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gnes et même par leur silence, paraissaient Improuver leur odieuse conduite; que les factieux se sont portés aux plus grands excès en immolant des citoyens innocents, en soumettant à des contributions révoltantes et arbitraires tous ceux qu'ils croyaient leur être opposés; qu'ils ont pillé les églises et un grand nombre de maisons particulières; qu'ils ont poussé la cruauté et la férocité jusqu'à porter la guerre dans Avignon et dans le Comtat; où l'on rencontre, à tous pas, des traces de vols, de pillages, d'incendies, et des assassinats les plus affreux; que cette guerre si désastreuse n'a cessé que par l'entremise de MM. les médiateurs envoyés au mois de juin dernier, par le roi, d'après un décret de l'Assemblée constituante; que cette médiation a été empêchée de ramener la paix et la tranquillité par des menées perfides et atroces de ces mêmes factieux qui avaient conspiré contre la chose publique; que le 31 août dernier, la municipalité aurait été en partie emprisonnée et en partie déposée par les agents de ces scélérats; qu'ils auraient mis le comble à toutes leurs horreurs par les malheurs qu'ils ont ordonnés et fait exécuter le 16 octobre dernier et jours suivants, d'abord sur plusieurs prisonniers détenus sans ordre depuis le 21 août, et parmi lesquels on compte 4 officiers municipaux et plusieurs notables, et une foule de citoyens de tout âge et de tout sexe; que la ville d'Avignon était à la veille d'essuyer les plus grands malheurs, et de voir égorger tout ce qui restait de citoyens honnêtes, si les troupes de ligne, et ensuite MM. les commissaires civils, dont le patriotisme et la sagesse, généralement reconnus, n'eussent prévenu, par leur arrivée, tous les maux dont nous étions encore menacés; qu'après avoir épuisé tous les genres d'infortunes, et avoir répandu les larmes les plus amères sur le sort des malheureuses victimes tombées sous les coups des barbares, et il est bien naturel de se laisser aller au doux sentiment de joie et de reconnaissance envers l'Assemblée nationale et le roi des Français, qui ont tendu une main secourable à cette ville dépeuplée, envers MM. les commissaires civils, M. le général, et les braves militaires dont le zèle infatigable et le patriotisme éclairé nous ont rendu la liberté et la paix.

"Considérant, en outre, que la ville d'Avignon a de nouvelles grâces à rendre à l'Assemblée nationale pour avoir, par son décret du 4 courant, rejeté le projet de son comité de pétitions, surpris par les insinuations perfides et les adresses mensongères d'un sieur Rovère, se disant faussement député du peuple avignonnais, individu sans caractère et sans mission; il a été unanimement délibéré :

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duite de MM. Le Scène et Mulot, ci-devant médiateurs entre les peuples d'Avignon et du Comtat; de désavouer à cet effet toutes délibérations, pótitions et adresses injurieuses et calomnieuses, présentées par quelque individu que ce soit, et notamment par le nommé Rovère, qui n'a jamais reçu aucun pouvoir du peuple avignonnais;

4° De témoigner par une députation de deux d'entre les délibérants, à MM. les commissaires civils et aux troupes de ligne, en la personne de M. Choisy, leur général, et des commandants de chaque corps, leur juste sensibilité sur la conduite noble et généreuse qu'ils ont tenue depuis leur arrivée pour rétablir l'ordre et la paix. La dite députation sera chargée, en outre, de remercier MM. les commissaires des ordres qu'ils ont donnés pour s'assurer de la personne de ceux qui ont si horriblement désolé Avignon et le Comtat, et qui viennent tout récemment de se rendre coupables des plus infâmes massacres, et de les prier d'ordonner l'arrestation de tous les prévenus, comme un préalable nécessaire pour consolider la tranquillité de cette ville, de tout le Comtat et des départements environnants, intéressés à la punition exemplaire des hommes atroces qui ont déshonoré l'humanité par des forfaits inconnus jusqu'à ce jour ;

