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ou d'un marchand vendant des choses pareilles, le propriétaire originaire ne peut se la faire rendre qu'en remboursant aux possesseurs le prix qu'elle lui a coûté.

L'art. 11, tit. 2, L. du 22 septembre-6 octobre 1791, consacre le même principe pour les bestiaux.

ACQUITTÉ;-est l'individu déclaré non coupable par arrêt ou jugement. Antérieurement à la loi organique des conseils de révision, tout accusé ou prévenu acquitté par le conseil de guerre, était, d'après l'article 31, L. 13 brumaire an v, mis de suite en liberté. Ce principe se trouvait confirmé par l'art. 358, C. I. C.

Sous l'empire de la loi du 13 brumaire an v, la juridiction militaire était omnipotente et absolue, les jugements étant inattaquables étaient exécutés sans appel et sans pourvoi. Mais on comprit bien vite les conséquences funestes qui découlaient d'une législation aussi promptement exécutoire, et aussi s'empressa-t-on d'y remédier par la loi du 18 vendémiaire an vi, qui constitua un deuxième degré de juridiction, en créant un tribunal supérieur au conseil de guerre. — Art. 12: « En cas qu'il n'existe pas de pourvoi de la part des parties, le commissaire du pouvoir exécutif (commissaire du roi pourra se pourvoir; cependant, en cas d'acquittement des prévenus, il n'aura que 24 heures de délai pour notifier son pourvoi au greffe du conseil de guerre. »-Cette disposition de l'art. 12 est conforme en matière correctionnelle aux art. 203 et 206, C. 1. C.

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Quand il y a pourvoi du ministère public en cas d'acquittement, il y a par ce fait abrogation implicite de l'art. 31, L. 13 brumaire an v. Ainsi, d'après le principe admis par l'art. 373, C. I. C., le pourvoi étant essentiellement suspensif de l'exécution du jugement, l'acquitté par un conseil de guerre reste en prison pour attendre la décision du conseil de révision. Si, au contraire, il n'y a pas pourvoi de la part du commissaire du roi du conseil, vingt-quatre heures après la lecture du jugement par le rapporteur, cet officier est tenu de faire mettre l'acquitté en liberté.

Si, conformément à l'art. 441, C. I. C., le ministre de la justice juge convenable de porter le jugement d'acquittement rendu par le conseil de guerre à la Cour de cassation, et que ce même jugement soit cassé, c'est uniquement dans l'intérêt de la loi, et l'accusé, mis en liberté, ne peut être atteint par l'arrêt de cassation.

On avait prétendu que, depuis la promulgation du Code d'instruction criminelle, l'art. 409 de ce Code était applicable en justice militaire; c'était une erreur; la Cour de cassation l'a décidé ainsi par son arrêt inséré au Bulletin le 3 août 1833.

La faculté de pourvoi du commissaire du roi deviendrait illusoire si l'acquitté était mis en liberté immédiatement après la sentence rendue; en agir autrement en faveur d'un acquitté, c'est violer, c'est détruire ce principe imprescriptible de l'égalité devant la loi.

Une fois mis en liberté, l'acquitté ne peut plus être repris ni poursuivi pour le même fait. Art. 360, C. I. C.

ACQUITTEMENT. Jugement qui acquitte un accusé ou prévenu du crime ou délit qui lui était imputé. Le jugement d'acquittement, dont il n'y a pas pourvoi, est irrévocablement acquis à l'acquitté vingt-quatre heures après qu'il lui en a été donné lecture par le rapporteur. Maintenir plus longtemps l'acquitté en prison serait un excès de pouvoir du rapporteur, prévu et puni par l'art. 127, C. P.—V. la formule.

ACTION publique et civile. L'action publique est exercée par un

magistrat, et, dans l'armée, par le général commandant pour le maintien de la discipline de l'armée et de l'ordre public. L'action civile est celle qui a pour objet l'intérêt privé du citoyen qui l'exerce. Toute infraction contient deux éléments distincts; sous le rapport moral, elle sape les bases de la société dont elle rompt l'équilibre, et donne lieu ainsi à l'application d'une peine; sous le rapport matériel, elle cause un dommage, elle nuit et donne lieu à une réparation civile (1). Ainsi, action publique, moralité, action civile, matérialité, tels sont les deux éléments qui correspondent à chacune de ces deux actions (2).

