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Exposé des motifs de la loi du 6 août 1902 autorisant l'avance d'un million de francs au Gouvernement crétois présenté le 24 décembre 1901 (V. ci-après à la suite de cette loi).

Loi du 29 décembre 1901, complétant la loi relative à la zone franche franco belge (J. Officiel du 31) (1) (2).

ARTICLE UNIQUE. Les cultivateurs établis en France dans un rayon de 2 kilomètres au plus de la frontière et qui exploitent en même temps sur le territoire belge, dans un rayon de 2 kilomètres, des terres qui, depuis le 1er fé vrier 1892 et sans interruption, en vertu de titres réguliers et ayant date certaine, appartiennent soit à eux-mêmes, soit à leurs ascendants ou ont été loués par le même propriétaire ou par ses ascendants, soit à eux-mêmes, soit aux fermiers qui les ont précédés dans l'ensemble de l'exploitation, seront admis à importer en franchise des droits de douane les produits provenant de ces dites terres.

Rapport fait le 22 novembre 1901, au nom de la Commission des douanes, chargée d'examiner la proposition de loi, adoptée par la Chambre des députés, tendant à compléter la loi relative à la zone frontière franco-belge, par M. Maxime Lecomte, sénateur.

Messieurs, à la séance de la Chambre des députés du 26 mars 1900, M. Plichon, député du Nord, a déposé une proposition de loi modificative du régime de la zone frontière franco-belge et a motivé comme suit sa proposition: «La loi du 17 février 1893 a réglementé le régime douanier sur la frontière franco-belge.

« Vous savez que les traités de 1814 avaient créé, dans cette région, une frontière purement politique qui coupait beaucoup d'héritages, provoquant ainsi de grosses difficultés, tant aux cultivateurs qu'aux services des douanes des deux pays; aussi les traités de commerce, conclus postérieurement avec la Belgique, continrent-ils une clause spéciale représentée en dernier lieu par l'article 11 du traité de commerce du 31 octobre 1881, spécifiant que les céréales en gerbes, etc., provenant d'une zone de dix kilomètres de chaque côté de la frontière pourraient être importées réciproquement en franchise de droit. Cette disposition par trop libérale donna lieu, vous le comprenez, à des fraudes importantes, de sorte que, lorsque reprenant notre liberté économique, nous établimes notre régime douanier de 1892, nous eûmes soin, dans la loi du 17 février 1893, de limiter aux seuls intérêts respectables cette tolérance de l'entrée en franchise des céréales en gerbes, qui ne pouvait d'ailleurs être refusée, sans interrompre l'exercice de leurs exploitations, aux cultivateurs qui avaient, avant cette date, leurs terres à cheval sur la frontière.

(1) Cette loi émane de l'initiative parlementaire (Voir doc. parl. Chambre, 7° législature, nos 1547 et 1684, et Sénat, année 1900, no 384).

(2) Chambre Discussion et adoption le 29 novembre 1900, urgence déclarée. Rapport présenté par M. Plichon le 8 juin 1900.

Sénat Discussion et adoption le 3 décembre 1901, urgence déclarée.

(V. ci-dessus).

Rapport par M. Maxime Lecomte le 22 novembre 1901, ann. no 423.

«La loi du 17 février 1893 est ainsi conçue dans sa partie essentielle : « ART. 1er. Les cultivateurs établis en France dans un rayon de 2 kilomètres au plus de la frontière, qui exploitent en même temps des terres sur le territoire belge dans un rayon de 2 kilomètres, soit comme propriétaires, soit comme locataires, en vertu de titres réguliers et ayant date certaine, passés avant le 1er février 1892, seront admis à importer en franchise des droits de douane les produits provenant de ces dites terres. »

Cette loi fut votée sur un rapport de M. Georges Graux, notre éminent président, qui spécifia, de la façon la plus nette, d'une part, quels étaient les droits à sauvegarder; d'autre part, quelles devaient être les précautions à prendre pour éviter la fraude. « Si un propriétaire, dit-il, exploite lui-même ou a en location des terres, en France et en Belgique, qui constituent un corps de ferme, il est évident que, si à l'expiration du bail, ce propriétaire perd le bénéfice de la loi proposée, c'est la désorganisation forcée de sa propriété ou de sa culture » ; et plus loin : « Tant que le corps de culture reste le même, on peut admettre que le privilège de la zone frontière subsiste, lors même que le fermier serait remplacé par un autre fermier. » Car, disait ailleurs le rapporteur, il paraît manifeste que la loi nouvelle doit concéder aux propriétaires une servitude active. »

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< Voilà bien dans quel esprit la loi fut votée et quel but poursuivait le législateur.

