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M. Dubois-de-Bellegarde. Mon observation porte principalement sur la nécessité d'exiger des officiers retirés un certificat de service actif dans les gardes nationales. Il faut fermer la porte à l'aristocratie; s'il y a le moindre petit trou, elle s'y glissera. (Rires et applaudissements.) Je demande qu'aucun citoyen actif ou fils de citoyen actif ne puisse prétendre aux emplois dévolus à la garde nationale s'il n'a pas fait un service actif et personnel dans la garde nationale dès le 1er janvier 1790. Nous savons tous, Messieurs, qu'à l'époque du 21 juin, beaucoup d'aristocrates sont entrés dans la garde nationale, les uns par peur, les autres dans de mauvaises intentions. Si nous ne prenons pas le soin de fixer cette date du 1er janvier 1790, nous aurons des aristocrates, et voilà ce que nous ne voulons pas.

M. Léopold. J'adopte la motion de M. Duboisde-Bellegarde avec la modification que l'on exemptera de cette formalité les Français des villes où la formation de la garde nationale est postérieure à cette époque.

M. Lameth (Théodore). Je demande la question préalable sur la motion de M. Dubois-de-Bellegarde, et je vous donne pour raison que les jeunes gens qui n'ont atteint l'âge de 18 ans que posterieurement au 1er janvier 1790, n'ont pas pu servir avant cette époque, et cependant vous vous priveriez, par là, de la possibilité de choisir parmi les jeunes gens très capables de remplir ces fonctions.

Plusieurs membres: Aux voix! aux voix! la proposition de M. Dubois-de-Bellegarde.

(L'Assemblée, consultée, rejette la question préalable et adopte la proposition de M. Duboisde-Bellegarde, sauf rédaction.)

M. Couthon, secrétaire. Voici la rédaction de M. Dubois-de-Bellegarde :

Ne pourront prétendre aux emplois réservés aux gardes nationales, par l'article précedent, que les citoyens et fils de citoyens qui auront fait un service actif et personnel dans les gardes nationales, depuis et compris le 1er janvier 1790 jusqu'à ce jour. »

M. Merlin. Je demande que le même avantage soit accordé aux sous-officiers et soldats d ́s troupes de ligne qui, s'étant retirés du service postérieurement au 1er janvier 1790, sont entres immediatement après dans la garde nationale.

M. Becquey. Beaucoup de citoyens actifs n'étaient pas entrés au 1er janvier 1790 dans la garde nationale, mais se sont inscrits, en vertu du décret du 21 juin dernier, pour aller aux frontières, et y sont même à présent.

Je demande que ceux qui se sont inscrits pour aller aux frontières ou qui sont partis pour les frontières sans se faire remplacer, soient admis aux sous-lieutenances, quand bien même is ne serviraient pas depuis le 1 janvier 1790; car, certes, ils ont donné en cela une grande preuve de leur patriotisme et de leur zèle pour la chose publique.

Plusieurs membres Aux voix! aux voix! la motion de M. Becquey.

(L'Assemblée, consultée, décrète la motion de M. Becquey.)

Un membre: De tous les amendements proposés, il n'y en a pas un qui soit admissible; je demande que dans la rédaction de M. Dubois-deBellegarde on ajoute après les mots : « actif et personne » ceux-ci, et sans interruption ».

Lorsque le roi fut arrêté à Varennes, tous les militaires ci-devant nobles vinrent se faire inscrire dans la garde nationale, et ils y servent depuis cette époque. Ils ont même servi en 1790, au mois de janvier, mais comme ils prétendirent avoir éprouvé quelques désagréments, et qu'ils ne voulurent point servir en qualité de simples soldats, pour maintenir, disaient-ils, leur prépondérance, il résulte de là qu'ils ont servi, mais qu'ils n'ont point fait un service continuel. Je demande donc que les mots : « et sans interruption » ou plutôt que le mot continuel soit inséré dans la rédaction. (L'Assemblée adopte cet amendement.)

M. Merlin. J'ai proposé d'ajouter au décret un amendement, dont je présente la rédaction en ces termes :

"Sont également admissibles auxdits emplois tous les sous-officiers et soldats qui, à l'époque de la formation des gardes nationales, étaient dans les troupes de ligne, et qui, depuis, ayant obtenu leur congé absolu, se sont fait inscrire, dans le délai d'un mois, après l'obtention dudit congé, dans la garde nationale, et ont fait un service actif et continu.

