le salut de la France est en vos mains. Maintenez la Constitution, ou préparez vous a toutes les horreurs de la guerre civile. « Nous sommes,

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etc.

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M. le Président. Voici le résultat du troisième tour de scrutin pour l'élection des deux grands procurateurs de la nation. Sur 373 votants M. Garran-de-Coulon a obtenu 233 voix, M. Pellicat a réuni 140 suffrages; en conséquence, M. Garrande-Coulon ayant seul obtenu la majorité je le proclame grand procurateur de la nation.

Il y aura lieu de procéder à un nouveau tour

de scrutin pour l'élection du deuxième grand procurateur.

L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les troubles occasionnés par les prêtres non assermentés.

Un membre: Je fais la motion de statuer sur le reste du projet de décret concernant les troubles religieux, sans désemparer.

Plusieurs membres: La question préalable! (L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette motion.)

M. François de Neufchâteau, rapporteur. Avant de passer à la lecture de l'article 16, je supplie l'Assemblée de me permettre des observations très succinctes. Je vais vous proposer quelques dispositions que je crois nécessaires, non pour ressusciter les articles 13 et 15 qué vous avez rejetés (1), mais pour y suppléer, afin que la chaîne qui lie toutes les parties de votre décret ne soit pas rompue d'une manière nui

sible à son exécution.

Sur l'article 13, quoique la formation du Corps législatif en comité général ait offusqué plusieurs membres, il est cependant nécessaire de prendre une résolution à propos des listes qui seront envoyées par les départements. Ce n'est pas assez de demander aux départements des listes et des arrêtés, comme l'Assemblée constituante l'avait ordonné, par son décret du 18 mars, si l'on n'annonce en même temps l'usage qu'on en fera, le délai dans lequel on en fera usage, et les précautions qu'on prendra pour que ces lois soient exécutées, c'est pourquoi je propose l'article suivant qui deviendrait l'article 13.

"A mesure que ces procès-verbaux, listes et arrêtés seront adressés à l'Assemblée nationale, ils seront remis au comité de législation, pour en faire un rapport général et mettre le Corps législatif à portée de prendre un dernier parti, afin d'extirper la rébellion qui se déguise sous le prétexte d'opinions prétendues religieuses. Dans un mois, le comité présentera le tableau des administrations qui auront satisfait aux articles précédent, et proposera les mesures à prendre contre celles qui seront en retard de s'y conformer. »

M. Thuriot. La raison qui a déterminé le comité à réveiller l'article 13 est celle-ci : c'est que l'on réservait très expressément de prendre des mesures ultérieures, ce qui était une déclaration formelle d'insuffisance dans la loi. Je demande que ces expressions ne se retrouvent point dans le nouvel article que nous propose le comité. J'admets que l'on exige, conformément au douzième article, que les districts nous envoient les tableaux, que l'on fasse ensuite passer ces tableaux au comité de législation, mais qu'on se borne à dire que le comité de législation en fera son rapport et que les fonctionnaires qui n'auront pas fait exécuter la loi seront poursuivis et punis. Voici comment je propose de rédiger cet article :

«Si des corps ou des individus revêtus de fonctions publiques négligent ou refusent d'employer les moyens que la loi leur confie pour prévenir ou pour réprimer une émeute, ils en seront personnellement responsables. Ils seront poursuivis, jugés et punis conformément à la loi du 3 août 1791. »

(L'Assemblée, consultée, adopte la rédaction de M. Thuriot, qui devient l'article 13.)

(1) Voy. ci-dessus, seance du 21 novembre 1791.

M. Chéron-La-Bruyère. Je demande que l'Assemblée ne reçoive de liste que par l'intermédiaire du pouvoir exécutif. (Murmures.)

(Cette motion n'a pas été mise aux voix.)

M. Delacroix. Je voudrais qu'il fût donné aux administrations de district un temps suffisant pour former ces états et ensuite les faire passer au département, qui, après en avoir fait un état général, le ferait passer à l'Assemblée nationale; et je voudrais qu'on autorisât les directoires dé département à envoyer, aux frais de l'administration de district, un commissaire chercher ces états pour les aider à les faire s'ils ne les avaient pas faits, ou envoyer... (Murmures.)

(Cette motion n'a pas été mise aux voix.)

