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éter. En effet, telle est la série d'opérations réelles qui (dans le arcas le plus en usage et dont les autres variétés peuvent être omises pour le moment, pour ne pas surcharger de distinctions la discussion des principes), se passent par suite d'un contrat d'édition: on remet un manuscrit, etc., d'un côté ; de l'autre on le fait imprimer, répandre un peu partout, vendre où faire se peut, et on paie les frais de ces opérations. Mais ce sont les suites, c'est l'exécution d'un contrat d'édition; ce n'en est ni l'objet ni le but.

L'objet de l'auteur, c'est faire usage de son œuvre en la publiant, et y gagner de l'argent. L'objet de l'éditeur, c'est faire usage de la même œuvre de l'auteur en la publiant, et y gagner de l'argent.

La vie de nos jours est assez compliquée en presque tous ses phénomènes pour qu'il faille assez souvent et même très régulièrement, pour la réalisation d'un bon et avantageux usage d'une chose ou entreprise quelconque, le concours d'une pluralité de personnes. Ces personnes y contribuent selon leurs forces et moyens ; elles participent aux bénéfices à un prorata équitablement établi : voilà l'essence de toute opération ou convention synallagmatique. On ne saurait donc hésiter à trouver bon que pour l'union des buts susdits de l'auteur et de l'éditeur, il y ait à trouver une formule équitable, comme pour toute autre opération qui soit analogue à celle de l'auteur et de l'éditeur en ce qu'elle voudra faire usage et exploiter une chose, un bien, en vue d'un rendement d'argent pour les deux parties.

Cela nous rapprochera des formules du droit commun; nous trouverons, pour nous guider, des conventions parallèles. Mais avant tout faudra-t-il constater la présence des éléments de notre thèse plus en détail.

L'auteur a la propriété de son œuvre. Qu'en fera-t-il? Il ne se contente pas de l'avoir conçue et élaborée, il veut la publier. Dans quel but? Nous n'ignorons pas que c'est en général, ou du moins dans un grand nombre des cas, le

désir de contribuer au développement de la civilisation, au culte du beau ou du vrai. Mais ce n'est pas là le seul but du moins de l'auteur dont nous avons plus spécialement à nous occuper. L'autre, celui qui se contente d'avoir fait connaître ses idées au profit du progrès de l'humanité et qui ne brigue pour toute récompense que quelques lauriers ou la conscience d'une bonne action, celui-là ne comparaîtra pas par devant notaire pour faire un contrat, ni plus tard en justice pour faire condamner son éditeur à une somme de...... Ce n'est pas lui qui intéresse les jurisconsultes désireux d'éclaircir cette branche du droit pour éviter les différends existants et à venir et propager l'esprit d'équité en matière d'intérêts, matériels et importants.

Or, nous ne disons rien de nouveau ou d'inouï en proclamant que l'objet de l'auteur, c'est de tirer avantage matériel de son œuvre. Nous rencontrerons moins encore d'opposition en prétendant que l'objet exclusif de tous ces industriels ou commerçants, qui s'appellent libraires-éditeurs, c'est de tirer un avantage matériel des œuvres des auteurs.

Voilà le positif de la thèse bien établi; examinons le revers. Est-ce que ces objets-là épuisent l'intention économique qui guide l'une et l'autre des parties, ou en reste-t-il d'autres qui pourraient compliquer la prétendue simplicité et convergence de leurs fins ?

Il faudrait bien alors que de tels objets se détachassent de l'une des opérations qui forment régulièrement l'exécution des contrats d'édition et que nous avons énumérées plus haut. Or, l'auteur a-t-il le moindre intérêt à remettre son manuscrit à l'éditeur, ou celui-ci à le recevoir? Ce n'est rien qu'une des actions mécaniques pour réaliser l'impression; l'auteur donne son manuscrit à l'éditeur parce que c'est celui-ci qui doit le lire et l'avoir en mains pour en opérer l'impression, le brochage, l'envoi aux libraires, la vente. Après coup, voilà le manuscrit qui est enseveli dans les ar

chives de l'un ou de l'autre des intéressés, parce qu'après l'existence d'un texte imprimé et bien plus lisible, ce papier n'a plus de valeur que pour les collections d'autographes. L'éditeur, de son côté, se plaît-il à faire imprimer, brocher, emballer, envoyer le livre ? Est-ce qu'il a le moindre intérêt, à un point de vue de droit, à ce qu'on passe par toutes ces opérations? Ni lui ni l'auteur non plus. Tous les deux ne seraient-ils pas bien contents si déjà on avait inventé la machine américaine où d'un côté on jette les manuscrits et de l'autre on retire, non pas les exemplaires typographiés, (car cela s'inventera bientôt chez nos amis d'outre-mer), mais bien l'argent de la recette faite par la vente de ces livres? Tous ces stages ne sont que subordonnés, comme articulations mécaniques indispensables mais pour cela non moins insignifiantes, au point de vue du droit, à l'objet unique des parties de gagner de l'argent par l'oeuvre de l'auteur.

