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que le temps et l'expérience auront suffisamment constatées. Telle est, Messieurs, la méthode d'enseignement mutuel, beaucoup plus ancienne qu'on ne le croit communément, et qui offre à un point singulier l'exemple de ce que produit l'emploi bien ordonné des élémens les plus simples. Vous ne vous attendez pas, Messieurs, que je vienne exposer ici ses procédés qui sont maintenant connus de tout le monde; vous ne vous attendez pas non plus que j'entreprenne de répondre aux objections quilui ont été opposées. Tout le monde sait que les nouveautés les plus utiles ont eu leurs contradicteurs. On se sent naturellement porté à se défier de tout ce qui est nouveau, et surtout après un temps où nous avons éprouvé de si terribles, de si funestes innovations. A Dieu ne plaise donc que j'accuse ni les intentions, ni les lumières de ceux qui se sont élevés contre la méthode d'enseignement mutuel ! Moi-même je l'avouerai, dans les premiers momens, je n'ai pu me défendre d'une certaine défiance: anais comme tout homme raisonnable ne doit point juger sans connaître, j'ai vu, j'ai examiné, et les effets m'ont convaincu. Je dirai avec la même franchise aux antagonistes de bonne foi: Venez et voyez: si l'institution est bonne,

vous vous reprocheriez plus tard de l'avoir jugée sans la connaitre; si elle est mauvaise, vous vous accuseriez de ne vous être pas mis à même d'en dévoiler les défauts par vos propres observations.

<< Au reste, Messieurs, la méthode d'enseignement mutuel éprouve le sort de tout ce qui est vraiment bon et vraiment utile. Partout l'opposition se montre et change ses moyens d'attaque, mais partout en même temps le nombre des écoles se multiplie. Les effets frappent les yeux, et les hommes sages qui voyaient naguère une foule d'enfans indociles et inoccupés, errant à l'aventure dans les rues de chaque cité, exposés à toutes les causes de corruption dans plus d'un genre, et qui les voient maintenant se livrer avec plaisir et avec succès à des occupations utiles à eux-mêmes et à la société, graver dans leur mémoire les dogmes et les préceptes de la religion, assister avec décence et avec recueillement au service divin; quand ils entendent ces jeunes voix élever chaque jour au ciel pour le meilleur des Rois, cette prière que la reconnaissance doit graver dans tous les coeurs, vraiment français, alors, Messieurs, ils bénissent les efforts courageux et le zèle charitable. des magistrats qui n'ont pas craint de lutter

contre quelques préjugés pour le bien de l'humanité.

<< Mais c'est vous surtout, mes enfans, qui devez conserver dans le fond de votre âme un souvenir ineffaçable du bienfait que vous recevez en ce jour. N'oubliez jamais que c'est à notre bon Roi, et à M. le préfet, fondateur de l'Ecole où vous êtes admis, que vous serez redevables des vertus qui font l'homme de bien, et de l'instruction qui vous est nécessaire pour suivre avec plus de succès le métier que vous embrasserez. Montrez votre reconnaissance ? en profitant des ressources qui vous sont fournies par votre bienfaiteur. Soyez dociles à la voix qui va vous instruire; aimez ce Dieu de bonté, qui porte à l'enfance un amour si tendre; montrez-vous enfans respectueux et soumis; devenez un jour de vrais chrétiens, des sujets fidèles et des hommes utiles à l'Etat. Soyez laborieux, conservez autant que vous le pouvez la profession de vos pères. Fuyez le vice, suivez la vertu, et vous serez certains de trouver le bonheur. »

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CHAPITRE XVIII.

Continuation du même sujet.

NOUS
ne savons si les adversaires de l'Univer-
sité lui pardonneront d'avoir parlé, en tous
lieux et en tous temps, un langage aussi propre
à désarmer la critique, et à convaincre de men-
songe l'absurde accusation d'athéisme et d'im-
moralité. Un des plus habiles peintres du coeur
humain nous révèle quelque part la honteuse
disposition qui nous fait hair celui que nous
avons offensé (1); et, nous ne pouvons nous
le dissimuler, beaucoup de gens, même d'hon-
nêtes gens, se sont condamnés à la haine envers
l'Université, parce que, sans réflexion et sans
examen, esclaves d'un
esclaves d'un préjugé, échos d'une
calomnie, prôneurs et victimes d'un parti,
censeurs du présent, quel qu'il soit, adorateurs

(1) Ingenii humani est odisse

quem læseris.

du passé, quel qu'il fût, confondant l'ancienne France et la nouvelle, Robespierre et Buonaparte, résolus à tout craindre, à tout blâmer, à tout repousser, ils se sont permis, dès l'abord, des injures et des outrages.

Espérons pourtant. La justice et la vérité ont une si grande force, et l'eloquence des faits est si entraînante!

Nous citerons un dernier discours, où il nous semble que les questions de l'éducation du peuple, des doctrines et des intentions du corps enseignant, sont traitées avec la sagesse et la mesure convenables.

Une école-modèle d'enseignement mutuel a été établie à Clermont-Ferrand, par les soins réunis du préfet, du recteur et du maire. Avant d'appeler le public à être témoin des procédés de cette méthode d'enseignement primaire, il avait fallu en donner quelque habitude à ses nombreux élèves, et surtout laisser au maître le temps de former ses moniteurs.

C'est le jeudi 18 juin 1818, que cette école fut ouverte au public.

Ce jour-là, les élèves se rendirent d'abord à la cathédrale, où M. le curé, président des co

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