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Art.

que soit la valeur du litige, il s'ensuivrait 1347 qu'ils sont toujours autorisés à ordonner, même d'office, que des témoins seront entendus, en vertu de l'axiome: qui peut le plus, peut le moins. Ainsi disparaissent les règles prohibitives de la preuve testimoniale, ainsi le commencement de preuve, s'il en est encore besoin, peut sourdre non-seulement d'un écrit émané d'une autre personne que celle contre qui la demande est formée, mais d'un écrit émané de celle-là mème qui a formé la demande; ainsi les lois s'en vont.

Rien ne doit être abandonné à la discrétion des tribunaux, pour l'idonéité de l'écrit d'où l'on veut tirer un commencement de preuve, si ce n'est l'aperçu de ses rapports avec le fait allégué. Le Code n'a pu tarifer les quanti tés positives ou négatives de la vraisemblance.

Il n'est pas toujours nécessaire qu'un écrit ait été tracé ou signé par la main d'une personne, pour que l'on dise qu'il est émané d'elle. Concluez de cette distinction que les clauses d'un acte authentique, les dires consignés en un procès-verbal de bureau de paix ou d'une opération judiciaire, les réponses à un interrogatoire sur fails et articles (1), les requêtes, les mémoires, peuvent servir de commencement de preuve contre ceux qui ont comparu, répondu, ou au nom de qui les significations ont été faites, quoique toutes ces sortes d'écrits ne soient pas de leur main, et lors mêms qu'ils ne sauraient écrire ni signer (a).

Je n'ai jamais douté qu'une écriture qui n'est ni déniée ni méconnue, et qui contient des énonciations propres à rendre vraisemblable le fait allégué, ne fût un commencement de preuve selon la loi, quand bien même on aurait dù y ajouter quelque forme de plus, pour lui donner la valeur d'une

(1) Voyez ci-après, chap. 26. V. encore Dalloz, XXI, 204, Cour royale de Paris du 11 janv. 1827. Jurisp. de Brux., 1827, II, 298. Brux., 16 janv. 1828. Jur. du x1xe siècle, 1828, III, 130. Liége, 15 août 1835. Jur. belge, 1855, II, 48.

(a) On peut encore considérer comme commencement de preuve, des écrits non émanés de celui à qui on les oppose, mais qu'il s'est en quelque sort rendu propres en en faisant lui-même usage. — Brux., 15 fév. 1825, et 4 juin 1830. Jur, de

preuve complète tel un billet non entière-
ment écrit de la main qui l'a signé, et sur le- 1,7
quel ne se trouve pas l'approbation de la
somme en toutes lettres; tel encore un acle
synallagmatique qui ne porte pas la mention
qu'il a été fait double. Il n'y a plus rien à dire
sur ce point, depuis la réfutation que M. Toul-
lier a faite de l'opinion contraire de M. Duran-
ton (2). Les fluctuations de la jurisprudence
ont cessé, elle tend à consacrer le système
du professeur de Rennes (b).

La cour de cassation a jugé avec grande raison qu'un acte privé dont l'écriture est déniée ou méconnue ne peut servir de commen cement de preuve (3). C'est une observation que Danty n'avait pas manqué de faire (4). M. Toullier l'a combattue, propter præsumptionem juris quæ pro scripturâ slare videtur (5). Ces mots de Boiceau qu'il a invoqués, n'ont aucun trait à ce côté de la question. La présomption qui revêt un écrit de l'apparence d'une preuve, lorsqu'il est émané de la personne contre laquelle la demande est formée, se subordonne nécessairement à l'existence d'une cause première, à la réalité, › à la vérité de l'écrit. Si cet écrit est faux, il n'y aura plus rien d'apparent, de commencé, plus d'émanation, plus de présomption. I! faut que la cause soit vérifiée, avant de calculer la portée de l'effet.

La loi défend la preuve testimoniale, parce qu'elle veut que l'on passe des actes; elle ne la défend plus, toutes les fois qu'il n'a pas été possible d'avoir facilement une preuve litterale. C'est l'expression de Pothier; elle indique très-bien qu'il ne s'agit ici que d'une impossibilité morale, d'une grande difficulté locale ou momentanée, d'un grand embarras de se procurer un écrit.

Brux., 1825, I, 365. 1830, I, 394. Jur. du XIX* siècle, 1825, III, 59. Merlin, Questions de droit, III, 328.