C. I. C, art. 1er: « L'action, pour l'application des peine, n'appartient qu'aux fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi.-L'action en réparation des dommages causés par un crime, par un délit, ou par une contravention, peut être exercée par tous ceux qui ont souffert de ces dommages.

Art. 2: « L'action publique, pour l'application de la peine, s'éteint par la mort du prévenu. L'action civile, pour la réparation du dommage, peut être exercée contre le prévenu et contre ses représentants. L'une et l'autre action s'éteignent par la prescription, ainsi qu'il est réglé au liv. 2, tit. 7, chap. 5, de la Prescription.

Art. 3: « L'action civile peut être poursuivie en même temps, et devant les mêmes juges que l'action publique. Elle peut aussi l'être séparément; dans ce cas, l'exercice en est suspendu, tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique, intentée avant ou pendant la poursuite de l'action civile.

Art. 4: «La renonciation à l'action civile ne peut arrêter ni suspendre l'exercice de l'action publique. »

L'action civile peut-elle être exercée en justice militaire ? La partie plaignante (3) peut-elle se constituer partie civile pour demander des dommages-intérêts au conseil de guerre? Telle est l'importante question à résoudre, question qui se présente souvent en justice militaire.

L'art. 28 de la loi du 13 brumaire an v, unique loi militaire dans l'espèce, est ainsi conçu : « Si la partie plaignante se présente au conseil, elle y sera admise et entendue, elle pourra faire ses observations, auxquelles l'accusé répondra, ou son défenseur pour lui; après quoi, le président demandera à l'accusé et à son défenseur, s'ils n'ont rien à ajouter pour leur défense; sur leur réponse négative, il leur ordonnera de se retirer; l'accusé sera reconduit à la prison par son escorte.

Ce texte formel: elle pourra faire des observations, ne précise point que la partie plaignante puisse exercer l'action civile devant les tribunaux militaires.-L'art. 3, C. I. C., dit que l'action civile peut être poursuivie en même temps et devant les mêmes juges que l'action publique. -Elle peut aussi l'être séparément. Cet article indique positivement la possibilité de suivre l'action civile, ou devant le tribunal qui juge l'action publique, ou devant une autre juridiction; il est constant qu'elle peut être exercée séparément.

De la combinaison des deux lois résulte le droit du plaignant de suivre l'action civile devant l'une ou l'autre juridiction. En France, le plaignant

(4) Certains délits spéciaux militaires, comme acte d'indiscipline, ou refus d'obéis sance, sont des exceptions aux maximes de droit des jurisconsultes.

(2) V. aussi Délits et quasi-délits.

(3) Le plaignant, en demandant des dominages-intérêts, fait un acte qui le constitue partie civile, il exerce donc par cela même l'action civile,

doit exercer son action civile après le jugement du conseil de guerre, qui lui donne acte de ses conclusions et réserves aux fins civiles. Le jugement porterait dans son libellé, après sa condamnation, ou même l'acquittement, le dispositif suivant: En ce qui concerne les dommages-intérêts réclamés par le sieur légalement constitué partie civile, par sa demande et conclusions, le conseil de guerre, sans rien statuer à cet égard, renvoie le demandeur à se pourvoir devant qui de droit, conformément à l'art. 3 du Code d'instruction criminelle.

D'accord avec le célèbre Merlin, Chénier, dans une remarquable dissertation, démontre l'impossibilité de suivre l'action civile devant les conseils de guerre en France. Son argumentation péremptoire est basée sur les lois qui régissent le timbre et l'enregistrement; l'expédition du jugement portant dommages-intérêts, ne pourrait être mise à exécution sans être préalablement timbrée et enregistrée.

La loi du 19 décembre 1790 sur l'enregistrement; celles des 18 février et 17 juin 1791 sur le timbre; la loi du 19 vendémiaire an vi, relative aux fonds nécessaires pour toutes les dépenses de l'an vi, et portant des dispositions sur le timbre et l'enregistrement; la loi du 22 frimaire an VII sur l'enregistrement, contiennent des dispositions qui ne concernent point les tribunaux militaires, et dont il est impossible d'exiger l'exécution de la part des greffiers, mais sans lesquelles formalités, comme il a déjà été dit, la sentence adjugeant des dommages-intérêts ne pourrait produire aucun effet.

