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avec succès la prétendue ancienne servitude qu'il entend faire résulter des ouvertures qu'il avait dans le mur latéral de sa maison qui faisait saillie, et au moyen desquelles il avait vue oblique sur la maison de l'intimé, son voisin : en esset, les deux maisons sont situées sur une place publique, qui est dans le domaine de la police: dès lors aucune de ces maisons n'aurait pu acquérir ni prescrire une servitude sur l'autre, puisqu'il dépendait de la police de faire supprimer, quand elle l'aurait jugé à propos, la saillie de laquelle l'appelant faisait résulter ladite prétendue servitude; d'ailleurs, y eût-il eu servitude, cela deviendrait indifférent pour la décision de la cause, puisque l'appelant l'aurait détruite lui-même, en reconstruisant sa façade à neuf, sur l'alignement prescrit par la police; Attendu que

le véritable objet du litige est de savoir si, comme le prétend Pintimé, l'appelant peut être astreint à supprimer ou reculer le balcon qu'il a fait établir au premier étage de sa nouvelle façade, en 1809, sous le régime du Code civil; - Attendu que le balcon dont il s'agit a procuré à la maison de l'appelant une vue oblique sur celle de l'intimé, et que, d'après l'art. 679 du Code cité, « on ne peut avoir des vues par côté ou obliques sur • l'héritage de son voisin, s'il n'y a six décimètres (deux pieds) ⚫ de distance »; Attendu qu'on ne peut isoler cet article du suivant, comme fait l'appelant, pour le soutenir inapplicable, parce que, a-t-il dit, ledit art. 679 ne parle pas de balcon; mais l'art. 680, qui fixe les deux points extrêmes de la distance mentionnée ès art. 678 et 679, ne laisse aucun doute que l'article 679 ne comprenne les balcons comme l'art. 678, puisque, après avoir, ledit art. 680, disposé que la distance dont il est parlé dans ces deux articles se compte depuis le parement extérieur du mur où l'ouverture se fait, il ajoute : « Et, s'il y a « balcons, ou autres semblables saillies, depuis leur ligne ex« térieure jusqu'à la ligne de séparation des deux propriétés.»; - Attendu que, dans l'espèce, la ligne séparative des deux maisons se prolonge jusqu'à l'angle de celle de l'appelant, qui fait saillie sur celle de l'intimé, d'autant que, lorsque celui-ci sera dans le cas de reconstruire sa façade, il pourra être tenu

de l'aligner sur celle de l'appelant ; - Attendu qu'il résulte de l'expertise faite en première instance que la distance depuis le parement extérieur de la grille du balcon jusqu'à la ligne séparative des deux maisons n'est que de vingt et un centimètres et cinq millimètres, tandis que, d'après l'art. 679 du Code, elle devrait être de six décimètres ou soixante centimètres (deux pieds); que, dès lors, si l'appelant entend maintenir son balcon, il doit le reculer dans la distance voulue par ledit article, et conformément à l'article suivant, et non dans la distance prescrite, pour les vues droites, à dix-neuf décimètres (six pieds), par l'art. 678, ainsi que l'ont pensé les premiers juges; et il y a lieu d'émender leur décision quant à ce seulement; - Attendu, quant aux dépens de la cause d'appel, que, l'appel étant fondé sous le rapport de la distance adoptée par lesdits juges, il y a lieu de compenser lesdits dépens, même ceux de l'arrêt;- Par ces motifs, prononçant sur l'appel du jugement rendu entre les parties par le tribunal civil de l'arrondissement de Strasbourg, le 19 mai 1810, MET l'appellation et ce dont est appel au néant, en ce qu'il a été ordonné que l'appelant, pour lors défendeur, sera tenu de supprimer ou reculer le balcon dont est question à la distance prescrite par l'art. 678 du Code civil; émendant quant à ce, ordonne que, dans le cas où l'appelant préférerait le maintien dudit balcon, il ne sera tenu de le reculer qu'à la distance prescrite par les art. 679 et 680 dudit Code; le jugement, au résidu, sortissant son effet; tous les dépens de la cause d'appel, même ceux du présent arrêt, compensés entre les parties; ordonne la restitu¬ tion de l'amende consignée. »

COUR DE CASSATION.

L'héritier qui a payé le montant d'une contrainte provisoire décernée contre lui par la Régie, pour le droit de mutation, reste-t-il soumis à l'obligation de faire une déclaration ultérieure? (Rés. aff.)

LA REGIE, C. HUET-DESMOULINS.

La Régie avait décerné contre un sieur Huet-Desmoulins, légataire universel de sa femme, une contrainte provisoire de la somme de 1,000 fr., pour le droit de mutation, sauf à augmenter ou diminuer d'après la déclaration qu'il serait tenu de faire. Puis, elle avait formé des saisies-arrêts entre les mains des débiteurs de la succession, et un jugement les avait condamnés à verser, dans la quinzaine, à la caisse de l'Administration, la somme de 1,000 fr., même une somme plus forte, si le cas y échéait, d'après la déclaration qui serait faite par Huet-Desmoulins dans le même délai. Les tiers saisis payèrent la somme de 1,000 fr.