«5° De députer provisoirement, et attendu l'urgence du cas, les sieurs Toilet, Emery et Bergas, conjointement avec M. Duchesne, pour la section de Saint-Pierre; M. Colle, homme de loi, pour la section des Bonshommes; M. Cavalaire, notaire, et M. George, son suppléant, pour la section des Augustins; M. Vernet, pour celle des Célestins; M. Clément, pour celle des Dominicains; M. Dominique Albet, pour celle des Petits-Carmes; M. Dukeney, pour celle des Grands-Carmes; à l'effet de procéder à l'information des vols, assassinats, crimes et délits quelconques qui n'ont aucun trait à la Révolution, et qui ont été commis depuis le mois d'août dernier; de dresser tous les procès-verbaux nécessaires, et de recevoir les dénonciations et dépositions des témoins et de procéder à l'interrogation des prévenus;

« 6o D'envoyer des députés aux citoyens de Carpentras, à l'effet de leur témoigner la vive reconnaissance des délibérants pour les marques publiques de sollicitude fraternelle qu'ils ont données, et les démarches généreuses qu'ils ont faites pendant la crise horrible que la ville d'Avignon vient d'éprouver; charge les députés d'assurer les citoyens de Carpentras que ceux d'Avignon s'empressent de désavouer la guerre injuste et barbare qui désole leur ville et une partie du Comtat, et de leur déclarer solennellement que cette guerre et les secousses qui l'ont suivie, n'ont été l'ouvrage que de quelques monstres, presque tous étrangers à Avignon;

"

7 De fonder une fête annuelle à chaque 10 novembre, jour de notre délivrance, pour transmettre à la postérité les sentiments dont nous sommes pénétrés envers les commissaires et les troupes de ligne qui y ont coopéré;

« 8° La municipalité donnera les ordres nécessaires au transport des victimes massacrées, et à leur dépôt dans un lieu particulier, lequel sera fait avec toute la pompe et la décence convenables. Il sera élevé un monument sur lequel on gravera les noms de ces mêmes victimes, et la sentence définitive qui sera prononcée contre leurs assassins (Murmures.), leurs auteurs et complices, pour éterniser l'horreur qu'ont excitée ces forfaits et les regrets qu'ils inspirent aux délibérants;

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9° Il sera fondé annuellement un service funèbre, à chaque mois d'octobre, auquel la municipalité, en corps, assistera;

10. La municipalité s'occupera incessamment des moyens nécessaires pour venir au secours des familles indigentes, dont les chefs sont tombés sous le fer des bourreaux;

14 L'horloge des Cordeliers sera incessamment réparée, pour la commodité des habitants voisins. (Murmures.)

Et ledit recensement étant fini, lesdits présidents de chaque section en ont requis acte, que nous, maire et officiers municipaux, avons concédé, et de suite ordonné la publication, affiche et impression de ladite déclaration pour être envoyée et distribuée, etc. »

(Suivent les signatures des présidents et officiers типісіраих.)

M. Hilaire. Ces procès-verbaux sont illégalement faits; il n'y a point de signatures individuelles. Vous voyez, Messieurs, que l'orage se forme à Avignon: vous voyez même que les officiers municipaux, les commissaires du roi, le commandant de l'armée paraissent favoriser le parti aristocratique. (Applaudissements dans les tribunes.) On parle bien des assassinats commis en dernier lieu, mais on ne vous dit pas un mot du meurtre de Lescuyer, commis à l'Hôtel-deVille. Ceux qui ont rédigé ces délibérations et ces procès-verbaux sont les vrais assassins de Lescuyer. Je ne vois d'autre moyen, pour arrêter la guerre civile, que de nommer deux commissaires pris dans le sein de l'Assemblée, qui surveilleront les opérations des agents du pouvoir exécutif à Avignon. (Applaudissements dans les tribunes.)

Un membre: Quant à la légalité des procèsverbaux, je réponds, Messieurs, que, quoiqu'ils ne soient pas signés individuellement, ils n'en sont pas moins parfaitement en règle. Ce n'est point une pétition qu'on vous a lue, ce sont des procès-verbaux d'assemblée de citoyens, réunis en assemblée primaire; en conséquence, ces actes doivent être signés du président et des secrétaires seulement, et l'Assemblée nationale ne peut se dispenser de recevoir ces pièces pour en former la base d'un rapport, en les renvoyant à un comité.