L'art. 16 du titre 3 de la loi du 13 brumaire an vII, consacre l'exception du timbre, pour les engagements, cnrôlements, congés, certificats, cartouches, passeports, quittances pour prêts et fournitures, billets d'étape, de subsistance et de logement, et autres pièces ou écritures concernant les gens de guerre, tant pour le service de terre que pour le service de mer. L'article 77 de la loi sur les finances du 28 avril 1816 maintient encore le droit mentionné dans toutes les lois énumérées cidessus.

En résumé, il résulte de toutes les lois qui régissent le timbre et l'enregistrement, que les jugements adjugeant des dommages-intérêts, doivent être indispensablement enregistrés pour produire leur effet. Comme l'accomplissement de ces formalités devient impossible avec la législation spéciale qui régit l'armée, il en découle la conséquence inévitable, que les conseils de guerre, dans leur état actuel, ne peuvent adjuger de dommages-intérêts à la partie civile; quand il existe des tribunaux ordinaires, c'est à ces derniers seuls qu'il appartient de statuer pour arriver à l'entière exécution du jugement.

Mais en ouvrant nos annales militaires, on remarque que, depuis Philippe Auguste, l'armée française a arboré son étendard dans tous les pays du monde. De nos jours, l'armée a promené en triomphe le drapeau tricolore, non-seulement dans tous les pays de l'Europe, mais encore sur les côtes d'Asie et d'Afrique; il y a peu de temps que des corps français occupaient aussi l'Espagne, la Grèce et Ancône; à ces armées et dans ces pays étrangers, il n'existait d'autres tribunaux français que les conseils de guerre. Lors du débarquement de l'armée expéditionnaire de Morée, il n'y avait alors aucune espèce de tribunal dans le pays. Dans une semblable situation, les conseils de guerre étaient nécessairement compétents pour connaître, pour statuer et accorder des dommages-intérêts réclamés, soit par des militaires, soit par des habitants du pays auxquels l'armée né pourrait refuser justice.

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L'obstacle créé en France par les lois d'enregistrement et de timbre,

disparaît complétement en pays étranger, où les jugements sont exécutoires sans cette formalité. Ainsi, dans ces cas exceptionnels, les conseils de guerre doivent connaître et statuer sur les demandes de dommagesintérêts.

Formalités. Les plaignants ne seront réputés parties civiles s'ils ne le déclarent formellement, soit par la plainte, soit par acte subséquent, ou s'ils ne prennent par l'un ou par l'autre des conclusions en dommages-intérêts. Art. 66, C. I. C.

La partie civile a vingt-quatre heures pour signifier son désistement. Ibid.

Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou par un délit, peut en rendre plainte et se constituer partie civile. Art. 63, id.

Les plaignants peuvent se porter parties civiles jusqu'à la clôture du débat. Art. 67, id.

Toute partie civile qui ne demeure pas dans l'arrondissement où se fait l'instruction de la procédure, sera tenue d'y élire domicile par acte passé au greffe du tribunal. Art. 68, id.

Avant l'audience, on pourra faire estimer les dommages-intérêts. Art. 148, id.

Le ministère public et la partie civile poursuivront l'exécution du jugement chacun en ce qui le concerne. Art. 165, id.

La partie civile peut faire entendre ses témoins. Art. 315, id.
La partie civile peut faire plaider sa cause. Art. 335, id.

La partie civile est tenue de former sa demande en dommages-intérêts avant le jugement; plus tard elle ne serait plus recevable. Art. 359, id. La partie civile a le droit de se pourvoir en cassation dans le délai de trois jours; mais elle ne pourra se pourvoir que quant aux dispositions relatives à ses intérêts civils. Art. 373, id.

Dans le libellé du jugement, à la suite de la condamnation, on formulerait le dispositif en dommages-intérêts comme il suit: Vu les conclusions du sieur légalement constitué partie civile, après avoir entendu les observations de l'accusé et son défenseur, le conseil de guerre, slaluant sur lesdites conclusions, condamne (noms, prénoms, grade et profession) à la somme de mages-intérêts envers ledit sieur

domdu dommage à lui causé (faire connaître la valeur du dommage), le pour réparation 184, conformément à l'art. 3 du Code d'instruction

criminelle.

Si au contraire le conseil refusait d'accorder à la partie civile les dommages-intérêts réclamés par les conclusions, le conseil de guerre débouterait purement et simplement de sa demande la partie civile, qui pardevant un conseil de guerre ne serait pas condamnée aux frais; attendu que l'action judiciaire est toujours intentée directement par le pouvoir supérieur militaire.