M. François de Neufchâteau, rapporteur. Quant à l'article 15, sans avoir la prétention d'opposer le regret que cet article peut m'inspirer au parti qu'a pris l'Assemblée, je la prierai d'adopter dans la loi la disposition suivante :

Indépendamment du projet de décret sur le mode civil de constater l'état des personnes, dont s'occupe en ce moment le comité de législation, il s'occupera de la revision des décrets de l'Assemblée nationale constituante des 12, 24 juillet et 27 novembre 1790, concernant l'exercice... (Murmures prolongés.)

Plusieurs membres : La question préalable!

M. François de Neufchâteau, rapporteur. Si l'article ne vous convient pas, vous le proscrirez, mais laissez-en achever la lecture.

Un grand nombre de voix : Non! non! La question préalable!

M. François de Neufchâteau, rapporteur. En ce cas, je renonce à mon article, et je vais lire l'article 16 qu'il vous reste à décréter et qui est ainsi conçu:

"Au moyen des dispositions précédentes, il ne pourra plus y avoir aucune dissidence réelle en ce royaume dans l'exercice du culte catholique; et comme il importe surtout d'éclairer le peuple sur les pièges qu'on ne cesse de lui tendre à ce sujet, l'Assemblée nationale exhorte tous les bons esprits à renouveler leurs efforts et à multiplier leurs instructions contre le fanatisme. Elle déclare qu'elle regardera comme un bienfait public les bons ouvrages à la portée des citoyens des campagnes, qui lui seront adressés sur cette matière importante; et, d'après le rapport qui lui en sera fait, elle fera imprimer et distribuer ces ouvrages aux frais de l'Etat et récompensera leurs

auteurs. »

M. Lemontey. Avant cet article 16, j'ai imaginé un article qui sera une sorte d'adresse au peuple et qui sera certainement lu, car il est renfermé en quatre lignes. Il intéresséra le peuple à ne pas persécuter. Il est tel qu'il assurera la plus grande tolérance et dégoûtera de leurs projets ennemis les prêtres négatifs. Car, plus nombreux seront ceux qui refuseront le serment, plus le peuple sera content, plus l'Etat sera tranquille. (Murmures.) Cette adresse, cette mesure vraiment politique, répressive et pacifiante, est renfermée dans l'article suivant :

Il sera fait un état de tous les ecclésiastiques qui n'auront pas prêté le serment, et composé une masse des traitements et pensions dont les aura privés leur refus de serment, lesquels traitements et pensions seront dans les proportions des contributions foncière et mobilière répartis entre les 83 départements, qui les feront distribuer par les municipalités aux citoyens indigents.» (Une

grande partie de l'Assemblée et les tribunes applau- | dissent; les acclamations se prolongent pendant plusieurs minutes.)

Plusieurs membres : Une seconde lecture!

M. Lemontey fait une seconde lecture de l'article qu'il propose.

Un grand nombre de membres: La priorité pour l'article de M. Lemontey!

acquérir; elle est donc parfaitement inutile. Je conclus à ce que la liste générale des prêtres non assermentés soit supprimée.

M. Guadet. Il y a des vérités si évidentes, qu'elles doivent saisir tous les esprits, et ne laisser place à aucun doute, ni incertitude. Et de ce nombre est celle que vous a présentée M. Lemontey. Son projet est à la fois fondé en justice et en politique. En justice, parce qu'il faut nécessairement que quelqu'un profite de la sup

M. Gérardin. Je demande à parler contre l'article profondément immoral de M. Lemontey.pression de ces pensions qui ne seront plus (Murmures.)

Plusieurs membres: Aux voix la priorité! (L'Assemblée, à la presque unanimité, accorde la priorité à l'article de M. Lemontey.)

M. Basire jeune. Je demande l'ajournement de l'article de M. Lemontey, et j'observe que cet article a besoin d'être profondément discuté. Indépendamment de ce qu'il accoutumerait les citoyens à bénéficier sur le nombre des mauvais citoyens, il est mauvais dans son exécution; il est absolument essentiel de le méditer. Je sais qu'il est brillant, j'en ai été ébloui moi-même; mais j'ai besoin d'y réfléchir, et nous en sentirons mieux le bon effet.

