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rite une réponse directe. Je propose en conséquence, de charger M. le Président de faire une réponse au nom de l'Assemblée.

Plusieurs membres: Appuyé! appuyé !

(L'Assemblée décrète que M. le Président fera une réponse qui exprimêra la douleur profonde de l'Assemblée.)

Un membre: Il a été adressé à l'Assemblée nationale une pétition signée de plus de 1,600 citoyens de Rennes, relativement à la question des prêtres; je demande qu'il en soit fait lecture avant de passer à la discussion.

:

Plusieurs membres L'ordre du jour! (L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

L'ordre du jour est un rapport du comité de législation sur les troubles occasionnés par les prêtres non assermentés.

M. le Président. Conformément à un décret rendu dans la séance d'avant-hier, le comité de législation s'est divisé hier en quatre sections pour présenter chacune un projet de décret sur les troubles du royaume.

La parole est à M. François de Neufchâteau.

M. François de Neuschâteau, au nom de la 3e section du comité de législation, lit le projet de décret suivant :

Projet de décret relatif aux troubles excités sous le prétexte de religion.

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L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport des commissaires civils envoyés dans le département de la Vendée, les pétitions d'un grand nombre de citoyens, et le rapport du comité de législation civile et criminelle, sur les troubles excités dans plusieurs départements du royaume, par les ennemis du bien public, sous prétexte de religion;

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Considérant que le contrat social doit lier, comme il doit également protéger tous les membres de l'Etat ;

« Qu'il importe de définir, sans équivoque, les termes de cet engagement, afin qu'une confusion dans les mots n'en puisse opérer une dans les idées, que le serment purement civique est la caution que tout citoyen doit donner de sa fidélité à la foi, et de son attachement à la société, et que la différence des opinions religieuses né peut être un empêchement de prêter ce serment, puisque la Constitution assure à tout citoyen liberté entière de ses opinions en matière de religion, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre, ou ne porte pas à des actes nuisibles à la sûreté publique.

"Que le ministre d'un culte, en refusant de reconnaitre l'acte constitutionnel qui l'autorise à professer ses opinions religieuses, sans lui imposer d'autres obligations que le respect pour l'ordre établi par la loi et pour la sûreté publique, annoncerait, par ce refus-là même, que son intention n'est pas de les respecter;

• Qu'en ne voulant pas reconnaitre la loi, il abdiquerait volontairement les avantages que cette loi seule peut lui garantir;

Que la voix de tous les citoyens éclairés proclame dans l'Empire cette grande vérité, que la religion n'est pour les ennemis de la Constitution qu'un prétexte dont ils abusent, et un instrument dont ils osent se servir pour troubler la terre au nom du ciel;

« Que leurs délits mystérieux échappent aisément aux mesures ordinaires, qui n'ont point de prise sur les cérémonies clandestines, dans lesquelles leurs trames sont enveloppées, et par

lesquelles ils exercent sur les consciences un empire invisible;

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Qu'il est temps enfin de percer ces ténèbres, afin qu'on puisse discerner le citoyen paisible et de bonne foi, du prêtre turbulent et machinateur qui regrette les anciens abus, et ne peut pardonner à la Révolution de les avoir détruits; Que l'obligation même d'assurer la liberté des opinions religieuses, garantie par l'acte constitutionnel, exige impérieusement que le Corps législatif prenne des grandes mesures polítiques pour réprimer les factieux qui couvrent leurs complots d'un voile sacré.

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Qu'il faut à cet égard fixer précisément le sens et l'exécution des lois antérieures, et, si elles sont insuffisantes, en préparer de nouvelles; Qu'enfin, c'est surtout aux progrès de la saine raison, et à l'opinion publique bien dirigée, qu'il est réservé d'achever le triomphe de la loi, d'ouvrir les yeux des habitants des campagnes sur la perfidie intéressée de ceux qui veulent leur faire croire que les législateurs constituants ont touché à la religion de leurs pères, et de prévenir pour l'honneur des Français, dans ce siècle de lumière, le renouvellement des scènes horribles dont la superstition n'a malheureusement que trop souillé leur histoire dans les siècles où l'ignorance des peuples était un des ressorts du gouvernement.

