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du 24 janvier 1890, art. 48, dont la rédaction est très voisine de celle du décret-loi portugais précité '.

A défaut de texte formel, la solution est, selon nous, la même, notamment en France, en Belgique et dans le Luxembourg, par application de la notion d'ordre public.

La lutte contre la propagation des tares et dégénérescences physiques intéresse d'autant plus directement l'ordre public que de son succès dépend, dans une certaine mesure, la diminution de la criminalité.

Malgré la gravité de ces raisons, qui sont vraies dans tous les pays, la rédaction des textes en vigueur crée en Hongrie une situation toute différente.

L'art. 111 de la loi 31 de 1894 porte que, « en cas de mariage contracté en Hongrie, les art. 11, 12 et 13 de la présente loi sont aussi applicables aux étrangers ».

Aucun renvoi n'étant fait à l'art. 14, qui s'occupe de l'empêchement basé sur la maladie mentale (Geiteskrankheit) et sur la surdi-mutité rendant impossible la communication même par signes, aucune considération d'ordre public ne peut permettre en Hongrie de faire application à des étrangers de cet art. 14.

21. S'il s'agit non plus de faire obstacle à la célébration d'un mariage projeté mais d'en faire prononcer la nullité en raison de la violation d'un empêchement fondé sur l'existence d'une tare ou maladie de nature à compromettre l'avenir de la race, les particularités suivantes doivent être signalées.

Jamais, selon nous, la loi locale ne fera obstacle, si naturellement elle a pour base le principe de l'observation de la loi nationale, à la nullité qui découlerait de la loi nationale de l'une ou l'autre des parties. L'ordre public local nous paraît sans intérêt au maintien du mariage d'épileptiques, de syphilitiques ou de fous mariés lors d'un intervalle lucide.

La nullité du mariage, déclarée par application de la loi nationale, aura effet partout.

tracter mariage en Norvège doit produire les certificats exigés des sujets norvégiens (par suite, celui de vaccination, voir, supra, n° 9) et doit aussi prouver que d'après la loi de son propre pays il n'existe pas d'empêchement au mariage. »><

1. Clunet 1911, p. 88-89.

2. Nous rappelons que le mariage des interdits est prohibé en France, en Belgique et dans le Luxembourg. Voir supra, no 6.

Au contraire, la nullité prononcée en vertu de la loi locale, dans les cas où cette loi aura dit applicables aux étrangers les empêchements édictés par elle en raison de maladies ou tares physiques, aura un effet purement territorial.

22. La délicatesse des questions que nous venons d'envisager s'accentue lorsqu'il s'agit des causes de divorce ou de séparation de corps.

Si la loi nationale étrangère, compétente pour déterminer les causes de divorce et de séparation de corps, fait, contrairement à la loi locale, d'une tare physique ou d'une maladie un motif de dissolution ou de relâchement du lien conjugal, on peut soutenir que cette conception contient une violation du principe d'ordre public que les époux se doivent mutuellement assistance et que l'abandon du conjoint, tombé malade après le mariage, constitue un exemple démoralisant '.

Cette idée ne nous paraît pas juste de façon absolue. Elle doit être complètement écartée lorsque toute vie commune est devenue impossible, que, par exemple, l'un des époux est interné pour le restant de ses jours et que la loi étrangère, qui permettra le divorce ou la séparation de corps en raison de la maladie du conjoint, pourvoira à ce que son entretien matériel soit autant que possible à l'abri de tout risque; on ne peut légitimement demander plus lorsque, en fait, la vie conjugale est irrémédiablement terminée.

Au contraire, l'argumentation sera vraie si l'entretien du conjoint malade n'apparaît pas comme assuré, et si la séparation de fait des époux n'est pas la conséquence inéluctable de la maladie; dans l'un ou l'autre cas, l'ordre public local, notamment en France, en Belgique et dans le Luxembourg, fera obstacle à la prononciation du divorce ou même de la séparation de corps.

Dans l'hypothèse inverse, c'est-à-dire si la tare physique ou la maladie constitue une cause de divorce ou de séparation, d'après la loi locale et non d'après la loi nationale, on peut faire valoir, pour obtenir la prédominance de la loi locale, que le maintien légal du lien conjugal, lorsque notamment toute vie commune a cessé par suite de l'internement de l'époux malade, conduit le plus souvent à des unions illégitimes.

1. Voir Laurent, Droit civil international, t. V, no 136, p. 289.

Mais, selon nous, la loi nationale doit, dans ce dernier cas. toujours l'emporter sur la loi locale.

L'union illégitime du conjoint resté en bonne santé est une conséquence qui n'est nullement certaine; sa seule possibilité ne peut, par suite, permettre de dire qu'il y a violation de l'ordre public local.

23. Naturellement, les principes que nous venons de poser ne sont applicables qu'en l'absence de convention internationale les écartant.

Un exemple de conventions de cette nature se trouve dans les Conventions de La Haye sur le mariage et sur la séparation de corps et le divorce.

La Convention sur le mariage qui régit les rapports de la France avec la Belgique, la Hollande, le Luxembourg, la Suède, l'Allemagne, la Suisse, la Hongrie, la Roumanie, l'Italie, le Portugal et l'Espagne a écarté toute mise en œuvre de la notion générale d'ordre public. La loi nationale de l'une et l'autre partie doit, par suite, être observée de façon absolue toutes les fois que la Convention est applicable, qu'il s'agisse d'empêchements à mariage, d'oppositions à mariage ou de nullités de mariage, à la condition toutefois que, pour les Etats confédérés, la loi à mettre en œuvre soit une loi fédérale et non une loi particulière d'Etat ou de canton confédéré 2.

