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Mais, ajoute l'art. 9, s'il advient, au cours du mariage, que les époux n'aient pas la même nationalité, leur dernière législation commune devra, pour l'application des articles précités, être considérée comme leur loi nationale. En d'autres termes, si un Français se faisait naturaliser, seul, en Allemagne, les époux n'auraient pas le droit de faire un contrat au cours de leur mariage, puisque la loi française, leur dernière législation commune ne le permet pas. Si, au contraire, deux époux français, mariés sans contrat, se faisaient tous deux naturaliser en Allemagne et si le mari obtenait seul, ultérieurement, sa réintégration dans la qualité de Français, il n'en conserverait pas moins le droit de passer, même devant un notaire français, un contrat au cours du mariage, conformément à la loi allemande, dernière législation commune des époux.

L'art. 10 précise que la convention n'aura pas d'application lorsque la loi qui devrait être appliquée ne serait pas celle d'un Etat contractant. Cette disposition se retrouve dans les Conventions du 12 juin 1902, relative au mariage, au divorce et à la séparation de corps. Elle entraîne la conséquence suivante des époux espagnols se font naturaliser français ; ils établissent ultérieurement leur domicile en Allemagne et, devant un tribunal de ce pays, se pose une question relative aux effets du contrat antérieur au mariage. Dans sa décision, le juge allemand ne sera pas contraint d'observer l'art. 5, § 1er de la Convention et de juger conformément à la loi espagnole, puisque cette loi n'est pas celle d'un des Etats contractants.

Dans les dispositions finales qui, dans l'ensemble, n'offrent qu'un intérêt secondaire, seul l'art. 12 nécessite une courte observation. Il dispose que la convention s'applique de plein droit aux territoires européens des Etats contractants, à l'exclusion des territoires, possessions ou colonies situés hors d'Europe, et des circonscriptions consulaires judiciaires. Il nous paraît hors de doute, par suite, que la convention ne s'applique pas en Algérie, malgré la jurisprudence de la Cour d'Alger qui, malgré les termes semblables employés dans plusieurs conventions antérieures, les déclare applicables dans notre grande possession africaine.

Gaston CIUZEL,

Docteur en droit,

Sous-chef du bureau de législation au Ministère de la Justice.

La protection de la race dans les rapports
internationaux '.

Fin.

II

DROIT INTERNATIONAL

La stérilisation, telle qu'elle est prévue par les lois des Etats américains que nous venons de mentionner, ne peut guère donner lieu pratiquement à des difficultés relevant du droit international.

Il faudrait supposer une action en dommages-intérêts intentée à l'étranger par l'opéré contre l'opérateur.

En ce cas, toute question de compétence réservée, il est certain que le médecin ou chirurgien sera couvert, quant au principe même de l'opération, sous réserve de la responsabilité au cas de faute, par la loi en vigueur dans le lieu où la stérilisation aura été pratiquée.

Les lois de stérilisation des tarés et des dégénérés sont des lois d'ordre public local.

Leur effet est absolu dans tout le territoire qu'elles régissent quels que soient la nationalité et le domicile de l'opéré et de l'opérateur.

17. Au contraire, les empêchements à mariage, nullités de mariage, oppositions à mariage et motifs de divorce ou de séparation de corps, basés sur des tares physiques ou des maladies, sont de nature à donner naissance à de fréquentes difficultés d'ordre international.

Les principes généraux doivent être appliqués en ce sens qu'il y aura lieu d'observer la loi du domicile si, de façon générale, la loi du domicile régit les conditions de fond du mariage, du divorce ou de la séparation de corps et la loi nationale, si, de façon générale, compétence est reconnue à cette dernière loi.

Les seules questions spéciales qui s'élèvent sont celles qui concernent la mise en jeu expresse ou implicite de la notion d'ordre public.

