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,, je fais effraié pour eux de cette parole de ,, Jesus-Chrift: Si un aveugle en conduit un ,, autre,ils tombent tous deux dans le précipice. ,, Ce n'eft pas que je penfe que des ames ,, pieufes uniquement occupées de leur falut, ,, & bien réfolues de mener une vie Chrétien,, ne, ne puiffent abfolument fe fauver entre ,, les mains des Jéfuites. Le but de ces Peres ,, comme je l'ai déja dit, n'est pas de détour,, ner de la piété, & de la pratique du Chrif ,, tianifme. Je fuis perfuadé qu'ils laiffent ,, fuivre les voies de la perfection à des ames s, qui le portent d'elles-mêmes à l'embrafler; ,, mais il faut convenir qu'il eft rare de ,, trouver des pénitens fi bien difpofés, & ,, que rien au contraire n'eft plus commun ,, que de voir des Chrétiens qui joignent à de ,, legeres envies de fe fauver, beaucoup d'i,,gnorance & de foibleffe; qui voudroient ,, allier le monde avec Jefus-Chrift, fe ré,, concilier avec Dieu fans faire pénitence, fréquenter les Sacremens, fans renoncer à leurs habitudes criminelles, à leurs ufu,, res, & fans reftituer le bien d'autrui. On ,, peut dire que le falut de ces perfonnes dé,,pend prefque abfolument du caractere des Directeurs aufquels elles s'adreffent. On les verra fe foumettre aux loix de la péniten,, ce, pratiquer les devoirs d'une vie Chrétienne, fi elles font affez heureufes pour trouver des Confeffeurs fermes & éclairés ,, qui leur annoncent les vérités du falut, & qui ne cherchent à s'attirer leur confiance, » que pour les conduire à Dieu.

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,, Mais fi par malheur ces mêmes perfon5, nes tombent entre les mains de Miniftres ignorans & infidéles, qui s'accommodent

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,, à leur gout, & qui les flatent dans leurs defirs vous les verrez languir dans ,, leurs mauvaifes habitudes, pratiquant les exercices extérieurs de la Religion, fans renoncer à une vie toute profane ,, & toute mondaine. Et à l'égard des pé,, nitens mieux difpofés, on ne peut difconvenir que ceux-là mêmes ne courent un » grand danger, lorfqu'ils tombent entre les ,, mains des Jéfuites; car ces Peres ne man,,quent gueres de s'attirer de la part des ,, perfonnes de ce caractere une confiance ,, fans bornes, dont ils abusent en plus d'une ,, maniere. 1. Il eft difficile que dans un certain efpace de tems, il ne furvienne des cas doureux & embarraffans où l'on a befoin de ,, confulter fur des queftions importantes de ,, Morale, foit pour foi-même, foit par la néceffité où l'on eft d'entrer dans les affaires des autres. Dans ces circonstances, on fera porté à fuivre la décifion d'un Direc,, teur; & le Directeur décidera non felon les regles de l'Evangile, mais felon celles des ,, Cafuiftes relâchés. 2. Il eft difficile que ces Peres ne faffent entrer infenfiblement ,, ceux qu'ils conduifent, dans leurs préjugés; qu'ils ne leur infpirent une défiance mal fondée contre tout ce que les Jéfuites n'eftiment pas; & qu'à la fin ils ne les ,, engagent à faire des démarches conformes ,, à ces préjugés : démarches qui feront fouvent d'une conféquence tout autrement grande qu'ils ne fe le perfuaderont, & dont leur confcience demeurera chargée. 3. Un danger prefque inévitable fur-tout à l'égard des Laïques & des femmes; c'est ,, que ces conducteurs les entretiennent dans ,, une grande ignorance de la Religion, non

