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recevable. Ils se fondaient sur les art. 157 et 443 du Code de procédure civile, — Aux termes de l'art. 443, disaient-ils, le délai de trois mois pour interjeter appel se compte du jour où l'opposition n'est plus recevable. Or l'art. 157 n'accorde pour former opposition que huit jours, à partir de la signification du jugement par défaut à l'avoué défaillant. Dans l'espèce, cette signification a eu lieu le 19 janvier; les héritiers Ganier n'étaient donc plus recevables à émettre leur appel le 10 mai suivant, puisque les délais cumulés de l'appel-et de l'opposition, n'étant que de trois mois et huit jours, se trouvaient expirés dès le 27 avril.

Les intimés ont victorieusement réfuté cette exception. Nous ne reproduirons pas leurs moyens : l'arrêt de la Cour en présente l'analyse.

Du 9 juillet 1811, ARRÊT de la Cour d'appel de Nancy, MM. Antoine et Breton avocats, par lequel:

⚫ LA COUR,-Sur les conclusions conformes de M. Demetz fils, avocat-général ; - Considérant que, si l'on examine avec attention les dispositions de l'art. 443, il est impossible d'admettre la conséquence que les intimés s'efforcent d'en tirer, laquelle d'ailleurs ne serait pas moins contraire à l'esprit de la loi qu'aux principes de l'équité. En effet, on remarque en général qu'elle a voulu prévoir tous les écueils qui tendraient à faire subir aux parties une condamnation définitive, avant d'avoir été en situation légale de se défendre : c'est ce que manifestent différentes dispositions du Code. L'art. 147 ne permet pas même d'exécuter un jugement quelconque, qu'il n'ait été signifié à avoué; mais il veut, en outre, que les jugemens provisoires et définitifs qui prononcent des condamnations ne puissent recevoir leur exécution qu'après avoir été signifiés à partie. Lorsqu'un jugement par défaut a été rendu contre une personne qui n'a pas constitué d'avoué, l'art. 156 veut encore que le juge commette un huissier pour le lui signifier. - Que la loi n'est pas moins prévoyante pour faire faciliter les voies d'opposition qu'elle prescrit en raison du danger que courrait la partie condamnée de ne pouvoir être instruite du jugement

qui la condamne. Il suffit de lire les art. 157 et 158 pour s'en convaincre. Tant de précautions pour éviter que les parties ne soient victimes d'une procédure qu'elles auraient ignorée contrasteraient d'une manière trop frappante avec l'imprévoyance que l'on veut attribuer à la loi, au cas présent. Il serait effectivement absurde de prétendre qu'elle aurait moins pris de précautions pour faciliter l'appel des jugemens par défaut que de ceux qui sont contradictoires; qu'elle se serait moins mise en garde contre un avoué négligent qui, en faisant défaut, a compromis les intérêts de sa partie, que contre celui qui a fait preuve de diligence, en figurant contradictoirement dans la contestation. Mais s'il est évident que l'esprit de la loi rejette le système des intimés, il ne l'est pas moins que le véritable sens de l'art. 443 le réprouve encore. En effet, après avoir fixé en général à trois mois le délai pour interjeter appel, l'article indique l'époque à laquelle ce délai commencera à courir. D'après le principe admis par l'art. 147, que tous jugemens provisoires et définitifs prononçant des condamnations ne peuvent être exécutés avant d'avoir été signifiés à partie, à personne ou domicile, ainsi qu'à l'avoué, il est certain que, si cette signification à personne est le seul moyen légal de lui donner l'existence nécessaire à son exécution, c'est seulement aussi par elle que la partie condamnée est avertie de pourvoir à sa réformation, lorsqu'elle y remarque des griefs qui l'autorisent à y résister. Aussi est-ce par cette raison que le délai ne court, selon l'art. 443, que du jour de la signification à personne ou domicile. Si l'article ne fait pas courir ce délai à partir de cette signification, pour les jugemens par défaut, mais seulement du jour où l'opposition ne sera plus recevable, c'est que l'art. 455 déclare non recevables les appels des jugemens susceptibles d'opposition; mais il ne s'ensuit pas moins qu'ils doivent être signifiés à partie ou domicile pour faire conrir le délai de l'appel : car, puisque, selon la loi, cette formalité est indispensable pour les jugemens contradictoires, à plus forte raison l'est-elle pour ceux qui ne le sont pas. La simple signification à avoué, prescrite par l'art. 157, de laquelle les

intimés voudraient partir, ne fait donc courir que le délai de l'opposition, et non celui de l'appel, ce qui écarte la fin de non

recevoir qu'on lui oppose ;

REJETTE la fin de non recevoir

proposée par les intimés, etc. »

Nota. La Cour de Paris a décidé la question dans les mêmes termes, par arrêt intervenu le 10 août 1811, entre le sieur Leroy et la dame Coustard de Villers.

COUR DE CASSATION.

Enoncer dans une inscription hypothécaire que la créance est EXIGIBLE, est-ce mentionner suffisamment L'ÉPOQUE d'exigbilité? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 2148, §4.

LEBLOND, C. FALLempin.