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L'Assemblée nationale, ayant décrété préalablement l'urgence, décrèté définitivement ce qui suit :

« Art. 1er. Dans la huitaine, à compter de la publication du présent décret tous les ecclésiastiques, autres que ceux qui se sont conformés au décret du 27 novembre dernier, seront tenus de se présenter par devant la municipalité du lieu de leur domicile, d'y prêter le serment civique dans les termes de l'article 5 du titre II de la Constitution, et de signer le procès-verbal, qui en sera dressé sans frais.

Art. 2. A l'expiration du délai ci-dessus, chaque municipalité fera parvenir au directoire du département, par la voie du district, un tableau des ecclésiastiques domiciliés dans son territoire, en distinguant ceux qui auront prêté le serment et ceux qui l'auront refusé. Ces tableaux serviront à former les listes dont il sera parlé ci-après.

Art. 3. Ceux des ministres du culte catholique, qui ont donné l'exemple de la soumission aux lois, et de l'attachement à leur patrie, en prêtant le serment de fidélité, tel qu'il était prescrit par le décret du 27 novembre, seront dispenses de toute formalité nouvelle. Ils seront invariablement maintenus dans les places qu'ils occupent et dans les traitements dont ils jouissent.

Art. 4. Quant aux autres ecclésiastiques, aucun d'eux ne pourra désormais toucher, réclamer ni obtenir de pension ou de traitement sur le Trésor public, qu'en représentant la preuve de la prestation du serment civique conformément à l'article 1 ci-dessus. Les trésoriers, receveurs ou payeurs, qui auront fait des payements contre la teneur du présent décret, seront condamnés à en restituer le montant, et privés de leur état. (Applaudissements.)

«Art. 5. Outre la déchéance de tout traitement, les ecclésiastiques qui auront refusé de prêter le serment civique seront, par ce refus même, réputés suspects de révolte contre la loi et de mauvaises intentions contre la patrie, et comme tels, particulièrement soumis et recommandés à

la surveillance de toutes les autorités constituées. (Applaudissements.)

"Art. 6. En conséquence, tout ecclésiastique ayant refusé de prêter le serment civique, qui se trouvera dans une commune où il surviendra des troubles dont les opinions religieuses seraient la cause ou le prétexte, pourra être éloigné provisoirement du lieu de son domicile ordinaire, en vertu d'un arrêté du directoire du département, sur l'avis de celui du district, sans préjudice de la dénonciation aux tribunaux, suivant la gravité des circonstances. (Applaudissements.)

« Art. 7. En cas de désobéissance à l'arrêté du directoire du département, les contrevenants seront poursuivis et punis d'une année de détention.

«Art. 8. Tout ecclésiastique qui sera convaincu d'avoir troublé l'ordre public par ses discours, ses actions ou ses écrits, sera puni de deux ans de détention; et si ces actions, ces discours ou ces écrits ont donné lieu à quelque meurtre, pillage ou incendie, le coupable sera puní des peines portées dans le Code pénal contre le meurtre, le pillage ou l'incendie. (Applaudisse

ments.)

« Art. 9. Si, à l'occasion de troubles religieux, il s'élève, dans une commune, des séditions qui nécessitent le déplacement de la force armée, les frais avancés par le Trésor public pour cet objet seront supportés par la commune, sauf le recours de cette dernière contre les chefs et les instigateurs des émeutes. (Applaudissements.)

« Art. 10. Le directoire de chaque département fera dresser deux listes, la première comprenant les noms et demeurés des ministres du culte catholique sermentés, avec la note de ceux qui seront sans emploi, et qui voudront se rendre utiles; la seconde, comprenant les noms et demeures de ceux qui auraient refusé de prêter le serment civique, avec les plaintes et les procèsverbaux qui auront été dressés contre eux. Ces deux listes seront arrêtées incessamment de manière à être présentées, s'il est possible, aux conseils généraux de département, avant la fin de leur session annuelle.