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(L'Assemblée adopte la proposition de M. Merlin, sauf rédaction.)

M. Carnot-Feuleins jeune. Je fais la motion expresse que nous décrétions, sans désemparer, ce qui concerne le remplacement des officiers.

M. Gérardin. C'est le moyen de faire de très mauvaises lois; je demande la question préalable.

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la motion de M. Carnot-Feuleins.)

M. le Président. Il vous reste, Messieurs, à statuer sur les limites d'âge entre lesquelles on pourra être appelé aux sous-lieutenances vacantes. Je rappelle que M. Lacuée a proposé de fixer à 18 ans le minimum et qu'il n'y ait pas de maximum. M. Jaucourt propose 16 et 24 ans et M. Rouyer 18 et 30 ans.

M. Dumas (Mathieu). S'il était question d'organiser une armée qui ne durerait qu'un certain temps, et qui seraitlicenciée à une époque fixe, j'adopierais le système qui consiste à n'admettre au service que les hommes les plus formés, les plus en état de servir en ce moment; mais l'Assemblée nationale doit porter plus loin sa prévoyance, et, quel que soit le terme qu'elle fixera pour l'admission des citoyens actifs qui auront servi dans les gardes nationales, comme la moitié des sous-lieutenances est accordée aux sous-officiers, il est clair qu'elle sera remplie d'hommes très âgés. Si, d'un autre côté, vous prenez dans les citoyens actifs qui ont servi dans les gardes nationales, des sous-lieutenants au-dessus de 25, 30 ans et indéfiniment comme on l'a exprimé, Vous voyez que dans fort peu d'années, le corps même des sous-lieutenants, à cause de la lenteur de l'avancement, sera extrêmement vieilli.

Tout le monde sait qu'il est impossible de faire la guerre avec un corps d'officiers très vieux, que si le bon exemple des vieillards est nécessaire, la verdeur et la force de l'âge ne le sont pas moins, et que les législateurs doivent surtout peser l'effet des lois dans l'avenir. Je conclus donc à ce qu'on ne dépasse pas le terme de 30 ans.

Un membre: Si l'on admet la réflexion du préopinant, l'Assemblée va commettre une injustice à l'égard de plusieurs citoyens qui se sont sacri

fiés pour l'éducation des gardes nationales. Quels sont ceux qui nous ont appris à manier le fusil? Des vieux militaires, des vieux caporaux. En conséquence, il est juste que ces citoyens puissent parvenir aux sous-lieutenances. Je soutiens donc la rédaction de 18 ans et au-dessus indéfiniment.

M. Delacroix. Si vous adoptiez la proposition de M. Dumas, il en résulterait que vous mettriez une distinction entre les sous-officiers et les citoyens actifs. En effet, on vous propose de donner la moitié des sous-lieutenances aux sousofficiers, et il est très possible que dans ces sousofficiers il y ait des hommes âgés de plus de 30 ans. D'un autre côté, vous ne devez pas supposer qu'un garde national, qui aura 40 ou 45 ans, se présente pour avoir une place de sous-lieutenant. Ainsi j'appuie la rédaction qui a été proposée pour dire de 18 ans et au-dessus. »

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Plusieurs membres : La discussion fermée! (L'Assemblée ferme la discussion.)

D'autres membres : La priorité pour la motion. de M. Lacuée!

(L'Assemblée accorde la priorité à la motion de M. Lacuée et décrète que les limites d'âge sont 18 ans pour le minimum, et qu'il n'y a pas de maximum.)

Un de MM. les secrétaires fait lecture de la rédaction suivante, résumant les diverses motions et amendements qui ont été adoptés et qui forment les articles 3 et 4 du décret sur le remplacement des officiers :

Art. 3.

"Ne pourront prétendre aux emplois réservés. aux gardes nationaux par l'article précédent, que les citoyens et fils de citoyens, de 18 ans et au-dessus, qui auront fait un service personnel et continu dans les gardes nationales, depuis et compris le 1er janvier 1790 jusqu'à ce jour, à moins qu'ils ne se soient fait inscrire pour aller à la défense des frontières, en vertu du décret du 21 juin dernier, et ne soient entrés dans les bataillons sans s'être fait remplacer. »

Art. 4.

