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Evrard ayant adressé au ministre des travaux publics un mémoire pour obtenir l'annulation des arrêtés des 4 avril et 28 juillet 1839, et le sieur Brunin en ayant adressé un pour obtenir leur maintien, M. le ministre soumit cette affaire à l'avis du conseil des ponts et chaussées. Sur l'avis unanime de ce corps, conforme à celui de l'ingénieur de la province du Hainaut, portant que les arrêtés de 1839 devaient être rapportés, M. le ministre invita M. le gouver neur du Hainaut à soumettre le rapport du conseil des ponts et chaussées à la députation permanente, en l'engageant à examiner s'il ne conviendrait pas qu'elle revint sur sa décision du 4 avril 1839.

C'est à la suite de cette demande de M. le ministre des travaux publics, qu'intervint l'arrêté du 11 octobre 1850, par lequel la députation permanente déclara n'y avoir lieu à revenir sur sa décision.

Le 15 novembre 1850, le garde champêtre de la commune de Nimi - Maizières dressa un procès-verbal à charge du sieur Evrard, et duquel il résultait que les eaux de la rivière la Haine baignaient de 35 centimètres la jauge apposée à une des piles du pont.

Le sieur Evrard fut attrait, pour ce fait, devant le tribunal de simple police de Mons, comme prévenu d'avoir contrevenu aux arrélés de 1839; mais ce tribunal, par jugement du 2 janvier 1851, déclara l'action du ministère public prématurée, en ce que le sieur Evrard n'avait été notifié de la décision du 11 octobre 1850, que postérieurement au fait servant de base aux poursuites, et prononça son acquittement. Ce jugement était ainsi conçu :

<< Attendu que si le cité Evrard a pu, par le fait qu'il a posé le 13 novembre 1850, en tenant les eaux de son moulin à une jauge plus élevée que de droit (ainsi que paraît le supposer certaine décision du conseil provincial du Hainaut, du 11 octobre dernier), commettre une contravention prévue par les règlements sur les cours d'eau, toujours est-il qu'il est établi et acquis au procès que le sieur Evrard n'a eu connaissance officielle de cette décision que par missive de l'administration des ponts et chaussées, en date du 5 décembre 1850; que dès lors il faudrait, pour lui infliger grief susceptible d'une condamnation quelconque, donner à cette notification officielle dont est question un effet rétroactif que la loi répudie;

«Par ces motifs, le tribunal déclare prématurée sur ce point, et quant à présent,

l'action intentée à charge de Pierre Evrard. »

Sur l'appel de ce jugement, interjeté par le ministère public, le tribunal correctionnel de Mons statua, le 13 mai 1851, dans les termes suivants :

« Attendu que l'intimé a d'abord prétendu en degré d'appel que le tribunal de simple police qui a rendu le jugement à quo était incompétent pour connaître de la contravention qu'il aurait commise en laissant monter les eaux de son usine au-dessus de la jauge fixée par arrêté de la députation permanente du conseil provincial du Hainaut, en date du 4 avril 1839;

«Attendu que l'appréciation du mérite de cette prétention exceptionnelle dépend de celle que l'on doit faire des expressions que renferme le numéro 5 de l'article 1er de la loi du 1er mai 1849, en ne perdant pas de vue qu'en matière de juridiction répressive surtout, l'interprétation des dispositions législatives qui la déterminent sont de sévère et de stricte interprétation;

« Attendu que le numéro 5 de l'article 1er de cette loi porte: « Les tribunaux de simple police sont compétents pour connaître des « infractions aux règlements provinciaux ; »>

«Attendu que les règlements provinciaux dont il s'agit en cette disposition ne peuvent s'entendre que des règlements discutés et arrêtés dans les assemblées des conseils provinciaux ou par leurs députations permanentes, par suite de renvoi et de délégation de ces derniers sur des matières qui intéressent la province en général, tels que sur les cours d'eaux, la police de l'exploitation des mines et minerais, la voirie provinciale, etc., et non de ces actes administratifs émanant journalièrement des députations, et n'ayant d'autre objet que de mettre fin à des discussions entre des particuliers ou des communautés, tout en réglant entre eux pour l'avenir le mode d'exercice de leurs droits respectifs, et en déterminant même la pénalité à encourir par le contrevenant;