Le sieur Fallempin avait obtenu contre l'un de ses débiteurs plusieurs jugemens, en vertu desquels il prit que inscription hypothécaire sur ses biens. Cette inscription énonçait bien que les créances étaient exigibles, mais sans faire mention de l'époque à laquelle l'exigibilité avait commencé.

C'est sur ce motif que le sieur Leblond, autre créancier inscrit, en a demandé l'annulation.

Le 28 décembre 1809, jugement du tribunal civil d'Arras, qui déclare l'inscription valable, « attendu qu'il résulte de l'article 2148 du Code civil, et de la loi du 4 septembre 1807, que l'époque d'exigibilité d'une créance ne doit être indiquée, dans une inscription hypothécaire, que lorsque cette époque doit avoir lieu à jour fixe, ou après un événement quelconque; que l'inscription dont il s'agit a été prise en vertu de jugemens, pour des créances échues, au paiement desquelles le débiteur a été condamné ; que, par suite, les créances étaient exigibles, mais non pas à jour fixe, les jugemens n'ayant déterminé aucune époque de paiement des créances qui étaient des condamnations, et que Fallempin a énoncé dans ses bordereaux que les créances étaient exigibles, ce qui se réfère à des créances

échues, et dont l'exigibilité doit avoir lieu au moment de l'inscription prise en vertu des jugemens de condamnation.

Sur l'appel, ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour de Douai, du 28 avril 1810.

Pourvoi en cassation, pour violation de l'art. 2148 du Code civil et de la loi du 4 septembre 1807.

L'art. 2148, no 4, a dit le demandeur, veut que l'inscription hypothécaire contienne l'époque de l'exigibilité de la créance, et la loi du 4 septembre 1807, dont l'objet a été de déterminer le sens et les effets de cet art. 2148, exige aussi la même énonciation.

Quel a été le motif de la loi en prescrivant une semblable formalité? Elle a voulu que l'inscription présentât aux parties intéressées le tableau fidèle de la position de débiteur, afin qu'elles pussent mesurer, sur ses facultés, le degré de confiance qu'il mérite; et ne s'engageassent jamais avec lui qu'en parfaite connaissance de cause. Or la mention de l'époque de l'exigibilité peut seule leur en donner le moyen: car inutilement sauraient-elles à quelle somme s'élèvent les créances inscrites, si elles ne savaient en même temps à quelle époque elles seront exigibles.

Voudra-t-on distinguer entre les créances échues et à écheoir, et dire que la mention de l'époque d'exigibilité, nécessaire à l'égard de celles-ci, ne l'est aucunement à l'égard de celles-là, puisque, une fois exigibles, peu importe de savoir depuis combien de temps elles le sont devenues? A ce moyen on répond d'abord que la loi ne distingue pas, et que, prescrivant l'indication de l'époque d'exigibilité pour toutes les créances en général, cette indication est indispensable dans tous les cas. L'on répond ensuite qu'il n'est point indifférent, pour celui qui veut traiter avec le débiteur, de connaître l'époque à laquelle a commencé l'exigibilité de la créance, puisque, plus le débiteur aura tardé à s'acquitter d'une dette échue, plus aussi sa solvabilité actuelle sera suspecte, et plus l'engagement projeté de mandera de réflexions.

M. Daniels, avocat-général, n'a point partagé l'opinion du

lemandeur : il a pensé que l'inscription de Fallempin était suffisante; qu'en déclarant exigibles les créances qui en étaient l'objet, c'était assez dire qu'elles pouvaient être exigées au moment même de Pinscription; que, dès lors, la formalité prescrite par l'art. 2148 du Code civil avait été remplie.

Dug juillet 1811, ARRÊT de la Cour de cassation, section des requêtes, M. Henrion président, M. Genevois rapporteur, par lequel :

« LA COUR,- Attendu que la créance dont il s'agit était Eexigible lors de l'inscription;- Qu'en déclarant, dans le bordereau, que cette créance était exigible, sans énoncer depuis - quel jour, il avait été suffisamment satisfait à la loi; — Et que, par conséquent, l'arrêt dénoncé n'a point contrevenu à l'article 2148 du Code civil, ni à la loi du 4 septembre 1807;REJETTE, etc. >>

Nota. Les Cours d'appel de Nismes et de Rouen avaient d'abord décidé cette question pour la négative, par arrêts des 15 juillet 1808 et 1er avril 1809; mais bientôt, revenant sur leurs pas, les mêmes Cours ont jugé, påâr arrêts des 11 juin et 23 décembre 1810, qu'énoncer dans l'inscription que la créance est exigible, c'est, par ceļa seul, faire mention de l'époque d'exigibilité. Cette opinion est aussi celle que la Cour de Riom a consacrée, par deux décisions des 15 janvier et 21 février de la même année. Si à toutes ces autorités on ajoute celle résultante de l'arrêt que nous venons de rapporter, on regardera, sans doute, la question comme irrévocablement résolue par la jurisprudence.

COURS D'APPEL DE BRUXELLES ET DE BESANÇON. § Ier.

La mention que les copies du procès verbal de saisie immobilière ont été laissées au greffier de la justice de paix et au maire ou à son adjoint doit-elle, à peine de nullité, étre faite par l'huissier exploitant, et non par ces fonctionnaires eux-mêmes? (Rés. aff.) Cod. de proc. civ., art. 676.

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