(2) Voyez M. Toullier, nos 81 et 82.

(b) V. les arrêts rapportés dans Dalloz, XXI, p. 215 et suiv.

(3) Sirey, 6-1-183.

(4) Additions au chap. 1er du Comment, de Boiceau, 2o partie, no 1er.

(5) Tom. 9, no 64.

Le Code civil en donne les exemples sui$3. vants:

148.

1o L'obligation qui naît d'un quasi-contrat: quelqu'un, en mon absence, et sans que j'y aie consenti, a fait valoir mes terres; il en a recueilli les fruits et les a vendus. Il me doit rendre compte de cette administration. S'il dénie, quelle autre preuve pourrais-je avoir contre lui, que la déposition des témoins qui l'ont vu cultiver et recueillir, puisque je n'y étais pas? Ou bien je demande réparation d'un délit, d'un quasi-délit : certes, il y aura impunité, s'il ne m'est pas permis d'amener devant la justice les témoins du fait; car, d'ordinaire, les gens n'annoncent point par des écrits les méchantes actions, les soustractions, les fraudes, les simulations et les dommages qu'ils se proposent de commettre (1).

2o Les dépôts nécessaires faits en cas d'incendie, ruine, tumulte et naufrage : In his enim locus vel tempus non patitur plenius deliberandi consilium (2). Chenu rapporte un arrêt du mois d'août 1575, qui, nonob. stant la prohibition de l'ordonnance de Moulins, permit aux enfants d'un huguenot, tué à la Saint-Barthélemy, de prouver par témoins le dépôt que leur père avait fait, le jour même du massacre, entre les mains d'un homme qui le niait. Meritò has causas deponendi separavit prætor, quæ contineat fortuitam causam depositionis ex necessitate descendentem, non ex voluntate proficiscentem... Hæc autem separatio justam rationem habet, cùm verò extante necessitate deponitur, crescit perfidiæ crimen et publica utilitas coercenda est, vindicandæ reipublicæ causú (3). C'est une espèce de dépôt nécessaire que celui fait par un voyageur en logeant dans une hôtellerie (4). La nécessité de s'en rapporter à la bonne foi des hôtes est considérée comme

(1) Art. 1348, no 1.

(2) L. 1, de Exercitoriâ actione.

(3) L. 1, § 2 et 4, ff. Depositi.

(4) Art. 1548, no 2.

(5) L. 1, § 1, ff. Nautæ, caupones, stabularii, ut recepta restituant.

BONCENNE. T. II.

une autre impossibilité de preuve littérale: Art. Necesse est plerumque eorum fidem 253. sequi et res eorum custodia commit- 1348. tere (5). Toutefois, la preuve testimoniale ne doit être reçue, en ce cas, qu'avec une sage réserve, suivant la qualité des personnes et les circonstances du fait. Supposez qu'un aventurier, mal famé, ou mal aisé, vienne prétendre qu'il a porté chez son hôte de l'argent ou des effets d'une valeur considérable, on ne permettra point à cet homme d'amener des témoins qui pourraient s'entendre avec lui pour ruiner un honnête aubergiste (6). Le Code dit : les dépôts faits par un voyageur EN LOGEANT dans une hôtellerie; d'où il suit que si vous allez déposer de l'argent ou des marchandises chez un hôtelier de la ville que vous habitez, sans prendre de lui une reconnaissance, vous vous ne serez pas admis à prouver ce dépôt par témoins, car c'était un dépôt ordinaire, vous n'y étiez point astreint par la nécessité, et vous devez vous imputer votre défaut de précaution. Ce fut ainsi jugé par arrêt du 21 mai 1594 (7).

5o Les obligations contractées en cas d'accidents imprévus, où l'on ne pourrait pas avoir fait des actes par écrit (8). » Cette disposition est un dédoublement de l'art. 5, titre 20 de l'ordonnance de 1667 : « N'entendons exclure la preuve par témoins pour dépôts nécessaires' en cas d'incendie, ruine, tumulte et naufrage, NI en cas d'accidents imprévus où on ne pourrait avoir fait des actes. « La rédaction était un peu confuse, elle n'était pas élégante; mais, à mon sens, c'était comme si l'on eût dit : N'entendons pas non plus exclure la preuve par témoins, en cas d'accidents imprévus, etc. Danty ne l'avait pas compris autrement; après avoir parlé des exceptions relatives aux dépôts nécessaires et aux choses apportées dans une hôtellerie, il ajoutait : « L'or

(6) Voyez Rodier, sur l'article 4, titre 20 de l'ordonnance de 1667.