M. Bréard. Je demande le renvoi de toutes ces pièces à un comité pour qu'il nous fasse son rapport, mais il est aussi de mon devoir de relever un fait. Ces procès-verbaux suffisent pour prouver que, malheureusement, l'esprit de parti règne encore dans cette malheureuse ville. On y dit que M. Rovère n'est revêtu d'aucun pouvoir, n'est chargé d'aucune commission du peuple avignonnais. J'atteste à l'Assemblée que le comité des pétitions a examiné les pouvoirs de M. Rovère et qu'il a reconnu que ces pouvoirs lui ont été donnés par les sections d'Avignon.

Plusieurs membres : A quelle époque?

M. Bréard. Lorsque M. Rovère s'est présenté pour dénoncer M. Mulot. Ses pouvoirs sont signés par les présidents des 6 sections d'Avignon, par les administrateurs provisoires, et par les représentants du peuple avignonnais assemblés à Bédarides. Au surplus, je sais bien que ceux qui lui ont donné ces pouvoirs ne sont plus les mêmes hommes qui composent aujourd'hui l'administration d'Avignon, puisqu'ils avaient émigré à cette époque. L'Assemblée ayant ordonné que les pièces de M. Mulot seraient renvoyées au co

mité des pétitions, je demande qu'on y joigne celles dont on vient de vous faire lecture.

(L'Assemblée décrète le renvoi des pièces au comité des pétitions.)

M. Delacroix. Le comité des pétitions vous ayant déclaré, par l'organe d'un de ses membres, que M. Rovère avait été véritablement chargé de pouvoirs par le peuple avignonnais, je crois qu'on peut l'admettre actuellement aux honneurs de la séance.

Plusieurs membres : La question préalable!

M. Merlin. J'appuie la motion de M. Delacroix.

Plusieurs membres Non! non! La question préalable!

(Après quelque agitation, l'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la motion de M. Delacroix, tendant à accorder à M. Rovère les honneurs de la séance.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse des citoyens de Toulouse qui offrent à l'Assemblée nationale l'hommage de leur respect et de leur reconnaissance, pour ses travaux et pour le décret qu'elle a rendu contre les Français conjurés au delà du Rhin; cette adresse est ainsi conçue:

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"Représentants des Français,

Honneur, trois fois honneur au courage énergique que vous venez de déployer: vous avez prononcé sur le sort de ces audacieux transfuges qui, des bords du Rhin, osaient insulter à notre apathique modération. Législateurs, cet acte de vigueur vous élève à la hauteur de vos fonctions; il atteste la majesté d'un grand peuple qui commence à vouloir; après avoir longtemps balancé, il nous rappelle les triomphes sublimes, mais trop rares de vos devanciers; il proclame dans toute l'Europe votre inébranlable fermeté; et nous devons vous le dire, il détruit une illusion qui nous avait trop longtemps consternés. Oui, législateurs, nous vous l'avouerons, le voile de la calomnie avait rembruni le tableau de nos espérances, et l'opinion d'un grand nombre de citoyens vous supposait plus de tendance à mollir ou à tergiverser, et moins de résolution ou de caractère: forts de vos principes, vous avez dù repousser cet injuste soupçon.

« Jouissez donc de toute votre gloire et osez acquérir de nouveaux droits à notre reconnaissance encore un décret ferme sur la horde noire (Rires et applaudissements.) qui dissémine la rage et le fanatisme dans tous les départements et qui ne rougit pas de réclamer la liberté, de désunir les familles et de susciter des guerres civiles encore un décret pour que la responsabilité des ministres ne soit pas illusoire (Applaudissements.), pour qu'à la faveur d'une démission adroitement combinée, les prévaricateurs n'aillent pas se soustraire à la vengeance publique et contempler de loin l'explosion des calamités qu'ils ont préparées..., etc. L'Europe s'apercevra à peine que l'Assemblée du mois de juin 1789 et du mois de juin 1791 ait quitté le sanctuaire de

nos lois.