Art. 11. A la suite de ces listes, les procureurs généraux syndics rendront compte auxdits conseils de département, des diligences qui ont été faites dans leur ressort pour l'exécution des décrets de l'Assemblée nationale constituante, des 12, 24 juillet et 27 novembre 1790, concernant l'exercice du culte catholique salarié par la nation. Ce compte rendu présentera le détail des obstacles qu'a pu éprouver l'exécution de ces lois et la dénonciation de ceux qui, depuis l'amnistie, ont fait naître de nouveaux obstacles, ou les ont favorisés, par prévarication ou par négligence.

Art. 12. Le conseil général de chaque département prendra sur ce sujet un arrêté motivé, qui sera adressé sur-le-champ à l'Assemblée nationale, avec les listes des prêtres sermentés et non assermentés, et les observations du département sur la conduite individuelle de ces derniers, ou sur leur coalition séditieuse, soit entre eux, soit avec les Français transfuges et déserteurs.

«Art. 13. Le Corps législatif se formera en comité général pour examiner ces différents procès-verbaux, listes et arrêtés, et, sur le vu du tout, aviser au dernier parti qu'il doit prendre, en proportionnant ses mesures, et à l'étendue des maux qu'occasionne l'obstination des rebelles,

et à la grandeur de la nation forcée de les punir. (Applaudissements.)

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Art. 14. Il est enjoint expressément à tous les fonctionnaires publics du royaume, chacun en ce qui le concerne, de concourir avec l'activité la plus soutenue, à l'exécution stricte et littérale du présent décret, et à celle des lois déjà existantes contre les perturbateurs de l'ordre public, auxquelles il n'est pas dérogé par ce même décret.

» Art. 15. Les décrets de l'Assemblée nationale constituante des 12, 24 juillet et 27 novembre 1790, ci-dessus rappelés, continueront aussi d'être suivis et exécutés suivant leurs forme et teneur, mais avec les modifications suivantes, que l'achèvement de la Constitution rend aujourd'hui nécessaires :

1. La formule du serment civique, portée en l'article 5 du titre II de l'acte constitutionnel, sera substituée au serment provisoire qui avait été prescrit par lesdits décrets;

2o Le titre de constitution civile du clergé n'exprimant pas la véritable nature de ces lois, et rappelant une corporation qui n'existe plus (Applaudissements.) sera supprimé et remplacé par celui de lois concernant les rapports civils et les règles extérieures de l'exercice du culte catholique en France;

3o Les évêques, curés et vicaires ne seront plus désignés sous la qualification de fonctionnaires publics, mais sous celle de ministres du culte catholique salariés par la nation. (Applaudissements.)

« Art. 16. Au moyen des dispositions précédentes, il ne pourra plus y avoir lieu à aucune dissidence réelle en ce royaume dans l'exercice du culte catholique, et comme il importe surtout d'éclairer le peuple sur les pièges qu'on ne cesse de lui tendre à ce sujet, l'Assemblée nationale exhorte tous les bons esprits à renouveler leurs efforts et à multiplier leurs instructions contre le fanatisme. Elle déclare qu'elle regardera comme un bienfait public les bons ouvrages à la portée des citoyens des campagnes, qui lui seront adressés sur cette matière importante et d'après le rapport qui lui en sera fait, elle fera imprimer et distribuer ces ouvrages aux frais de l'Etat,et récompensera leurs auteurs.» (Vifs applaudissements dans l'Assemblée et dans les tribunes.)

Plusieurs membres: Bravo! bravo!