(7) Chenu, Centurie, 1, quest. dernière. (8) Art. 1548, no 5.

27

Art. donnance de 1667 excepte aussi en général, 253. tous les cas d'accidents imprévus auxquels 1348. on ne pourrait avoir fait des actes, ce que celle de Moulins n'avait point expliqué (1). » Cependant M. Toullier a beaucoup exalté le § 5 de l'art 1548 du Code civil; il l'a considéré comme une précieuse innovation, comme la réparation merveilleuse d'un fåcheux oubli. Je crois qu'il y a erreur dans cette distribution d'éloges et de blâme, et que l'ordonnance avait également pourvu à toutes les difficultés et à toutes les exigences des preuves, pour les dépots confiés, comme pour les obligations contractées dans les cas de néces sité et d'événements imprévus, quels qu'ils fussent, heureux ou malheureux.

Ainsi, je trouve, en voyageant sur un chemin peu fréquenté, et loin de toute habitation, un homme que je connais; il est presque nu, des voleurs viennent de le dépouiller. J'ouvre ma bourse, et je lui prète ce qu'il lui faut d'argent pour se vêtir et continuer sa route. Nous n'avions là ni plume, ni encre, ni papier. Cet homme meurt, et ses héritiers refusent de reconnaître cette dette sacrée, parce que je n'en ai pas la preuve écrite. Ne devrai-je pas être admis à prouver le prêt par le témoignage des personnes qui m'accompagnaient, ou de celles qui en ont recueilli l'aveu de la bouche de l'emprunteur? Sans aucun doute, a dit M. Toullier (2); et je pense de même. Mais cette justice m'aurait été tout aussi bien assurée par l'ancienne que par la nouvelle loi.

4o La perte d'un titre par suite d'un cas fortuit, imprévu et résultant d'une force majeure. « La même raison qui oblige à recevoir la preuve testimoniale des faits dont la partie qui les allègue n'a pu se procurer un acte, oblige aussi d'admettre à cette preuve celui qui, par un cas fortuit et imprévu, a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale...

«Mais, pour que le juge puisse admettre la preuve par témoins, il faut que le cas

(1) Observ. générales sur la preuve par témoins, p. 12, no 20.

(2) Tom. 9, no 199.

fortuit qui a donné lieu à la perte de titres soit constant. Par exemple, il faut qu'il soit 253, reconnu, ou que je sois en état de prouver 134 que ma maison a été incendiée ou pillée, pour que je puisse être reçu particulièrement à la preuve testimoniale des prêts d'argent, ou des payements dont je prétends avoir perdu les billets ou les quittances dans l'incendie ou le pillage de ma maison.

་་

« Si celui qui demande à faire la preuve testimoniale allègue seulement qu'il a perdu ses titres, sans qu'il y ait aucun fait de force majeure constaté, par lequel la perte serait arrivée, il n'y peut être reçu. Autrement l'ordonnance qui défend la preuve par témoins, pour prévenir les subornations, deviendrait illusoire; car il ne serait pas plus difficile à quelqu'un qui voudrait prouver par témoins quelque prêt ou quelque payement qu'il n'aurait pas fait, de suborner des gens qui déposeraient qu'ils ont vu entre ses mains des obligations ou des quittances, comme d'en suborner qui diraient qu'ils ont vu compter l'argent (5) »

C'est le résumé de la législation de tous les âges et de tous les pays. Actorum namque interitu veritas convelli non solet. Voyez les titres du Digeste et du code de Fide instrumentorum et amissione eorum. Il y avait une formule de Marculfe dans laquelle on disait: Dùm instrumenta cremata esse cognovimus, per hunc præceptum plenius Din ei nomine circà eum suffultum atque confirmatum absque ullius inquietudine, vel refragatione teneat et possideat. Les lettres que le prince octroyait, en pareil cas, post inquisitionem, s'appelaient præcepta de chartis combustis (4).

