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352. Nulle récompense pour l'héritage vendu dans l'intervalle du contrat de mariage à la célébration.

353. 2o. Tout acte en vertu duquel la communauté s'enrichit aux dépens des propres des conjoints, donne droit à une récompense ou reprise.

354. Comment s'exerce la récompense.

355. Explication des mots remploi, reprise, récompense. Le remploi proprement dit est le remplacement en héritage. 356. Quand il est censé fait à l'égard du mari, et son effet. 357. L'héritage acquis pour remploi ne devient propre qu'à la concurrence du prix du propre vendu. Quid, si la différence du prix est peu considérable?

358. La déclaration du remploi doit étre faite incontinenti dans le contrat d'acquisition, et non ex intervallo. 359. Le remploi du propre de la femme doit étre formellement accepté par elle.

360. Elle ne peut l'accepter après la dissolution de la commu

nauté.

361. Mais elle peut accepter depuis le contrat, si le mari n'á pas rétracté ses offres.

362. Il ne peut les rétracter, s'il est stipulé dans le contrat de mariage que le remploi sera fait sur le premier acquét. 363. Est-il nécessaire qu'en ce cas la femme accepté le rem'ploi? Peut-elle le refuser?

364. Examen plus approfondi de la question. Le mari est en ce cas le mandataire de la femme.

365. La rigueur de l'ancienne jurisprudence, sur les remplois faits pendant le mariage, fondée sur la prohibition de se donner entre époux, a cessé avec la prohibition qui lui servait de prétexle.

566. Le Code donne trois moyens de faire les remplois pendant le mariage.

36. La stipulation d'emploi sur le premier acquét s'exécute

t-elle de plein droil, méme sans déclaration de remploi ? 368. L'action en remploi est mobilière et tombe dans le don universel des meubles fait à l'autre époux.

369. Quid, si elle est stipulée immobilière par contrat de" mariage?

370. On ne peut faire par anticipation le remploi d'un immeu ble non encore vendu; mais on peut stipuler que s'il est vendu des propres de la future pendant le mariage, le remploi en sera fait sur tel propre du mari et à tel taux. 371. Quid, s'il était prouvé que l'héritage acquis pour remploi

des deniers de la femme n'a pas été payé de ses deniers? 372. Peut-on stipuler que les immeubles de la femme mariée

sous le régime de la communauté seront inalienables? 33. Peut-on stipuler dans le contrat de mariage que s'il est vendu des immeubles pendant le mariage, il n'en sera pas dú récompense ou remploi ?

303. Nous avons vu suprà, pag. 121, no. 35, que dans les principes de nos anciennes coutumes françaises, le mari était pendant sa vie seul propriétaire des biens de la communauté ; qu'il pouvait en disposer à son plaisir et volonté, les aliéner, les hypothéquer, sans le concours de sa femme; les donner, les perdre même, sans en devoir compte à personne; en un mot, qu'il avait, dans toute sa plénitude, le droit d'user et d'abuser, qui constitue essentiellement la propriété. Aussi les rédacteurs des coutumes, pour caractériser les droits du mari sur les biens de la communauté, se gardèrent bien de dire qu'il en avait l'administration; terme équivoque, qui ne répondait point à l'étendue de ses droits : ils prononcèrent nettement qu'il en était le seigneur, c'està-dire le propriétaire, le vrai seigneur; et comme s'ils avaient craint qu'on ne prît pas cette expression dans sa signification naturelle et énergique, ils ajoutèrent: «En telle manière qu'il les peut › vendre, aliéner ou hypothéquer, et en faire et

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› disposer par donation ou autre disposition entre vifs, à son plaisir et volonté, sans le consentement de sa femme. »

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.. Le Code a modifié ce pouvoir excessif du mari. On serait même tenté d'abord de penser qu'il l'a dépouillé de sa qualité de propriétaire, pour le réduire à la qualité d'administrateur. « Le mari, dit l'art. 1421, administre seul les biens de la ⚫ communauté. » Mais ce mot a plusieurs acceptions. On peut administrer des biens qui ne nous appartiennent pas; c'est ainsi qu'on dit que le tuteur administre les biens de son pupille; le père, durant le mariage, les biens de ses enfans mineurs (389); le mari, les biens personnels de son épouse (1428).

