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peler ces maladies, simulées par imitation, pour les distinguer de celles qu'il nomme simulées par provocation. Dans le premier cas, dit notre savant confrère, la maladie n'existe pas, elle est feinte : telle est l'épilepsie simulée; dans l'autre cas, au contraire, la maladie. est réelle, mais elle est l'effet d'un artifice: elle a été provoquée dans le dessein d'en imposer et de faire croire à l'existence d'une affection dont la durée est plus ou moins longue; c'est ainsi qu'en appliquant sur la conjonctive une poudre irritante, on provoque une ophthalmie. Quelle que soit la difficulté que l'on éprouve, dans certaines circonstances; à distinguer si la maladie est provoquée, nous pensons devoir admettre la division proposée par le docteur Marc, parce qu'elle est l'expression rigoureuse de ce qui se passe journellement sous nos yeux.

Généralités sur les maladies simulées. Ces généralités doivent comprendre l'histoire des motifs qui portent à feindre les maladies, et celle des moyens généraux propres à faire découvrir que l'affection n'est point réelle.

Des motifs qui portent à simuler les maladies. Ces motifs sont, 1° le désir de se soustraire à certaines charges: ainsi on voit des individus qui se disent malades pour ne point répondre à des assignations; d'autres veulent s'exempter du service militaire ou se faire réformer, et simulent, avec une effronterie dont on a peine à se faire idée, des affections souvent fort graves; 2° l'intention d'éviter une peine afflictive ou infamante, ou de la faire adoucir: combien de fois n'at-on pas vu des prisonniers avoir recours à ce moyen

pour obtenir leur élargissement, ou du moins un adoucissement à leur punition! 3° le désir d'exciter la compassion publique; on connaît la fourberie de ces mendians dont le corps est monstrueusement emphysémateux par suite de l'injection d'une certaine quantité d'air dans le tissu cellulaire sous-cutané, de ceux dont la peau est couverte de plaies et d'ulcères qui sont leur ouvrage, de ceux qui feignent les convulsions, l'extase, etc.; 4o l'intérêt pécuniaire, comme, par exemple, lorsqu'on aggrave les effets d'une blessure légère pour avoir droit à des dommages et intérêts plus considérables; 5o l'ambition, la haine, la crainte, le chagrin, la paresse, l'amour et le fanatisme: tout commen

taire ici deviendrait inutile.

Des moyens généraux propres à faire connaitre que la maladie n'est point réelle. 1o On déterminera d'abord si l'affection est de nature à pouvoir être imitée ou provoquée: en effet, il est des maladies que l'on peut aisément simuler, comme l'aphonie, des douleurs nerveuses, un très-grand nombre de lésions des fonctions intérieures, etc.; il en est d'autres, au contraire, qu'il est difficile et quelquefois même impossible de feindre: telles sont les fièvres, l'anévrysme du cœur, la phthisie pulmonaire, etc.

2o On examinera si la maladie dont il est question est du nombre de celles auxquelles l'individu devrait être plus exposé à raison de son âge, du sexe, de son tempérament, de ses habitudes et du genre de vie qu'il mène.

3° On aura égard à la situation morale de la per

sonne: l'état de ses affaires, ou d'autres motifs, peuventils la porter à feindre une maladie qu'elle n'a pas?

4° On interrogera l'individu avec adresse, de manière à ce qu'il soit obligé de répondre autrement que par oui et par non par ce moyen on le fera souvent tomber en contradiction, ou bien on lui fera avouer qu'il éprouve des symptômes qui sont incompatibles avec la maladie qu'il dit avoir. L'histoire rapportée par Sauvages vient à l'appui de ce précepte: « Une fille de sept ans imitait si parfaitement les gestes et les mouvemens de ceux qui tombent en épilepsie, qu'il n'y avait personne à l'hopital général qui n'y fût trompé. Sauvages lui demanda si elle ne sentait pas un air qui passait de la main à l'humérus, et de là dans le dos et dans le fémur; elle répondit que oui: il ordonna qu'on lui donnât le fouet, et la recette fit tant d'effet sur elle qu'elle se trouva parfaitement guérie.» (Nosologie méthodique, tome IV, page 120, édition de 1772.) Les questions devront être posées avec d'autant plus de finesse que les facultés intellectuelles du malade douteux paraîtront plus développées, et son esprit plus cultivé; on conçoit en effet qu'il sera souvent facile de trouver en défaut un ignorant qui ne seroit point rusé.

