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de fusil, n'y parvient qu'en louchant momentanément à gauche, c'est-à-dire en fermant l'œil de ce côté et en dirigeant l'œil droit sur le point de mire. Du reste, il est peu d'incommodités aussi faciles à simuler que le strabisme.

Oreilles. On est réformé du service militaire lorsqu'on est atteint d'un écoulement muqueux, purulent et fétide par les oreilles; aussi voit-on souvent les jeunes conscrits chercher à enflammer et ulcérer le conduit auditif, en y introduisant de la poudre de cantharides, de l'emplâtre épispatique, qu'ils remplacent, quelque temps après, par un mélange de suif rance, d'huile empyreumatique, d'asa foetida ou du vieux fromage. Il suf fit, pour reconnaître la fraude, d'examiner attentivement les deux oreilles, et surtout de s'assurer que la maladie résiste à un traitement méthodique et bien suivi. N'a-t-on pas vu, dans un cas de ce genre, le conduit auditif contenir, au lieu d'un mucus purulent, du miel dont le conscrit avait fait usage pour fairè prendre le change?

Surdité. La surdité est une des maladies que l'on simule le plus souvent, parce qu'elle exempte du service, qu'on peut la feindre avec facilité, et qu'il n'est pas toujours aisé de distinguer si elle est vraie ou simulée. Rien ne nous semble plus propre à faire connaître les moyens que l'on doit mettre en usage pour démasquer la fourberie, que le récit d'un certain nombre d'observations de faux sourds dont on n'a pas été la dupe. On sait d'ailleurs que la plupart des vrais sourds offrent une physionomie particulière, que présentent rarement ceux qui simulent cette maladie.

1° Un conserit veut se faire passer pour sourd: on laisse tomber adroitement à ses pieds une pièce de monnaie, et il fait un mouvement qui le trahit. 2° Avezvous encore votre père? combien avez-vous de frères? demande-t-on à d'autres; et on a soin de baisser suc cessivement la voix à mesure qu'on leur adresse de nouvelles questions: les fourbes donnent dans le piége, et répondent même lorsqu'on leur parle à voix basse. 3o Un autre, que des moyens analogues n'avaient point démasqué, voit entrer dans la salle où il était détenu, et sans s'y attendre, un gendarme qui s'annonce comme ayant l'ordre de l'arrêter, parce qu'il est prévenu de meurtre et de vol: aussitôt le faux sourd, qui avait parfaitement entendu, proteste contre cette mesure, et pleure parce qu'il est innocent. 4° On en a vu qui avaient introduit dans leurs oreilles des pois, des fèves, de la moelle de jonc; et qui se plaignaient consirablement lorsqu'on cherchait à explorer le conduit auditif avec une curette: « Dans un cas de ce genre, disent MM. Percy et Laurent, à qui nous avons emprunté ces faits, nous fûmes curieux de voir un exem. ple de ces caroncules qui naissent quelquefois dans lé conduit auditif; nous prîmes un canif qui se trouvait sur la table, et en piquant le corps étranger, nous n'en fimes point sortir de sang, et il nous fit éprouver une impression singulière qui éveilla nos soupçons : nous demandâmes alors une curette, et nous fimes, non sans peine, l'extraction d'un pois qui y avait été introduit dans l'espoir d'en imposer à des examinateurs superficiels. 5° Victor Foy, soi-disant Victor Travanait, passait pour sourd et muet depuis plusieurs années, et

voyageait pour éviter le service militaire : toutes les épreuves faites en Allemagne, en France, en Espagne et en Italie, dans le dessein de savoir si la maladie était réelle ou simulée, avaient été infructueuses, lorsque l'abbé Sicard reconnut la fourberie parce que les fautes d'orthographe du faux sourd-muet étaient en parfaite harmonie avec la prononciation; ainsi il écrivait pin pour pain, massu pour massue, etc. : « La raison que j'en donne, dit Sicard, c'est qu'il orthographie comme le peuple; qu'il écrit comme on entend; au lieu que les sourds-muets ne peuvent écrire que comme ils voicnt. Celui-ci est même si ignorant, qu'il partage les mots, et que souvent il lie les prépositions aux mots, imaginant sans doute qu'elles en font partie, et cela parce que la métaphysique des rapports est trop subtile pour être remarquée ou même soupçonnée par les gens de la classe ignorante. Vous remarquerez dans le mot conduit, qu'il écrit quhonduit, la lettre q mise à la place du c, ce qui prouve de la manière la plus évidente que celui qui met l'une à la place de l'autre a entendu, et qu'il a appris que le son de ces deux gutturales est le même.» (Moniteur de 1806, n° 137.)