Mais le texte même de la loi n'est pas suffisamment clair; et le Conseil d'Etat, consulté sur son application, émet l'avis : « que le propriétaire établi en France, qui n'exploite pas lui-même les terres qu'il possède dans la zone privilégiée, ne saurait prétendre de son chef à l'immunité, et que, d'autre part, le bénéfice de l'exonération des droits de douane ne peut être valablement réclamé par le locataire que si, étant établi en France, il exploite en même temps, en vertu de titres réguliers, ayant date certaine, passés avant le 1er février 1892, des terres situées en France et en Belgique dans une zone de deux kilomètres.

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Voici la conséquence de cette interprétation:

<< Sur la frontière belge visée par la loi, il y a très peu de terres exploitées directement par leur propriétaire, la culture étant très divisée. L'exploitation est faite presque uniquement par des locataires; or, la durée moyenne des baux étant de neuf années, il s'ensuit, ce que ne conteste pas le service des douanes que, en 1901, au plus tard, il n'existera plus un locataire ayant un titre régulier et ayant date certaine, passé avant le 1er février 1892 et pouvant, par conséquent, invoquer le bénéfice de la loi. Ainsi donc, à partir de l'année prochaine, la loi deviendrait inutile et ne pourrait plus être appliquée.

« C'est manifestement contraire à ce qu'a entendu faire le législateur et c'est pour permettre l'exécution de sa volonté que nous vous proposons de compléter l'article 1er de la loi du 17 février 1893, de façon à ce que, tout en maintenant rigoureusement les précautions prises avec soin pour éviter la fraude, les intérêts, profondément respectables et s'exerçant sous la foi des traités, que le Parlement avait voulu respecter, puissent conserver l'exercice d'un droit, que les termes obscurs de la loi suppriment en réalité.

Nous vous proposons donc d'ajouter purement et simplement à l'article 1er le paragraphe suivant, qui enlèvera, dorénavant, toute difficulté d'interprétation et qui se trouve textuellement dans le rapport de l'honorable M. Graux

« Lors même que le fermier serait remplacé par un autre fermier. » La rédaction proposée parut à juste titre trop large dans ses termes à la commission de la Chambre des députés et cette commission tint à rester dans l'esprit du rapport du regretté M. Georges Graux.

Les conditions stipulées par la commission de la Chambre des députés sont les suivantes : il faut que les terres, dans la zone dont il s'agit, soient possédées à titre de propriété ou de location, sans interruption et en vertu de titres réguliers, par ceux qui demandent la franchise ou par leurs ascendants, depuis le 1er février 1892; ou bien, s'il s'agit de terres en location, que ces terres aient été louées, dans les mêmes circonstances, par le même propriétaire ou par ses ascendants, soit à ceux qui demandent la franchise, soit aux fermiers qui les ont précédés dans l'ensemble de l'exploitation.

Ces conditions restrictives paraissent suffisantes et traduisent, dans le texte proposé, la pensée qui avait inspiré le rapporteur, M. Georges Graux, lorsqu'il disait : « Tant que le corps de culture reste le même, on peut admettre que le privilège de la zone frontière subsiste. »

Nous avons donc l'honneur de vous demander, messieurs, d'adopter la proposition suivante.

Décret du 29 décembre 1901 autorisant les consuls de France en pays de juridiction à procéder au mariage d'un Français avec une étrangère.

Le Président de la République française,

Sur la proposition du Ministre des Affaires étrangères et du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice,

Vu la loi du 29 novembre 1901, qui a modifié l'article 170 du Code civil et autorisé les agents diplomatiques et les consuls à procéder à la célébration du mariage d'un Français avec une étrangère dans les pays qui seront désignés par décrets du Président de la République ;

Vu les ordonnances des 23 et 26 octobre 1833 et le décret du 19 janvier 1881 sur les pouvoirs des consuls, vice-consuls et agents consulaires relativement aux actes de l'état civil des Français en pays étranger;

Décrète :

ART. 1. Les agents diplomatiques, consuls généraux, consuls et vice-consuls de France en Turquie, en Perse, en Egypte, au Maroc, à Mascate, au Siam, en Chine et en Corée sont autorisés à procéder au mariage d'un Français avec une étrangère, toutes les fois qu ils en seront requis.

La même faculté est accordée aux agents consulaires qui ont reçu les pouvoirs d'officiers de l'état civil dans les conditions prévues par l'article 7 de l'ordonnance du 26 octobre 1833.

ART. 2. Le Ministre des Affaires étrangères et le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, sont chargés de l'exécution du présent décret. Fait à Paris, le 29 décembre 1901.

Convention pour la protection des œuvres littéraires et artistiques conclue entre la France et le Monténégro, à Cettigné, le 11-24 janvier 1902 (Approuvée par la loi du 6 avril 1903 (1); échange des ratifications (1) Chambre : Discussion et adoption le 2 décembre 1902, urgence déclarée. Rapport présenté le 28 novembre 1902, par M. François Deloncle, annexe no 496.

Sénat Discussion et adoption le 30 mars 1903, urgence déclarée.

Rapport présenté le 26 mars 1903, par le Comte d'Aunay, annexe n° 119.

