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qui veut que lorsqu'il est question du mariage de l'enfant d'un interdit, les conventions matrimoniales soient réglées par un avis du conseil de famille, est applicable aux enfans des sourds-muets (1). Un arrêt du parlement de Toulouse, du mois d'août 1679, juge que le sourd-muet de naissance peut tester s'il sait écrire, et s'il est capable d'affaires par l'écriture (2). Cette jurisprudence est suivie dans un arrêt de la Cour de Colmar, du 17 janvier 1815 (3).

Après avoir traité des vices de l'entendement qui peuvent modifier le caractère moral des actions humaines, le médecin-légisté s'occuperait encore avec fruit des systèmes de pénalité mis en usage pour prévenir les crimes, pour les réprimer et pour améliorer l'état moral des condamnés qui conservent la vie. Mais cette tâche a été jusqu'ici réservée aux philosophes, aux moralistes, aux jurisconsultes; nous nous abstiendrons de l'entreprendre. Nous croyons seulement devoir parler d'une question médicale adressée à des gens de l'art, sur le résultat d'un nouveau châtiment. M. Levingstone, jurisconsulte de la Nouvelle-Orléans, chargé par la législature de son pays de rédiger un projet de Code pénal, propose de remplacer la peine de mort par une séclusion absolue et perpétuelle ou un emprisonnement solitaire, de telle façon que le prisonnier ne puisse aucunement communiquer avec ses semblables. Mais avant d'arrrêter définitivement son opinion sur ce

(1) Syrey, Tab. vicen., pag. 740.

(2) Répert. gén. de Jurispr., art. Testament.
(3) Sirey, tom. xv, deuxième partie, pag. 265.

point, M. Levingstone a désiré savoir si un pareil isolement ne pourrait pas finir par attérer les facultés mentales du réclus, et le jeter dans la démence, accident qui, aux yeux du jurisconsulte américain, serait presque aussi funeste que la perte de la vie. M. Esquirol, l'un des médecins consultés, a répondu premièrement, qu'il ne pensait pas que la peine de la séclusion absolue pût être rigoureusement mise à exécution; secondement, qu'il ne pouvait résoudre par aucun fait qui lui fût personnel la question proposée, mais que si l'on s'en rapportait aux exemples de séquestration solitaire observés autrefois dans des couvens ou dans des prisons d'état, et rapportés par quelques historiens, ce genre de supplice affaiblit le corps et l'esprit, sans produire l'aliénation mentale. (Voyez le projet de M. Levingstone, publié à Paris en 1824 ou 1825, par M. Taillandier, avocat.) ( Article communiqué par M. GEORGET.)

Déterminer si une personne qui meurt dans les vingt jours de la date d'un contrat de rente viagère, était atteinte, au moment de la passation de ce contrat, de la maladie qui la fait périr.

Il n'y a pas encore long-temps que les tribunaux ont été saisis d'une affaire qui se rattache naturellement à ce sujet, et qui mérite d'autant plus de fixer Onotre attention, qu'elle était entièrement du ressort de la médecine légale. Voici le fait le sieur Fried, de Strasbourg, passe le 11 mars 1809 un contrat de rente qui renferme une constitution de rente à fonds

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perdus à son profit: cet homme était hémiplégique depuis dix ans, à la suite d'une attaque d'apoplexie ; il meurt le deuxième jour après la passation du contrat de rente, d'une attaque d'apoplexie accidentellement survenue à la suite d'une altercation. On veut savoir si, le jour de la passation de l'acte, il était déjà atteint de la maladie à laquelle il a succombé; ou, d'autres termes, on demande si l'hémiplégie qui existait depuis dix ans, et l'attaque d'apoplexie qui l'a fait périr le deuxième jour de la passation du contrat, ne forment qu'une seule et même maladie. Les débats sont motivés sur les articles 1974 et 1975 du Code civil, dans lesquels on trouve : « Que tout contrat de rente viagère créé sur la tête d'une personne qui était morte au jour du contrat, ne produit aucun effet, et qu'il en est de même du contrat par lequel la rente a été créée sur la tête d'une personne atteinte de la maladie dont elle est décédée dans les vingt jours de la date du con

trat. »