«Seront également admissibles auxdits emplois, tous les sous-officiers et soldats qui, à ladite époque du 1er janvier 1790, étaient dans les troupes de ligne, et qui, depuis, ayant obtenu leur congé absolu, se sont fait inscrire dans le délai d'un mois après l'obtention dudit congé, sur le registre de la garde nationale, et y ont fait un service actif et continu. »

(L'Assemblée adopte cette rédaction.)

M. le Président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur pour rendre compte de l'état actuel des districts d'Avignon et de Carpentras.

M. Delessart, ministre de l'intérieur. C'est pour obéir à un décret de l'Assemblée que je lui demande un instant d'attention. Elle à décrété que je lui rendrais compte de l'état d'Avignon et de Carpentras, et des dispositions faites pour y rétablir l'ordre et faire punir les auteurs et complices des meurtres qui viennent de s'y commettre. La première mesure, la seule qu'il ait été possible de prendre, consiste, d'une part, dans le renvoi de 3 commissaires civils nommés par le roi, en exécution du décret du 14 septembre dernier, sanctionné par Sa Majesté; de l'autre, dans le rassemblement des troupes de ligne en nombre suffisant pour protéger les opérations des com

missaires relatives à l'exécution de cette loi.

En exécution du décret du 23 septembre, sanctionné par Sa Majesté le 2 octobre, concernant l'organisation provisoire du ci-devant État d'Avignon et du Comtat-Venaissin, des commissions ont été expédiées le 6 octobre, deux des commissaires sont arrivés le 21 à Orange, où on leur a confirmé la réalité des meurtres commis le 16 à Avignon, dont la nouvelle leur Etait parvenue dans la route. Les trois commissaires m'ont mandé, le 25, qu'ils faisaient imprimer le décret de réunion et leurs pouvoirs, afin de les faire notifier à toutes les communes le même jour ou le lendemain. On ignorait encore jusqu'où s'était étendue la fureur du parti dominant à Avignon.

Carpentras jouissait d'une tranquillité au moins apparente; cependant il s'y était formé une assemblée de citoyens, soi-disant actifs, dite de Saint-Symphorien, parce qu'elle tenait ses séances dans une église de ce nom. Elle avait invité, par une circulaire, les communes à se coaliser. On voit que le but de cette coalition était de venger les catastrophes sanglantes d'Avignon et d'en empêcher le renouvellement. Cette présomption, est confirmée par une adresse au roi, dans laquelle elle dénonce à Sa Majesté la conduite du sieur Jourdan et de ceux qu'il commande. Les inquiétudes qui subsistent encore ne seront dissipées que par le compte que les commissaires doivent rendre de leur entrée à Carpentras et Avignon, et des mesures qu'ils auront prises pour le rétablissement de la paix et de la tranquillité et pour la punition des coupables. J'attends tous les jours de leurs nouvelles.

M. Delessart. ministre de l'Intérieur, demande encore à M. le Président un moment d'attention pour parler à l'Assemblée d'une affaire qui concerne les travaux du Rhône à Valence.

Les entrepreneurs des travaux du Rhône à Valence ont été accusés d'avoir voulu tromper l'administration sur la quantité de pierres employées à ces travaux. Cette affaire, par sa nature, m'a fait naître des doutes sur la question de savoir si elle doit être jugée par les tribunaux, ou si elle doit être portée devant les corps administratifs.

L'article 3 du titre XIV de la loi sur l'organisation judiciaire est ainsi conçu :

«Les entrepreneurs de travaux publics, etc... » Les termes très précis de cet article paraissent devoir résoudre la question en faveur des corps administratifs du département de la Drôme, et il me semble qu'ils seraient les seuls compétents pour statuer sur les difficultés qu'on a élevées relativement à l'exécution des clauses du marché fait avec les entrepreneurs des travaux du Rhône à Valence. On pourrait penser, cependant, que ces difficultés ne peuvent avoir de rapport qu'au marché fait par les entrepreneurs de travaux publics, avec leurs sous-traitants et autres chargés d'exécuter lesdits marchés; mais qu'elles ne peuvent pas concerner ceux passés entre les entrepreneurs et les directoires ou les anciens corps administratifs. On pourrait donner pour raison que les départements, étant alors partie contre les entrepreneurs ils ne pourraient pas en devenir les juges, et que les tribunaux doivent seuls statuer sur la demande du procureur général syndic du département, et à la poursuite et diligence du procureur-syndic du district. C'est ce que le département a pensé.

Comme il s'agit d'interpréter la loi, j'ai cru devoir soumettre cette affaire à l'Assemblée nationale.