Quelque temps après, Huet-Desmoulins n'ayant point fait de déclaration, la Régie décerna contre lui une nouvelle contrainte en augmentation de la somme de 200 et quelques francs. Il y forma opposition: il soutint que le jugement lui avait donné l'alternative de payer la somme de 1,000 fr., ou de faire sa déclaration; qu'il avait choisi le premier parti, et qu'en conséquence il était libéré; que la Régie n'avait plus rien à lui demander.

Il obtint, en effet, le 25 mai 1809, du tribunal civil d'Angoulême, un jugement par lequel, attendu que l'Administration n'établissait par aucun titre qu'il lui fût dû une somme plus forte que celle de 1,000 fr. qu'elle avait d'abord demandée, Huet Desmoulins fut déchargé de la contrainte, avec

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La Régie s'est pourvue en cassation. Ses moyens sont exactement analysés dans les motifs de l'ARRÊT rendu le 27 mars 1811, par la section civile, au rapport de M. Rousseau, et dont voici les motifs :

« LA COUR, — Sur les conclusions de M. l'avocat-général Pons; Vu l'article 27 de la loi du 22 frimaire an 7;

-Et attendu que la déclaration exigée par ledit article est d'une obligation rigoureusement prescrite; que les contraintes décernées par la Régie, tant que cette déclaration n'a pas eu

lieu, sont nécessairement provisoires, et sont sujettes à augmentation comme à retranchement; Qu'il ne dépend que du redevable de fixer invariablement la base du droit par une déclaration détaillée et exacte, conformément à la loi; qu'il y avait d'autant moins lieu de s'écarter de cette doctrine, dans l'espèce, que le premier jugement préjugeait que l'objet de la première contrainte n'était que provisoire, et que le droit définitif dépendrait de la déclaration à faire; -Que le jugement attaqué, en dispensant Huet-Desmoulins de passer la déclaration voulue par la loi, et en déboutant la Régie de sa demande en supplément, sous prétexte qu'il avait été satisfait au premier jugement rendu sur une première contrainte qui n'avait même été décernée qu'avec réserve, a contrevenu évidemment à l'art. 27 de la loi du 22 frimaire an 7 ; CASSE, etc.>

COUR DE CASSATION.

Le virement de parties, au moyen duquel un négociant se paie de ce qui lui est dû par un autre, en s'appliquant des fonds qui lui ont été remis pour ce dernier, est-il valable ? ( Rés. aff.)

Celui qui a fait la remise de ces fonds peut-il se plaindre de cette opération, quand elle opère sa décharge? (Rés. nég.) Des effets de commerce protestés et retirés pour celui qui les a souscrits peuvent-ils revivre par leur passage dans les mains d'un tiers, après leur échéance ? ((Rés. nég. )

MAGRO, C. CHristich.

Le sieur Christich s'était retiré à Marseille, après avoir cédé au sieur Mutti et compagnie une maison de commerce qu'il avait fondée à Salonique. Un sieur Magro, négociant à Barcelone, voulant tirer des blés de Salonique, s'adresse à Christich, et lui demande sa recommandation auprès de ses successeurs. Il le prie, en outre, de les autoriser à fournir sur lui des traites dont il s'engage à faire les fonds. Le sieur Christich consent à toutes ces demandes.

L'opération s'engage au mois d'octobre 1802. Magro donne ses ordres à la maison Mutti; il lui envoie des denrées coloniales et des piastres pour l'achat des blés. Une première expédition lui est faite; mais il paraît qu'on n'avait pu vendre qu'une partie des denrées coloniales, et la maison Mutti et compagnie tire sur le sieur Christich. Un second envoi donne lieu à de nouvelles traites, toutes à l'ordre des sieurs Hubsch et Timoni, de Constantinople. Le sieur Magro remplit sa promesse, en remettant exactement au sieur Christich les fonds de toutes ces traites,

Mais celui-ci, déjà créancier de la maison Mutti de sommes considérables qu'elle ne remboursait point, s'apercevant qu'elle se livrait à des opérations inconsidérées, laissa protester les dernières traites, dressa son compte courant avec la maison Mutti, la crédita de toutes les sommes qu'il avait reçues de Magro pour elle, et lui envoya ce compte, en l'instruisant des raisons pour lesquelles il n'avait pas payé les dernières lettres de change.

Il adressa le même compte à Magro, en lui faisant part des motifs qu'il avait eus d'adopter ce mode de comptabilité; il l'avertit en même temps des risques que courait la maison Mutti, et le prévint de ne point lui donner une confiance aveugle. Magro ne se rendit point à cet avis.

Cependant la maison Mutti reçoit le compte courant, en voit et en reconnaît la justesse, et, sans se plaindre, reçoit des mains de Hubsch et Timoni, de Constantinople, les traites protestées, les garde et les retire de la circulation.

Quoiqu'elle ne pût pas critiquer l'opération, elle n'en conservait pas moins de ressentiment. Elle écrivit donc au sieur Magro qu'elle allait se pourvoir contre lui pour obtenir son remboursement, et qu'elle gardait les marchandises coloniales qu'elle avait entre les mains, par forme de nantissement. Ce n'était de sa part qu'une menace impuissante, puisque Magro était libéré vis-à-vis d'elle ; mais celui-ci donna dans le piége, et fit assigner le sieur Christich au tribunal de commerce de Marseille, pour se voir condamner à lui restituer les sommes qu'il lui avait remises pour acquitter les traites.

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