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bre de citoyens, et à disposer des localités de manière que les voitures puissent circuler sans danger pour les piétons, et sans encombrement de la voie publique. A cet égard les pouvoirs de l'autorité résultent des lois qui désignent à sa surveillance tous les lieux publics, et de celles qui lui confient la police de la voirie.

91. Le maintien du bon ordre et de la tranquillité, l'observation des mœurs sont aussi parmi les objets confiés à la même autorité : sous ce rapport, on peut citer les dispositions qui suivent comme susceptibles d'être prises:

1° L'heure de la clôture du spectacle, et par conséquent celle de son ouverture, peuvent être prescrites à l'avance.

2° Il doit être défendu aux entrepreneurs de distribuer un nombre de billets supérieur à celui des places, afin d'éviter les discussions qui pourraient être occasionnées par cet abus.,

3o Les communications des spectateurs avec les coulisses et les loges particulières où s'habillent les acteurs et les actrices, doivent être fermées.

4° Tout ce qui pourrait interrompre le spectacle et troubler le public doit être interdit la lecture des billets jetés sur la scène, la comparution du directeur ou autre employé devant le public peut être empêchée ou permise selon les circonstances; mais ces mesures ne peuvent pas s'étendre jusqu'à enlever aux spectateurs le droit qui leur appartient d'exprimer leur opinion sur les pièces ou les acteurs, droit dont l'exercice illé

gitime ne doit être réprimé que par les autres spectateurs.

Telles sont, d'une manière générale, les dispositions qui peuvent être prises et qu'il serait impossible d'indiquer avec plus de détail.

92. Outre ces mesures, qui s'appliquent à toutes les représentations, des circonstances particulières peuvent prescrire des ordres exceptionnels: dans certains cas, les réglements généraux pourront fléchir devant une convenance du moment; dans d'autres il sera nécessaire d'ajouter aux réglements une disposition commandée par un fait imprévu.

༡.

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Si la représentation d'une pièce, si la présence d'un acteur est une cause de trouble, la pièce pourra être défendue et le directeur contraint à congédier l'acteur.

93. On a vu dans une circonstance l'autorité municipale prescrire à des entrepreneurs de recevoir un acteur dont l'absence occasionnait le tumulte. Talma avait été expulsé par les sociétaires de la Comédie-Française, le public, admirateur d'un talent qui brillait déjà d'un grand éclat, demanda son rappel le 17 septembre 1790. On s'était porté en foule au Théâtre-Français pour le demander, la soirée avait été très tumultueuse; pour prévenir de plus grands désordres, la municipalité de Paris ordonna aux comédiens français de jouer avec lui; les comédiens ayant refusé d'obtempérer à cet ordre, la municipalité ordonna la clôturé du théâtre, qui ne fut rouvert que quand la

société eut consenti à la rentrée de Talma. Il faut avouer que dans cette circonstance le pouvoir municipal porta très loin l'exercice de son autorité, mais nous pensons que le soin de la tranquillité publique lui donnait le droit d'exiger le rappel de l'acteur congédié, et cet exemple fait voir jusqu'à quel point ce motif peut autoriser les mesures prises par l'autorité municipale.

94. Le principe qui doit être la règle des mesures de cette autorité a déjà été indiqué, et ne doit pas être perdu de vue. Elle peut arrêter toutes les dispositions qui sont commandées par les intérêts confiés à son zèle; mais elle ne peut jamais s'immiscer dans les droits privés, et, en ce qui concerne les spectacles, elle ne doit en aucun cas s'occuper des intérêts particuliers de l'entreprise : elle ne peut, dit la loi du 19 janvier 1791, rien enjoindre aux comédiens que conformément aux lois et aux réglements de police; elle serait donc sans droit pour intervenir dans les contrats passés entre les propriétaires et les comédiens; elle ne pourrait annuler, modifier ni changer en rien leurs transactions pécuniaires, prescrire la forme des billets, leur couleur, les énonciations à y insérer, comme le fit, en 1829, un adjoint du maire de Bordeaux, en un mot s'occuper d'objets privés, si l'intérêt des citoyens ne s'y trouvait pas attaché; et les actes qu'elle se permettrait ainsi hors de ses attributions constitueraient un excès de pouvoir.

95. A ces attributions qui tiennent à la nature

de ses fonctions, l'autorité municipale réunit l'obligation de surveiller l'exécution des devoirs imposés aux entrepreneurs envers l'administra→ tion proprement dite: on peut citer, entre autres dispositions qu'elle est chargée de faire respecter par les directeurs de province, celles qui leur défendent de faire jouer des acteurs engagés à d'autres théâtres, sans congé ou après l'expiration de leur congé; d'engager des élèves de l'école de chant sans l'autorisation du ministre, et de traiter avec des acteurs qui ne sont pas porteurs d'un congé délivré par le directeur dont ils quittent la · troupe.

96. Enfin il est un dernier pouvoir dont elle se trouve investie. Aux termes de l'art. 19 du régle ment du 25 avril 1807, l'autorité chargée de la police des théâtres prononce provisoirement sur toutes contestations, soit entre les directeurs et les acteurs, soit entre les directeurs et les auteurs ou leurs agents, qui tendraient à interrompre le cours ordinaire des représentations, et sa décision provisoire peut être exécutée nonobstant le recours vers l'autorité à laquelle il appartient de juger le fond de la contestation. Le réglement de 1814 a reproduit cette disposition, sauf un changement de rédaction, qui évidemment n'altère en rien le sens de la disposition.

§. II. Pouvoirs de l'autorité municipale en raison du monopole de fait attribué aux entreprises de théâtre.

97. Le principe qui défend à l'autorité muni

cipale de s'immiscer dans les détails privés des entreprises de théâtre, doit subir une modification, en raison des lois qui ont tué toute concurrence dans l'exercice de cette industrie. Avec la concurrence, le public ne serait point exposé à voir ses droits méconnus, ou ses plaisirs mal servis par une entreprise de théâtre en effet, si l'entrepreneur établi venait à le mécontenter, une exploitation rivale pourrait à l'instant se former, et la lutte qui s'établirait afin d'attirer les spectateurs, tournerait au profit commun. Mais avec le régime de nos lois sur cette matière et l'application qu'elles reçoivent, le public serait entièrement à la discrétion des théâtres, qui, toujours certains que nulle autre entreprise ne se formera, et que seuls ils seront admis à ouvrir leur salle pourraient, abuser de ce monopole, si l'autorité publique n'intervenait point pour prévenir de semblables abus.

98. D'un autre côté, l'exploitation du théâtre, même dans ce qui paraît le plus toucher aux intérêts privés, peut se rattacher aux intérêts publics. L'établissement du monopole est apprécié par les spectateurs dans les conséquences qu'il peut produire à leur préjudice. S'il arrivait qu'une entreprise méconnut toutes ses obligations, causât de graves mécontentements, et ne craignit point de tirer parti de l'exclusion de toute rivalité, le public pourrait témoigner son déplaisir par des actes de désordre, et exercer contre les entrepreneurs des réclamations dont l'énergie et la

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