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bunal civil d'Angoulême, qui, par un jugement du 23 juillet 1809, déclare les saisies valables, et prononce la confiscation au profit du sieur Boucher.

Sur l'appel, ce jugement est infirmé par arrêt de la Cour de Bordeaux, du 19 février 1810, - Attendu, entre autres motifs, que la disposition de l'art. 47 du titre 15 de l'ordonnance de 1669, qui prononce la confiscation des bois trouvés gisans ou sur pied dans les ventes après le temps des coupes ou des vidanges, n'est point applicable aux forêts des particuliers.

Pourvoi en cassation de la part du sieur Boucher, pour contravention à l'art. 5 du titre 26 de l'ordonnance de 1669.

M. le procureur-général Merlin, qui portait la parole dans la cause, a d'abord reconnu qu'effectivement il résultait de l'article invoqué par le demandeur que toute action qui est réputée délit dans les bois de l'Etat est également réputée délit dans les bois des particuliers; que les mêmes peines, les mêmes restitutions, et, ce qui est à remarquer, les mêmes confiscations, doivent être prononcées pour les délits commis dans les seconds que pour les délits commis dans les premiers, et par conséquent que les arbres non abattus ou non vidés dans les temps où ils doivent l'être sont sujets à confiscation, dans les uns comme dans les autres.

Mais, ajoutait M. le procureur-général, s'ensuit-il de là que le sieur Boucher soit fondé à se plaindre de ce que la Cour de Bordeaux ne lui a pas adjugé la confiscation à laquelle il concluait. Non, sans doute ; et il y en a deux raisons aussi simples que tranchantes : c'est que, d'une part, le sieur Boucher n'avait point pris la voie nécessaire pour faire prononcer contre les sieurs Gosselin et consorts la confiscation qu'ils pouvaient avoir encourue ; et que, de l'autre, il n'avait qualité ni pour requérir que cette confiscation fût prononcée, ni pour s'en faire adjuger le profit. - La confiscation est une peine correctionnelle; et à ce titre, elle ne peut, hors quelques cas formellement exceptés par la loi, être prononcée ni par les tribunaux civils, ni au profit de particuliers. Elle ne peut

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être régulièrement prononcée que par les tribunaux de police correctionnelle ellene peut l'être que sur les conclusions du Ministère public, elle ne peut l'être qu'au profit de l'Etat ; et c'est pourquoi l'art. 190 du Code du 3 brumaire an 4 porte « que les poursuites pour le paiement des amendes et confiscations prononcées par les jugemens des tribunaux de police correctionnelle sont faites, au nom du commissaire du pouvoir exécutif, par le directeur de la régie des droits d'enregistrement et des domaines ». ». - - Ainsi la Cour de Bordeaux a sans doute erré dans les motifs de son arrêt, en disant que la peine de confiscation établie par l'art. 47 du titre 15 de l'ordonnance de 1669 n'avait pas lieu à l'égard des bois des particuliers; mais elle n'a pas erré dans son dispositif, en jugeant que, d'après cet article, le sieur Boucher n'avait pas droit à la confiscation qu'il réclamait, et il n'en faut pas davantage pour faire rejeter le pourvoi du demandeur.

Du 10 janvier 1811, ARRÊT de la Cour de cassation, section des requêtes, M. Basire rapporteur, par lequel:

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« LA COUR,- Attendu que le sieur Boucher n'avait pas pris la voie légale pour faire prononcer la confiscation, qui ne pouvait être demandée qu'en police correctionnelle; - Attendu, d'ailleurs, que le sieur Boucher n'avait aucun intérêt à faire prononcer cette confiscation, puisque dans aucun cas elle ne lui aurait appartenu, vu que c'est une peine dont le produit doit être versé dans le trésor public; — Attendu enfin que le défaut d'intérêt, qui écarte le premier moyen du sieur Boucher, le rend également sans intérêt à proposer les quatre autres; REJETTE le pourvoi du sieur Boucher, etc. »

COUR D'APPEL DE RENNES.

La tradition feinte peut-elle avoir lieu en matière de vente de meubles? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 1606.

BÉGOUIN, C. Geffrier.

Le sieur Guérin avait souscrit deux billets à la dame Al

leaume. Il était poursuivi et saisi dans ses meubles, à défaut d paiement du premier à son échéance; celle du second n'étai pas éloignée. Dans cet état de choses, le débiteur, voulant évi ter la vente judiciaire des objets saisis, les vendit au siew Geffrier, à l'amiable et par acte notarié.

Une partie du prix fut payée à la dame Alleaume, qui donna mainlevée de la saisie. Une autre partic lui fut déléguée,pour la toucher à l'échéance du second billet. Le vendeur: reçut le reste, et en donna quittance. Une clause de l'acte por-tait que Geffrier tenait les meubles pour déplacés et à lui livrés, et qu'il les laissait a sicur Guérin, à titre de louage, pendant un an, moyennant 6o fr. de loyer : le prix de la vente était de 1,032 fr.

Quelques mois après, un sieur Bégouin, autre créancier de Guérin, fait saisir-exécuter les mêmes meubles. Geffrier s'oppose à la saisie, et fait assigner Bégouin au tribunal de première instance de Rennes, pour la voir déclarer nulle. Celui-ci conteste la vente, mais il succombe; et, le 22 août 1809, jugement qui déclare la vente bonne et valable, et ordonne que le gardien sera tenu de se retirer.