M. Tardiveau, au nom de la première section du comité de législation. La première section de votre comité de législation me charge de vous présenter le projet de décret suivant sur le même objet :

« Tous les citoyens doivent obéissance à la loi. Ceux qui abusent des opinions religieuses pour égarer le peuple, l'exciter à la sédition et au mépris des autorités constituées, sont les plus dangereux ennemis de la société, l'intérêt général exige qu'ils soient connus et réprimés; en conséquence l'Assemblée nationale décrète :

« Art. 1er. Tout ecclésiastique qui n'a pas encore prêté le serment civique, sera tenu dans la quinzaine, à compter de la publication du présent décret, de le prêter dans les termes prescrits par l'article 5 du titre II de l'acte constitutionnel. Ce serment sera reçu par la municipalité du domicile. L'acte en sera inscrit sur un registre, et signé de celui qui aura satisfait à la loi.

« Art. 2. Le refus du serment civique emportera la déchéance de toutes pensions et traitements sur le Trésor public. Ceux qui l'auront

refusé seront regardés comme suspects. Toutes fonctions ecclésiastiques leur seront expressément interdites, et, dans le cas de contravention, ils seront poursuivis comme coupables de désobéissance à la loi, punis de trois mois de prison, et d'un an en cas de récidive.

«Art. 3. Tout ecclésiastique qui, par ses écrits, ses discours ou ses actions engagera le peuple à la violation des lois de l'Etat, ou à porter atteinte au libre exercice du culte, sera puni d'un an de détention pour la première fois, et de deux ans en cas de récidive.

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« Art. 4. Dans le cas d'attroupement, émeute ou sédition pour cause de religion, le ministre d'un culte qui y aura participé, ou qui l'aura favorisé, en sera réputé le principal auteur.

« Art. 5. Seront, conformément à la loi du 3 août 1791, réputés attroupements séditieux, et punis comme tels, tous rassemblements de plus de 15 personnes qui auraient pour objet d'attenter à l'établissement d'un ministre du culte ou à la liberté des opinions religieuses. En conséquence, si les discours, les écrits ou les actions mentionnées au précédent article ont occasionné un pareil rassemblement, l'auteur sera puni de deux ans de détention.

» Art. 6. Si la sédition a eu lieu, et s'il en est résulté meurtre, incendie ou pillage, l'auteur de l'émeute sera puni de mort. Dans le même cas, les délits moins graves seront assujettis aux peines prononcées par le Code pénal ou par celui de la police orrectionnelle. L'auteur des violences et ses complices seront, en outre, solidairement condamnes à la réparation et aux dommages et intérêts des parties offensées.

"Art. 7. Si, à l'occasion d'une personne déclarée suspecte par le refus du serment civique, il y a émeute, sédition ou attroupement dans une paroisse, le conseil général de la commune pourra lui enjoindre provisoirement de s'éloigner à la distance de 6 lieues.

«Art. 8. Le conseil général de la commune sera tenu d'envoyer, dans trois jours, copie de la délibération, au directoire de district, qui la fera passer dans le même délai, avec son avis motivé, au directoire de département.

» Art. 9. Si, après avoir vérifié les faits, le directoire de département juge indispensable au maintien de la tranquillité publique d'éloigner la personne suspecte, il pourra lui interdire le retour dans la paroisse pendant le temps qui paraîtra nécessaire, en lui indiquant une maison où il pourra se retirer et où il sera fourni à sa subsistance, dont le maximum ne pourra excéder 500 livres par année.

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Art. 10. Si la personne présente refuse d'obéir à l'injonction dans le délai qui leur aura été prescrit, elle sera arrêtée, mise en prison, et y restera pendant le temps déterminé pour son éloignement.

Art. 11. Les municipalités préviendront, dans trois jours, les directoires de district des troubles survenus dans leur arrondissement. Les directoires de district en instruiront, dans le même délai, les directoires de département, qui en donneront connaissance, dans la huitaine, au ministre de l'intérieur. Le ministre de l'intérieur en mettra, tous les mois, les tableaux sous les yeux du Corps législatif.

Art. 12. Les municipalités et les directoires sont spécialement charges de dénoncer les auteurs des troubles aux accusateurs publics près des tribunaux. Les commissaires du roi rendront compte, tous les 15 jours, au ministre de la jus

tice des poursuites qui auront lieu. Le ministre de la justice en instruira, tous les mois, le Corps législatif.