En apprenant la mesure que vous venez de prendre, nous avons été étonnés de savoir que le roi des Français avait refusé de la sanctionner. Nous aimons à penser que des motifs purs ont déterminé cette suspension; mais s'il était possible qu'elle eût alarmé votre zèle, législateurs, voyez la nation entière revêtir votre décret dé l'unanimité toute puissante de ses suffrages:

souvenez-vous de ce que vous êtes, de ce que nous sommes, de ce que nous voulons être; et lorsque la volonté suprême du véritable souverain se fait entendre, consolez-vous des délais momentanés et suscités par son premier représentant. (Applaudissements.)

(Suivent 6 pages de signatures des citoyens de Toulouse.) (Applaudissements.)

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Toulouse, le 24 novembre 1791, l'an troisième de la liberté. »

Plusieurs membres : L'insertion au procès-verbal avec mention honorable!

Un membre: La question préalable sur l'insertion!

Un autre membre. Ayez la hardiesse de la motiver, votre question préalable!

(L'Assemblée, consultée, décrète l'insertion de cette adresse dans le procès-verbal.)

M. Lemontey, secrétaire, donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :

1 Lettre de MM. Deprade, Odion et Montbayen, qui offrent de fournir, dans le courant de décembre, 6 millions en espèce, à 14 0/0. Cette lettre est accompagnée de deux notes, l'une relative à quelques faits d'agiotage, l'autre aux moyens des sieurs Deprade, Odion et Montbayen, pour effectuer leur promesse.

(L'Assemblée renvoie ces pièces au comité des assignats et monnaies.)

2° Lettre de M. Bertrand, député de l'ile de Bourbon à l'Assemblée nationale, qui demande que l'Assemblée ajourne à jour fixe la discussion de son admissibilité

Plusieurs membres: A demain soir!

Un membre: Il me paraît souverainement impolitique d'ajourner à demain soir la question de savoir si vous admettrez parmi vous des députés des colonies. Je demande l'ajournement jusqu'à ce que le comité colonial vous ait fait un rapport sur les relations des colonies avec la métropole.

(L'Assemblée adopte cette motion.)

30 Lettre de M. Moreton-Chabrillan qui demande à l'Assemblée de s'occuper d'une pétition qu'il lui a été précédemment adressée.

(L'Assemblée ajourne la discussion de cette pétition à la séance de demain soir.)

4° Lettre de M. Amelot, accompagnée du tableau des biens nationaux vendus et à vendre dans 45 districts; cette lettre est ainsi conçue:

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l'Assemblée nationale la confiance de ces citoyens dans son courage et son amour pour la liberté; cette adresse est ainsi conçue:

Frappés de l'énergie que vous déployez dans vos discussions, nous avons tous résolu de manifester notre dévouement à vos personnes, et notre adhésion à vos décrets, notamment à celui que vous venez de porter sur les traitres qui vont lâchement machiner sur une terre étrangère la ruine et la désolation de leur patrie. Oui, législateurs, ce décret vigoureux répond aux vœux de tous les citoyens, il répond à la confiance dont ils aiment à vous environner. N'était-il pas temps de mettre un terme à l'excessive indulgence du peuple français, pour de vils esclaves des préjugés et de la naissance, pour des pygmées dont l'impunité ne ferait qu'augmenter l'orgueil et la scélératesse !

Législateurs, il vous reste encore deux sortes d'ennemis à anéantir: ce sont, d'un côté, les agioteurs avides, de l'autre, les prêtres perturbateurs. Témoins des maux que ces êtres malveillants causent dans nos contrées, nous désirons depuis longtemps qu'une loi sévère mette un frein à leurs coupables manœuvres. Ecrasez ces sangsues du peuple, éloignez les prêtres fanatiques et séditieux, vous aurez délivré la France de deux fléaux qui la désolent, vous aurez affermi les bases de la liberté. Législateurs, voilà l'hommage du respect et de la reconnaissance que vos vertus, votre courage et vos talents nous inspirent. (Applaudissements.)

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Plusieurs membres: Mention honorable au procès-verbal !

(L'Assemblée décrète qu'il sera fait mention honorable de cette adresse au procès-verbal.)

6o Pétition des administrateurs du département de la Seine-Inférieure tendant à obtenir une avance de fonds pour le payement des travaux des routes dans l'étendue de ce département.