(L'Assemblée renvoie au comité des pétitions le rapport du ministre sur Avignon et Carpentras, et au comité de législation le mémoire sur la question de compétence entre les administrateurs du département de la Drôme et les entrepreneurs des travaux du Rhône à Valence.)

M. Brival. J'ai une dénonciation à faire; rien n'est plus intéressant: c'est l'honneur de l'Assemblée qui est blessé par un des agents du pouvoir exécutif. Je demande à M. le président de consulter l'Assemblée pour savoir si elle veut m'entendre.

(L'Assemblée, consultée, décide que M. Brival sera entendu demain à l'ouverture de la séance.) (Voir ci-après, page 86.)

M. le Président. J'invite l'Assemblée à se retirer dans les bureaux pour la nomination d'un vice-président et de deux secrétaires.

(La séance est levée à quatre heures.)

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

Séance du mercredi 16 novembre 1791. PRÉSIDENCE DE M. VIENOT-VAUBLANC

La séance est ouverte à neuf heures du matin. M. Lémontey, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du mardi 15 novembre.

Un de MM. les secrétaires annonce une pétition des huissiers-priseurs de Paris, qui demandent qu'on s'occupe incessamment de leur sort.

(L'Assemblée renvoie cette pétition au comité des pétitions.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse du deuxième bataillon des volontaires nationaux du département de Rhône-et-Loire, qui ambitionnent l'honneur de faire partie des secours qui doivent être envoyés à Saint-Domingue; cette adresse est ainsi conçue :

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"

A nos augustes Représentants,

Messieurs, vous venez de décréter un secours de 2,300 hommes pour nos malheureux frères de Saint-Domingue. Le deuxième bataillon des volontaires nationaux du département de Rhôneet-Loire ambitionne l'honneur de faire partie de ce secours. L'amour de la patrie nous a rassemblés et formés. Veuillez, Messieurs, ordonner notre embarquement. La patrie est pour nous dans tous les lieux où il existe des Français. Leurs foyers, quelque lointains qu'ils soient, deviennent les nôtres lorsqu'il s'agit de les défendre. Le climat de l'Amérique est propice à la liberté. Nos ennemis qui ont secrétement machiné la perte de nos colonies, ont cru que les troubles intérieurs qu'ils nous avaient déjà suscités, ne nous permettraient pas de voler à la défense des colonies; ils ont calculé comme sous le règne du despotisme et seront étonnés de ce que la France peut sous le règne de la liberté. Qué les corps américains soient étonnés en voyant des citoyens français d'Europe sous l'uniforme aux trois couleurs, se joindre aux troupes de ligne pour aller y affermir le drapeau chancelant de la liberté. (Applaudissements.)

"

A Lyon, ce 12 novembre 1791. »

(Suivent les signatures.)

M. Bréard. Je demande qu'il soit fait mention

honorable de l'offre des volontaires de Lyon au procès-verbal, et que M. le président soit chargé par l'Assemblée de répondre à ces braves militaires. (Applaudissements.)

Un membre: Je demande qu'on choisisse dans le nombre de ces braves gardes nationales ceux qui doivent faire partie des forces à envoyer à Saint-Domingue. J'ai l'honneur de vous observer, Messieurs, que si vous envoyez à Saint-Domingue des gardes nationales pour rétablir la paix avec les troupes de ligne, elles agiront de concert, partageront les dangers et partageront aussi la gloire. Au lieu que si l'on n'envoie que des troupes de ligne, elles seront entièrement subordonnées aux chefs (Rires.); elles ne suivront d'autre mouvement que celui que leur donnera le chef. Au contraire, avec des gardes nationales en moitié nombre, les gardes nationales partageront la confiance des citoyens, serviront utilement la patrie et ne porteront point la désolation dans ces contrées.

Plusieurs membres : L'ordre du jour sur cette motion !