5° On cherchera à surprendre l'attention de l'individu, en lui faisant exécuter des mouvemens et des actes auxquels il serait hors d'état de se livrer s'il était réellement atteint de la maladie qu'il accuse.

6° On s'attachera particulièrement à l'examen des causes qui auront pu donner naissance à la maladie; sont-elles en rapport avec celle-ci, l'individu hésite

t-il à assigner une origine quelconque à la maladie dont il se dit attaqué?

7° Mais c'est surtout en comparant les symptômes avec ceux que l'on devrait observer si la maladie était réelle, que l'on parviendra à connaître la vérité. Ici c'est un fourbe qui fait une exposition assez-exacte des phénomènes morbides pour en imposer au premier abord; mais il est trahi parce qu'il fait paraître ces symptômes dans un ordre et dans une succession insolites; là c'est un homme qui craint de ne pas caractériser assez bien l'affection qu'il veut simuler, et qui accuse des phénomènes que l'on n'observe jamais dans cette maladie; plus loin, le faux malade croit bien faire en simulant à chaque visite de nouveaux symptômes, et en omettant de désigner ceux dont il s'était plaint d'abord, et qui étaient en quelque sorte caractéristiques de l'affection.

8° On conseillera des médicamens, et on aura égard aux effets qu'ils produisent et à l'empressement que l'individu met à les prendre; car on sait que, dans la plupart des cas, les personnes bien portantes répugnent à faire usage de substances d'une odeur et d'une saveur désagréables: on pourra donc, en épiant ces personnes à plusieurs reprises, en les surprenant en quelque sorte, s'assurer si elles cachent les médicamens prescrits.

9° On fera également attention à la nature des boissons et des alimens que l'individu paraît préférer. Ne serait-on pas en droit de soupçonner qu'une affection bilieuse est simulée, si le malade douteux repoussait les boissons acidules froides et les alimens légers, pour

obtenir des viandes, des boissons alcoholiques, etc.? 10° Si la maladie que l'on accuse est du nombre de celles qui se manifestent par des accès, on observera l'individu peu de temps avant l'attaque et pendant qu'elle a lieu; on surveillera alors ses gestes, ses cris, son pouls, etc.

11° On n'aura recours à des moyens énergiques, tels que la fustigation, la cautérisation, etc., qu'autant qu'on sera à peu près convaincu que la maladie est simulée ou que l'individu affirmera qu'il a complétement perdu la sensibilité dans un membre ou dans une de ses parties; mais il sera souvent utile, pour l'intimider, de lui proposer l'emploi des moyens les plus violens.

Tels sont les préceptes généraux qui doivent servir de base aux médecins chargés de décider s'il y a ou non simulation d'une maladie; sans doute il en est encore beaucoup d'autres fondés sur les connaissances psycologiques et physiologiques les plus positives, que l'on ne saurait exposer d'une manière générale, parce qu'ils peuvent varier à l'infini. Le médecin ne peut découvrir la ruse, comme l'a fort bien dit le docteur Marc, dans un excellent article du Dictionnaire de médecine (DÉCEPTION, tomeVI), que par l'emploi de ressources ingénieuses, et en quelque sorte improvisées.

S Ier.

Des maladies simulées par imitation.

On désigne ainsi, comme nous l'avons déjà dit, les maladies qui n'existent pas et que l'on feint d'avoir : les principales de ces maladies sont l'amaurose, la myo

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