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On nous objectera peut-être que nous oublions les frais, risques et périls, éléments d'un caractère abstrait, mais néanmoins économique et matériel, et reconnus comme d'intérêt supérieur, même et surtout au point de vue du droit. Il n'en est rien pourtant. Le débours des frais, c'est, dans notre cas, encore une et rien qu'une des opérations que nous avons qualifiées de mécaniques, parce qu'elles ne sont pas immanentes à l'objet des parties. On sait bien qu'il y aura des frais de toute nature, soit en travail d'une certaine valeur de la part personnelle de l'auteur et de l'éditeur, soit argent comptant à payer aux typographes, aux metteurs, aux marchands de papiers, aux commis de correspondance et de comptabilité, aux vendeurs et jusqu'aux hommes de peine, et aux chemins de fer et aux postes. Mais l'objet du contrat d'édition, l'intention des parties contractartes n'est guère de dépenser de l'argent en frais, ce n'est que de gagner de l'argent: tant, si faire se peut, que les frais soient d'abord remboursés et qu'il en reste

néanmoins quelque chose pour les intéressés au contrat: l'auteur et l'éditeur.

Nous profitons de suite de l'occasion pour démontrer, par cette même exégèse des velléités qui meuvent les parties, qu'il n'y a point de différence essentielle quant à la nature fondamentale du contrat, soit que l'auteur reçoive sa rétribution lors de la signature du contrat ou lors de l'émission ou du commencement de la vente ou pendant celle-ci, soit qu'il la reçoive en somme ronde ou au fur et à mesure des recettes, soit enfin qu'il contribue ou non aux frais. Les bénéfices, ainsi que les frais, risques et périls peuvent être répartis de part ou d'autre sans que la tendance principale du contrat soit altérée, sans que toutes les deux parties cessent de vouloir uniquement et exclusivement utiliser l'œuvre de l'auteur pour en faire de l'argent l'une et l'autre.

Il y a lieu à constater ici la conformité, en principe, d'une autre forme anormale d'édition: celle faite par l'auteur lui-même. Évidemment, la collaboration du libraire n'est pas de rigueur; l'auteur qui croit pouvoir se dispenser de ses bons offices se dispensera également du partage des recettes et se chargera de cette partie des obligations, frais et agissements qui en général incombe à l'éditeur. Nous n'allons pas examiner ici les désavantages que cette ma nière de voir aura presque toujours dans une société organisée comme la nôtre il nous suffit que cette forme primitive des opérations, dont une forme plus développée et compliquée est l'objet de notre étude, ne présente pas des bases essentiellement différentes de la nôtre. C'est encore l'auteur voulant faire de l'argent par le moyen de son œuvre, qui passe par tous les stages constatés plus haut et fait faire, selon ses propres indications au lieu de celles de l'éditeur, mais par les mêmes auxiliaires et manoeuvres techniques, toutes les opérations destinées et entreprises, à plus forte raison, pour conduire à son objet unique: la recette d'ar

gent.

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Nous venons d'épuiser l'étude de l'objet du contrat d'édition; examinons maintenant d'abord la classe des contrats du droit commun dans laquelle cette nature, que nous lui avons trouvée, devra le placer. Assurons-nous ensuite quels sont les signes et qualités distinctives, s'il y en a, qui lui sont innés en opposition aux autres conventions du même genre général, et les règles spéciales de droit auxquelles il doit être soumis, et par son attribution à ladite classe et par suite de ses différences que nous venons de mentionner.

La participation des deux parties aux avantages de la publication de l'œuvre peut être réglée, nous l'avons vu, d'une façon assez variée. Au contraire y a-t-il dans tous les procédés pour réaliser l'édition, que nous venons d'examiner, une uniformité absolue à l'égard de la distribution des obligations entre les parties contractantes. C'est toujours l'auteur qui fournit la chose à exploiter, l'œuvre; c'est toujours l'éditeur qui se charge des opérations consécutives |_ jusqu'à la recette, de la publication ou de l'édition proprement dite.

Il y a bien des menues interpolations de travail de la part de l'auteur, au règlement desquelles on a parfois voué un soin considérable dans les projets de contrats-modèles dont nous parlions plus haut. Nous ne pensons pas à déconseiller qu'on soit toute attention à l'égard de la correction et révision des épreuves quand il s'agit d'écrire un contrat, ou contrat-modèle, ou même un projet de loi spéciale sur les contrats d'édition. Nous nous refusons toutefois à admettre que tout cela puisse entrer en considération lors d'une discussion des principes du droit d'édition. C'est à cause de ces services apparents de l'auteur qu'on lui a parfois attribué une obligation spéciale formant partie des

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