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de son évêque, et ne le reconnoît plus pour son chef. Cela peut être d'un mauvais exemple pour son troupeau, si tant est qu'il en ait un, et je crains que ses coadjuteurs, comme il les appelle, ne soient tentés d'imiter un jour sa défection. Nous reconnoissons, ajoute-t-il, que, pour le gouvernement de l'Eglise, il est nécessaire qu'il existe un concile et un chef ou patriarche, et les que évéques aient, sous l'autorité de ce concile, le pouvoir de faire des règles de discipline en harmonie avec l'état de civilisation des peuples soumis à leur juridiction. Il seroit difficile de renfermer plus de contradictions dans moins de mots. Un concile est nécessaire! Et pourquoi, je vous prie, s'il ne peut avoir aucune autorité, comme cela est évident d'après vos maximes? Seroit-ce pour définir les dogmes? Ce seroit une absurdité, puisqu'il n'est pas infaillible. Seroit-ce pour tracer des règles de discipline? Mais vous donnez ce droit aux évêques, chacun dans leur juridiction. Il est vrai que vous y mettez une restriction, et que vous les subordonnez à cet égard au concile. Mais s'il arrivoit que le concile se trompât, ou que du moins ils le jugeassent ainsi, voudriez-vous les soumettre à son autorité? Ensuite, qu'est-ce que ce concile? de qui est-il composé? quelle est la source de sa juridiction? Est-il temporaire ou permanent? Où siége-t-il? que fait-il? Comment le connoître et savoir quand il a parlé? Toutes choses que Châtel oublie, et qu'il auroit pourtant bien fait de nous apprendre; car, s'il est nécessaire que ce concile existe, il l'est aussi sans doute qu'il agisse et qu'on le sache. J'en dis autant de ce patriarche qui se tient dans l'ombre, et qui, s'il est bon à quelque chose, auroit, ce me semble, un autre moyen pour nous en convaincre que de nous le faire dire par son délégué. Enfin Châtel veut que les évêques aient le droit de faire des règles de discipline. Mais, à moins de supposer dans l'Eglise une autorité infaillible, ces règles deviennent nécessairement illusoires, puisqu'on ne peut jamais imposer à personne l'obligation de s'y soumettre. S'il en falioit une nouvelle preuve, Châtel lui-même nous la fourniroit. En effet, s'il refuse de se soumettre à son évêque et aux règies de discipline établies ou reconnues par l'Eglise entière, c'est parce qu'il prétend que l'Eglise s'est trompée en les établissant. Or, ce qu'il fait, voudroit-il contester à d'autres le droit de le faire également? Et que deviendra, encore une fois, le pouvoir et le gouvernement de l'Eglise, si chacun peut toujours lui opposer qu'elle se trompe, et que ses règles ne sont plus en harmonie avec l'état de la civilisation?

Après avoir, à l'exemple de Luther, rejeté le dogme de l'infaillibilité de l'Eglise, Châtel proclame aussi cet autre principe fondamental, que la raison de chacun doit étre la règle de sa croyance, et que non-seulement on peut, mais qu'on doit suivre sa propre conviction, lors méme qu'elle se trouve en opposition avec la croyance

générale; c'est-à-dire qu'il admet l'indifférence la plus complète en matière de croyance, et qu'il adopte de primé-abord toutes les conséquences que le principe de la réforme devoit entraîner, et contre lesquelles on a vu les chefs du protestantisme résister si long-temps. Quel moyen alors de condamner aucune erreur? Chacun pourra être impunément socinien, mahométan, déiste, matérialiste, athée même, au gré de ses caprices et de ses opinions. TOUJOURS VARIABLES ET INCERTAINES. Il suffira d'être ou de se croire

convaincu, pour se dire innocent. Il en sera de même pour la morale, qui repose nécessairement sur des croyances. Adieu les vertus et les devoirs. Pour se mettre à l'aise, on n'aura qu'à se persuader que tout cela n'est rien autre chose que des préjugés. Voilà où nous mène ce beau système, qu'on nous donne modestement pour une nouvelle réforme.