Plusieurs professeurs des facultés de Paris, de Montpellier et de Strasbourg, ainsi que d'autres médecins distingués, sont consultés, et les opinions qu'ils expriment dans leurs rapports ou dans leurs consultations médico-légales ne s'accordent point: les uns pensent que le sieur Fried n'a pas cessé d'être attaqué d'apoplexie, dont les symptômes concomitans ont reparu trois fois, et ils attribuent sa mort à cette maladie, dont il était atteint lors de la passation du contrat de vente de sa maison; les autres sont d'un avis contraire, comme on peut le voir par les conclusions suivantes du docteur Ristelhueber, l'un des médecins qui, dans cette

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occasion, nous paraît avoir fait preuve de plus de talent: 1° Fried est mort d'une apoplexie non déterminée par la même cause qui avait donné lieu à la première attaque, mais provoquée par un accès de colère. 2oL'accès de colère qui a produit l'attaque d'apoplexie doit être considéré comme une cause occasionelle et déterminante, car elle a réduit en acte la disposition à l'apoplexie qui existait chez Fried; elle a converti son infirmité en une apoplexie foudroyante, et, pour parler avec plus de précision, en une autre maladie qui n'existait pas au jour du contrat. 3o Il n'est pas vrai que Fried, hémiplégique depuis dix ans, est mort de la maladie ou infirmité dont il était atteint le jour qu'il a passé le contrat; car Fried, hémiplégique au jour du contrat, ne présentait aucun symptôme d'une attaque d'apoplexie; il n'est donc pas mort de l'hémiplégie qui existait, mais de l'apoplexie survenue à la suite d'une altercation. (Rapports et Consultations de médecine légale, par J. Ristelhueber. Paris, 1821.)

Il est aisé de voir qu'il nous serait impossible d'établir des règles générales propres à résoudre les questions analogues qui pourraient se présenter par la suite; les divers problèmes de ce genre peuvent être accompagnés de circonstances tellement différentes, qu'il est indispensable de les juger individuellement. Toutefois nous admettrons avec le docteur Ristelhueber, que pour que le contrat soit nul, il faut que la personne meure de la maladie ou de l'attaque dont elle était atteinte au jour du contrat, et non au jour de la récidive de l'une ou de l'autre. Ne serait-il pas absurde, en effet, de frapper de nullité un contrat passé

le jour même où un homme éprouve une attaque d'hémoptysie, par cela seul qu'il ineurt à la suite d'une autre attaque, au dix-neuvième jour après la passation de l'acte, tandis qu'il s'était bien porté dans l'intervalle des deux accès? Il est évident que l'individu dont nous parlons n'est pas mort de l'attaque qu'il avait eue au jour du contrat, mais bien de la dernière : ce qui le prouve, c'est qu'il n'a pas été sensiblement malade dans l'intervalle des accès; et l'on conçoit que l'attaque qui l'a fait périr aurait aussi bien pu avoir lieu après les vingt jours, qu'au dix-neuvième jour après la passation de l'acte.

VINGT-CINQUIÈME LEÇON.

De la Mort.

Nous ne nous occuperons, dans ce chapitre, que des moyens de distinguer si la mort est réelle ou apparente; des altérations des tissus et des fluides qui sont le résultat de la mort, et qui pourraient être attribuées à des violences exercées sur les individus vivans ou à des maladies antécédentes; enfin des précautions que l'on doit prendre avant, pendant et après l'ouverture des cadavres.

ARTICLE PREMIER.

Moyens propres à faire reconnaitre si la mort est réelle ou apparente.

Des observations nombreuses rapportées par Lancisi, Zacchias, Philippe Peu, Misson, Guillaume Fabri, Pechlin, Falconnet, Rigaudeaux, etc.; l'histoire

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