Art. 13. Si les informations établissent qu'il y a complot contre la sûreté de 1 Etat, il en sera envoyé des expéditions au Corps législatif, qui décidera s'il y a lieu à accusation à la haute cour nationale.

« Art. 14. Si des corps ou des individus revêtus de fonctions publiques refusent ou négligent d'employer les moyens que la loi leur confie pour prévenir une sédition, ils en seront personnellement responsables. S'il est nécessaire d'employer la force pour dissiper les troubles, les dépenses que cet emploi aura occasionnées seront réparties sur des habitants de la commune, au marc la livre de leurs contributions, sauf son recours solidaire contre les auteurs, fauteurs et complices de la sédition.

«Art. 15. Tout prêtre qui aura prêté le serment civique, pourra, conformément au décret du 7 mai 1791, célébrer la messe dans les églises paroissiales, succursales et oratoires nationaux, hors les heures du culte salarié par l'Etat.

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Art. 16ous ceux des ci-devant religieux ou religieuses qu. ont opté pour la vie commune, et qui auront satisfai: aux dispositions de la présente loi, pourront ouvrir leurs chapelles au public, et y admettre ceux des prêtres qui justifieront avoir prêté le serment civique.

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Un membre, au nom de la deuxième section du comité de législation: Voici le projet de décret adopté par la deuxième section du comité de législation sur le même objet:

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L'Assemblée nationale, considérant que si les principes du droit naturel et de la Constitution française consacrent la liberté des opinions et des cultes religieux, ces mêmes principes réprouvent et condamnent tout acte qui, sous prétexte de religion, trouble l'ordre public etabli par la loi: considérant que l'exercice des droits naturels, civils et politiques, garantis à tous les Français par la Constitution, doit être restreint et motivé relativement aux citoyens qui refusent d'obéir à la loi; considérant enfin qu'il est de son devoir et de sa sollicitude d'arrêter, par tous les moyens que la souveraineté nationale lui a transmis, les troubles qui agitent l'Empire, décrète ce qui suit :

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Art. 1. Tout ecclésiastique français, recevant de l'Etat un traitement, salaire ou pension, à quelque titre et sous quelque dénomination qué ce soit, sera tenu, dans la quinzaine qui suivra la publication du présent décret, de prèter, écrire et signer de sa main, devant le conseil général de la commune du lieu de sa résidence, ou devant le directoire de son district, le serment civique, prescrit par l'article II du titre 2 de la Constitution, et de faire sa déclaration qu'il ne troublera en aucune manière les opinions religieuses, et n'excitera jamais les citoyens à la désobéissance aux lois. (Applaudissements.)

« Art. 2. Le procès-verbal qui constatera la prestation de serment et la déclaration ci-dessus sera déposé, dans les trois jours, au directoire du département, lequel en enverra de suite une expédition en forme, au ministre de l'intérieur, qui en instruira, sans délai, le Corps législatif. Art 3. Tout ecclésiastique qui ne se sera pas conformé aux dispositions de l'article 1er, dans le délai prescrit, est, par cela seul, déclaré suspect de rébellion à la loi, et privé de tout traitement et pension sur l'Etat. En conséquence,

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il est défendu à tout receveur et caissier de lui faire aucun payement, à peine de responsabilité personnelle, et d'être poursuivi et puni comme prévaricateur.

«Art. 4. Si, par ses discours, ses écrits, ou par toute autre voie, directe ou indirecte, l'ecclésiastique non-sermenté excite quelque trouble, ou porte les citoyens à la désobéissance aux lois, il en sera, sur-le-champ, dressé procès-verbal par la municipalité, ou par le juge de paix du canton; et sur ce procès-verbal, envoyé dans les trois jours au directoire du département, celuici, sur sa responsabilité, dénoncera à l'accusateur public l'auteur du trouble, et, dans le cas de dénonciation, l'ecclésiastique sera tenu provisoirement et jusqu'à ce qu'il ait été prononcé par les tribunaux, de s'éloigner de quatre lieues au moins de l'endroit où le trouble aura été commis.

