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pas la guerre de Buonaparte pour la secourir, et les autres puissances ne souffriroient pas une intervention à main armée. M. le ministre termine, en disant que c'est à la chambre maintenant à approuver ce système de paix, ou à manifester son vœu pour la guerre générale.

M. Thouvenel attaque toutes les parties de l'administration intérieure et extérieure, mais il est impossible de suivre le cours de son discours, au milieu de l'agitation qui succède à celui de M. C. Périer, II. demande que le tableau de la France, inquiète, appauvrie par les impôts, tourmentée par les suites du système actuel, soit mis fidèlement sous les yeux du Roi misanthrope (rires). L'orateur sc reprend, en disant philanthrope.

M. Thiers examine, dans un long discours, comment doivent être comprises les conséquences de la révolution de juillet, et tout ce qui a été fait depuis un an. Il approuve la conduite de l'administration, notamment de celle des finances, et réfute toutes les prétentions des hommes du mouvement. Il cherche à établir que le système de la paix étoit le seul à suivre, et qu'une guerre générale seroit calamiteuse. L'orateur a été plusieurs fois assez vivement interrompu par les mein¬ bres de la gauche.

On nous invite à insérer la lettre suivante, qui a été adressée par un curé de l'arrondissement de Sainte-Ménébould à l'éditeur du Journal de la Marne.

Servon, le 30 juillet 1831.

<< Monsieur, j'ai cru devoir vous signaler le zèle qu'ont déployé, dimanche dernier (24 juillet), à l'occasion d'un vol commis dans mon habitation, la compagnie de sapeurs-pompiers et les gardes nationaux de ma paroisse. Des voleurs étoient entrés chez moi, pendant la messe, à l'aide d'effraction; ils avoient fui, emportant avec eux une modique somme qu'ils avoient trouvée dans une armoire dont ils avoient détaché la serrure. Le vol est bientôt connu dans la paroisse, et à l'instant on bat le rappel. Personne ne pense à dîner. Pompiers, gardes nationaux, tous se réunissent, et en moins de dix minutes, des détachemens de trois ou quatre hommes sont dirigés sur tous les points. Ces hommes dévoués firent une telle diligence, que les individus présumés coupables du vol furent arrêtés à une petite lieue de la commune de Servon.

>> J'ose vous prier, Monsieur, d'insérer ma lettre dans votre journal. Je dois cette marque de reconnoissance aux pompiers et aux gardes nationaux de ma paroisse. Je pense aussi que cet exemple de dévoûment ne peut qu'exciter le zèle des gardes nationaux du département, et leur montrer ce qu'ils peuvent pour la sûreté des propriétés et la répression des délits.

J'ai l'honneur d'être, etc. >>

RENARD, desservant.

Le Gérant, Adrien Le Clerc.

COURS DES EFFETS PUBLICS.-Bourse du 10 août 1831.

Trois pour 100, jouissance du 22 juin, ouvert à 54 fr. 40 c., et fermé à 53 fr. 70 c. Cinq pour 100, jouissance du 22 mars, onvert à 86 fr. 00 c., et fermé à 85 fr. 75 c.

ROYAL

Sur une Traduction nouvelle de la Bible, par M. Cahen.

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M. S. Cahen, juif, directeur de l'école israélite de Paris, a publié le premier volume d'une traduction nouvelle de Bible, avec l'hébreu en regard; le texte est accompagné des points-voyelles et des accens toniques, avec des notes philolo giques, géographiques et littéraires, et les variantes de Sep tante, et du texte des Samaritains. Le premier volume ten tient la Genèse. Le Journal des Débats, du 13 juillet, a rendu un compte très-favorable du travail de M. Cahen; il loue la concision de la traduction, la suppression des conjonctions et des particules, le système d'ortographe des noms, et trouve même que, s'il y a un reproche à faire à M. Cahen, c'est de n'avoir pas été assez hardi. Enfin, comparant sa traduction avec les anciennes versions, et particulièrement avec la version protestante, il lui accorde l'avantage sur toutes, et dit que l'on ne sauroit donner trop d'encouragemens à son travail, et que nous aurons enfin, grâces à lui, une véritable Bible hébraïque, libre de tout alliage étranger au texte original. Ces éloges officieux partent sans doute d'une main bien amie. L'Avenir est moins enthousiaste; il combat la méthode rationaliste, il en montre les inconvéniens. M. Cahen, dit-il, ignore quelle arme terrible il veut mettre entre les mains des Jeunes disciples de la science sacrée ; il est vrai qu'il ne s'en sert pas au même degré que beaucoup d'autres rationalistes, et qu'il semble pénétré de respect pour ces livres, antique fondement de la religion de ses pères : mais cette qualité si précieuse est achetée au prix d'une inconséquence. L'Avenir félicite M. Caben des changemens qu'il a faits dans l'orthographe des noms; il loue sa concision et sa fidélité scrupuleuse, il dit que ses notes en général pourront être très-utiles. Il blâme cependant celle sur Elohim, mot où M. Cahen n'a garde de voir la Trinité, et qu'il explique par Dieu considéré comme la collection de toute la force. Il reproche aussi au traducteur de sembler révoquer en doute la longévité des premiers patriarches. Enfin, il conclut en disant que le travail de M: Cahen

