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faut une nouvelle disposition testamentaire. Cela résulte de la disposition de l'art. 1035 du Code, qui n'admet la déclaration, du changement de volonté que dans le sens de la révocation, ce qui est bien différead de la réhabilitation du testament révoquée par un acte postérieur.

«On peut assimiler çe cas à celui où un testateur voudrait ratifier ou confirmer par un simple acte ordinaire un testament qui serait nul par le défaut de formalités; on ne peut confirme ni un testament qui n'existe pas, ou, ce qui est de même, qui est nul, ni celui qui était valable dans le principe, mais qui a cessé d'exister. » (1)

Ainsi, d'après le sentiment de M. Grenier, il semble qu'ily aurait nécessité de renouveler, dans l'acte postérieur qui a pour objet la réhabilitation d'un testament révoqué, la disposition qu'il contenait, et qu'une simple déclaration, manifestant la volonté que le testament révoqué reçoive son exécution, est insuffisante. Aussi a-t-on beaucoup argumenté de cette opinion pour soutenir la négative de la deuxième question posée en tête de cet article.

4. Un, testament légalement révoqué, disait-on, est rentré dans le néant; il n'existe plus. Or, si un testament révoqué est censé n'avoir jamais existé, le testateur ne peut plus le faire revivre, le tirer du néant, où il a été plongé par la révocation. Sil revient à sa volonté première, il ne peut le faire que par une nouvelle disposition, par un nouveau testament, qui exprime et répète ce qui était écrit dans le premier. Cette conséquence est exacte, surtout lorsque la réhabilitation ou la confirmation d'an testament révoqué ne porte, comme dans l'espèce, que sur une partie des dispositions. Car comment pourra-t-on distinguer bien précisément ce que le testateur a voulu rejéter ou conserver; comment établir une ligne exacte de séparation

(1) Il faut remarquer ici que M. Grenier parle seulement d'un simple acte notarlé portant réhabilitation. Peut-être cût-il pensé autrement dans T'hypothèse où la réhabilitation eût été faite par testament.

entre la disposition que l'on veut faire revivre et celle qu'on veut laisser dans le néant? C'est pour cela, et à l'effet de prévenir cet inconvénient, que le législateur a prescrit d'une manière absolue que les dispositions soient lues au testatèur et aux témoins, pour empêcher toute ambiguité. Or il est évident que ce but serait manqué si, après dix ou quinze ans, în testament annulé, révoqué, pouvait reprendre l'existence et la vie par une simple déclaration du testateur, à qui souvent l'acte n'aura pas été représenté depuis ce temps, et dont la mémoire infidèle peut même s'être méprise sur ses véritables dispositions. Il faut, comme l'a observé M. Grenier, faire une grande différence entre la révocation et la réhabilitation d'un testament. Un simple acte portant déclaration du changement de volonté suffit pour la révocation, d'après l'art. 1035. Mais cet article, ni aucun autre, ne dit la même chose pour la réhabilitation. Donc il n'a pas voulu, pour ce dernier cas, admettre la même facilité, la même simplicité de forme que pour la première hypothèse.

Mais il y a plus: aux termes de l'art. 1558 du Code, l'acte de confirmation d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité ou en rescision n'est valable qu'autant que l'ony rappelle la substance de cette obligation, et dans une matière aussi importante que celle des testamens, le législateur se serait montré moins rigoureux, il eût exigé une moindre précaution, manifesté une plus grande indulgence! Non, sans doute, une pareille supposition ne saurait être admise; elle peut l'être d'autant moins que l'art. 1339 fournit encore un argument plus victorieux, en voulant que la donation nulle ou vicieuse soit refaite dans la forme légale, et ne puisse être réparée par aucun acte confirmatif. L'art. 45 de l'ordonnance, de 1751 et Part: 964 du Code civil ont une disposition semblable pour les donations révoquées par survenance d'enfans; elles ne peuvent revivre ni par la mort de l'enfant du donateur nipar aucun autre acte confirmatif. Or les testamens ne sont pas des actes moins importans que les donations entre vifs; ils ne sont pas soumis à des formalités moins rigoureuses; et si, lorsque les premières

sont nulles ou révoquées, elles ne peuvent reprendre leu existence par une simple déclaration confirmative, sur que texte de la loi pourrait-on se fonder pour en indaire une antre conséquence à l'égard des testamens ?

Tels étaient les moyens qu'on proposait à la Cour de cassetion contre un arrêt rendu par la Cour de Rennes dans l'espèce suivante.

Par un premier testament, du 12 avril 1808, passé devant Guillet, notaire à Nantes, le sieur Lehereau avait légué à Alexandre Collé tous ses biens, à la charge par lui de payer à Françoise et à Marie-Anne Ameline une rente viagère de 900 fr., divisible par moitié entre elles, et réversible pour l tout au profit de la survivante.

Par un autre testament, du 29 juillet même année, le testateur déclare révoquer purement et simplement celui du avril, et vouloir qu'il soit considéré comme non avenu.

