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Foulon le fit assigner au tribunal civil de Paris, pour voir déclarer l'instance périmée. Les deux parties constituèrent ayoué et en demeurèrent encore là, Après trois ans de silence absolu, le sieur de la Maillardière fit citer le sieur Foulon au bureau de paix, pour se concilier, si faire se pouvait, sur la demande qu'il annonça être dans l'intention de former contre lui, afin de faire déclarer périmée sa demande en péremption.

En cet état, l'avoué du sieur Foulon a sommé celui du sieur de la Maillardière de fournir dans le jour des défenses à la demande en péremption.

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Le lendemain, la comparution au bureau de paix eut lieu, et l'on pense bien qu'il n'y eut point de conciliation. En conséquence le sieur de la Maillardière fit assigner; mais on lui répondit que la péremption était interrompue par la sommation de fournir des défenses. Il répliqua qu'on n'avait pas pu l'interrompre au préjudice de sa citation, parce que la péremption est acquise par la demande.

Le 11 août 1810, jugement du tribunal de première instance qui, attendu que la demande en péremption peut être formée en toute espèce d'instance, que le sieur Foulon n'a donné aucune suite à la demande en péremption par lui introduite, et qu'elle n'avait été interrompue par aucun acte de procédure avant la demande du sieur de la Maillardière, déclare la péremption d'instance acquise au profit de ce dernier ; en conséquence, sans s'arrêter à celle demandée par le sieur Foulon, ordonne qu'il défendra sur la demande en rescision.

Appel de la part du sieur Foulon, qui insiste fortement sur ce que la citation en conciliation n'est point une demande judiciaire, et soutient en conséquence qu'il a valablement interrompu la péremption par sa sommation de défendre.

Le sieur Lefebvre de la Maillardière a reproduit le système qu'il avait déjà présenté au premier tribunal; mais il n'a pas eu le même succès.

Du 11 février 1811, ARRÊT de la Cour d'appel de Paris, deuxième chambre, M. Pantin avocat, par lequel:

• LA COUR, —Attendu que, Foulon et sa femme ayant avoué en cause, la demande en péremption d'instance devait être formée contre eux par requête d'avoué à avoué; que la citation en conciliation n'était pas nécessaire, et conséquemment n'a pu empêcher Foulon et sa femme d'interrompre, comme ils l'ont fait, par acte de procédure, le cours de la péremption; - Faisant droit sur l'appel du jugement rendu au tribunal civil de Paris, le 20 août 1810, MET l'appellation et ce dont est appel au néant; émendant, décharge Foulon et sa femme des condamnations contre eux prononcées; au principal, déboute Lefebvre de la Maillardière de sa demande en péremption, etc. >>

Nota. M. Carré enseigne la même doctrine, et ajoute que la demande en péremption ne peut être valablement formée que par requête d'avoué à avoué. Il se fonde principalement sur ce que l'avoué, qui est le maître du procès, n'ayant pas connaissance de cette demande, si elle est signifiée à la partie et non à lui-même, couvre nécessairement la péremption en faisant un acte de son ministère. Voyez les Lois de la procédure civile, tom. 2, pag. 28, no 1446.

COUR D'APPEL DE TURIN.

La délégation n'opère-t-elle novation qu'autant que le délégataire a expressément libéré le déléguant, son débiteur? Rés. aff.) Cod. civ., art. 1275.

Lorsqu'il n'y a pas novation, le débiteur délégué peut-il opposer au délégataire les exceptions qu'il a contre le déléquant, quoiqu'il se soit engagé, méme hypothécairement, à payer le délégataire ? (Rés. aff.)

PIGINO, C. Vitta.

Le 21 janvier 1810, Caius Pigino s'est rendu acquéreur d'un immeuble appartenant aux frères Rinaldi. Le prix de la vente, fixé à la somme de 5,850 fr., devait être acquitté en trois paiemens; mais il fut convenu d'une manière expresse

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qu'à défaut d'effectuer le premier paiement à l'époque indiquée, l'acquéreur serait déchu, quant aux deux autres, du bénéfice du terme.

Le sieur Emile Vitta, créancier des vendeurs, est intervenu dans le contrat, et ceux-ci lui ont délégué le prix de l'immeuble vendu, jusqu'à concurrence de l'obligation par eux consentie en sa faveur, le 10 mars 1809. Vitta ayant accepté la délégation, Pigino lui a donné hypothèque tant sur l'immeuble qui-faisait l'objet du contrat que sur ses biens personnels.

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Enfin, les vendeurs se sont rendus garans, envers l'acquéreur, de toute espèce de trouble ou d'éviction.

Cependant, le délai accordé pour le premier paiement expire sans que Pigino l'ait effectué. En conséquence, après un commandement d'acquitter le prix total de la vente, Vitta fait procéder, le 5 octobre 1810, à la saisie de ses effets mobiliers

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Le 20 du même mois, le saisi obtient une ordonnance de référé, qui surseoit à la vente de ses meubles, et renvoie les parties devant le tribunal.

Alors Pigino fait remarquer que l'immeuble vendu est grevé de 400,000 fr. d'hypothèques; qu'en payant au délégataire, il s'exposerait, par conséquent, à payer une seconde fois aux créanciers. Il déclare, au surplus, que les hypothèques seront incessamment purgées, et qu'après l'homologation de l'ordre, Vitta recevra la somme dont il réclame le paiement, s'il est colloqué en rang utile.