18. En Angleterre, les restrictions que la notion d'ordre

1. V. commencement de l'étude, Clunet 1913, p. 795.

public permet d'apporter à l'observation de la loi du domicile nous paraissent sans intérêt pour notre étude '-2.

cas de

Il en est de même de celles qui sont formulées par l'art. 2. de la loi argentine sur le mariage civil, entrée en vigueur le 1er décembre 1889, puisque, le principe de l'observation de la loi du domicile étant admis, réserve n'est faite, au mariage célébré hors du territoire argentin, que de l'observation des §§ 1, 2, 3, 5 et 6 de l'art. 9 de cette même loi sur le mariage civil et que l'insanité, seul empêchement au mariage fondé en droit argentin sur une tare physique, est prévu par le § 7 de cet article.

Au contraire, les lois chilienne et mexicaine se préoccupent, dans les exceptions par elles apportées à l'application de la loi du domicile, de la protection de la race.

La loi chilienne sur le mariage civil du 10 janvier 1884, porte, dans son art. 15, que, malgré l'observation en principe de la loi du domicile, « si un Chilien ou une Chilienne contracte mariage à l'étranger en violation des dispositions des art. 43, 5, 6 et 7 de la présente loi, cette violation aura au Chili le même effet que si elle avait été commise au Chili », et l'art. 175 du Code civil mexicain, dans une formule plus générale, déclare valable le mariage contracté à l'étranger soit entre Mexicains, soit entre Mexicains et étrangers, « s'il est établi que le mariage a été célébré conformément aux formes et conditions formulées par la loi du lieu de la célé

1. Dicey, Conflict of laws, 2° éd., 1908, p. 615. « La capacité de chacune des parties au mariage doit être appréciée d'après les lois de leurs domiciles respectifs... » Cet auteur ajoute, il est vrai, p. 634, qu'« un mariage célébré en Angleterre n'est pas nul en raison d'une incapacité qui, bien qu'édictée par la loi du domicile de l'une des parties ou des deux, est de la nature de celles que nos Cours refusent de reconnaitre » ; mais il ne cite comme exemples que les interdictions basées sur les vœux et ordres religieux et sur la différence de race. L'hypothèse inverse (mariages d'Anglais célébrés hors d'Angleterre) n'a pas être envisagée, la loi anglaise ne connaissant ni empêchements à mariage, ni causes de divorce ou de séparation de corps basés sur l'intérêt de la race.

2. Le Danemark adopte également le principe de l'observation de la loi du domicile sous réserve de la mise en œuvre de la théorie de la fraude à la loi nationale, Laws relating to marriage in force in certain foreign countries, London, p. 76; cette réserve a de l'intérêt pour l'étude actuelle, la loi danoise édictant la nullité du mariage pour folie, ibid., p. 73.

3. Cet art. 4, no 5, formule l'empêchement basé sur la folie.

bration et que le citoyen mexicain n'a pas contrevenu aux dispositions du présent Code concernant les empêchements, la capacité de se marier et le consentement des ascendants ». Au point de vue de la théorie pure, ces lois qui mettent en œuvre à la fois le principe de la loi du domicile et celui de la loi nationale sont certainement très critiquables, mais on ne peut nier qu'en fait le résultat obtenu est excellent.

On ne saurait trop énergiquement combattre le mariage des fous et des dégénérés.

19. Si nous envisageons maintenant les législations dont le droit international repose sur l'observation de la loi nationale, France, Belgique, Luxembourg, C. civ. fr. belge et luxemb., art. 3; Allemagne, 1. d'introd. au Code civil allemand, art. 13; Hongrie, 1. 31 de 1894, art. 108; Italie, C. civ., art. 100; Hollande, C. civ., art. 138; Suisse, loi fédérale du 25 juin 1891, mod. par l'art. 61 du titre final du Code civil suisse 2, Portugal, décret-loi du 25 décembre 1910, art. 59; Roumanie 3, Serbie, Suède, loi du 8 juillet 1904 sur le droit international du mariage, art. 1; Grèce3, Japon, loi concernant l'application des lois en général, art. 13, et Brésil, décret 181 du 24 janvier 1890 6, aucune difficulté sérieuse n'existe lorsque