On peut aussi administrer des biens ou des droits qui nous appartiennent en partie, comme des biens indivis entre plusieurs personnes, une entreprise, une société dans laquelle on est intéressé. Enfin, on peut administrer ses propres biens, ses propres affaires : on est alors administrateur rei suæ. C'est ainsi qu'on dit d'un homme qu'il administre lui-même ses affaires, ses propres biens, pour dire qu'il n'en confie l'administration à personne. On ne peut donc tirer des termes de l'art. 1421 aucune induction contre le mari, pour en conclure qu'il n'est pas propriétaire des biens de la communauté.

D'ailleurs, immédiatement après la disposition qui dit que le mari administre seul les biens de la communauté, cet article en ajoute une autre qui l'explique et dit : « Il peut les vendre, alié

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ner et hypothéquer, sans le concours de sa femme, et par conséquent, sans lui en devoir aucun compte. Or, on ne vend pas, on n'aliène pas les choses dont on n'a que l'administration: le mari a donc des pouvoirs plus étendus què ceux d'un administrateur, et puisqu'il peut vendre, aliéner, c'est-à-dire transférer à autrui la propriété, il est propriétaire; car on ne peut transférer à autrui plus de droits qu'on n'en a soimême. (2125, 2182.)

Sur la tête de qui, d'ailleurs, reposerait la propriété des biens de la communauté? Ce ne peut être sur la tête de la femme, qui n'y a qu'un droit éventuel et conditionnel; en un mot, la simple espérance d'un droit. Ce ne peut être non plus sur la tête de ce fantôme d'être moral qu'ont imaginé de placer comme une tierce personne entre les deux époux, quelques auteurs dont nous avons réfuté la doctrine, suprà, no. 82, et qui d'ailleurs ne donnent qu'un usufruit à leur prétendu être moral. Quant à la propriété des biens de la communauté, M. Delvincourt (1), l'un de ceux qui regardent comme un usufruit légal le droit de la communauté sur les fruits et revenus des biens personnels des époux, dit positivement que le mari est censé propriétaire, à l'égard des tiers, des biens de la communauté.

(1) Pag. 17 du tom. III de l'édition de 1819: « Le mari est seul chef » et libre administrateur de la communauté, tant qu'elle dure; il ed » est même, comme nous l'avons dit, censé propriétaire à l'égard des » tiers. »

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Mais si le mari est censé propriétaire des biens de la communauté à l'égard des tiers, il l'est, à plus forte raison, à l'égard de la femme, qui est en sa puissance, et à laquelle il ne doit aucun compte de ce qu'il a fait de ces biens sans la con'sulter.

Disons donc que, sous l'empire du Code, le mári est encore propriétaire des biens dits de la communauté, quoique sa propriété soit beaucoup plus limitée que sous l'empire des coutumes, ainsi que nous le verrons bientôt. Et comme il ne doit compte à personne ni des aliénations ́qu'il fait, ni des motifs qui l'ont porté à les faire, ni de l'emploi des sommes qui en sont provenues, les principes établis par Pothier, no. 470 du Traité 'de la communauté, sont encore aujourd'hui dans toute leur force.

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• Le mari peut, à son gré, perdre les biens de la communauté sans en être comptable; il peut laisser périr, par la prescription, les droits qui dépendent de la communauté, dégrader les héritages, briser les meubles, tuer par brutalité ses chevaux et autres animaux dépendans de la com»munauté, sans être comptable à la femme de toutes ces choses. »

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304. Ces actes caractérisent clairement le droit d'user et d'abuser, en quoi consiste la propriété. On ne peut donc définir avec justesse le droit du mari sur les biens dits de la communauté, qu'en disant que c'est un droit de propriété, non pas plein et entier, mais modifié par les dispositions du Code. De là découle un principe qui peut ser

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