Enfin, le 29 septembre 1808, Lehereau fit un troisième testament, contenant cette simple déclaration : « Je confirme mon testament du 12 avril 1808, au rapport de Guillet, notaire à Nantes, mais seulement en ce qui concerne Françoise Ameline et Marie-Anne Ameline sa nièce; le surplus demeure révoqué comme je l'ai fait par mon testament du 29 juillet dernier, au rapport dudit Guillet. »

Le testateur étant décédé le lendemain même de cette dispo sition, des demoiselles Ameline ont demandé l'exécution et la délivrance des legs exprimés en leur faveur.

Sur le refus des héritiers, la cause est portée devant le tribunal civil de Nantes, qui, par jugement du 10 mai 1809, 3 débouté les légataires de leur demande, attendu que le testa ment du 12 avril 1808 avait été révoqué par celui du 29 juillet suivant; que l'acte du 29 septembre, portant confirmation de premier testament, ne contenait aucune disposition; que e n'était point par conséquent un testament, et que ce dernier acte n'avait pu faire revivre celui du 12 avril.

Sur l'appel, la Cour de Rennes a, par arrêt du 29 août 1810, infirmé la décision des premiers juges, et ordonné la dél”

vrance du, legs, « attendu que le testament du, 29 septembre est le dernier acte de la volonté de Lehereau; que si, par celui du 29 juillet précédent, il avait déclaré révoquer son premier testament, du 12 avril de la même année, celui-ci n'était annulé que jusqu'à ce que le sieur Lehereau eût marqué une volonté contraire ; qu'il l'a manifestée par celui du 29 septembre, par lequel, en faisant revivre son premier testament, il donne aussi une nouvelle existence aux dispositions faites en faveur des demoiselles Ameline par ce premier testament; qu'aucune loi n'assujettit le notaire à répéter dans un dernier testament, à peine de nullité, les dispositions portées dans le premier du même individu, lorsqu'il ne présente pas d'irrégularité, ni même à l'annexer à ses dernières dispositions; que, si l'art. 972 du Code civil veut impérativement que lecture en soit donnée au testateur en présence des témoins, cela ne peut s'entendre que respectivement à ce qui est dicté par le testateur au notaire rapporteur de ce dernier acte, et que cette formalité de rigueur a été observée dans le testament du 29 septembre ».

Les héritiers Lehereau se sont pourvus en cassation contre cet arrêt, pour violation des art. 1035, 1338 et 1339 du Code civil.

Et, le 4 décembre 1811, ARRÊT de la section des requêtes, M. Henrion président, M. Vallée rapporteur, M. Mathias avocat, par lequel:

« LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. Giraud, avocat-général ;-Attendu qu'aucune disposition du Code civil ne défendant à un testateur de faire revivre un premier testament qu'il avait révoqué, et que, le testament du 29 septembre 1808, qui rend l'existence à l'une des dispositions de celui du 12 avril même année, étant revêtu des formalités prescrites par la loi, la violation alléguée se trouve dénuée de tout fondement; -REJETTE, etc. »

Nota. M. Toullier, Droit civil, tom. 5, pag. 586, se borné à rappeler l'arrêt de la Cour de cassation, et semble en adopter les motifs. Il est fâcheux que ce jurisconsulte, dont l'opinion fait

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souvent autorité, n'ait pas approfondi davantage une question de cette importance, et qui, malgré l'arrêt de la Cour su prême, fait encore la matière d'une sérieuse controverse.

COUR DE CASSATION.

Le marché fait par le commis voyageur d'une maison de com merce est-il censé passé dans le lieu où siége la maise pour laquelle il agit? (Rés. nég.) Cod. de proc. civ., article 420.

Le lieu du paiement est-il au domicile du débiteur, s'il n'y a pas de convention contraire? (Rés. aff.) Cod. civ., article 1247.

DAMERY, C. LÉGLISE.

Les sieurs Léglise, négocians à Marseille, expédient au sien Dambry, à Paris, une balle d'éponges : le marché avait été fat à Paris avec le commis voyageur des sieurs Léglise.

A la réception de la balle, le sieur Dambry, ne trouvant point les éponges telles qu'il les avait demandées, en prévient les evpéditeurs et leur mande qu'il les garde pour leur compte. Ceux-ci répondent que les marchandises sont de bonne qualité, qu'ils n'entendent pas les reprendre, et tirent sur le sieur Danbry pour le montant du prix. La traite ayant été refusée, ils fort assigner le sieur Dambry au tribunal de commerce de Marseille, pour se voir condamner au paiement.

De son côté, le sieur Dambry s'était adressé au tribunal d commerce de Paris pour faire visiter les éponges, qui ne furcat pas trouvées recevables. Il fit signifier le procès verbal aus sieur's Léglise, avec assignation au même tribunal, pour se voir condamner à reprendre les marchandises, et au remboursement des frais de transport. En même temps il fit proposer son décknatoire au tribunal de Marseille, qui le rejeta, et condamna Dambry au paiement de la traite. De leur côté, les sieurs Légase proposèrent aussi leur déclinatoire à Paris. Sur quoi, jugement qui renvoie les parties à se pourvoir en règlement de jugos, toutes choses demeurant en état.

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