(L'Assemblée renvoie cette pétition au pouvoir exécutif.)

7° Lettre de M. l'abbé Auger, membre de l'Académie des belles-lettres, qui fait hommage à l'Assemblée de 12 exemplaires d'un ouvrage dont l'objet est d'éclairer le peuple sur ses droits et sur ses devoirs, avec cette épigraphe: Salus populi suprema lex esto.

(L'Assemblée accepte l'hommage de l'auteur et décrète qu'il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal.)

8 Lettre de M. Lejeune, curé de Cleirey, district de Troyes, qui fait également hommage à l'Assemblée d'un ouvrage manuscrit intitulé: Le Publiciste chrétien.

(L'Assemblée accepte l'hommage et renvoie l'examen de l'ouvrage au comité d'instruction publique.)

Un membre: Je demande qu'on fasse demain soir le rapport sur la dénonciation faite par M. Rouyer (1) relativement à une pension payée à un officier mort depuis trente ans.

(L'Assemblée fixe ce rapport à demain soir.) (La séance est levée à dix heures.)

(1) Voy. ci-dessus, séance du 19 novembre 1791, page

157.

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

Séance du mardi 29 novembre 1791, au matin.

PRÉSIDENCE DE M. LACÉPÈDE, président, ET DE M. VIENOT-VAUBLANC, ex-président.

La séance est ouverte à neuf heures du matin. M. Guadet, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du lundi 28 novembre, au soir.

M. Guadet, secrétaire, donne lecture des pétitions et adresses suivantes :

1° Pétition des sieurs Sicard et Dalmats, sousfermiers des domaines de la généralité de Tours. (L'Assemblée renvoie cette pétition au comité des domaines.)

2o Pétition des administrateurs de l'hôpital général de Bourges qui déclarent que la source des aumônes étant tarie depuis la Révolution, le défaut des secours les obligera à renvoyer les pauvres.

(L'Assemblée renvoie cette pétition au comité des secours publics.)

3° Adresse des officiers du premier bataillon du département de la Gironde, district de Libourne, qui protestent de leur constante fidélité à observer les règles de la discipline, de leur dévouement aux lois, et qui assurent que s'ils se sont emparés des armes déposées dans l'arsenal du Chateau-Trompette de Bordeaux, et qu'on leur cachait avec affectation, ce n'a été que pour se défendre contre l'insurrection de 5 à 600 matelots, excités contre eux par les malveillants; mais, qu'au reste, ils ne se serviront jamais de ces armes que pour protéger l'exécution des lois et vaincre les ennemis de la patrie.

(L'Assemblée renvoie cette adresse au comité militaire.)

M. Lacretelle, secrétaire, rédacteur du procèsverbal de la séance du lundi 28 novembre, au matin, ne pouvant se faire entendre de l'Assemblée, est suppléé par M. CAMBON, qui donne lecture de ce procès-verbal.

M. Cambon, faisant fonctions de secrétaire, donne ensuite lecture d'une lettre signée TéorierMonier, pour les administrateurs du département du Jura; elle est ainsi conçue :

«Les administrateurs du département du Jura doivent sans doute leur premier hommage aux représentants de la nation. Environnés de dangers, c'est en vous qu'ils ont placé toute leur espérance, c'est de la sagesse des mesures que vous prendrez que dépend le salut de l'Empire. Que pourront les ennemis du dehors, que pourront ceux du dedans, si, tranquilles au milieu de l'orage, vous tenez d'une main assurée, le timon de l'Etat ? Le décret rendu contre les émigrés a déjà terrassé une partie de nos ennemis; achevez votre ouvrage, enchainez encore le fanatisme, et la France calmée jouira pleinement des bienfaits de la Constitution. Toutes les mesures que vous prendrez seront exécutées avec zèle par les corps administratifs : celui du Jura, qui s'est toujours signalé par son dévouement pour la chose publique, prend ici l'engagement d'être fidèle à vos décrets et de mourir plutôt que de cesser d'être libre. (Applaudissements.)

«Nous sommes avec respect, Messieurs, vos rès humbles et très obéissants serviteurs.

« Les administrateurs du conseil général du département du Jura.