Tone LXIX. L'Ami de la Religion.

F

peut servir à ranimer et à étendre l'étude de l'hébreu, et que tout le recommande aux jeunes hébraïsans.

Ce dernier jugement n'est-il pas encore beaucoup trop favorable? Nous croyons qu'on s'en convaincra aisément en examinant avec soin le volume de M. Cahen. On ne pourra se dissimuler quel esprit a présidé à son travail. Déjà, dans son Avant-propos, il range sous deux divisions générales les méthodes suivies jusqu'à ce jour pour l'explication de l'Ecriture sainte; ce sont la méthode dogmatique et la méthode critique ou rationnelle. Il partage la première en trois branches, la dogmatique religieuse proprement dite, la dogmatique philosophique et la dogmatique pratique. En traitant de celle-ci, l'auteur dit : « Il est naturel de prévoir qu'on a dû chercher à fonder le droit divin sur l'autorité divine; aussi des théologiens de toutes les communions chrétiennes, et principalement de la communion romaine, ont commenté la partie politique de la Bible dans l'intérêt du despotisme; les pays et les nations sont donnés de Dieu en patrimoine aux rois légitimes, et bien entendu que ces rois deviennent eux-mêmes, par l'onction du sacre, le patrimoine de l'Eglise. » C'est ainsi que l'auteur se moque des théologiens et des commentateurs catholiques, et par conséquent de Bossuet lui-même, qui, dans sa Politique sacrée, a suivi la méthode improuvée par M. Cahen. Pour lui, il se félicite d'avoir adopté la méthode rationnelle, qui consiste à étudier la Bible en elle-même et pour elle-même; cette méthode, dit-il, est suivie par les plus célèbres théologiens de l'érudite Allemagne, et elle seule, dans l'état actuel des esprits, peut faire servir les saintes Ecritures à la conservation du sentiment religieux. L'auteur tient fidèlement sa parole dans tout le premier volume; l'autorité de la tradition et du consentement unanime de l'antiquité l'embarrasse peu. S'il discutoit les passages où sa rationalité secoue le joug de l'autorité, il imiteroit du moins ses maitres naturalistes, qui appuient toujours leurs opinions de raisons quelconques. Aussi l'érudite Allemagne n'approuvera certainement pas son travail.

Le texte hébreu qu'offre son volume est assez inutile ; nous avons beaucoup de Bibles hébraïques, supérieures pour le texte à la sienne, dont l'exécution typographique a été si peu soignée que le texte en devient presque illisible. Les points-voyelles des lignes se confondent, et l'aspect seul fatigue la vue.

Le système de traduction, que d'autres trouvent admirable, présente bien des défauts dominans, des contresens, des phrases mal tournées et de mauvais goût, de l'obscurité produite par une traduction servile, de mauvaises locutions qui viennent du peu de soin qu'a eu le traducteur de déterminer les temps des verbes, assez souvent vagues en hébreu; des mots mal rendus. On peut citer des exemples de chacun de ces défauts.