« Attendu, en effet, que dans leur acception naturelle les mots règlements provinciaux indiquent ceux dont l'objet est d'administration générale, ceux qui traitent des intérêts matériels et généraux d'une province, ceux enfin qui intéressent la généralité des habitants de celle-ci et auxquels cette généralité est soumise;

« Attendu que spécialement ce n'est pas d'une contravention au règlement provincial du 22 juillet 1843, ayant uniquement

pour objet d'assurer l'entretien en bon état des rivières et cours d'eau non navigables ni flottables du Hainaut, qu'il s'agit dans l'espèce, mais seulement d'une contravention à l'arrêté de la députation permanente du conseil de cette province, en date du 4 avril 1839, tout particulier aux sieurs Cordier, la veuve Legrand et Brunin Roger, dont il a réglé les droits sur la réclamation de ce dernier en fixant pour l'avenir la jauge des eaux de l'une de leurs usines qui se trouve en aval et en leur imposant des devoirs et des obligations réciproques;

«Attendu que ce qui démontre bien évidemment que cet arrêté est tout particulier aux intéressés Cordier, la veuve Legrand et Brunin Roger, et non un règlement provincial dans l'acception de ces mots, c'est que par son article 7 les frais de l'instruction à laquelle la réclamation du sieur Brunin a donné lieu, ainsi que ceux des opérations y relatives, ont été mis par parties égales à la charge desdits intéressés;

« Attendu que l'article 4 de ce même arrêté du 4 avril 1839 a positivement déterminé quelles seraient les peines encourues en cas d'infraction aux dispositions qu'il comporte en s'exprimant de cette manière: «Le point de repère ne pourra être dépassé « sous peine, par le propriétaire de l'usine « occupée par les sieurs Legrand et Cordier «ou ceux qui les représentent, d'être punis « de l'amende à infliger d'après la législa«tion existante; >>

« Attendu qu'en dehors du règlement provincial sur les cours d'eau du 22 juillet 1845, qui n'est ici d'aucune application, le ministère public n'a invoqué d'autre loi que celle du 6 mars 1818, dont l'article 3 autorise les états provinciaux à statuer pour la sanction de leurs ordonnances une peine d'amende ne pouvant toutefois dépasser 75 florins et un emprisonnement de sept jours au plus, séparément ou cumulativement;

« Attendu qu'en supposant que les pénalités de cet article soient applicables à l'espèce du procès, le maximum de chacune d'elles étant supérieure à celui que les tribunaux de simple police sont, d'après la loi commune de leur compétence, autorisés à prononcer, il en résulte que le tribunal de cette catégorie, au jugement duquel a été dévolue l'infraction imputée au sieur Evrard, n'était pas compétent pour en connaître;

<< Par ces motifs, déclare que le tribunal de simple police était incompétent pour connaître de l'infraction aux dispositions de l'arrêté de la députation du conseil provin

cial du Hainaut, en date du 4 avril 1859, relatif aux usines des sieurs Evrard et Brunin Roger, et annule par suite la citation et tout ce qui s'en est ensuivi. »

C'est contre ce jugement que le pourvoi était dirigé.

Ni le mémoire produit par le demandeur, ni l'acte du pourvoi n'indiquaient expressément les articles de loi auxquels le jugement attaqué aurait pu contrevenir, seulement l'acte du pourvoi énonçait qu'il était fondé sur ce que le tribunal, en réformant le jugement à quo, avait mal à propos déclaré que le tribunal de simple police était incompétent pour connaître de l'infraction aux dispositions de l'arrêté de la députation permanente, en date du 4 avril 1839.

