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CHAPITRE X L I.

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Néceffité, pour tous les amis de l'ordre de fe rallier à l'autorité royale, & d'une DICTATURE dans les mains du roi.

L'OPINION eft auffi éclairée qu'elle peut l'être

fur les vices de la nouvelle conftitution; toutes les perfonnes qui ont les notions les plus vulgaires favent l'apprécier aujourd'hui, & ceux de fes défenfeurs à qui l'on connoît quelque jugement, ne luttent en défefpérés que parce qu'ils redoutent la punition de leurs crimes; cependant l'accord de ces deniers avec la populace, que feule ils peuvent tromper encore, forme un obstacle infurmontable pour des mécontens difperfés & défunis. Cette défunion provient furtout de la différence de leurs fyftêmes. Les uns veulent des états-généraux formés par les repréfentations de trois ordres de citoyens; les autres les veulent formés en deux chambres, mais avec une variété prodigieufe dans la manière de les compofer; d'autres fe bornent à demander des états ou des adminiftrations de province;

d'autres enfin l'ancien régime fans modification quelconque.

Les factieux fuivent conftammment leur marche. Ils feroient bientôt arrivés à la diffolution

,

complette du royaume, fi l'audace de la fecte incendiaire n'eût armé contr'eux les principaux. fouverains de l'Europe. Telle eft l'horrible fituation de la France, que les maux qu'elle pourroit avoir à craindre des étrangers, n'égaleroient jamais ceux qui lui feroient préparés par une partie de fes habitans fi on l'abandonnoit à leur fureur ; mais vainement les armées des républicains auront été vaincues; vainement les fouverains ligués auroient montré toute la générofité que cette fois leur intérêt exige auffi-bien que leur gloire; quel moyen de falut peut nous refter, fi les ennemis des inftitutions nouvelles ne peuvent s'accorder fur les moyens de maintenir l'ordre public?

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Notre befoin le plus preffant eft d'avoir le gouvernement le plus énergique pour contenir les fcélérats. Lorsqu'un état eft déchiré par des factions, & que la multitude ne connoît d'autre empire que celui de la violence, l'ordre ne peut être rétabli que par un grand pouvoir. II ne faut pas perdre du temps à délibérer; il faur

réfoudre promptement, exécuter plus promptement encore. Dans la république romaine, pour pacifier des troubles, étouffer une conjuration prévenir une guerre civile, ou réunir toutes les forces du peuple contre des ennemis étrangers, on investissoit les confuls d'une puiffance illimitée, ou ils étoient chargés de nommer un magiftrat fuprême, fous le nom de dictateur avec l'autorité la plus abfolue. Jamais la dictature ne fut auffi néceffaire chez les Romains qu'elle l'eft devenue chez les Français.

Puifqu'une dictature momentanée eft indif penfable pour fauver la France, il est évident que le roi foul a le droit de l'exercer; qu'entreprendre de la tranfmettre en d'autres mains, feroit une continuation de crimes envers la couronne & de fervitude pour le peuple.

Quels que foient, pour l'avenir, les fystêines de ceux qui defirent la tranquillité publique ils ont tous un égal intérêt à obtenir la liberté du roi, à lui rendre un pouvoir fouverain. Il feroit criminel, au milieu d'une pareille crife, d'exiger le fuccès de fes opinions, comme une condition de fon obéiffance, de prétendre les faire triompher autrement que par l'approbation du roi libre dans fon confeil.

Ceux qui defirent des états-généraux organi

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fés, d'après les formes fuivies en 1614, qu'ils appellent ancienne conftitution, doivent reconnoître que, d'après cette ancienne conftitution, ils n'ont rien à preferire au monarque, feul juge de la convenance d'un raffemblement d'étatsgénéraux, & n'ayant nul befoin d'attendre leur. intervention pour gouverner. Ceux qui veulent procurer à tous les feigneurs de fief du royaume, le droit d'approuver ou de rejeter toutes les propofitions de loix nouvelles; ceux qui veulent former des états-généraux par des représentations distinctes de citoyens féparés en familles nobles & roturières, qui les uns & les autres jugent auffi plus avantageux de donner à leurs fyftêmes le nom d'ancienne conftitution, & nous pré-fentent, fous ce titre, l'ancienne conftitution de Suède, n'ont pas le droit de forcer un feul homme à fe foumettre à leurs projets. Quelque bonne que leur paroiffe cette mauvaise forme de gouvernement & leur manière d'interprêter nos monumens hiftoriques, par quel motif leur conviction pourroit - elle enchaîner celle des autres? Sous le prétexte que le monarque eft captif, auroit-on le pouvoir de fixer les règles qu'il doit fuivre après fa liberté ? Prétendroit on s'autorifer des déclarations rendues le 23 juin 1789, pour , pour les états-généraux de la même an

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pas

née ? Mais ces états-généraux font terminés, & fans doute les partifans de la représentation en trois ordres n'ont le deffein de rappeler cette affemblée, & de confier de nouveau notre destinée à toutes les perfonnes qui les compo-foient. D'ailleurs, le roi avoit abandonné fes déclarations du 23 juin. Tout eft changé depuis cette époque; rien ne prouve qu'il reviendroit aujourd'hui à ce qu'il vouloit alors, & lui feul peut diffiper à cet égard toutes les incertitudes.

Ceux qui demandent des états-généraux périodiques concourant à la légiflation, comme les parlemens antérieurs à Philippe-le-Bel, mais qui propofent le rapprochement de l'ancienne compofition, en même-temps que celui des an-ciennes fonctions; c'eft-à-dire, une repréfentation générale des communes & le droit perfonnel d'affiftance à des pairs héréditaires ou à des vaffaux immédiats de la couronne; ceux qui par ménagement pour les opinions de la plupart des gentilshommes, fe borneroient à joindre aux représentans du peuple une chambre de magiftrats â vie ; ceux enfin qui perfiftent dans des idées chimériques d'égalité, voudroient au moins voir concentrer la représentation & l'adminiftra2tration dans les mains des propriétaires, ontils quelques moyens pour faire adopter leurs

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