à Cettigné le 19 juin 1903; promulguée par décret du 30 juin 1903; J. Officiel du 4 juillet suivant).

Son Exc. M. le Président de la République française et S. A. R. le prince de Monténégro, animés du désir de garantir dans leurs Etats les droits des auteurs sur leurs œuvres littéraires ou artistiques, ont résolu de conclure à cet effet une Convention et ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir:

S. Exc. M. le Président de la République française: M. Fernand Souhart, son Ministre plénipotentiaire chargé des fonctions de Ministre résident auprès de S. A. R. le prince de Monténégro, et S. A. R. le prince de Monténégro, le voivode Gavro Vancovitch, son Ministre des Affaires étrangères; lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

ART. 1. Le Gouvernement de la République française et celui de Monténégro s'engagent réciproquement à empêcher sur leurs territoires respectifs toute reproduction illicite d'oeuvres artistiques et littéraires, de même que toute représentation ou exécution illicite des œuvres dramatiques ou musicales d'auteurs ressortissant à l'un des deux pays, à poursuivre les contrefacteurs et auteurs des reproductions illicites et à saisir les originaux et les copies des œuvres contrefaites, ainsi que les instruments de contrefaçon.

Pour que les auteurs, éditeurs ou artistes des deux pays soient admis en conséquence devant les tribunaux des deux pays à exercer des poursuites contre les contrefaçons, il suffira qu'ils justifient de leur droit de propriété en établissant par un certificat que l'écrit ou l'œuvre d'art en question est une œuvre qui, dans le pays où elle a été publiée, jouit de la protection légale contre la contrefaçon ou la reproduction.

Pour les écrits et les œuvres d'art de citoyens français, ce certificat sera délivré par le bureau de la librairie au Ministère de l'Intérieur et légalisé par le consulat général de Monténégro à Paris; pour les écrits et les œuvres d'art des sujets monténégrins, le certificat sera délivré par le Ministère princier de l'instruction publique et légalisé par la légation de France à Cettigné.

ART. 2. La présente Convention sera ratifiée et les ratifications en seront échangées à Cettigné le plus tôt possible. Elle entrera en vigueur un mois après l'échange des ratifications.

ART. 3. La présente Convention aura la durée de 10 ans et il est entendu que si celle-ci n'est pas dénoncée à son échéance, elle se trouvera prorogée d'année en année, tant que l'une ou l'autre

des parties contractantes ne l'aura dénoncée. La dénonciation devra avoir lieu six mois avant l'échéance.

En foi de quoi les plénipotentiaires respectifs ont signé cette convention et l'ont revêtue de leurs cachets.

Fait en double expédition, à Cettigné, le 11-24 janvier 1902.

(L. S.) F. SOUHART.

(L. S.) V. G. VANCOVITCH.

Exposé des motifs du projet de loi portant approbation de la Convention ci-dessus, présenté le 20 octobre 1902, au nom de M. Emile Loubet, Président de la République française, par M. Delcassé, Ministre des Affaires étrangères, et par M. Chaumié, Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts.

Messieurs, les droits de propriété de nos auteurs et de nos artistes étaient antérieurement garantis au Monténégro par les dispositions de la Convention de Berne du 9 septembre 1886 pour la protection des œuvres artistiques et littéraires, à laquelle la principauté avait accédé le 1er juillet 1893. Le 1er avril 1900, le Monténégro s'est retiré de l'Union. La dénonciation par le Gouvernement du Monténégro de la Convention de Berne ayant eu pour conséquence de laisser nos auteurs et nos artistes sans protection assurée dans ce pays, le Gouvernement de la République s'est préoccupé de remédier à cette situation fâcheuse en concluant un Arrangement sur la matière avec la principauté. Des négociations ont donc été engagées avec le Gouvernement monténégrin et elles ont abouti à la signature de la Convention que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.

Cette Convention, à défaut de stipulations plus complètes et plus détaillées à l'adoption desquelles l'état actuel de la législation de la principauté ne se prêtait pas, contient les dispositions essentielles qui assurent la protection des droits de nos auteurs et de nos artistes au Monténégro. En outre, point qu'il est intéressant de signaler, nous avons obtenu que la reconnaissance de ces droits ne fût pas subordonnée à l'accomplissement des formalités génantes de la déclaration et du dépôt.

Pour que les auteurs, éditeurs ou artistes des deux pays soient admis en conséquence devant les tribunaux des deux pays à exercer des poursuites contre les contrefacteurs, il suffira qu'ils justifient de leur droit de propriété en établissant par un certificat émanant de l'autorité publique compétente que leur œuvre jouit, dans le pays où elle a été publiée, de la protection légale contre la contrefaçon ou la reproduction illicite.

Cette Convention est, dans notre pensée, de nature à donner satisfaction à nos écrivains et à nos artistes. Nous avons donc la confiance que vous voudrez bien l'approuver et adopter le projet de loi qui nous autorise à la ratifier.

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