L'exception d'incompétence opposée à l'action du ministère public, disait le demandeur, était fondée sur ce que les lois et règlements invoqués, à l'appui de cette action, ne prévoyaient pas le cas pour lequel le défendeur était cité devant le tribunal de simple police; c'est là confondre deux ordres d'idées distinctes. Car pour justifier l'exception d'incompétence, il fallait démontrer, non pas que le fait incriminé n'était pas prévu par une loi pénale, mais bien que la peine à laquelle la poursuite pouvait aboutir excédait les limites de la juridiction du juge de simple police.

L'unique question à résoudre, pour apprécier la compétence du juge de simple police, était celle de savoir s'il avait le droit de statuer sur le fait tel qu'il lui était soumis.

Or, si le fait incriminé ne peut donner lieu qu'à une peine que le juge de paix a le droit d'infliger, il est compétent pour en connaître, abstraction faite du point de savoir si le texte de la loi ou du règlement invoqué, par le ministère public, prévoit ou ne prévoit pas l'espèce dont il s'agit. Sans doute le juge conserve toute son indépendance pour admettre ou repousser l'application de la loi invoquée, mais dans l'une et l'autre hypothèses il statuera compétemment, par cela seul que le fait déféré à son tribunal ne constitue qu'une contravention ou un délit pour lequel l'article 2 de la loi du 1er mai 1849 a augmenté sa compétence.

Cependant le tribunal de Mons a déclaré que le tribunal de simple police était incompétent parce que, ni le règlement provincial du 22 juillet 1843, ni aucune autre loi ne punissaient le fait de l'usinier laissant monter les eaux au delà de la hauteur fixée par l'administration; c'est là dire, en d'autres termes, que la compétence est subordonnée à

l'applicabilité de la loi, tandis qu'elle doit être mesurée sur les conséquences légales que son application est de nature à entraîner.

Les tribunaux de répression doivent s'attacher avant tout, en recourant au libellé de la citation, à la nature du fait dénoncé, à la qualification qui lui est donnée, et à la peine qui peut en être le résultat. Tel est le système consacré par la Cour de cassation de Belgique dans ses arrêts des 8 janvier 1835 (Bulletin, 1835, p. 559); 26 février 1855 (ibid., p. 160); 29 mars 1838 (Bull., 1838, p. 369); 19 novembre 1844 (Bull., 1845, p. 633); 10 septembre 1847 (Bull., 1848, p. 657); 17 juillet 1848 (Bull., 1848, p. 602).

La question se réduit donc à rechercher si la citation signalait un fait de nature à entraîner une peine supérieure à celle que le tribunal de simple police peut appliquer, sans qu'on ait à se préoccuper s'il doit être fait droit ou non aux réquisitions du ministère public.

Or, l'exploit du 29 novembre 1850 assigne le sieur Evrard « à comparaître devant <«<le tribunal de simple police sous la pré«vention d'avoir, le 15 novembre 1850, à 8 heures du matin, retenu les eaux au

« dessus de la jauge apposée à l'une des piles « du pont situé sur la rivière la Haine, en << la commune de Nimi-Maisières, à l'endroit « où cette rivière traverse la route de Mons à Bruxelles, et ce contrairement à l'arrêté << de la députation permanente du conseil « provincial, en date du 4 août 1859, con<<firmé par décision du 25 juillet même « année. »

Le ministère public vit dans ce fait une contravention au règlement provincial du Hainaut, en date du 22 juillet 1843, articles 27 et 29, § 2, mis en rapport avec les arrêtés de 1859, el par suite et en vertu de l'article 1er, no 5 de la loi du 1er mai 1849, qui dispose que les juges de paix connaîtront des infractions aux règlements provinciaux, il saisit le tribunal de simple police; et en effet, le fait, tel qu'il est libellé, ne pouvait constituer un délit d'une autre nature qu'une contravention de la compétence du tribunal de simple police.

