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graphies; ce ne sont que de simples esquisses, mais combien vivantes quand les auteurs s'appellent Fernand Laudet ou Lanzac de Laborie! Le premier nous montre Augustin Cochin dans sa vie politique et sociale; il nous donne comme la clé de ces Espérances chrétiennes restées inachevées et qui méritent d'être mieux connues. C'est encore au directeur de la Revue hebdomadaire que l'on a demandé de parler de Mme Swetchine, qui, tout en sachant s'effacer, a exercé sur toute une élite intellectuelle une influence si considérable. M. Laudet s'est acquitté de cette tâche avec autant de charme que de justesse 1.

L'un des hommes qui ont dû le plus à l'influence bienfaisante de Mme Swetchine est le comte de Falloux, qui a été aussi l'ami d'Augustin Cochin, l'un de ses compagnons d'armes au Correspondant. Dans des pages courtes mais pleines, M. de Lanzac de Laborie précise la physionomie et le rôle du grand homme d'État à qui l'on doit la loi de 1850 sur la liberté de l'enseignement. Quelques lettres inédites donnent un attrait de plus à cette esquisse biographique 2.

Dans la Hollande sociale (Paris, Bloud, 1912. In-16, 62 p. Science et religion, no 651), M. Henri Joly nous fournit les résultats d'une enquête qu'il a faite sur ce pays. La criminalité, la vie familiale, les mœurs, la religion, la liberté de l'enseignement et celle de la charité, le socialisme, sont étudiés tour à tour; puis vient une étude analytique des différentes populations et des différentes provinces. Livre instructif, plein de renseignements et d'enseignements.

S. Ém. le cardinal Alfonso Capecelatro, qui est mort en novembre, dans sa quatre-vingt-neuvième année, était un des membres les plus distingués du Sacré Collège par ses travaux et ses connaissances historiques. Né à Marseille, en 1824, entré dans l'Oratoire, appelé à l'archevêché de Capoue en 1880, au cardinalat en 1885, nommé en 1893 bibliothécaire de la sainte Église romaine, il ne cessa de faire preuve d'une activité littéraire assez considérable. Sur plus de vingt volumes qui sont dus à sa plume, les moins importants ne sont pas ceux qu'il a consacrés à des biographies de saints. La vie de sainte Catherine de Sienne, parue d'abord en 1856, a eu de nombreuses éditions. Il est naturel que les personnages illustres de la congrégation à laquelle il s'était attaché l'aient attiré particulièrement; c'est ainsi qu'il

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1 Augustin Cochin, 1912. In-16, 63 p., portrait. Mme Swetchine, 1912. In-16, 64 p., portrait. Fautes d'impression à corriger dans une prochaine édition p. 23, l'abbé Beautain, pour Bautain; don Guéranger, pour dom; Sherer, pour Scherer. - Falloux, 1811-1886. Paris, Bloud, 1912. In-16, 63 p.

a étudié tour à tour les grandes figures du cardinal Newman (1859) et de saint Philippe Neri (1879). Rappelons encore ses livres sur saint Pierre Damien (1862) et sur saint Alphonse de Liguori (1893). Une réfutation de Renan (Errori di Renan, 1864) le conduisit à nous donner, en 1868, une vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

M. James Gairdner, qui est mort à Londres, le 4 novembre, était un des meilleurs érudits anglais. Né à Édimbourg, en 1828, il fit sa carrière dans le Record office, dont il devint conservateur adjoint en 1859. C'est surtout sur le xve et sur le xvIe siècle qu'ont porté ses recherches. La plupart de ses publications sont des recueils de documents empruntés surtout au grand dépôt dont il avait la charge. Nous rappellerons ici les suivants : Memorials of Henry VII (1858); Letters and Papers illustrative of the reigns of Richard III and Henry VII (1861-1863, 3 vol.); The Paston letters (1872-1875, 3 vol.; réimprimés en 4 vol. en 1901); The Houses of Lancaster and York with the conquest and loss of France (1874); The historical collections of a citizen of London in the fifteenth century (1878); Three fifteenth century chronicles (1880). Il continua les Calendars of letters and papers of the reign of Henry VIII, commencés par son maître Brewer, et en donna les tomes V-XII (1880-1890). Comme ouvrages d'exposition, il faut noter Early chroniclers of Europe: England (1879), Studies in English history, avec James Spedding (1881), History of the life and reign of Richard III (1878), Henry VII (1889); The English church in the XVIth century (1902) et ses articles du Dictionary of national biography.

