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qu'elle ne fût point publiée séparément, que même aucun article de cette constitution ne fût définitivement arrêté, avant que l'ouvrage entier eût été soumis à l'examen le plus réfléchi. L'examen devoit avoir lieu dans les bureaux, et l'on ne devoit tenir que trois séances publiques par semaines (1)..

Le rapport des commissaires obtint les applaudissemens de la plupart des députés des trois ordres 2 même de ceux qui redoutoient

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(1) Plusieurs personnes m'ont blamé d'avoir contribué à ta déclaration des droits. Je dois observer qu'instruit du désir de plusieurs députés,, de proposer à cet égard l'exemple des états américains, je fis tous les efforts possiblés pour les détourner de ce projet. Ne pouvant les persuader, j'eus quelque raison de croire que les précautions indiquées dans le rapport du comité, en préviendroient les inconvéniens. Les événemens postérieurs ayant' secondé plus que jamais ceux qui vouloient une déclaration des droits, j'en présentai une où j'eus soin de n'insérer que des piincipes qui ne me parurent pas dangéreux. Plusieurs de ces articles ont fait partie de celle qu'on a promulguée. J'eusse mieux fait sans doute de soutenir comme quelques députés, que toute idée abstraite sur les droits des hommes, admise en législation, peat-être mal inter prétée et produire de funestes conséquences.

le plus les innovations. Plusieurs des membres du comité avoient cependant les systêmes les. plus démocratiques, et n'avoient été choisis dans les bureaux, que parcequ'ils n'avoient pas encore fait connoître leurs opinions; mais ils avoient tenté vainenient d'obtenir la préférence pour un plan plus conforme à leurs vues.

Depuis plusieurs jours, quelques membres des communes se plaçoient parmi ceux du clergé et de la noblesse ; ils furent invités, dans la séance du 10 juillet, à garder leurs places ordinaires, et à laisser aux premiers ordres celles qui leur étoient réservées; nouvelle preuve de l'esprit de modération qui dominoit encore.

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Le roi répondit aux remontrances qu'on lui avoit présentées, qu'il avoit assemblé de troupes pour maintenir le bon ordre, et que si leur présence causoit encore de l'ombrage, il consentiroit à transférer les états-généraux à Noyon ou à Soissons. Sur cette réponse, celui qui avoit présenté le projet d'adresse, pressa l'assemblée d'exiger le départ des troupes. Il ne fut pas même écouté. Un député de la noblesse s'écria qu'on devoit s'en rapporter avec confiance aux vertus et à la parole du roi, et l'on s'occupa d'autres objets.

L'assemblée parut donc satisfaite de la réponse du roi. Les factieux furent désespérés de ce contre-temps. Mais on ne profita point de ce bonheur. Il falloit rester en observation, et pour arrêter la corruption des soldats, les éloigner de quelques lieues, leur prescrire des exercices militaires, exciter leur émulation par la présence et les récompenses du souverain.

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des ordres comme l'unique soutien de son trône. On lui disoit qu'il étoit de sa dignité que les formes ordonnées le 23 juin fussent exactement suivies. On ne fut point arrêté par les adresses sans nombre que recevoit chaque jour l'assemblée, pour la féliciter sur la réunion des ordres et sur sa résistance à la déclaration du 23 juin. Ces adresses étoient alors librement délibérées par les anciennes municipalités, par une foule de citoyens de toutes les parties du royaume, et par les corps administratifs de plusieurs provinces.

On pensa qu'un grand appareil militaire disposeroit les esprits à l'obéissance , et que la multitude seroit frappée de terreur. On fit tous les préparatifs les plus propres à la répandre ; et lorsqu'on crut avoir donné, des ressources de l'autorité, une idée assez formidable M. Necker reçut l'ordre de sortir de France, et

MM. de Saint-Priest, de Montmorin et de la Luzerne reçurent celui de quitter le ministère.

Il étoit impossible de choisir un moyen plus prompt et plus efficace pour exciter le mécontentement dans tout le royaume. Déjà M. Necker après son premier ministère, avoir été accompagné dans sa retraite par les regrets de la plupart des citoyens. Il n'avoit point perdu leur confiance, et les alarmes qu'avoit occasionnées, dans la ville de Versailles, le bruit répandu quelques instans, le 23 juin, de son prochain départ, indiquoit assez l'effet que son éloignement pouvoit produire.

Comme les ministres s'étoient déclarés pour la réunion des ordres, on ne pouvoit attribuer leur disgrâce qu'à un changement absolu de systême au sujet des états-généraux. On avoit vu s'aplanir tous les obstacles qui avoient si longtemps suspendu leurs délibérations on les croyoit parvenus à ce terme heurexx où le bien s'opere sans efforts, et l'on s'en félicitoit d'autant plus qu'on l'avoit acheté par de cruelles inquiétudes. Qu'il étoit dangereux de troubler de nouveau les espérances du peuple !

avoient

Ceux qui conseilloient le monarque vu l'orage qu'ils alloient exciter: mais ils étoient convaincus que le repos public pourroit être

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