Le demandeur entrait ensuite dans des développements pour établir que le fait ne pouvait constituer soit le délit prévu par l'article 457 du Code pénal, soit ceux prévus par les articles 15 et 16 de la loi du 6 octobre 1791, puisqu'il n'y a pas eu d'inondation causée.

Ainsi donc, poursuivait-il, si le fait dé

PASIC., 1852. Ire PARTIE.

noncé constitue une infraction punissable, ce n'est que dans le règlement du 22 juillet 1843 que l'on peut trouver la peine qui doit lui être appliquée; cette peine est de simple police suivant l'article 27 dudit règlement, et par voie de conséquence, le juge de paix était compétent, soit à raison de la loi générale, articles 137 et 139 du Code d'instruction criminelle, soit à raison de la loi spéciale du 1er mai 1849, article 1, no 5.

Le tribunal correctionnel de Mons prétend qu'il ne s'agit pas d'une contravention au règlement provincial du 22 juillet 1843, dont l'unique objet est d'assurer l'entretien et le bon état des rivières et cours d'eau non navigables ni flottables, mais seulement d'une contravention à l'arrêté de la députation permanente du 4 avril 1839; par suite il décide que l'article 10, no 5 de la loi du 1er mai 1849, ne mentionnant que les contraventions aux règlements provinciaux, ne peut être étendu aux arrêtés des députations permanentes.

C'est là une erreur, car de la feuille d'audience du tribunal de simple police, et des réquisitions du ministère public y insérées, on voit qu'il s'agissait du règlement provincial mis en rapport avec l'arrêté de la députation. En effet, l'article 29, § 2 du règlement provincial de 1845 porte « que les « vannes pourront être levées à l'interven«<tion de l'autorité locale, lorsqu'il sera con<< staté que les eaux dépassent le clou de

jauge. Si l'autorité locale a ce droit, c'est parce que le fait de laisser monter les eaux au-dessus du point de repère est défendu, donc ce fait est une contravention; donc, aussi, l'article 27 du même règlement lui est applicable puisqu'il porte «< toutes con<< traventions aux présentes dispositions réglementaires seront constatées et poursui<< vies comme en matière de simple police.

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Il est d'ailleurs si peu vrai qu'il ne s'agit que d'une contravention à l'arrêté du 4 avril 1859, que l'article 4 de cet arrêté renvoie pour l'application de la peine à la législation existante. Ainsi on peut dire que si la contravention existe, elle résulte du règlement provincial; seulement l'arrêté du 4 avril 1839 fixe les limites de la contravention en indiquant le niveau de la jauge que le règlement provincial défend d'outre-passer.

Le jugement allègue encore que l'arrêté de la députation du 4 avril 1839 est tout particulier à la veuve Legrand, aux sieurs Cordier et Brunin, qu'il n'a d'autre but que de régler les droits des usiniers. Cela fut-il vrai, il n'en résulterait aucune conséquence

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favorable au défendeur, car d'une part il a été jugé, par la Cour de cassation, le 6 juin 1854 (Bull., 1834, p. 352), que la fixation de la hauteur de la retenue des eaux appartient à l'administration, bien que les contestations entre riverains sur l'usage des eaux soient du ressort des tribunaux civils, et d'autre part l'article 29, § 2 du règlement provincial ne distingue pas; de plus il résulte des motifs qui précèdent le dispositif de l'arrêté du 4 avril 1859, qu'abstraction faite de l'intérêt particulier des usiniers, cet arrêté a été pris dans un but d'utilité générale et pour empêcher les inondations des propriétés riveraines.

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Il y a là deux choses à remarquer, d'abord il s'agit d'une amende comminée par la loi et non par un règlement, ensuite il s'agit d'une loi alors en vigueur et non d'un règlement futur.

D'ailleurs le règlement de 1843 ne s'ap

Enfin, le jugement, raisonnant dans l'hy-plique pas à la propriété des usines établies

pothèse où il y aurait lieu d'appliquer l'article 3 de la loi du 6 mars 1818, infère du taux des pénalités établies par cet article que le juge de paix serait incompétent pour les appliquer.