La Convention sur la séparation de corps et le divorce, pour laquelle, réserve faite de l'Espagne, les Etats contractants sont les mêmes que pour la précédente Convention, a rejeté elle aussi la notion d'ordre public en tant que notion générale 3, mais elle a, afin de concilier les principes et les nécessités pratiques, permis à chaque Etat d'exiger que la demande de divorce ou de séparation soit justifiée « à la fois par la loi nationale des époux et par la loi du lieu où la demande est formée encore que ce soit pour des causes différentes », tout en précisant, art. 3, que, « nonobstant les dispositions des art. 1 et 2, la loi nationale sera seule observée si la loi du lieu où la demande est formée le prescrit ou le permet ».

1. Maurice Travers, La Convention de La Haye relative au mariage, t. I, no 55 et s., p. 39 et s.

2. Maurice Travers, op. cit., no 52, p. 37.

3. Maurice Travers, La Convention de La Haye relative au divorce et à la séparation de corps, n° 207, p. 281.

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Selon nous, le principe d'interprétation est que, sauf existence de textes précis contraires, et tel est le cas de la législation allemande, la loi nationale doit être exclusivement suivie, sauf si elle est contraire à l'ordre public local'. Pratiquement, étant données les législations des Etats contractants, une distinction doit être faite lorsque le divorce ou la séparation sera demandé en raison d'une tare ou maladie physique.

S'il s'agit de l'application des lois allemande, suisse et suédoise, et si la cause invoquée est l'aliénation mentale du défendeur, il n'y aura besoin de justifier d'aucune cause de divorce, de séparation admise par la loi locale, car ces législations se préoccupent de l'entretien du défendeur et exigent que toute vie commune soit à jamais impossible 2.

Si, au contraire, la disposition de loi invoquée est celle de la loi portugaise qui permet 3 la prononciation du divorce ou de la séparation pour maladie contagieuse incurable ou maladie entraînant aberration sexuelle, la justification d'une cause de divorce ou de séparation acceptée par la loi du pays. où se suit la procédure sera nécessitée par les exigences de l'ordre public local. Tout particulièrement en France, en Belgique et dans le Luxembourg, le sentiment public serait atteint si, l'un des époux pouvant soigner l'autre au domicile commun et une communauté de vie intellectuelle demeurant possible, le divorce ou la séparation était prononcé en raison d'une maladie contractée sans qu'aucune violation des devoirs conjugaux ait été commise.

Maurice TRAVERS,

Avocat à la Cour de Paris,
Lauréat de l'Institut.

NOTE. V. Clunet. Tables générales, III, vo Divorce, p. 587; IV, Mariage, p. 77; v° eod. v° race, Tables annuelles de 1904 à 1912.

1. Maurice Travers, ibid., no 65, p. 85; no 83, p. 112.

2. Maurice Travers, ibid, no 132, p. 174.

3. Voir supra, no 14.

CLUNET. T. 40. No VII-X, 1913.

72

ANALYSES ET EXTRAITS

SOURCE.

LA

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NAVIGATION AÉRIENNE DANS LES RAPPORTS

INTERNATIONAUX.

Le droit international aérien par XX., L'OPINION

(Direct. M. Colrat), 26 avril 1913.

:

BIBLIOGRAPHIE.

L. D. L'atterrissage en France d'un dirigeable allemand (aff. du Zeppelin), Clunet 1913, p. 512 et 751. L'incident d'Arracourt, ibid., p. 753.

10

Consult. Clunet, Tables générales, III, vo Ballon, p. 216; IV, Navigation aérienne, p. 311; eod. vo Tables annuelles de 1904 à 1912 avec les nombreuses références.

Les deux atterrissages récents, en territoire français d'un ballon dirigeable et d'un biplan militaire allemands (V. Clunet 1913, p. 512 et 751; ibid., p. 753) ont démontré surabondamment à quel point il était urgent de fixer d'une manière positive, et du consentement mutuel des Etats intéressés, les bases du droit international aérien, et de conclure tout au moins à défaut d'une entente internationale acceptée par tous des conventions particulières, premières assises d'une législation plus complète et plus universellement admise.

Déjà, en 1911, les gouvernements et les parlementaires belges et hollandais, s'inquiétaient avec raison du nombre croissant d'aéronats allemands, qui survolaient leur territoire et, souvent même, atterrissaient à proximité de leurs fortifications.

Malheureusement, la Conférence internationale de navigation aérienne, qui, sur l'initiative du Gouvernement français, s'était réunie à Paris en mai 1910 et où dix-huit Etats s'étaient fait représenter avait dû se séparer sans avoir abouti à rien d'utile. On s'est donné beaucoup de mal en haut lieu, pour cacher le plus possible au grand public les véritables motifs de ce fiasco et le ministère de l'Intérieur a poussé la pudeur diplomatique jusqu'à interdire à MM. les Conservateurs de la Bibliothèque Nationale de communiquer aux lecteurs trop curieux le volume édité par les soins de l'Imprimerie Nationale et où se trouvent consignés les procèsverbaux des laborieuses et stériles séances de cette malheureuse conférence. La vérité, c'est qu'on avait commis l'erreur

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