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ce Code, en autorisant le curateur nommé au sourd - muet à accepter une donation, ne lui confère pas le droit de donner; -Que le conseil de famille ne peut lui-même s'attribuer ce pouvoir qu'autant qu'il y serait autorisé par la loi; -- Que le sieur Jean Runel père, sourd-muet de naissance, ne pouvant manifester sa volonté par l'écriture, à l'effet de donner ou d'hypothéquer ses biens pour l'établissement de ses enfans, se trouvait par-là réduit à la condition d'un imbécille, et que dès lors il était loisible à ses parens de faire constater légale ment cet état, pour prendre ensuite les mesures convenables.

Appel de la part du curateur, le sieur Touzellier; et, le 3 janvier 1811, ARRÊT de la Cour d'appel de Nismes, par lequel:

« LA COUR, — Sur les conclusions du procureur-général; -Attendu qu'il est constant, en fait, que Jean Runel père est sourd et muet, et qu'il est illettré, et qu'à raison de cet état, il lui avait été nommé un curateur par un procès verbal du 14 vendémiaire an 11, antérieurement à la promulgation du Code civil;-Attendu que, Runel père se trouvant ainsi dans l'impossibilité de manifester sa volonté, François Runel, son fils cadet, se trouve dans les dispositions de l'art. 160 du même Code, et qu'il peut les invoquer avec d'autant plus d'avantage qu'il a , atteint sa majorité, tandis que cet article de la loi permet aux mineurs dont les parens ne peuvent manifester leur volonté de contracter mariage avec le consentement d'un conseil de famille; - Attendu que, le conseil de famille de François Runel ayant délibéré, le 14 novembre dernier, son consentement à son mariage avec Jeanne de Vic, l'homologation de cette délibération est aussi juste que nécessaire ;- Attendu que l'article 511 du Code civil dispose que, « lorsqu'il sera question de Fenfant d'un interdit, la dot, ou l'avancement d'hoirie, et « les autres conventions matrimoniales, seront réglés par un « avis du conseil de famille, homologué par le tribunal, sur les « conclusions du procureur du Roi »; Que, quoique cet article ne semble d'abord applicable qu'aux enfans des personnes interdites pour fait de démence, fureur ou imbécillité, il l'est

encore aux enfans de ceux que la nature a mis dans un état
réel d'interdiction, en les privant de l'usage de l'ouïe et de la
parole, et lorsqu'ils ne peuvent pas manifester leur volonté ;-
Que cette interprétation de la loi est d'autant plus juste et
nécessaire qu'elle est conforme aux principes de l'ancienne lé-21
gislation, d'après lesquels la cause actuelle doit être décidée,
et qui portaient les mêmes dispositions en faveur des enfans des
sourds et muets, ainsi que l'enseigne Domat,
tom. 1, tit. 2
n° 12, et les Institutes de Justinien, liv. 3, tit. 20; qu'il est
impossible de priver les enfans des uns de la faculté accordée
aux enfans des autres; que les mêmes motifs subsistent pour
tous; que la loi protège les mariages des citoyens et les encou-
rage; et que ce serait condamner au célibat et porter le désor-
dre dans la société, que de priver les enfans des sourds et muets
de la faculté de se marier: or ce serait la leur refuser que de
les priver d'une dot qui seule peut décider un établissement
dans nos mœurs;
Attendu que le tribunal de première in-
stance a fait une fausse application de l'art. 511 du Code civil
en refusant l'homologation de la délibération dont s'agit ; que
çette délibération est conforme au vœu de la loi, et qu'en dé-
terminant une dot en argent de 3,000 fr., le conseil de famille
a balancé avec autant de sagesse que d'équité l'intérêt des
Runel père et fils; - Par ces motifs, A Mis à néant l'appella-
tion et ce dont a été appelé ; - Et, par un nouveau jugé, vu
les dispositions des art. 160 et 511 du Code civil, a homologué
la délibération du conseil de famille de Jean Runel père, du
14 novembre dernier; - A ordonné qu'elle sortira son plein
et entier effet pour l'accomplissement du mariage de François-
Runel, fils puîné, et que l'amende consignée sera restituée
sans frais. »>

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COUR D'APPEL DE BRUXELLES.

L'article 407 du Code civil, qui prescrit la manière de for-
mer le conseil de famille, doit-il étre exécuté à la ri-
gueur? (Rés. aff.)

t

Le parent qui a concouru à la délibération, sans réserve ni protestation, est-il recevable à l'attaquer? (Rés. aff.) AMBROS, C. JANS.

Un sieur Janssens, oncle maternel et subrogé tuteur du mineur Jans, provoque l'assemblée du conseil de famille pour délibérer sur l'émancipation de son neveu. Le conseil est composé de quatre parens maternels, et de deux seulement pris dans la ligne paternelle, du nombre desquels est le sieur Ambros, tuteur. Le conseil est unanimement d'avis de l'émancipation, qui est prononcée; le sieur Janssens est nominé

curateur.

Peu de temps après, Ambros est poursuivi en reddition de compte, d'une manière qui annonce de l'animosité et le dessein de le vexer. — Alors il demande la nullité de la délibération, attendu que le conseil de famille n'a point été composé conformément à l'art. 407 du Code civil, et qu'il n'y avait que deux parens paternels, quoiqu'il s'en trouvât un nombre suffi

sant sur les lieux.