Dès l'instant qu'on reconnaît que l'article 29, § 2 du règlement provincial de 1845 implique l'idée d'une contravention, il faut la punir d'après l'article 27 du même règlement; mais en supposant même qu'il fallut faire application de l'article 3 de la loi du 6 mars 1818, la conséquence qu'en déduit le jugement n'est pas fondée, car il ne s'agirait pas moins d'une contravention à un règlement provincial, punie par relation à une loi générale, ce qui rendrait applicable l'article 1er, no 5 de la loi du 1er mai 1849, d'autant plus que l'article 2 de cette loi autorise les juges de paix à infliger, dans les matières énumérées en l'art. 1 er, des amendes qui peuvent s'élever à 200 francs, et l'emprisonnement jusqu'à huit jours, tandis que l'article 3 de loi du 6 mars 1818 n'atteint pas ces limites.

Réponse. Le défendeur répondait le jugement attaqué contrevient-il à la loi?

Pour la solution de cette question, quatre points sont à examiner :

S 1er. Y a-t-il contravention possible à l'arrêté de la députation, en date du 4 avril 1839?

Cet arrêté est dépouillé de toute force exécutoire, l'appel du défendeur et dont le gouvernement est saisi a suspendu les effets de cet arrêté; la décision attaquée n'ayant plus d'existence ou au moins aucune exécution possible durant l'appel, on n'a pu y contrevenir.

§ 2. La prévention peut-elle se prévaloir du règlement provincial du 22 juillet 1843?

Le fait qu'on érige en contravention se

sur les cours d'eau non navigables ni flottables, mais seulement au curage et à l'entretien des cours d'eau de cette espèce.

Cela résulte non-seulement des motifs de l'arrêté royal contenant application dudit règlement, mais aussi de l'intitulé de tous les chapitres dudit règlement.

Son article 27 qui traite des contraventions ne mentionne pas celle de l'usinier qui a laissé dépasser le clou de jauge.

Dès lors le fait imputé au défendeur ne tombait pas sous l'application du règlement provincial de 1845.

§ 3. Le jugement attaqué contrevient-il au no 5 de l'article 10 de la loi du 1er mai 1849?

Une fois que le règlement de 1843 se trouve écarté, il est impossible qu'on ait pu contrevenir au no 3 de l'article 10 de la loi du 1er mai 1849 qui porte « que les juges de << paix connaîtront des contraventions aux « règlements provinciaux. >>

Cet article est sans application du moment que le règlement provincial est luimême sans application à l'espèce; d'ailleurs la prévention ne prétend pas que le défendeur y a contrevenu, elle lui reproche seulement de n'avoir pas exécuté une décision de la députation et dont l'exécution était suspendue par un appel.

Cette décision n'était pas d'ordre public, elle ne concernait que des intérêts privés; le défendeur n'aurait même pu se soumettre à cette décision et l'exécuter sans encourir la déchéance de son appel et sans s'exposer à des dommages-intérêts envers d'autres usiniers qui, s'appuyant sur des titres de possession et de propriété, lui ont fait notifier la défense d'abaisser le niveau actuel de l'eau.

Les tribunaux de police n'ont pas à intervenir dans de pareils débats, et les questions

de possession et de propriété ne sont pas du ressort des tribunaux de répression.

4. A quelle juridiction appartient le délit mentionné à l'article 29 du règlement provincial de 1843?

L'auteur du pourvoi, reprochant au défendeur d'avoir contrevenu aux articles 28 et 29 du règlement provincial de 1843, celuici faisait observer que l'article 28 n'attribue compétence aux bourgmestres, aux officiers des ponts et chaussées et aux officiers de police que pour tout ce qui concerne le curage et l'entretien des rivières non navigables ni flottables.