Vitta répond que, par l'effet de la délégation, Pigino est devenu son débiteur direct. « Il ne peut donc, ajoute-t-il, m'opposer aucune exception du chef des vendeurs. S'il s'est contraint de payer une sconde fois ou de délaisser, il exercera contre eux son action en garantie. Mais, à mon égard, il s'est personnellement engagé pour le prix de la vente, il a même affecté ses biens d'une manière spéciale, et rien ne saurait le soustraire à l'accomplissement de son obligation. »>

Le 17 novembre 1810, jugement du tribunal civil de Verceil, qui, sans s'arrêter aux exceptions de l'acquéreur

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torise le délégataire à passer outre à la vente des meubles saisis. Appel de la part de Pigino.

Le débiteur délégué, a-t-il dit, peut opposer au délégataire toutes les exceptions qu'il aurait le droit d'opposer au créancier déléguant lui-même, à moins que la novation ne se soit complétement opérée. Mais, dans l'espèce, il n'y a pas en de novation, puisque, suivant l'art. 1275 du Code civil, elle n'a point lien, si le créancier n'a expressément déclaré qu'il entendait décharger le débiteur qui a fait la délégation. Or le sieur Vitta n'a point libéré les frères Rinaldi de leur engament. Il est donc leur créancier, et ne saurait, dès lors, se prétendre en même temps créancier direct du débiteur par eux délégué.

L'intimé reproduit les moyens qu'il a fait valoir en première instance. Il invoque à l'appui la loi 19, ff. de novat. et delegat. Enfin il ajoute qu'en supposant même fondé le système de l'appelant, il n'en serait pas moins non recevable, puisque rien ne preuve l'éviction dont il se prétend menacé.

Du 11 février 1811, ARRÊT de la Cour d'appel de Turin, troisième chambre,, par lequel :

« LA COUR, -Considérant que l'acte public du 21 janvier 1819, reçu par Castagnone, notaire, contient la vente d'un im* meuble faite par Rinaldi à Pigino, sous garantie d'éviction, et une délégation faite par le vendeur à l'acheteur de payer le prix à un créancier hypothécaire;-Que, quelle que pût être la force de cette délégation aux termes du droit commun, il est constant, d'après les nouvelles dispositions du Code civil, contennes sous le titre de la Novation, que la délégation n'opère point la novation, sauf le cas où le créancier déclare expressément qu'il entend décharger le débiteur qui a fait la délégation; -- Que de ces dispositions de la loi nouvelle, par lesquelles toutes les difficultés que les différentes interprétations des lois romaines avaient amenées en cette matière, se trouvent éliminées, il s'ensuit évidemment que la première et seule cause de l'obligation de Pigino, savoir, celle de l'achat par lui fait, subsiste toujours dans toute sa force, et que, par conséquent, l'acheteur délégué peut opposer soit au vendeur, soit

à son créancier, toutes les exceptions que la loi lui accorde po garantir son acquêt de tout trouble qui pourrait lui être infé par suite des obligations antérieures du vendeur; Qu' vain dirait-on, dans l'espèce, que Vitta a uniquement suivi foi de l'acheteur, et qu'il a voulu l'obliger plus validement p une hypothèque spéciale d'immeubles à lui appartenans : ca quel que puisse être l'effet de ces conventions, relativeme aux plus grandes sûretés de Vitta, dans le cas où Pigino s réellement tenu de lui payer le prix des immeubles en que tion, il est cependant constant que Vitta n'a point recom Pigino comme son seul débiteur, et qu'il n'a point libéré R naldi de son obligation. Il est constant de même que Pigi n'a point renoncé aux droits que la loi accorde aux acheteu pour garantir leurs achats de sorte que Vitta lui-même dû connaître la force de cette garantie et en prévoir les effets

Qu'au surplus, c'est encore en vain que Vitta voudrait ex clure Pigino de la faculté que l'art. 1653 du C. civil lui accord de suspendre le paiement du prix en question jusqu'à la cess: tion des troubles, sous prétexte qu'il ne résulte point légalemen en l'instance la preuve de ces troubles et des inscription prises par des tiers sur le même immeuble: C'est dans un autre instance que la force des réclamations de Pigino doit êtr décidée; mais, en attendant, la justice exige que l'acquéreu qui a déjà dénoncé aux premiers juges le juste sujet de crainte qu'i a d'être tenu de délaisser jouisse du bénéfice de la loi susdite - Par ces considérations, MET ce dont est appel au néant émendant, dit n'être, le sieur Pigino, tenu de payer au demandeur le prix de l'immeuble dont il s'agit, sauf que le vendeur Rinaldi, et, pour lui, le demandeur, aient fait cesser, aux termes des lois, les troubles qui peuvent lui être inférés su le même immeuble, ou qu'ils n'aiment mieux donner caution de représenter ledit prix, dans tous les cas qu'il soit par justice ordonné. »

Nota. M. Toullier pose en principe que le délégué, capable de contracter, ne peut plus, après s'être obligé en vertu de la délégation, opposer au créancier les exceptions qu'i

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