"Art. 5. Faute, par l'ecclésiastique prévenu, de s'éloigner, ainsi qu'il est dit à l'article précédent, dans les trois jours de la sommation, qui lui en sera faite par le procureur général syndic, il sera de nouveau dénoncé comme rebelle à la loi, et puni de deux ans de détention.

Art. 6. Dans les cas de dénonciation portés en l'article 4 ci-dessus, les ecclésiastiques convaincus seront punis pour la première fois de deux années de détention, en cas de récidive, de trois années de gène, et, à la troisième fois, ils seront bannis du royaume à perpétuité.

Art. 7. Les dispositions de l'article précédent sont indépendantes des lois portées dans le Code pénal contre les perturbateurs du repos public. Dans les cas de délits plus graves, les corps administratifs, tribunaux, accusateurs publics et officiers de police, chacun en ce qui les concerne, veilleront, avec une sévère exactitude, à l'exécution de ces lois ainsi qu'à celle du présent décret, à peine de forfaiture et de destitution.

"Art. 8. Les édifices nationaux destinés à l'exercice du culte dont les frais ont été déclarés à la charge du Trésor public, seront exclusivement réservés aux ecclésiastiques fonctionnaires salariés par l'Etat. Pourront neanmoins y célébrer la messe, ceux des ecclésiastiques non fonctionnaires qui auront prêté le serment et fait la déclaration énoncée à l'article du présent décret, de même que ceux qui en auront obtenu la permission expresse du ministre du culte des

servant.

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Art. 9. Le comité de législation est chargé de présenter incessamment un projet de décret qui fixe un mode uniforme de constater les naissances, mariages et décès pour tous les citoyens, sans distinction, et désigner les officiers civils qui en dresseront et conserveront les actes.

Le comité d'instruction publique présentera aussi incessamment un projet de loi relatif à la suppression des congrégations qui existent sous diverses dénominations dans le royaume.

M. Léonard Robin, au nom de la quatrième section du comité de législation. Voici le projet de décret de la quatrième section de votre comité sur le même objet :

L Assemblée nationale, instruite des troubles qui agitent différentes parties de l'Empire; considérant que la religion qui les réprouve n'en est que le prétexte; que l'exercice des fonctions purement civiles par les ministres du culte pour constater les naissances, mariages et décès, peut en être aussi, dans plusieurs endroits, le prétexte,

mais que la haine de la Constitution, l'esprit de révolte en sont la principale cause; que cette conspiration intérieure paraît intimement liée avec la conjuration des émigrés; que ces désordres ne peuvent avoir des motifs religieux lorsque le culte des religions est généralement permis, également protégé par la Constitution; que cette liberté doit cependant être restreinte et même réprimée d'après la Constitution même, là où la manifestation des opinions religieuses tro blerait l'ordre public établi par la loi; qu'ainsi il est instant de séparer de l'ordre religieux ce qui appartient essentiellement à l'ordre civil, et de réprimer, par des mesures sages et sévères, les attentats qui tendent à cette subversion criminelle, décrète ce qui suit :

Art. 1er. Il sera incessamment pourvu au mode dont les naissances, mariages et décès seront constatés à l'avenir, et reconnus par la loi; et ce mode sera en pleine activité, à compter du 1er janvier prochain.

« Art. 2. L'Assemblée nationale n'entend interdire à aucun culte la faculté de tenir pour son usage particulier la note des registres de baptêmes ou naissances et mariages. (Murmures.)

«Art. 3. Les frais et traitements des ministres des diverses cultes seront à la charge des citoyens qui professeront ces cultes; il n'y a d'exception que le culte catholique desservi par les prêtres sermentés, dont les frais et le traitement de ses ministres continueront, aux termes de la Constitution, de faire partie de la dette nationale.

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Art. 4. Les prêtres non sermentés, qui voudront exercer les actes de la religion ailleurs que dans les églises desservies par les prêtres assermentés, ne pourront le faire, dans les maisons particulières, que pour les person es y demeurant. (Murmures.) Ils seront tenus de se pourvoir de lieux publics pour l'exercice commun de leurs actes de religion, et d'en donner avis à la municipalité du lieu, ainsi que des temps et heures de leurs exercices.