M. Delacroix. Je demande le renvoi de l'adresse au pouvoir exécutif et mention honorable au procès-verbal.

(L'Assemblée décrète la motion de M. Delacroix.) M. Audrein. J'ai à vous faire part d'une lettre du département du Morbihan, qui annonce de nouveaux malheurs arrivés sur son territoire à l'occasion de l'installation d'un nouveau curé que des séditieux ont voulu chasser. Le curé constitutionnel qui avait été nommé à la cure de Guiscriff, l'une des plus considérables du district du Faouet, devait prendre dernièrement possession de cette paroisse. Des méchants avaient préparé les cordes des cloches. Au moment où le prêtre allait faire la cérémonie, les cloches sonnèrent de toutes parts le tocsin; l'alarme fut générale. Cependant à force de courage de la part de la gendarmerie nationale, le nouveau curé prit possession. On dressa procès-verbal de tous ces malheurs; et ils n'eurent pas plutôt disparu, que l'on se jeta sur le presbytère. Le curé fut obligé de céder la place, et ne dut son salut qu'à la fuite.

Au même instant, à quelques lieues de là, un autre curé d'une paroisse non moins considérable, Plouguernevel, du même district, prenait possession du bénéfice. Il est arraché de l'autel par les cheveux, maltraité et laissé dans l'état le plus effroyable. La garde nationale d'une petite ville voisine accourut et donna mille preuves de valeur pour dissiper les mutins. Pour effrayer les révoltés, elle fit une décharge de mousqueterie en l'air, et deux hommes furent tués (Rires.) contre l'intention sans doute de ces braves militaires.

Les peuples, dans l'alarme et la consternation, se réunissent aujourd'hui pour supplier l'Assemblée nationale de leur rendre la paix en éloignant de leurs cantons les prêtres réfractaires, auxquels ils attribuent leurs malheurs. Ils vous demandent de déporter ces curés à huit lieues de leur résidence actuelle, avec défense d'aller dans leurs familles, hors le cas de maladie constatée.

Cette nouvelle pièce, ajoutée à mille autres, doit prouver à l'Assemblée que chaque jour, chaque instant qu'elle diffère de prendre un parti rigoureux contre les perturbateurs du repos public, coûtent des malheurs incalculables à la patrie. Vous savez que les conjurations sont mille fois plus à craindre quand le peuple s'en mêle, et le peuple soutient les prêtres réfractaires; vous con

naissez le mal, attaquez-le dans sa source; bientôt elle tarira. Je demande, en attendant, le renvoi de ces pièces au comité de législation.

(L'Assemblée renvoie la pétition et les pièces annexées au comité de législation.)

M. Laureau. Dans la même séance, j'ai entendu deux motions capables de faire perdre tout espoir à la patrie. L'une, d'abandonner nos colonies; l'autre, d'expulser du royaume quiconque n'a pas notre opinion religieuse. Dans ce moment où nous agitons le dé dont la sortie va nous donner la paix ou la guerre intérieure, dans ce moment où les clameurs populaires tendent à nous faire substituer l'opinion vulgaire à celle du législateur, craignons de nous laisser conduire à une loi qui serait plus funeste que la révocation de l'édit de Nantes, puisque si on persécute, le prêtre et le sectaire fuiront l'Etat persécuteur. Encore quelques principes pareils, et l'on nous écartera des principes de sagesse qui doivent nous diriger. Je répète avec le chancelier de l'Hospital Excidat illa dies, que ce jour de calamité s'éloigne; et que, s'il arrive, les maux qu'il occasionnera puissent un jour retomber sur la tête de leurs auteurs! Quand une nation qui a renoncé aux conquêtes tire l'épée, c'est son sang qu'elle fait couler. Je déclare, pour mon compte, que je n'abandonnerai pas le rôle honorable dé son législateur pour celui de son persécuteur, et je fais la motion que toute proposition incendiaire tendant à faire perdre l'aplomb et le calme d'esprit, source pure de toute loi, ne soit pas même écoutée, et soit rejetée comme contraire au bien et à la paix.

Plusieurs membres : L'ordre du jour!
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

M. Brival. J'avais demandé la parole à la fin de la séance d'hier pour présenter des réflexions fort importantes sur un projet d'interêt public, l'Assemblée m'a renvoyé à aujourd'hui pour être entendu Je la demande de nouveau.

M. le Président. La parole est à M. Brival.

M. Brival. Nous avons juré de maintenir la Constitution de tout notre pouvoir, et de ne rien consentir pendant toute la législature qui puisse y porter atteinte. Le roi a prêté le même serment, et cependant sa proclamation du 12 de ce mois (1), relative au refus qu'a fait Sa Majesté de sanctionner le décret sur les émigrés, quoique belle et séduisante, est contraire à la Constitution. (Murmures.) C'est ce que je vais établir.