:

Des contresens. Au chapitre xxII de la Genèse, verset 14, il se montrera sur la montagne de l'Eternel, au lieu de on y pourvoiera, il y sera pourvu sur la montagne de l'Eternel. - Chap. XXVI, v. 6: tu nous es devenu beaucoup trop puissant, au lieų de : tu es devenu beaucoup plus puissant que nous. Chap. XLIX, V. 4: alors tu as déshonoré celui qui montoit sur mon lit de repos, au lieu de tu as souillé ma couche, il est monté sur ma couche. On peut en effet, si on veut conserver le texte hébreu tel qu'il est, regarder ce dernier membre de phrase comme une répétition énergique produite par un vif sentiment d'indignation, ou bien faire un léger changement de ponctuation au verbe, et traduire : tu as souillé ma couche en y montant. Chap. XXVI, v. 13: cet homme devint grand, et alla toujours en augmentant jusqu'à ce qu'il devint très-grand; il s'agit ici des biens, des richesses et de la puissance d'Abraham.

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Il suffira de rapporter les phrases mal tournées et de mauvais goût, et on peut se dispenser d'y joindre le correctif. Chap. III, v. 2: de l'arbre dont je t'ai défendu de manger, as-lu mangé? - Chap. xxx1, v. 39: de déchirée, je ne l'en ai point rapporté. Rien n'est si commun dans la nouvelle traduction que ces inversions bizarres et ces tournures affectées.

Obscurités. Chap. 1, il fut soir, il fut matin, un jour; il fut soir, il fut matin, deuxième jour, Le Journal des Débats avoit trouvé cela très-beau; c'est, disoit-il, le refrein d'une grande ode. Mais, dans une ode même, on n'est pas dispensé d'être clair. - Chap. xi, v. 15: les grands de la

Par'au.

maison de Par'au la virent aussi, et la louèrent devant Par'au; la femme fut transportée dans la maison de Chap. xxx, v. 18: alors tu diras: C'est à ton serviteur Jacob, présent envoyé à mon maître Esave. Mauvaises locutions. Au chap. XIX, V. 2 : je vous maîtres, dirigez-vous vers la maison de votre serviteur,

prie,

mes

passez-y la nuit, lavez vos pieds, vous pouvez être matinals. Chap. xxxII, v. 17: quand mon frère Esave te rencontrera et qu'il te demande. - Chap. xxxiv, V. 19: lorsque son maître entendit les paroles de sa femme qui lui dit: Ainsi me fit ton esclave.

Mots mal rendus. Chap. 11, v. 18: il n'est pas bon à l'homme d'être seul, je lui ferai un aide à son encontre. Chap. XXII, v. 13: et mena avec lui deux garçons, au lieu de deux serviteurs. Chap. XXXI, V. 2 : il n'étoit plus avec lui comme hier et avant-hier, au lieu de comme auparavant. - Chap. XXII, v. 10 : je suis trop petit pour tes bienfaits, au lieu de je suis indigne, etc.

:

Les notes offrent peu de critique, et ne seront pas d'une grande utilité. M. Cahen garde un silence absolu sur les travaux immenses faits dans ces derniers temps par les naturalistes allemands, dont cependant il se vante de suivre les doctrines. Il ne reproduit sans cesse que les noms de quelques rabbins. Ainsi, il paroit étranger aux progrès récens de l'exégèse biblique. En outre, ses notes n'éclaircissent point les endroits obscurs et difficiles. Quant aux opinions énoncées dans ces notes, ou aux doctrines qui y sont insinuées, on en jugera par la note du premier verset du chapitre III, où l'auteur Traite d'apologue l'histoire de la tentation de nos premiers pères par le serpent. Dans les notes supplémentaires, page 184, il traite de mythe le récit de la tour de Babel. En parlant du changement de la femme de Loth, chap. xIx, v. 26, sa note est ainsi conçue: Une pétrification saline peut avoir donné lieu à cette tradition; comme si le texte n'étoit pas assez formel, et qu'on eût besoin d'une tradition à ce sujet. Enfin, il anéantit la célèbre prophétie de Jacob, Genèse, chap. XLIX, V. 10, touchant le Messie, prophétie reconnue par Önkélos lui-même et par les talmudistes, comme l'avoue M. Cahen. C'est encore là un des changemens qui avoit excité l'admiration du Journal des Débats; il ne faut rien négliger, et c'est un précieux avantage que d'ôter à la religion une de ses plus belles propheties et une de ses preuves.

Que dirons-nous de l'orthographe bizarre adoptée par M. Cahen? Il défigure tous les noms, et l'on ne reconnoit plus personne dans cette Bible. Plus d'Adam, d'Esau, de Noë, d'Isaac, etc.; non, ce sont Adame, Esave, Noah, liscs'hac. Ismaël devient lichmaël, Loth est appelé Lote, Juda prend

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