Signé: TEORIER-MONIER, président. »

Plusieurs membres : L'insertion de cette adresse au procès-verbal avec mention honorable! (L'Assemblée décrète l'insertion de l'adresse au procès-verbal avec mention honorable.)

M. Taillefer donne lecture d'une adresse des administrateurs du district de Sarlat, département de la Dordogne, qui réclame contre la quantité des contributions imposées sur ce district.

(L'Assemblée renvoie cette adresse au comité des contributions publiques.)

Un membre, au nom du comité d'instruction publique, demande que l'Assemblée autorise ce comité à prendre 6 commis, et de plus 4 commis extraordinaires pour la confection du dictionnaire des municipalités.

(L'Assemblée accorde cette autorisation.)

Un membre, au nom du comité des décrets, demande que l'Assemblée autorise ce comité à prendre 3 commis.

(L'Assemblée accorde cette autorisation.)

Un membre: J'observe qu'il a été procédé dans la séance du 7 de ce mois, à la nomination de 4 commissaires qui doivent composer le comité des lettres de cachet; et cependant, ni le procès-verbal de cette séance, ní les procès-verbaux subséquents, ne font aucune mention de la proclamation de ces commissaires. Je demande que cette omission soit réparée.

(L'Assemblée adopte cette proposition et décrète que les noms des membres du comité des lettres de cachet seront insérés dans le procèsverbal de la séance de ce jour.)

Ce sont : MM. DUVAL (Charles), DONGOIS, REVER, MOREL.

Un membre, au nom du comité militaire : Je viens, au nom du comité militaire, vous faire la relue du décret sur les remplacements dans les emplois vacants de l'armée (1). (Il le lit.)

Un membre: Messieurs, il est établi, en principe, que l'Assemblée nationale ne peut rien décréter sur la proposition immédiate d'un ministre. Je demande donc que l'on retranche dans le préambule du décret sur le remplacement des officiers les mots : « Délibérant sur la proposition du roi, énoncée dans la lettre du ministre de la guerre.» (L'Assemblée adopte cet amendement.)

Un membre: Je demande, par amendement, que l'Assemblée nationale déclare ne rien préjuger sur le remplacement des officiers de toutes les armes, qui sont maintenant employés sur les frontières, dans les bataillons de gardes nationales, et qu'elle se réserve de statuer sur cet objet, d'après le rapport de son comité militaire.

(L'Assemblée décrète cet amendement comme article additionnel.)

Un membre: Je demande aussi, par amendement, qu'il soit décrété que le service des officiers de toutes les armes, qui ont été appelés par le vœu des gardes nationales volontaires à les com mander, et qui auront accepté, ne fera point de lacune dans leur service militaire, et que le ministre de la guerre ne pourra les faire rem placer.

(1) Voy. Archives parlementaires, 1re Série, t. XXXIV, seance du 10 novembre 1791, page 729, et ci-dessus seances des 11, 15, 22 et 26 novembre 1791, pages 1, 81, 305 et 385.

M. Louis Hébert. On ne peut conserver 2 postes. Les officiers réformés, en acceptant des places dans les gardes nationales volontaires, ont renoncé à leurs droits dans l'armée de ligne.

M. Basire jeune. Ce serait punir le civisme que de lui ôter ainsi des droits sacrés que la réforme n'a pu détruire. Je demande qu'on renvoie l'examen de cette question au comité militaire.

M. Delacroix. J'appuie la motion de M. Basire et je demande qu'elle soit adoptée sans rien préjuger sur les officiers du génie et de l'artillerie, qui diffèrent essentiellement des autres en ce qu'ils ont reçu l'ordre de se rendre dans les gardes nationales.

(L'Assemblée renvoie cet amendement au comité militaire qui sera chargé de faire un rapport sur cet objet.)

Suit la teneur du décret sur les remplacements dans les emplois vacants de l'armée, tel qu'il a été adopté définitivement:

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire,

«Considérant que le mode provisoire de nomination aux emplois de sous-lieutenants dans l'armée, prescrit par le décret du 1er août 1791, ne devait avoir d'effet, d'après le décret du 28 septembre, que jusqu'au 15 octobre dernier, et qu'il est impossible, dans ce moment, de procéder aux remplacements par la voie de l'examen ;

"Considérant que la discipline et la force de l'armée exigent que les emplois vacants par la défection d'un grand nombre d'officiers soient promptement remplis, décrète qu'il y a urgence. «L'Assemblée nationale, après avoir rendu le décret d'urgence, décrète ce qui suit;

Art. 1er.