Passant à l'article 29 du même règlement, il établissait que le délit prévu par l'art. 457 du Code pénal dont parle ledit article 29 n'avait pu être commis par lui, puisqu'il n'avait occasionné aucune inondation et que d'ailleurs la connaissance de ce délit n'appartiendrait qu'aux tribunaux correctionnels.

M. le premier avocat général Dewandre a conclu au rejet du pourvoi. Il a dit :

Nous croyons que si l'on écarte du débat les faits et les points de droit qui ne font que l'embarrasser inutilement, parce que leur examen est sans intérêt pour la décision du litige, la discussion se ramène à des termes fort simples et ne soulève aucune difficulté sérieuse.

La police réglementaire des cours d'eau non navigables ni flottables appartient aux conseils provinciaux.

Le soin de déterminer la hauteur des clous de jauge ou de repère sur ces cours d'eaux rentre dans les attributions spéciales des députations de ces conseils.

Ces deux points réglés par la loi ne sont ni contestables ni contestés, et ne réclament par conséquent aucune démonstration.

En fait, dans l'espèce, la députation du conseil provincial du Hainaut, par une première décision du 14 octobre 1833, a fixé à 1 mètre 95 centimètres la hauteur du clou de jauge de l'usine du défendeur, et, le 12 avril 1834, ce clou a été posé par les soins de l'administration sous la réserve (inutile d'ailleurs) de pouvoir le baisser ultérieurement si la nécessité en était reconnue.

Plus tard des réclamations se sont élevées de la part des usiniers supérieurs, et la mème députation, par ordonnance du 4 avril 1839, a prescrit l'abaissement du niveau de la retenue des eaux du défendeur à 1 mètre 50 centimètres, par conséquent à 45 centimètres en dessous du niveau primitivement fixé.

La députation ayant ajouté à son arrêté que les contraventions qui pourraient y être commises seraient punies d'après les dispositions législatives existantes, il ne peut être douteux que le fait de retenir les eaux audessus de la jauge fixée constitue un fait de contravention à cette ordonnance de la députation, autrement la détermination du niveau ne serait plus qu'une vaine formalité.

Mais pour qu'un fait entraîne des conséquences pénales il ne suffit pas qu'il soit érigé en contravention, il faut de plus qu'une sanction y soit attachée.

La seule question que nous ayons à examiner est donc celle-ci :

Le fait reconnu constant à charge du défendeur d'avoir, le 13 novembre 1850, retenu les eaux de son moulin au-dessus du clou de jauge fixé en exécution de la résolution de la députation du conseil provincial du Hainaut, du 4 avril 1839, tombe-t-il sous une disposition pénale? à qui appartient l'application de cette disposition pénale?

Spécialement, le jugement attaqué, en fondant l'acquittement du prévenu Evrard sur le motif qu'aucune disposition pénale n'atteignant le fait mis à sa charge, les arrêtés de la députation ne constituant que des actes purement administratifs d'intérêt privé dont le tribunal de police n'avait pas à connaître, contrevient-il à une disposition légale, et notamment à l'article 29, § 2, du règlement provincial du Hainaut sur les rivières et cours d'eau non navi

gables ni flottables du 22 juillet 1843, seule disposition qui soit invoquée dans le pourvoi du ministère public demandeur?

Subsidiairement, la loi du 6 mars 1818 pouvait-elle être invoquée dans l'espèce?

Aux termes de l'article 85 de la loi provinciale du 30 avril 1836, les conseils peuvent faire des règlements d'administration intérieure et des ordonnances de police, et ils sont autorisés à établir pour leur exécution des peines qui n'excèdent pas huit jours d'emprisonnement et deux cents francs d'a

mende.

Nous ne rechercherons pas si, dans l'espèce, la députation du Hainaut avait reçu une délégation du conseil pour faire un règlement, cet examen devient sans objet dans la cause actuelle, puisque ce conseil a fait lui-même un règlement pour les cours d'eau, et que ce règlement, du 22 juillet 1843, atteint nécessairement le fait reproché au défendeur, puisque ce fait est du 15

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