1. L'art. 174 C. civ. mexicain montre que le droit mexicain part du principe de l'application de la loi du domicile « un mariage célébré entre étrangers hors du territoire de la République, et valable d'après la loi du pays de la célébration, aura les effets civils d'un mariage valable dans le district fédéral et le territoire de la Californie inférieure. »

2. Le droit suisse applique très nettement aux mariages d'étrangers ou mixtes célébrés en Suisse le principe de l'observation de la loi nationale, art. 7 c, 1. 25 juin 1891 : « La validité d'un mariage célébré entre deux personnes dont l'une ou toutes les deux sont étrangères, est régie, pour chacune d'elles, par sa loi nationale»; mais pour les mariages célébrés hors de Suisse, le système est éminemment transactionnel, art. 7 f. « La validité d'un mariage célébré à l'étranger, conformément aux lois qui y sont en vigueur, est reconnue en Suisse, à moins que les parties ne l'aient conclu à l'étranger dans l'intention manifeste d'éluder les causes de nullité prévues par la loi suisse. Le mariage qui n'est pas valable à teneur de la loi étrangère, sous l'empire de laquelle il a été contracté, ne peut être annulé en Suisse que s'il est annulable à teneur de la loi suisse.» Voir, pour l'application du système suisse, au cas d'impuis-sance, Cour de justice civile de Genève, 21 mai 1910, Clunet 1912, p. 310. 3. Laws relating at marriage, p. 219, note 4.

4. Ibid., p. 238.

5. Ibid., p. 111.

6. Clunet 1911, p. 87, note 2.

l'empêchement à mariage, basé sur une maladie ou tare physique de nature à compromettre l'avenir de la race, est formulė par la loi nationale et ne l'est pas par la loi locale.

Il nous paraît, en effet, certain que l'ordre public local, quelle que soit la portée que l'on veuille donner à cette notion éminemment imprécise, n'exige nullement que la prohibition de la loi nationale étrangère soit méconnue.

Un Etat qui laisse toute liberté pour se marier à ses ressortissants atteints soit de folie avec intervalles lucides, soit de maladies contagieuses vénériennes ou héréditaires, ne nous paraît avoir aucun iutérêt majeur à permettre sur son territoire, contrairement à leur loi nationale, le mariage d'étrangers affectés de maladies ou tares de cette nature, alors surtout que le plus souvent ces étrangers ne retourneront pas dans leur patrie, si leur mariage est célébré contrairement à leur loi nationale.

20. Dans l'hypothèse inverse, c'est-à-dire si c'est la loi locale qui fait de la tare physique ou de la maladie une cause d'empêchement ou d'opposition à mariage et la loi nationale qui n'en tient pas compte, la loi locale devra, en règle, l'emporter sur la loi nationale.

Aucun doute ne peut exister dans les législations qui, malgré le principe de l'observation de la loi nationale, décident que les étrangers doivent, pour les conditions de fond du mariage, satisfaire à la fois aux prescriptions de leur loi nationale et à celles de la loi locale.

De ce nombre sont le Code civil italien, art. 102 : « la capacité d'un étranger de se marier est déterminée par les lois du pays auquel il appartient, mais l'étranger est aussi soumis aux empêchements énoncés dans la seconde section du premier chapitre de ce titre », le décret portugais du 25 décembre 1910, art. 62: « Les dispositions du présent décret et de celui régissant l'état civil concernant les causes d'empêchement à mariage et les formalités préliminaires du mariage civil devront être appliquées aux mariages d'étrangers célébrés en Portugal 2 », et le décret brésilien no 181

1. Nous rappelons que, dans ce titre, se trouve l'art. 61 du C. civ. ital. ainsi conçu : « Le mariage ne peut être contracté par des personnes interdites pour infirmité mentale. »

2. Le système est le même en Norvège, Laws relating to marriage in force in certain foreign countries, p. 187. « L'étranger qui désire con

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