Jurisprudence.- Le conseil ne peut statuer sur les conclusions à fins de dommages-intérêts qui seraient prises devant lui; il doit seulement, quant à ce, renvoyer la partie demanderesse à se pourvoir devant le tribunal civil (quand il en existe). A. 6 fructidor an vi, B. 541 et 23 oc

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La partie civile ne peut déposer qu'à titre de simples renseignements. A. 29 messidor au VIII, B. 259; 6 novembre 1834 (Dalloz, Recueil, t. 35, p. 34); et 10 février 1835 (Sirey, t. 35, p. 301).

On peut entendre la partie lésée plaignante comme témoin sous la foi du serment, quand elle ne s'est pas portée partie civile. A. 15 avril 1825

(Dalloz, Recueil, t. 25, p. 177); 15 novembre 1833, B. 571, et 27 novembre 1840, B. 484.

Les tribunaux ne peuvent accorder de dommages-intérêts à une personne, qu'autant qu'elle les demande formellement et qu'elle est partie dans l'instance. A. 26 janvier 1808, B. 15.

En Cour d'assises, on peut conclure à des dommages-intérêts sans avoir besoin du ministère d'un avoué (1). A. 25 novembre 1831 (Dalloz, Recueil, t. 32, p. 57).

Le plaignant peut valablement intervenir à l'audience, et y prendre des conclusions de dommages-intérêts, sans qu'il y ait eu, de sa part, ni plainte, ni déclaration préalable, ni aucun acte d'intervention. A. 6 novembre 1812 (Sirey, t. 17, p. 64).

Le jugement d'incompétence (qui renvoie les parties à se pourvoir par la voie de droit) laisse intacts les droits de la partie civile quant aux dommages-intérêts. A 21 novembre 1825 (Sirey, t. 26, p. 85).

ADHÉSION à une autre forme de gouvernement. L. 9 septembre 1835, art. 7: « Seront punis des peines prévues par l'article précédent, ceux qui auront fait publiquement acte d'adhésion à toute autre forme dé gouvernement, soit en attribuant des droits au trône de France, aux personnes bannies à perpétuité par la loi du 10 avril 1832, ou à tout autre que Louis-Philippe et sa descendance;-soit en prenant la qualification de républicain où toute autre incompatible avec la Charte de 1830; - soit en exprimant le vœu, l'espoir ou la menace de la destruction de l'ordre monarchique constitutionnel, ou de la restauration de la dynastie déchue.

Art. 6« Toute attaque prévue par la loi du 29 novembre 1830 continuera d'être punie conformément aux dispositions de cette loi. »

L. 29 novembre 1830, art. 1er: « Toute attaque, par l'un des moyens énoncés en l'art. 1er de la loi du 17 mai 1819, contre la dignité royale, l'ordre de successibilité au trône, les droits que le roi tient du vœu de la nation française, exprimée dans la déclaration du 7 août 1830, et de la Charte constitutionnelle par lui jurée et acceptée dans la séance du 9 août de la même année, son autorité constitutionnelle, l'inviolabilité de sa personne, les droits et l'autorité des chambres, sera punie d'un emprisonnement de trois mois à cinq ans et d'une amende de 300 à 6,000 fr. »

Jurisprudence. La proposition non agréée de former un complot dont le but aurait été, soit de changer le gouvernement ou l'ordre de successibilité au trône, soit d'exciter les citoyens à s'armer contre l'autorité royale, constitue un délit politique de la compétence des Cours d'assises (2). A. 28 septembre 1832, B. 526, et 3 novembre 1832, B. 610.

On ne peut considérer comme délit politique le fait d'avoir illégalement pris le grade de capitaine, et d'avoir porté illégalement la décoration de la Légion d'honneur. A. 6 janvier 1831, B. 5.

La provocation par des cris proférés dans un lieu public, au renversement d'une administration publique, constitue un délit politique. A. 7 août 1831, B. 147.

L'attaque contre les droits que le roi tient du vœu de la nation française, ne constitue un délit qu'autant que les discours ont été proférés

(4) Cet arrêt est essentiellement applicable aux tribunaux militaires, jugeant au criminel comme les Cours d'assises.

(2) Les militaires ou individus attachés à l'armée, sont toujours justiciables des corseils de guerre.

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