« Art. 5. Toute personne tenant de la nation, pension, traitement, grade, offices ou fonctions à exercer, et en général toutes espèces d'avantages au delà des droits communs aux simples citoyens en sera complètement déchu, si, dans le mois de la publication du présent décret, elle n'a déposé à la municipalité son serment civique par écrit et signé par elle, ou bien authentiquement écrit sous sa dictée, dans le cas où elle ne pourrait écrire elle-même.

Art. 6. Tout ministre ou officier d'un culte quelconque ne pourra en exercer les fonctions sil n'a, au préalable, prêté son serment civique dans le delai ci-dessus, et s'il n'y a joint sa soumission par écrit de ne jamais troubler directement ni indirectement les autres religions ou croyances.

Art. 7. Toute personne qui exercerait le ministère ou les actes d'un culte avant d'avoir rempli les conditions présentees dans l'article precedent, ou qui, après avoir pris ce double engagement, viendrait à y manquer, subira la peine de déportation hors du royaume, sans dérogeraux peines plus graves prononcees par la loi.

Art. 8. Le comite de legislation présentera dans huitaine un projet de loi pour développer et étendre les lois déjà faites contre les attroupements, séditions, troubles publics, écrits ou discours provoquant à la désobéissance à la loi dans le cas où la religion et les cultes en seraient la cause ou le prétexte, et en distinguant les

prêtres ou autres ministres des autres citoyens délinquants.

« Art. 9. Les officiers et fonctionnaires publics chargés de dresser les procès-verbaux et de faire les premières instructions pour constater les délits, les accusateurs publics, les commissaires du roi dans les tribunaux, et les tribunaux eux-mêmes, seront, chacun à leur égard, responsables des défauts de poursuites. Dans les cas où les délits leur seront connus, ils encourront la peine de destitution.

« Art. 10. Les procureurs généraux des départements, les procureurs-syndics des districts, les procureurs des communes, et en général, les corps administratifs, auront la concurrence, tant pour dénoncer les crimes et délits ci-dessus mentionnés, que pour poursuivre la responsabilité et la destitution des officiers publics, accusateurs et juges négligents aux termes du précédent article. »

Plusieurs membres: La priorité pour le projet de M. François de Neufchâteau.

D'autres membres : La seconde lecture du prémier projet de décret! (Murmures.)

Un membre: Monsieur le Président, au nom de plusieurs de nos collègues, je demande la priorité sans une seconde lecture.

M. Albitte ainé. La mesure que nous avons dessein de prendre dans ce moment-ci, doit porter un coup bien important et très utile; mais il faut savoir bien profondément de quelle manière nous porterons le coup; c'est pourquoi je demande que les quatre projets soient imprimés.

Plusieurs membres : La question préalable sur l'impression!

M. Vergniaud. Les mesures à prendre pour faire enfin cesser les troubles qui agitent le royaume ont été suffisamment développées par ces quatre projets de décret. Il s'agit de savoir maintenant auquel de ces quatre projets on accordera la priorité. Sans doute, aucun d'eux ne contient toutes les dispositions nécessaires; cependant il faut, dès cet instant, décréter la priorité pour l'un des quatre; parce qu'après avoir adopté les articles qui vous auront parù les plus sages, Vous pourrez ajouter ceux qui vous paraîtront utiles, et vous les puiserez, s'il le faut, dans les trois autres projets de décret auxquels vous aurez refusé là priorité. (Applaudissements.)

Nous ne serons pas embarrassés pour choisir celui qui parait le plus complet, quand même il ne le serait pas autant qu'il pourrait l'être. Or, le premier projet qui a été lu, est certainement celui qui embrasse le plus les mesures que la sagesse indique, et que la justice peut adopter pour porter enfin remède aux troubles qui nous désolent. Je demande donc la priorité pour celui-là.