"L'exécution des articles du décret du 28 septembre dernier, relatif aux mode de l'examen qui doit précéder les nominations aux emplois de sous-lieutenants dans l'armée, demeure suspendue jusqu'au 1er février prochain.

Art. 2.

« Sont exceptés dans la disposition ci-dessus les remplacements à faire dans l'artillerie et le génie.

Art. 3.

«La moitié des sous-lieutenances actuellement vacantes, ou qui viendront à vaquer dans chaque régiment de toute arme jusqu'au 1er février prochain, sera donnée aux sous-officiers du même régiment; l'autre moitié sera donnée aux gardes nationaux du royaume.

Art. 4.

"Tout citoyen, ou fils de citoyen, âgés de dix-huit ans et au-dessus, sera admissible aux emplois réservés aux gardes nationaux par l'article précédent, s'il a fait un service personnel et continu dans la garde nationale depuis et compris le 1er juin 1790 jusqu'à ce jour.

"Sont dispensés de cette dernière disposition les citoyens inscrits pour aller à la défense des frontières en vertu des décrets des 21 juin et 4 août derniers, pourvu qu'ils ne se soient point fait remplacer, où qu'ils n'aient pas retiré leur inscription.

Art. 5.

«Seront également admissibles auxdits emplois tous les anciens sous-officiers et soldats qui, à l'époque du 1er janvier 1790, étaient dans les troupes de ligne, et qui depuis, dans le délai de deux mois, à compter du jour de la date de leur congé absolu, sont entrés dans la garde nationale, et y ont fait un service personnel et continu jusqu'à ce jour.

Art. 6.

« Les officiers des troupes de ligne, réformés ou retirés, qui, d'après le décret du 1er août 1791, peuvent prétendre à rentrer en activité, ne pourront être promus aux emplois vacants, s'ils ne remplissent les conditions prescrites par les articles 4 et 7 du présent décret.

Art. 7.

« Nul ne pourra, excepté les citoyens qui se trouvent compris dans la dernière disposition de l'article 4, obtenir son remplacement dans l'armée, ni être nommé à aucune des sous-lieutenances accordées par le présent décret aux gardes nationaux du royaume, s'il ne produit un certificat qui atteste qu'il a fait dans la garde nationale un service tel qu'il est prescrit par la première disposition de l'article 4 et par l'article 5; qu'il a été soumis aux autorités constituées, et qu'il n'a cessé de prouver son attachement à la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale.

« Ce certificat, pour être valable, devra être signé par les officiers municipaux de la commune, par l'état-major de la garde nationale dans les lieux où il y en aura, et par la majorité des officiers, sous-officiers et gardes nationaux de la compagnie dans laquelle celui qui aura besoin de ladite attestation aura fait son service.

Art. 8.

«Dans le cas prévu par les articles 2, 3, 5, 6, 11 et 12 du décret du fer août 1791, les officiers de chaque régiment de toute arme qui, par leur ancienneté de service, auront droit à des places de lieutenant ou de capitaine, les obtiendront de préférence dans leurs régiments, s'il y en a de vacantes.

Art. 9.

« Le ministre de la guerre sera tenu d'effectuer tous les remplacements d'ici au 1er février prochain.

Art. 10.

«Le ministre de la guerre sera tenu, en outre, de faire passer, dans quinzaine, à l'Assemblée nationale l'état nominatif des officiers de toutes les armes qui ont abandonné leurs régiments sans congé ou démission, avec designation du corps où ils servaient, du grade qu'ils avaient, et de l'époque de leur absence.

Il fera parvenir, dans le même délai, l'état nominatif de ceux qui ont été admis aux remplacements qu'il a dù faire avant le 15 octobre dernier.

Art. 11.

«Tout officier non employé, de quelque grade qu'il soit, ainsi que tout commissaire des guerres,

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