Appel par Bégouin. Il a soutenu que la vente était faite en fraude des créanciers : il en donnait pour preuve la clause même de louage. Il prétendait qu'il n'y avait eu aucune tradition ni déplacement, et que, les meubles se trouvant encore garnir les lieux, rien ne pouvait arrêter sa saisie. Il invoquait l'article 2279 du Code civil, portant qu'en matière de meubles, la possession vaut titre, et le sentiment de Charondas, pour établir que la tradition feinte ne peut avoir lieu en fait de

meubles.

Les réponses faites à ces griefs sont analysées dans l'arrêt

suivant :

Du 15 janvier 1811, ARRÊT de la Cour d'appel de Rennes, deuxième chambre, MM. Daguen, Lesbaupin et GaillardKerbertin avocats, par lequel :

« LA COUR, -Considérant que, si l'art 1167 du Cade civil accorde aux créanciers la faculté d'attaquer les actes faits

en fraude de leurs droits par leur débiteur, il ne leur suffit pas falléguer la fraude, qui, en général, ne se présume point: il faut la prouver, ou du moins il faut qu'aux termes de l'article 1355 du Code civil, il s'élève contre les actes attaqués comme franduleux des présomptions graves, précises et concordantes, que les magistrats puissent admettre; --Considérant, dans l'espèce de la cause, que l'appelant n'apporte aucune preuve que l'acte du 11 mai 1809 soit frauduleux; que, loin qu'il s'élève contre cet acte des présomptions de fraude, les faits appris au procès démontrent au contraire qu'il a été passé de bounc foi, pour satisfaire un créancier qui tenait sous le coup d'une saisie-exécution Guérin et sa femme, dont les effets allaient être vendus sur la place publique; que ces faits ne peuvent être révoqués en doute, puisque le créancier saisissant a cessé ses poursuites, et que les titres de créances qu'il portait sur ses débiteurs ont passé aux mains de Geffrier, leur acquéreur ;--Considérant que la vente est parfaite entre parties, et la propriété acquise de droit à l'acheteur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix ;-Considérant que l'acte authentique du 11 mai 1809 est antérieur de près d'un mois au procès verbal de saisieexécution de Bégouin; qu'au moment de la vente, Guérin et femme avaient, respectivement à lui, la pleine propriété et di – position de leurs effets; Considérant que le Code civil admet, comme elle l'était dans l'ancien droit, la tradition feinte comme équipollente à la tradition réelle; que l'acte du 11 mai 1809 renferme une tradition feinte dans la clause par laquelle l'acquéreur reconnaît les effets pour déplacés et à lui livrés, et les laisse aux vendeurs à titre de louage pour un an, avec stipulation du prix de location; qu'il y aurait donc eu de l'injustice à dépouiller un acquéreur de bonne foi d'effets mobiliers dont la majeure partie du prix a tourné à l'acquit d'une dette pour laquelle les effets des vendeurs étaient frappés d'une saisie-exé cution étrangère à Bégouin; - Par ces motifs, DECLARE l'appelant sans griefs. »

Nota. M. Toullier n'admet point le principe consacré par

cette décision: ce jurisconsulte pense que la tradition feinte n'a pas lieu en fait de meubles, et que, si, après la vente, l'acquéreur les prête ou les loue au vendeur, ils continuent de pouvoir être saisis par ses créanciers, parce que; ces meubles n'ayarıt jamais été livrés, il y a lieu de présumer de la fraude et de la collusion. (Droit civil, tom. 7, pag. 61.)

COUR D'APPEL DE CAEN.

Les tribunaux peuvent-ils admettre d'autres motifs d'exclu sion des conseils de famille que ceux énoncés dans la loi? (Rés. nég.) Cod. civ., aft. 442 et suiv. Plus particulièrement, un frère peut-il étre exclu du conseil de famille, sous prétexte qu'il est intéressé à ce que son frère ne soit pas interdit? (Rés. nég.) Cod. civ., art. 495.

LES FRÈRES DE PIERREPONT.

Timothée de Pierrepont provoque l'interdiction d'Augustin son frère. Le conseil de famille s'assemble pour émettre son avis, conformément à l'art. 494 du Code civil. La majorité se prononce pour l'interdiction.

Mais Bon-Joseph de Pierrepont, l'un des frères d'Augustin, n'a point été appelé à cette délibération. En conséquence, Augustin en provoque la nullité, sur le motif qu'aux termes de l'art. 408 du Code civil, les frères germains doivent nécessairement faire partie du conseil de famille.

Timothée prétend que Bon-Joseph a dû être exclu d'une assemblée où son intérêt personnel l'aurait empêché d'apporter une opinion impartiale et libre. Pour justifier son assertion par des faits, il établit que Bon-Joseph est porteur de la procu→ ration générale d'Augustin, qu'il a en cette qualité agi sous le nom de son frère pour obtenir la mainlevée de l'opposition au mariage de ce dernier; qu'il s'est présenté à toutes les audiences; qu'enfin, il est en possession d'administrer la fortune et de recevoir les revenus d'Augustin.

Le 9 octobre 1810, jugement du tribunal civil de Valogue,

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