Comment se doit faire cette preuve ? Fautil que les témoins déposent qu'ils étaient présents lorsque le titre a été pris, ou brûlé, ou déchiré? Boiceau répond à ces questions : « Il n'est pas nécessaire que les témoins déposent précisément et par détail de la manière en laquelle la perte est arrivée; mais

(5) Pothier, Traité des Oblig., no 781.

(4) Liv. 1er des Formules, chap. 35, et les notes de M. Bignon sur ce chapitre.

8.

il suffira qu'ils affirment avoir autrefois vu 3. le titre, et qu'ils en ont lu ou entendu lire le contenu, se olim vidisse instrumentum et ejus tenorem legisse, audivisse, aut percepisse ; qu'ils savent l'endroit où le propriétaire de ce titre avait coutume de placer ses papiers, scire quo loco dominus in strumenti omnia sua instrumenta condere solebat; et que depuis ils ont vu la maison périr par un incendie, ou qu'ils l'ont vu piller par des gens de guerre ou des volenis; que l'endroit où étaient les papiers n'a point été épargné, qu'il a été brûlé, ou forcé, etc.; locumque instrumentorum effractum, et instrumenta capta, fracta, dispersa, aut flammis tradita (1). » On n'a rien écrit de mieux ni sur les ordonnances, ni sur le code.

En matière commerciale, les juges ont conservé le privilége de pouvoir admettre la preuve testimoniale, quelle que soit la valeur du litige, et sans qu'il soit besoin d'un commencement de preuve par écrit.

M. de Lamoignon disait dans la conférence tenue pour l'examen du titre 20 de l'ordonnance: « A l'égard de l'exception que l'on fait pour les juges consuls, encore que l'article ne décide rien précisément (il renvoyait aux anciens usages), ils croiront avoir un titre qu'ils expliqueront en leur faveur, on a toléré qu'ils aient reçu la preuve par témoins au-dessus de 100 livres, lorsqu'on a cru qu'ils étaient aidés par quelques adminicules; mais il serait dangereux d'en faire un article de l'ordonnance, parce qu'ils en pourraient abuser.... Que ce qui était de meilleur en ce qui concernait cette juridiction, c'est que tant qu'elle en userait bien, elle se maintiendrait, et qu'elle ne saurait subsister en faisant mal. »

L'exception a été confirmée, et la juridiction subsiste.

Néanmoins, la faculté d'entendre des témoins cesse dans les tribunaux de commerce, pour certains cas où la loi exige des actes,

(1) Lib. 1, cap. 15, in fine.

comme pour les sociétés en commandite et At collectives, les assurances, les contrats à la grosse, etc.

J'ai cru qu'il convenait d'exposer les principes du droit civil touchant la preuve testimoniale, avant d'aborder le système d'action qui va les animer et s'unir à leurs fins. La disposition de ces règles de détail et de ces formes d'application resterait incomprise, si l'on ne connaissait pas la pensée qui doit présider à leur mouvement, à leur accord. Quel motif trouveriez-vous, par exemple, à ce bref agencement de délais que la partie la plus diligente fait courir contre elle-même, et à la rigoureuse précision avec laquelle ils doivent être observés, si la loi ne vous avait pas dit d'avance tous ses soupçons, toutes ses craintes, et ses défiantes précautions contre l'influence des suggestions et les tentatives de subornation? C'est ce qui m'a fait entrer dans les explications préliminaires auxquelles je viens de me livrer. Il me fallait éclaircir mon horizon de procédure, et le purger de ces nuages de caprices et de préjugés, de ces milieux trompeurs où tant de réfractions dif férentes dénaturent les lignes et les formes. J'ai eu quelquefois la témérité de ne pas suivre les opinions de notre Pothier moderne; mais je me suis attaché à ce qui m'a paru le plus strictement conforme à l'intention de la loi, en dépit des interprétations ennemies que l'ordonnance de Moulins eut à subir. Je crois que la doctrine de M. Toullier incline trop, quelquefois, pour l'admissibilité de la preuve testimoniale; il n'en avait peut-être pas vu les abus de si près.

Jusqu'à la publication du code civil, les tribunaux de Genève avaient eu à faire l'application de deux systèmes opposés : l'un pour le pays de Gex où l'ordonnance de 1667 était en vigueur, l'autre pour la Savoie où la preuve par témoins était admise sans aucune limite. Il nous a été facile d'en comparer les résultats, disait M. Bellot (2), et de nous

(2) Exposé des motifs de la loi de procédure pour le canton de Genève.