Avec M. le comte Desbassayns de Richemont, mort le 11 novembre dernier, disparaît un des plus anciens collaborateurs de cette revue. C'est dans ce recueil, en effet, que parurent d'abord les articles qui ont formé son excellent livre sur les catacombes (Les nouvelles études sur les catacombes romaines, 1870), pour lesquelles il s'était passionné à la suite de son illustre ami, M. de Rossi.

E.-G. LEDOS.

Sous le titre Une famille pendant la guerre et la Commune 1, M. André Delaroche-Vernet publie des extraits de la correspondance échangée par ses grands-parents Delaroche-Vernet et Talbot, du 25 juillet 1870 au 6 juin 1871 ; ce sont ceux où il est question de la guerre et de la Commune. Les auteurs de ces lettres

1 Paris. Plon-Nourrit, 1 vol. in-16, iv-292 p. 1912.

étaient placés dans des conditions particulières qui leur permettaient de bien suivre les événements dont ils s'entretenaient, et ils en parlaient avec l'anxiété de bons Français ; ils reflétaient, avec leur opinion, celle de la haute bourgeoisie parisienne et du monde universitaire auquel ils se rattachaient. A ces deux titres, cette publication se lit avec intérêt.

Dans sa Chronique de nos jours 1, M. Ernest Daudet a réuni un certain nombre d'articles parus dans les journaux et les périodiques de 1895 à 1911; ce sont les événements et les personnages défilant au jour le jour sous nos yeux. Au passage, nous remarquons Casimir Périer donnant sa démission de président de la République; le comte de Paris mariant sa fille et partant pour l'exil, victime d'une loi inique; la reine de Portugal, sa fille, faisant admirer dans sa patrie d'adoption les qualités de distinction, de grâce et de bonté de sa patrie d'origine et de sa maison; l'impératrice d'Autriche allant chercher sur les plages normandes un remède à sa santé et à son ennui; l'impératrice Frédéric luttant avec son brutal adversaire Bismarck. M. Daudet dessine avec sympathie les silhouettes pittoresques et sympathiques d'Ismaïl Pacha, du duc de Broglie, du duc d'AudiffretPasquier, du cardinal Perraud, de Me Dosne, et, à propos de ces articles, il nous ouvre le trésor assez riche de ses souvenirs personnels. Cette « chronique » rétrospective des années qui viennent à peine de s'écouler ne saurait être de l'histoire; elle n'y prétend pas; mais elle fournira plus d'un trait intéressant ou curieux aux historiens de demain.

L'Impératrice douloureuse 2, de M. C. de Tchudi, est le récit de la vie si brillante d'abord, si attristée ensuite, tranchée en fin par le couteau d'un régicide, de l'impératrice d'Autriche Élisabeth. L'auteur parle d'elle avec une admiration débordante qui manque parfois de sens critique, avec une note légèrement irréligieuse et un style déclamatoire et pompeux. Son livre ne nous apporte rien de bien nouveau.

Dom Berlière, ancien directeur de l'Institut historique belge de Rome, a publié, sur l'ordre monastique des origines au XIIe siècle 3, une série de conférences données, en 1911-1912, à l'Extension universitaire pour dames de Bruxelles. Il y étudie tour à tour les origines monastiques, depuis les solitaires d'Égypte, les missions monastiques de l'époque mérovingienne, l'œuvre

1 Paris, Plon-Nourrit, 1 vol. in-16, 310 p. 1912.

2 Trad. H. Heinecke. Pa

ris, édition du Temps présent, 76, rue de Rennes, in-16, 194 p. 1912. baye de Mared sous, 1911, in-12, 275 p.

3 Ab

civilisatrice des moines au triple point de vue matériel, intellectuel et social, la réforme de Cluny et l'influence qu'elle eut, au XIe siècle, sur la réforme de l'Église, enfin l'ordre de Citeaux. L'énumération des sous-titres suffit à marquer l'intérêt de ce livre et le nom de l'auteur nous est un garant que ces questions ont été traitées de main de maître; dom Berlière est, en effet, un maître dans l'histoire bénédictine. Les notes et les renseignements qui suivent chacune de ces conférences précisent le caractère nettement scientifique de cette œuvre de haute vulgarisation.

Pour faire revivre la figure de Henri IV, M. Nouaillac 1 a choisi deux cent trente-six lettres ou billets écrits par ce roi à toutes les époques de sa vie, de 1566 à 1610, à ses amis, à ses lieutenants, à ses compagnons d'armes, à Catherine de Médicis, à Henri III, à sa femme, à ses maîtresses, la comtesse de Gramont, « la belle Corisandre, » Gabrielle d'Estrées, la marquise de Verneuil. L'éditeur, qui connaît tout particulièrement cette époque, a fait précéder ces lettres d'une étude où il a essayé de faire revivre la physionomie de Henri IV et de son style. Il l'a fait avec bonheur, quelques réserves que l'on puisse faire sur quelques-unes de ses appréciations trop indulgentes, et on lira avec le même intérêt les lettres et la préface qui nous les présente.