M. Audrein. Je demande l'ajournement de cette affaire.

M. Brissot de Warville. Messieurs, vous ne pouvez vous dispenser... (Murmures)

M. Gérardin. C'est par des motions incidentes qu'on fait perdre le temps de l'Assemblée. Je demande qu'avant toutes choses on passe à l'ordre du jour. (Appuye! appuyé!)

M. Delacroix. Je demande pourquoi l'on passerait à l'ordre du jour, puisque nous ne savons pas ce que Monsieur peut avoir à nous dire. (Murmures.)

Plusieurs membres : Nous l'avons entendu !
M Brissot de Warville. La nature de la dé-

(1) Voir aux annexes de la seance la nouvelle proclamation du roi sur le emigrants ainsi que les deux lettres du roi à ses frères, Louis-Stanislas-Xavier et Charles-Philippe.

nonciation qu'on veut vous faire est trop impor-
tante... (Le bruit couvre la voix de l'orateur.)
L'ordre du
Voix diverses: L'ajournement!
jour! La priorité pour l'ordre du jour!

-

M. Delacroix. Je demande à ceux qui veulent passer à l'ordre du jour sans savoir... (Bruit.) M. le Président. On demande la priorité pour l'ordre du jour? (Oui! oui !)

Plusieurs membres : La discussion fermée!

M. Thariot. Je ne crois pas que M. le Président ait accordé la parole sans connaitre les motifs qui ont déterminé Monsieur à la solliciter. Je prie M. le Président, afin que tout le monde soit en etat de statuer en connaissance de cause, de vouloir bien dire quel est l'objet dont Monsieur veut nous occuper.

M. le Président. M. Brival a demandé la parole à l'Assemblée sans me dire sur quel sujet. On demande d'une part l'ajournement, d'autre part l'ordre du jour. Là-dessus s'élève une discusion tumultueuse. Plusieurs membres demandent que cette discussion soit fermée; je vais mettre cela aux voix, et ensuite l'Assemblée décidera.

M. Delacroix. Je demande à l'Assemblée si l'on peut fermer une discussion qui n'est pas ouverte? Je demande que l'on consulte l'Assemblée pour savoir si l'opinant sera entendu.

(L'Assemblée, consultée, décide que M. Brival ne sera pas entendu.)

Un membre du comité des assignats et monnaies se présente pour lire un rapport.

M. Brissot de Warville. Je demande l'ajournement de cette question à demain.

(L'Assemblee ajourne à demain la lecture du rapport du comité des assignats et monnaies.)

Un membre, au nom du comité des décrets : Votre comité m'a chargé de référer à l'Assemblée une difficulté relative à la forme des décrets, pour être présentés à la sanction du roi Pour résoudre cette difficulté, il vous propose le projet de décret suivant :

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L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des décrets, décrète que, conformément à la disposition de l'article 11 de la section II du chapitret pour lequel la maIII, titre III de l'acte constitutionnel, tout

tière aura été décrétée urgente, en énoncera les motifs et qu'il en sera fait mention dans le préambule du décret définitif, et cependant les deux décrets seront inscrits sur la même feuille, à la suite l'un de l'autre. »

M. Thuriot. Ce décret est inutile; il ne faut ici qu'une attention particulière de MM. les secré taires et de la part de MM. les commissaires. Il est bien certain que quand il y a un décret d'urgence on doit le mettre à la tête du décret définitif. Je demande la question préalable sur le tout.

Plusieurs membres: Non! non! l'ordre du jour!

(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

L'ordre du jour est un rapport du comité des assignats et monnaies sur le brûlement des assignals fautés ou surnuméraires, qui appartiennent à Témission des 100 millions d'assignats de 5 livres, décrétée le 6 mai 1791.

M. Dorizy, au nom du comité des assignats et monnaies, Messieurs, les commissaires du comité avaient commencé le comptage des bouts de sé

[Assemblée nationale législative.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 novembre 1791.]

ries qui appartiennent aux 100 millions d'assignats de 5 livres qui ont été décrétés le 6 mai. Ils croyaient que cette annonce suffisait pour opérer le brûlement de ces bouts de séries qui ne doivent plus servir, l'émission des 100 millions étant absolument parfaite. Cependant votre comité a observé que, relativement à l'émission des 400 millions, les commissaires chargés de la surveillance des assignats avaient toujours pris un décret de l'Assemblée nationale qui y autorisait. En conséquence, le comité m'a chargé de vous proposer le décret suivant :