que

pas

Luther avoit dit qu'il ne reconnoissoit d'autre règle de foi l'Ecriture, interprétée par la raison de chacun; Châtel, qui le copie, mais en homme qui ne comprend rien, commence par nous dire expressément que la raison de chacun doit être la règle de ses croyances, puis il ajoute néanmoins nous prenons l'Evangile pour notre unique règle de foi. Ainsi la raison et l'Evangile sont en même temps pour chacun l'unique règle de foi; ce qui n'est très-facile à entendre, mais ce qui montre avec quelle étourderie Châtel va se jeter dans des contradictions qu'un autre chercheroit au moins à dissimuler. On ne fiuiroit pas, si on vouloit relever toutes les niaiseries et les contradictions que cet écrit renferme sur le seul article de l'infaillibilité. Je ne puis toutefois me dispenser d'er signaler encore une des plus grossières: Châtel regarde le dogme de l'infaillibilité comme une impiété, parce que c'est, dit-il, attribuer à des hommes ce qui appartient exclusivement à Dieu. Cependant il admet l'E vangile comme règle de foi, et regarde les livres canoniques comme inspirés; ce qui suppose évidemment que les auteurs n'ont pas pu se tromper en les écrivant : le contraire seroit un blasphème. Voilà donc des hommes à qui Châtel est obligé d'attribuer l'infaillibilité. Comment fera-t-il pour se justifier de cette impiété? réformateur ignorant, qui n'a pas vu que, si les écrivains sacrés ont été infaillibles, si les conciles le sont, c'est parce que Dieu leur communique son infaillibilité, et qu'il préserve les conciles d'erreur par son assistance particulière, comme il en a préservé les écrivains par son inspiration. D'où il suit que l'infaillibilité n'appartient proprement ni aux uns, ni aux autres, mais qu'ils la tiennent seulement d'emprunt, si je puis parler ainsi, et par commu̟nication de celui qui seul en est la source, Quand on n'a pas assez d'esprit pour comprendre cela, on pourroit bien se dispenser de faire des professions de foi.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. Derrière le maître-autel de l'église Notre-Dame, à Paris, étoient deux belles statues de Louis XIII et de Louis XIV, représentés à genoux en mémoire du vœu du premier de ces rois, vœu renouvelé par son fils. On ne sait à qui ces deux statues ont déplu, mais on vient de les faire enlever. Jeudi dernier des ouvriers sont arrivés dans la cathédrale sans que personne en fût prévenu; ils ont forcé les chanoines à aller célébrer leur office ailleurs, et les statues ne sont plus à leur place. Quel motif peut-on alléguer d'une telle mesure? est-ce que ces témoignages de la piété des deux monarques auroient choqué un siècle irréligieux? Mais on n'a vu aucune réclamation à ce sujet dans les journaux qui sont en possession d'indiquer au gouvernement ce qu'il a à faire. Aucun écrivain, du moins à notre connoissance, ne s'étoit plaint de ces statues. C'est donc un outrage gratuit et à la religion et à la mémoire des deux rois Mais ce qui est plus étonnant, c'est que cet outrage leur fût réservé sous le règue d'un prince de leur sang, d'un petit-fils de Louis XIII, d'un petit-neveu de Louis XIV. Ce prince renie-t-il sa famille? fait-il divorce avec toute l'ancienne monarchie? ne veut-il avoir rien de commun avec les plus grands noms de notre histoire? Tout ce qu'on peut supposer, c'est que prince n'est pas instruit de ce qui s'est fait. Il est impossible d'imaginer qu'il eût consenti à faire cet affront à ses ancêtres.