253.

Art convaincre que rien ne contribue plus à 253. favoriser l'esprit processif, à démoraliser

255.

plaideurs et témoins, que l'admission illimitée et l'usage trop fréquent de la preuve par

témoins. "

Tout doit se lier et s'appuyer dans l'ordre général des lois. Le meilleur fruit de celles qui répandent aujourd'hui l'instruction, serait de faire observer plus sévèrement la prohibition de la preuve vocale, de rendre ses restrictions plus étroites et son emploi plus rare. C'est ainsi que les enquêtes par turbes furent abolies après la rédaction et la réformation des coutumes (1).

On distingue encore aujourd'hui deux sortes d'enquêtes: l'enquête par écrit et l'enquête verbale.

Dans la première, le tribunal n'entend et suiv. point les témoins; c'est un de ses membres, et quelquefois un magistrat étranger, qui reçoit les dépositions à huis clos. et c'est sur la lecture du procès-verbal où elles sont écrites, que le jugement est rendu. Celle-ci appartient à l'instruction ordinaire.

407.

et suiv.

255.

La seconde se fait à l'audience; la vive voix des témoins y frappe l'oreille des juges et du public. Celle-là appartient à l'instruction sommaire.

Ce chapitre est spécialement consacré aux règles de l'enquête par écrit.

La délégation d'un commissaire pour ouïr les témoins est d'un usage beaucoup plus ancien que le secret de leur audition. Ce ne furent point les effets d'une mème cause; chacun de ces traits de nos vieilles mœurs judiciaires a sa source particulière.

Un capitulaire de l'année 829 prescrivait aux envoyés royaux, missi dominici, de choisir dans chaque comté les hommes les

(1) Les enquêtes par turbes avaient lieu lorsqu'il s'agissait de vérifier une coutume non écrite, ou l'usage, le style d'une juridiction. Il fallait une troupe ou turbe de dix personnes pour représenter la déposition d'un témoin; par conséquent, l'enquête ne pouvait faire preuve, suivant le système du temps, si deux turbes au moins n'étaient pas amenées.

(2) Capitul. Ludovici Pii, lit. 2, cap. 3.

meilleurs et les plus sincères pour faire les enquêtes, rapporter la vérité des choses, et 255 aider les comtes à rendre la justice : Ut in omne comitatu hi qui meliores et veraciores inveniri possunt, eligantur à Missis nostris, ad inquisitiones faciendas et rei veritatem discendam; et adjutores comitum sint ad justitias faciendas (2). La même prescription se retrouvait dans les capitulaires de Charles le Chauve (5), et dans la loi des Lombards (4).

Pour les affaires des évêques, des abbés et des grands, qui se portaient à la cour du roi, le comte du palais faisait lui-même les enquêtes et venait rapporter au conseil ce qui lui en était apparu. Plus tard on nomma des commissaires particuliers, des auditeurs, qui furent chargés d'aller procéder, dans les provinces, aux enquêtes que la cour avait ordonnées. «< Telles manières de gens qui sont baillies pour oir tesmoins sont appelés auditeurs, pour che que ils doivent oir che que les témoins diront, et fere escrire leur dit, et scéler de leurs sceaux, et rapporter le dit des tesmoins escrit et scélé en jugement par devant les jugeurs à qui la querelle appartient å jugier (5). » Philippe le Long defendit aux auditeurs de mener avec eux un train trop considérable (6).

Dans les causes des gens du petit état, pauperum et minus potentium, que le comte palatin avait le pouvoir d'expédier seul (7), il déléguait à son tour des enquêteurs pour examiner et entendre les témoins.

Les enquêtes furent assez rares tant que subsista l'usage du combat; mais elles durent se multiplier à l'infini, après que saint Louis eut mis preuve de tesmoins en lieu de bataille.

Or, il arriva que les baillis, les prévôts et

(3) Tit. 45, cap. 11.
(4) Tit. 41, cap. 4.
(5) Beaumanoir, chap. 40.

(6) Ordonn. du 17 novembre 1318, art. 8.

(7) Nec ullus comes palatii nostri potentiorum causas sine nostrâ jussione præsumat; sed tantùm ad pauperum et minus potentium justitias faciendas sibi sciat esse vacandum. Capitul,, lib. 3, cap. 77.

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