On le soutient non recevable à proposer la nullité, parce qu'il a concouru à la délibération, sans aucune réserve ni protestation.

Jugement qui, adoptant l'exception, lui ordonne de plaider sur la demande à fin de reddition de compte.

I interjette appel, et soutient qu'un parent qui a concouru aux opérations d'un conseil de famille n'en est pas moins recevable à attaquer la délibération, s'il y aperçoit des vices graves, parce qu'il s'agit des intérêts du mineur, qui sont un objet de droit public.

Passant ensuite à l'établissement de la nullité, il fait obser ver que le Code civil exige dans la composition du conseil de famille un égal nombre de parens dans chaque ligne; qu'à défaut de parens dans l'une des deux, le Code n'appelle pas des parens de l'autre, mais des amis.

Le mineur et son curateur insistent sur la fin de non recevoir. Ils observent, au fond, que l'art. 407 ne prononce pas la peine

de nullité..

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Ambros réplique que la nullité résulte nécessairement de la disposition de la loi, puisque le conseil de famille ne peut être régulier s'il n'est pas composé conformément à ce qu'elle prescrit.

Du 4 janvier 1811, ARRÊT de la Cour d'appel de Bruxelles, deuxième chambre, MM. Roly et Lespérance avocats, par Jequel:

« LA COUR,—Vu l'art. 407 du Code civil, où il est textuellement dit : « Le conseil de famille sera composé, non compris le juge de paix, de six parens ou alliés, pris tant dans la « commune où la tutelle sera ouverte que dans la distance de « deux myriamètres, moitié du côté paternel, moitié du côté « maternel, et en suivant l'ordre de proximité dans chaque «ligne. Le parent sera préféré à l'allié du même degré, le plus «« âgé à celui qui le sera le moins. »; Attendu, en fait, qu'il résulte du procès verbal en date du 10 mars 1810 que

le

conseil de famille qui a prononcé sur l'émancipation de JeanLambert Jans, et sur la nomination de la personne d'UlricGilles Janssens pour curateur, a été composé de quatre parens maternels et de deux parens paternels; qu'il a été allégué par l'appelant, et non contredit par les intimés, qu'il éxistait sur les lieux un proche parent paternel dudit émancipé, qui n'a point été convoqué ;-Attendu, en droit, que l'art. 407 du Code civil statue, en termes formels, que le conseil de famille sera composé de six parens, trois du côté paternel et trois du côté maternel;-Que cette disposition renferme une forme essentielle et constitutive du conseil de famille, dans lequel l'influence des deux lignes doit être égale pour l'avantage du mineur, afiu que ses intérêts ne puissent être compromis ni par l'une ni par l'autre ; - Qu'il s'ensuit 1° que la composition dudit conseil de famille est illégale et nulle, quoique cette nullité ne soit pas prononcée par un article exprès de la loi; 2o que les parens qui même en ont fait partie peuvent s'adresser au juge pour la faire prononcer, parce que le bien-être du mineur les rend recevables en tout état de cause; Attendu que l'art. 883. du Code de procédure civile n'est pas applicable à l'espèce,

parce qu'il a pour objet de déterminer le mode suivant lequel un peut attaquer une délibération du conseil de famille qu'on suppose légalement organisé : ce qui n'est pas le cas de la présente contestation, dans laquelle il s'agit de juger si quatre parens d'une ligne et deux de l'autre peuvent valablement composer un conseil de famille : ce qui présente une question toute différente, celle de savoir si on peut impunément violer la disposition précise de l'art. 407 du Code civil, ce qui pourrait produire des effets très-nuisibles aux intérêts du mineur, comme la présente cause en produit déjà un exemple, puisque le mineur à peine émancipé, et sans se donner le temps ni de sonder les dispositions de son tuteur, ni de lui faire des sommations amiables et extrajudiciaires, lui fait donner surle-champ, et avec l'assistance de son nouveau curateur, pris dans la ligue maternelle, deux citations pour des prétentions qui, évidemment, ne devaient former l'objet que d'une seule demande : ce qui semble indiquer que toutes ces opérations doivent être attribuées non à un sentiment de bienveillance envers le mineur émancipé, mais à l'esprit de parti, ou à une tracasserie de famille dont l'inexpérience de celui-ci le rendrait victime ; — Par ces motifs, MET l'appellation et ce dont est appel au néant ;-Émendant, déclare illégale et nulle la composition dudit conseil de famille, et par suite toutes les délibérations qu'il a prises. »

Nota. La question a été jugée de même par un arrêt de la Cour de Lyon, du 15 février 1812. Voyez aussi des arrêts analogues, tom. 8 de ce recueil, pag. 504, et tom. 9, pag. 520.

COUR D'APPEL DE CAEN.

L'enfant qui vient à la succession de son père est-il obligé de rapporter ce que le père a payé pour le faire remplacer? (Rés. aff.) Cod. civ., ait. 851.

LES ENFANS Dasseville.

Le sieur Dasseville, cultivateur à Beuttemont, arrondissement de Lisieux, avait deux fils, Jean-Mathieu et Jean Ana

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