Mutité ou mutisme. On a eu quelquefois recours pour simuler momentanément la mutité, au datura stramonium; plus souvent encore on a feint d'être muet en cessant volontairement de parler. L'homme de l'art doit se rappeler que dans la mutité réelle, produite par la paralysie des nerfs de la langue, cet organe est mince, émacié, ramassé, comme pelotonné, et qu'il sort difficilement de la bouche: si elle tient à la

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lysie du larynx, l'individu qui en est affecté ne peut faire entendre aucun son, même en toussant; on a beau lui serrer la gorge et le faire éternuer, le mouvement qui en résulte n'est point sonore. On doit encore chercher à déterminer si l'affection n'est pas le résultat d'une blessure au cou, à la poitrine, de la perte d'une portion de la langue, ou si elle n'est pas congéniale; ce que l'on peut savoir à l'aide de certificats parfaitement authentiques. « Tout muet qui tire la langue et la meut, disent MM. Percy et Laurent, s'il n'est pas né sourd, est un imposteur. La réclusion, la privation des alimens, etc., tels sont les moyens employés par les chirurgiens militaires pour découvrir la ruse.

Bégaiement. Ce vice de conformation est le résultat d'une réaction imparfaite du cerveau sur le système musculaire des organes de la prononciation, ou des habitudes vicieuses contractées dès l'enfance dans l'articulation des sons. Tout le monde sait combien il est facile d'imiter les bégues, aussi a-t-on été obligé, pour démasquer les fourbes qui voulaient se faire passer pour tels, de les enfermer dans une chambre, et de ne leur donner des alimens que lorsqu'ils auraient cessé de bégayer.

Ozène. Les punais, car c'est ainsi que l'on désigne les individus dont l'haleine est repoussante, sont impropres au service militaire. Cette maladie a été souvent simulée, en introduisant dans une des narines un bourdonnét de charpie préalablement trempé dans du fromage mou et vieux, dans des sucs fétides, etc. Les considérations suivantes pourront servir à reconnaître si la maladie est réelle : l'ozène est commune chez les

personnes dont le nez est écrasé, vice de conformation d'autant moins rare qu'il semble héréditaire. Le vice vénérien, les dartres, un état scorbutique ou cancéreux, produisent souvent cette maladie, qui peut également être le résultat de la contusion ou d'une plaie du nez. On remarque d'abord tous les symptômes du coryza; bientôt après la membrane muqueuse fournit un pus ichoreux, corrosif, d'une odeur fétide, et qui devient de plus en plus consistant; l'ozène vénérienne est presque toujours un symptôme d'une infection générale. Quand la maladie a son siége dans le sinus maxillaire, il paraît, entre l'os malaire et la fosse canine, une tumeur dure, incolore, offrant quelquefois une petite ouverture fistuleuse au-dessus des dents molaires, par laquelle s'écoule un pus fétide; la douleur est d'autant plus vive que la suppuration est moins abondante.

Perte des dents. (Voyez Maladies simulées par provocation, page 36.)

Paralysie Nous dirons, en parlant des blessures, que la paralysie d'un membre ou d'une partie d'un membre peut être la suite de la blessure du nerf qui se distribue aux muscles chargés de le mouvoir. Il faudra donc examiner attentivement, dans un cas de paralysie que l'on soupçonnera être simulée, si l'on ne découvré pas une cicatrice sur quelque partie du membre; si celui-ci n'a pas été fortement contus à une époque plus ou moins éloignée; s'il est mou et moins volumineux que celui qui n'est pas malade, comme cela s'observe à la suite de paralysies traumatiques. Si tout porte à croire qu'il y a simulation, on n'hésitera pas à propo

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