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feulement en leur ôtant les Livres pro ,, pres à les inftruire des vérités folides & proportionnées à leur état, mais encore ,, en leur donnant de l'éloignement de ces ,, Livres, & de tous ceux qui les lifent. On fait par expérience que leur maxime est de confeiller peu de lectures, & fur-tout de », celles qui pourroient éclairer l'efprit; foit ,, qu'ils fuivent cet ufage par un effet de leurs préjugés, foit qu'ils veuillent tenir ceux ,, qu'ils gouvernent, dans une plus grande dépendance.,, Ainfi parle M. l'Abbé Couet. Ce que ce Théologien dit des Jéfuites, convient à tous les Confeffeurs qui ont le même efprit que ces Peres, & qui fuivent les mêmes maximes. La facilité de tous ces mauvais guides eft un appas qui cache l'hameçon. Ils donnent une affurance qui mene à la mort. La vérité au contraire femble d'abord effraier; mais c'est pour conduire à la paix & au repos. Ce qui fait que tant de perfonnes fe contentent d'un phantôme de justice, au lieu de chercher une juftice ferme, ftable & perfévérante, c'est qu'igno rant les douceurs de la vraie piété, & n'aiant du gout que pour les objets fenfibles dont le cœur s'eft rendu efclave, la pensée d'un entier renoncement au péché, & d'un inébranlable attachement à la Loi de Dieu, n'offre à leur efprit qu'un avenir trifte & affligeant. Mais la voie de la piété n'eft pénible & étroite que pour ceux qui n'y entrent que par contrainte ou par bien féance. Elle s'élargit & remplit l'ame de contentement & de paix à proportion de ce qu'on l'aime. Si l'on trouve un plaifir miférable & féducteur dans la fatisfaction des fens du

corps: peut-on croire que l'ame ne fente pas un plaifir infiniment plus pur dans la poffeffon des biens fpirituels, dans l'union avec Dieu, qui eft la fource du vrai bonheur ? Les vrais pénitens avouent avec de faints tranfports de joie qu'ils n'ont commencé à gouter le vrai & folide bonheur, que du moment qu'ils ont renoncé pleinement & fans retour au péché.

XI.

XXVII. Queftion de

la fuffifance de la crainte

Nous traiterons ici en deux mots la queftion de la fuffifance de la crainte pour être réconcilié avec Dieu dans le Sacrement de Pénitence. On fent combien elle a de liaifon pour être réavec la matiere qui eft l'objet de cet Article. concilié avec Les Jéfuites s'imaginent que la crainte de Dieu. l'enfer fuffit pour la réconciliation. Ils apCat. hift.& pellent Attrition une douleur de les péchés Dog. caufée par cette crainte deftituée d'amour, & ils prétendent qu'étant jointe au Sacrement, elle juftifie l'homme & le fait rentrer en grace avec Dieu, & que la contrition qui a l'amour de Dieu pour principe, n'eft pas néceffaire. Cette doctrine eft parfaitement conforme aux autres erreurs des Jéfuites fur l'administration du Sacrement de Pénitence. On fent que fi elle étoit vraie, il ne feroit point abfolument néceffaire d'éprouver les pécheurs avant de leur donner l'abfolution. Il y en a peu qui ne craignent les peines de l'enfer. Les lumieres de la Foi, jointes à l'amour de foi-même, fuffitoient pour faire concevoir la crainte de ces tourmens horribles & éternels. Ainfi prefque tous ceux qui fe préfentent au Tribunal de la péniten ce, aiant les difpofitions néceffaires pour re

cevoir l'abfolution avec fruit, on auroit grand tort de la différer. Mais fi la crainte ne fait que difpofer de loin à recevoir la grace de la réconciliation, en arrêtant la main & faifant ceffer les actions criminelles, & s'il eft néceffaire de commencer à aimer Dieu comme fource de toute justice, on a raifon de différer l'absolution, afin de préparer l'ame à entrer dans cette fainte difpofition, que Dieu ne forme ordinairement dans le Pénitent que peu à peu & par degrés. 379. & Nous avons vu dans l'Hiftoire du Concile de Trente, avec quelle lumiere on y établit les vrais principes fur la juftification & fur les difpofitions qui y conduifent.

Tome VIII.

fuiv.

XXVIII.

cete doctri

ne eft affor

La doctrine fur la fuffifance de la crainte Combien n'eft pas feulement liée avec les relâchemens des Jéfuites dans la difcipline de la Pénitentie au-lyftème ce elle l'eft auffi avec leur Morale & avec général des leurs principes fur la Grace. Tout le tient j'éfuites. parfaitement dans leur fyftême. La fuffifance de la crainte eft une fuite naturelle de l'idée qu'ils ont de la juftice Chrétienne en croyant qu'elle ne confifte pas effentiellement dans l'amour de Dieu. S'il n'eft pas néceffaire pour être jufte de rapporter fes actions à Dieu par le principe de fon amour, pourquoi cet amour feroit-il nécessaire pour recouvrer la juftice quand on l'a perdue? Et ces erreurs font en même tems une fuite du grand principe des Jéfuites sur la Grace, par lequel ils prétendent que l'homme a toujours un pouvoir d'équilibre pour accomplir ce que Dieu lui prefcrit. Dieu ordonne à un pécheur de fe réconcilier avec lui: il faut done que ce pécheur ait un pou voir d'équilibre pour remplir ce devoir. Mais

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