M. Charles Lemenestrel s'est demandé si l'instruction en France date de la Révolution 2, et son étude l'amène à conclure, à l'encontre des manuels condamnés par l'épiscopat, que l'instruction était déjà fort développée avant 1789, et que c'est dénigrer notre passé que le nier. Pour le prouver, il retrace sommairement l'histoire de l'enseignement en France, depuis les druides jusqu'à Napoléon. Son livre, fait de seconde main, gagnerait à plus de précision et d'exactitude; on le trouvera aussi inégal, tantôt sommaire, tantôt plus détaillé. Un pareil sujet et des conclusions si justes méritaient une étude plus approfondie, avec des références plus nombreuses.

On lira avec intérêt Le voyage en Dalmatie, Bosnie-Herzégovine et Monténégro 3, par M. Pierre Marge, surtout en ces jours où l'attention de la France et du monde entier est attirée d'une manière si angoissante sur ces régions et leurs populations. M. Marge les a étudiées sur place; s'écartant des sentiers battus, il a pénétré dans l'intérieur des pays, examinant d'un œil avisé leurs mœurs, leur caractère, leur degré de civilisation, les transforma

Henri IV raconté par lui-même. Paris, Picard, 1913. In-12, 391 p. · 2 L'instruction en France date-t-elle de la Révolution? Paris, Champion, 1912. In-12, 304 p. 3 Paris, Plon-Nourrit, 1912. In-12, ш-373 p.

tions qui s'y produisent; d'abondantes bibliographies enrichissent ses chapitres pleins d'idées et de faits, et écrits avec vivacité et couleur.

On souhaiterait les mêmes qualités aux Visions du Brésil 1 de M. Gaffre. Non que ce livre ne se lise avec profit et intérêt ; l'auteur a visité le Brésil à un moment critique de son histoire, et il en rapporte des traits fort curieux sur sa vie religieuse, politique et économique; mais trop souvent ils sont noyés dans des considérations générales d'un écrivain qui est plus orateur qu'historien, et dont la personnalité déborde trop au milieu des faits qu'il nous décrit.

La maison Letouzey (76 bis, rue des Saints-Pères, Paris) vient de faire paraître le huitième fascicule du Dictionnaire d'histoire et de géographie ecclésiastiques que dirigent Mgr Baudrillart et MM. Vogt et Rouzies. Il va du mot Alidosi au mot Alphonse. C'est dire que ce fascicule est aussi complet que les précédents. Il donne les notices de 48 personnages ayant porté le nom d'Alphonse, de 22 ayant porté celui d'Almeida. L'article le plus important de tout le fascicule est l'article Allemagne : il ne remplit pas moins de 97 colonnes. M. Richard parle en 37 colonnes de l'Église germanique, depuis les origines jusqu'au milieu du xve siècle, et il fait encore son histoire au XVIIIe siècle; M. Paquier l'étudie de 1417 à 1648; enfin le nom de M. Goyau s'imposait pour l'histoire religieuse de l'Allemagne au XIXe et au XXe siècle, et nous félicitons les directeurs du Dictionnaire d'avoir obtenu son précieux concours. Les collaborateurs de ce fascicule ont été aussi bien choisis que ceux des précédents; les articles sont faits, en général, par des spécialistes ayant travaillé d'après les textes et même d'après les documents inédits. M. l'abbé Mollat était désigné, par exemple, pour les notices des personnages ecclésiastiques de ces xive et xve siècles, qui lui sont si familiers ; on lira avec intérêt sa notice de Jean Allarmet, cardinal de Brogny, qui joua un rôle si important au concile de Constance. M. Brehier fait autorité dans les études byzantines; ce fascicule lui doit un excellent article sur Allatius. M. l'abbé Constant approfondit depuis des années l'histoire du protestantisme au xvIe siècle et du concile de Trente; il a donné, sur ce sujet, plusieurs articles originaux, en particulier une notice sur le cardinal Allen.

Cette spécialisation des collaborateurs nous explique pourquoi ces notices, non contentes d'être exactes et de se terminer par de sérieuses bibliographies, s'appuient parfois sur des docu

1 Paris, librairie Aillaud, 1912. In-12, 400 p.

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