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Nous donnons aujourd'hui le texte de l'ordonnance des grands-vicaires d'Aix, dont nous avons parlé dans notre dernier numéro :

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« Nos très-chers Frères, le Roi, dans la lettre qu'il nous a adressée le 18 de ce mois, réclame les suffrages de l'Eglise en faveur des chrétiens morts dans son sein, et qui ont péri, l'année dernière, durant les journées des 27, 28 et 29 juillet.

>> Instruite et dirigée par l'Esprit saint, l'Eglise, dont les espérances s'étendent au-delà du temps, a toujours reconnu que la pensée de prier pour les morts est une pensée sainte et salutaire. Fidèles à la doctrine de cette mère tendre et compatissante, nous nous empresserons tous de seconder les vues religieuses de Sa Majesté.

les autres

» Les premières autorités de ce département, ainsi que autorités locales, après avoir rempli ce devoir religieux pour les morts, veulent aussi, d'après les instructions qui leur ont été transmises par l'autorité supérieure, intéresser le Ciel en faveur de la France. Pénétrés de reconnoissance pour les bienfaits déjà reçus du Seigneur, et désirant d'en voir la continuation et l'accroissement par l'esprit d'ordre, de paix et de concorde qui doit régner entre les enfans d'une même patrie, elles se proposent de venir dans le temple du Dieu vivant, le 29 de ce mois, demander pour la France et pour son Roi l'abondance des fa

veurs célestes.

» A ces causes, après en avoir conféré avec MM. les dignitaires, cha

noines et chapitre de l'église métropolitaine d'Aix, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit:

>>1° Pour nous conformer aux intentions religieuses de Sa Majesté, il sera célébré, le 27 de ce mois, dans toutes les églises du diocèse d'Aix, une messe solennelle de Requiem pour le repos de l'ame des personnes qui out péri l'année dernière dans les journées des 27, 28 et 29 juillet, dont la France célèbre l'anniversaire. Cette messe sera celle marquée dans le Missel, au jour de la commémoraison générale des morts; et les collecte, secrète et post-communion seront seulement celles Pro defunctis fratribus; la messe sera suivie de l'absoute.

» 2o Le surlendemain 29 de ce mois, il sera célébré, dans l'église métropolitaine d'Aix, et dans les autres églises paroissiales, où les autorités civiles locales se rendroient en corps ce jour-là pour y assister à un service religieux, une messe solennelle d'actions de grâces De Beata Maria, pour remercier Dieu des grâces reçues, et pour lui demander la continuation de ses bienfaits. On y ajoutera les collecte, secrète et post-communion Pro Rege, marquées dans le Missel. Après la messe on chantera le psaume 19, Exaudiat te Dominus in die tribulationis, etc., suivi du Tantum ergò, des versets et oraisons de SS. Sacramento, Pro gratiarum actione et Pro Rege, et de la bénédiction du très-saint Sa

crement. >>

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L'ordonnance est datée du 22 juillet; elle est signée des grandsvicaires capitulaires, MM. Rey, chanoine théologal; Abel, chanoine pénitencier; de Suffren, chanoine, grand-chantre, et Gal. M. Boulard, autre grand-vicaire capitulaire, avoit refusé de prendre part à la délibération; M. Gal étoit notoirement absent, et n'avoit pas été consulté; M. de Suffren a protesté. Ainsi, sur cinq grands-vicaires, il n'y en avoit véritablement que deux pour Fordonnance. Les curés, qui en curent connoissance, avoient donc des raisons très-légitimes de ne pas obtempérer à un acte aussi irrégulier sous tous les rapports. Aussi il n'y en a guère eu que trois ou quatre, dans tout le diocèse, qui aient lu et exécuté l'ordonnance; encore cela vient-il peut-être de ce qu'ils n'étoient pas bien instruits de ce qui s'étoit passé. Qu'est-il résulté de là? C'est qu'on a crié contre les curés, et qu'ils ont été harcelés, inquiétés, dénoncés. Voilà le beau service que leur a rendu l'ordonnance.