« Le comité des assignats, chargé de suivre les opérations et la surveillance attribuée par le corps constituant aux commissaires établis par le décret des 21 et 22 mai dernier, pour la fabrication des assignats de 5 livres créés par le décret du 6 dudit mois, fera le compte et le recensement des assignats délivrés à l'imprimerie, remis au timbre et au numérotage,et qui, lors du numérotage ou de l'application du timbre, ont été mis hors d'état de servir par quelque vice dans l'application du timbre ou des numéros, ainsi que de ceux qui se trouveraient excéder la quantité qui a été nécessaire pour fournir les 100 millions. Après ledit recensement ou au fur et à mesure, lesdits assignats qui n'ont pu servir, et tous ceux qui se trouveraient excéder le nombre qui a rempli l'émission de 100 millions, seront brûlés dans la cour de la Caisse de l'extraordinaire, en présence des commissaires de ladite caisse et du public; i sera dressé procès-verbal desdits compte, recensement et brùlement d'assignats, et il sera rendu public par la voie de l'impression. »

J'ai l'honneur de vous observer que le décret doit être porté à la sanction, et qu'il n'y a d'autre motif d'urgence que l'empressement du comité à éteindre des représentations de valeur dont la nation ne peut plus faire usage; mais son respect pour la Constitution l'a conduit à proposer à l'Assemblée le décret d'urgence.

:

Plusieurs membres L'urgence! l'urgence! (L'Assemblée décrète qu'il y a urgence.)

Un membre: Je ne vois pas quel motif on peut invoquer pour le décret d'urgence; je demande qu'il soit rapporté.

M. Lecointe-Puyraveau. Je soutiens que le décret d'urgence doit être maintenu, car son effet n'est que de dispenser des trois lectures. Nous pouvons aujourd'hui décréter qu'il y a urgence, et néanmoins faire imprimer et distribuer demain le projet de décret. Nous pourrons alors le discuter dans deux ou trois jours.

Plusieurs membres: La question préalable sur la demande d'impression.

(L'Assemblée, consultée, rejette la questa r préalable.)

Un membre: J'insiste sur le rapport de Bar d'urgence.

Plusieurs membres: La question prah 1 (L'Assemblée, consultée, décrète lieu à délibérer sur le rapport 20 as gence, ajourne à samedi probī et ordonne cependant l'impress décret et la distribution potente tin.)

M. Quatremère Quina d'instruction publique, vory" la discussion du proas

tion des encouragem:

87

discussion qui, dans la séance d'avant-hier, avait
été ajournée à aujourd'hui, soit commencée.
(L'Assemblée ajourne cette discussion à ven-
dredi prochain.)

M. Lemontey, secrétaire, fait lecture d'une lettre du ministre de la guerre à M. le Président, par laquelle ce ministre soumet à l'Assemblée la demande qui lui est faite par les commissaires des guerres, de conserver, par des motifs d'économie, leur ancien uniforme, au lieu de prendre celui qui leur est assigné par le décret du 20 septembre dernier.

(L'Assemblée renvoie la lettre du ministre et le mémoire des commissaires des guerres au comité militaire.)

M. le President. Messieurs, le scrutin pour la nomination d'un vice-président a réuni 213 votants. La majorité absolue est de 107 voix. M. Brissot de Warville en a obtenu 76; M. Lemontey, 50; M. Lacépède, 44; il y a eu 43 voix perdues. Personne n'ayant obtenu la majorité, il y aura lieu de procéder à un second scrutin. Pour les secrétaires, plusieurs bureaux n'ont pas remis leur scrutin, doit-on passer outre ? (Oui! oui !)

Les deux membres qui ont obtenu le plus de voix sont M. Guadet, 85 voix; M. Lacretelle, St. En conséquence, je les proclame secrétaires.

M. Lemontey, secrétaire. Voici une ame écrite à l'Assemblée nationale par l'Assombane nérale de la partie française de Saint-Domk 100,000 noirs sont révoltés dans la pe Nord....

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Plusieurs membres : La date?
M. Lemontey, secrétaire:

«Le Cap-Français, 13 sepembe
100,000 noirs sont révolt de 151
Nord. Plus de 200 sucreries sun
maîtres sont massacres ANC
se trouvent épargnés, kom
pire que la mort mang ng
gné les montagnes, 12 è
avec eux; un ros à
aussi la proie de li
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toutes parts cump ~
pés au camug
cherche su
soit ass.

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