(L'Assemblée accorde, à l'unanimité, la priorité au projet de M. François de Neufchâteau.(Vifs applaudissements.)

Un membre: Je demande que le projet soit adopté sans désemparer.

Plusieurs membres : L'impression des quatre projets de décret!

D'autres membres: L'impression du premier projet seulement !

Plusieurs membres: La question préalable sur l'impression!

M. Gensonné. Je demande la question préalable sur la motion qui a été faite d'imprimer les quatre projets de décret. Les projets présentés

par le comité de législation ne doivent être envisagés que comme une simple rédaction. Il y a déjà eu une foule de projets de décret, et certainement on ne peut plus porter de jour sur cette matière; elle est coulée à fond.

Je demande que l'Assemblée nationale, après avoir décrété l'urgence, livre à la discussion, article par article, le projet auquel elle a accordé la priorité, sauf les amendements qui pourront être adoptés.

Plusieurs membres: Appuyé! Aux voix ! aux voix ! Fermez la discussion!

(L'Assemblée ferme la discussion, décide que les projets ne seront pas imprimés, que la discussion du premier commencera immédiatement article par article et décrète l'urgence sauf la rédaction des motifs.)

M. le Président. J'annonce à l'Assemblée que M. le ministre de l'intérieur demande la parole.

M. Delessart, ministre de l'intérieur, ministre des affaires étrangères par intérim. C'est, comme chargé par intérim du département des affaires étrangères, que je vais avoir l'honneur de parler à l'Assemblée (1).

Messieurs,

Le roi m'a autorisé à donner conaissance à l'Assemblée nationale, des réponses que Sa Majesté a reçues de diverses puissances, depuis celles que M. de Montmorin a communiquées à l'Assemblée. Je commencerai par la réponse de l'empereur. Cette réponse est en latin: mais la traduction que je vais lire est, je crois fidèle (1). Vienne, le 23 octobre 1791.

Très sérénissime et très puissant prince, monsieur, notre très cher frère, cousin et allié, l'ambassadeur de Votre Majesté nous a remis les lettres par lesquelles Elle nous certifie son acceptation de la nouvelle Constitution qui lui a été présentée. Plus nous sommes étroitement unis par les liens du sang, de l'amitié, de l'alliance et du voisinage, plus nous avons à cœur la conservation de Votre Majesté et de sa famille royale, de même que la dignité de la Couronne et le salut de la monarchie française. Ainsi nous désirons avec une affection sincère, que le parti que Votre Majesté a cru devoir prendre dans l'état actuel des choses, ait le succ's qu'elle en attend, qu'il réponde à ses vœux pour la félicité publique; et en même temps, que les causes qui sont communes au roi et aux princes, et qui, par ce qui s'est passé dernièrement, ont donné lieu à de sinistres augures, cessent pour l'avenir, et que

Assemblée nationale

(1) Bibliothèque nationale. législative. Diplomatie, n. 7. (2) Voici la répon-e en latin de l'Empereur.

Vieunæ, die 23 mensis octobris, anno 1791. Serenissime et potentissime princeps, domine frater, consobrine et affinis charissime! reddidit nobis Majestatis Vestræ orator ejusdem litteras quibus certiores nos facit, se oblatos sibi novæ constitutionis articulos acceptasse. Quo arctiora nos conjungunt sanguinis, amicitiæ, forderis ac vicinitatis vincula, és magis cordi nobis est tam majestatis vestræ regiæque familia incolumitas, quam et ipsa coronæ suæ dignitas; et monarchia francic salus. Itaque sincero affectu optamus, ut consilium, quod majestas vestra in presenti rerum statu sibi capiendum credidit, ii consequantur successus, qui expectationi, suisque pro publica felicitate votis plenè re-pon leant, et simul illæ quæ regibus et principibus communes sunt, ex nuper præteritis sinistre ominandi, causa deinceps cessent serioque eavendi necessitas evitetur. Deum interea precamur, ut majestatem nostram diu sospitem servet, atque incolumeu.

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