- M. l'évêque de Belley, après avoir, dans une circulaire du 5 août, invité ses curés à ne pas faire la procession hors de l'église le jour de l'Assomption, ajoute :

« Gardez-vous cependant, Messieurs, de rien changer à la liturgie ce jour-là : vous ferez donc les prières pour le Roi comme elles sont marquées; vous chanterez, comme à l'ordinaire, le Sub tuum; vous ferez même la procession dans l'intérieur de l'église, eu chantant les litauies de la sainte Vierge, à moins que des circonstances purement locales et matérielles n'y mettent obstacle, par exemple, si l'église étoit trop petite, etc.

» La France est consacrée depuis long-temps au culte de Marie; elle

est mise sous la protection spéciale de cette reine du ciel, qui la protége d'une manière qui est évidente pour tous ceux qui ne sont pas plongés dans le plus profond aveuglement, Renouvelons, chacun en particulier, cette consécration: moins elle aura d'éclat et de solennité extérieure, plus il faut y suppléer par notre recueillement et notre ferveur; plus le nombre de ceux qui ne veulent avoir aucun rapport avec le ciel augmente, plus il faut que ceux qui ont le bonheur de conserver la foi et d'en apprécier l'importance, se montrent assidus aux offices divins, et semblent vouloir par-là remplir les lacunes qui sont laissécs par les déserteurs.

» Jamais, non jamais on ne pourra justifier, ni même concevoir l'inconséquence d'un homme qui, ne s'étant jamais occupé que de la terre, aspire béanmoins aux récompenses du ciel. Eh! que dire, que penser de ceux qui, non-seulement ne font rien pour le ciel, mais se mettent en opposition ouverte avec tout ce qui se rapporte à la Divinité; qui blasphement le saint nom de Dieu, maudissent le culte qu'on lui rend, profanent les jours, ou les lieux, ou les objets qui lui sont consacrés, applaudissent à ceux qui le font, etc. Que dire, Messieurs? hélas ! gémir et prier beaucoup. Demander surtout, par l'intercession de Marie, que cette maladie spirituelle cesse parmi nous; que des idées saines, justes, raisonnables, et surtout religieuses, prennent la place de ces spéculations téméraires et même criminelles que nos neveux mettront uu jour au rang des monomanies et des folies de l'esprit humain, comme nous y avons mis toutes les extravagances de l'idolâtrie. Hâtons ce moment par notre fidélité à la grâce, par notre assiduité à remplic nos devoirs, par notre prudence, par notre esprit de pénitence, et par notre tendre dévotion envers la mère de Dieu. »

M. l'évêque témoigne en finissant le désir que l'on fasse, dans toutes les paroisses, une neuvaine à la sainte Vierge, pour lui demander le rapprochement des esprits et des cœurs et l'affermisse-9. ment de la religion, dont le fruit sera le calme et la paix, objet de tous nos vœux, dit le prélat. De tels sentimens et de tels voeux ne devroient-ils pas faire rougir les ennemis du clergé de leurs plaintes amères et de leurs injustes défiances?

- En plusieurs lieux, dans le Midi, le service funèbre du 27 juillet a été l'occasion d'insultes à la religion, et des gens qui demandoient des prières y ont mêlé des hymnes de vengeance. A Draguignan, toutes les autorités assistant à la messe, immédiatement après l'élévation, une douzaine de voix chantèrent la Parisienne. Ce fut une grande rumeur dans l'église; les prêtres gémissoient, plusieurs fidèles s'indignoient. Les chanteurs s'arrêtèrent au refrain, étonnés peut-être de leur petit nombre, et cédant aux prières de deux officiers plus sages que les autres. On dit que le préfet a blâmé cette insulte; n'auroit-il pas pu l'empêcher? A StZacharie, diocèse de Fréjus, le corps municipal se rendit à l'église, pour le service du 27 juillet, le cortége faisant entendre des airs patriotiques. Le curé déclara que, si on continuoit ces chants daus le lieu saint, il n'y auroit pas de messe. On cessa en effet de chan

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