M. Gérardin. L'Assemblée nationale, en ordonnant à tous les ecclésiastiques de prêter le serment civique, doit croire que tous s'y conformeront. D'abord, elle ne doit pas, en réduisant des citoyens à la misère la plus profonde, vouloir en enrichir d'autres à leurs dépens. (Exclamations et murmures prolongés.) Je dis que c'est une mesure qui peut être digne de la politique de Machiavel, mais qui est très immorale et très injuste. Je parle contre un article additionnel qui ferait désirer au peuple français, s'il était moins généreux, de voir des citoyens réduits à la misère la plus profonde. C'est faire injure au peuple. Il restituerait sans doute à ces citoyens malheureux une partie de la pension que vous leur ôtez; et certes, ces citoyens que vous dépouillez seraient les premiers qui auraient droit à ces aumônes. Je demande donc que la proposition de M. Lemontey soit repoussée par la question préalable.

Plusieurs membres: L'ajournement !

M. Lemontey. Je demande à appuyer mon article.

Plusieurs membres: Cela n'est pas nécessaire. M. Delacroix. La question préalable sur l'ajournement !

Un membre: L'Assemblée nationale ayant décrété que ces pensions, par le refus de serment, seraient supprimées, la nation trouvera sans doute plus grand de les distribuer à des malheureux que d'en profiter vilainement. (Murmures.) Ce n'est pas cette parcimonie qu'il faut réserver à la nation; et M. Gérardin a eu tort de détourner votre attention des indigents à qui M. Lemontey veut préparer des secours. Mais je trouve que dans son projet il y a une disposition qui devrait en être rejetée, c'est celle de la liste générale des prêtres non assermentés à distribuer dans le royaume; car il doit suffire à l'Assemblée nationale et à chaque département de connaître ceux à qui il faut retirer les pensions; mais il n'est pas nécessaire que la nation en connaisse la quotité.

Plusieurs membres Pourquoi?

Le même membre: C'est qu'elle n'ajoute rien à la masse des pensions et à la certitude que les départements et l'Assemblée nationale veulent

payées à ceux qui refuseront de prêter le serment civique; c'est à la nation que la rentrée doit s'en faire. Or, la nation ne s'honore-t-elle pas, lorsque, rendant en quelque sorte ces pensions à leur véritable destination, elle en fait le patrimoine des indigents. (Vifs applaudissements.)

Cette proposition n'est pas fondée seulement en justice, mais elle l'est surtout en politique. Remarquez que vous avez surtout besoin de séparer le peuple des prêtres qui le trompent et qui le gagnent. Or, vous n'avez certainement pas de moyens plus heureux et en même temps de moyens plus justes pour séparer les intérêts des uns et des autres, que d'attribuer ces pensions aux pauvres à qui elles sont dues. (Applaudissements.) Les pensions des ecclésiastiques, c'est là le vrai but d'instruction qui vous était proposé par l'article 16 du projet de décret. J'appuie donc la motion faite par M. Lemontey. Je désirerais seulement qu'il fût dit par amendement que la distribution des pensions qui ne seront plus payées aux ecclésiastiques quí refuseront de prêter le serment civique portera seucipalités où les prêtres auront refusé de prêter lement sur les départements, districts et munile serment. (Applaudissements.)

M. Reboul. J'appuie la proposition de M. Lemontey et l'amendement de M. Guadet. Il est très bon en politique, et certainement il est de la plus rigoureuse justice et de la moralité la plus pure que vous fassiez du produit de ces pensions la destination qui vous a été proposée. Vous y trouverez encore un avantage, c'est que l'exécution du décret devient extrêmement simple.

Plusieurs membres: Fermez la discussion ! (L'Assemblée ferme la discussion.) Plusieurs membres: L'ajournement !

D'autres membres: La question préalable sur l'ajournement!

(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la motion d'ajournement.)

M. Basire jeune. Au nom du peuple français que l'on veut déshonorer, je demande la question préalable sur l'article.

(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il y a lieu à délibérer sur l'article de M. Lemontey.)

Plusieurs membres: La question préalable sur l'amendement de M. Guadêt !

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement de M. Guadet.)

M. Lagrévol. En laissant l'article tel qu'il est conçu, il faudrait que, tous les ans, nous fissions une opération décroissant à raison du décès de ceux à qui ces pensions sont dues. Je demande que l'Assemblée fixe à quatre ans le terme de cette distribution.

M. Basire jeune. La masse des impositions doit diminuer à raison de la réduction des dépenses publiques, et les dépenses publiques doi

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