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d'éviter de se mettre en opposition formelle au texte et à l'esprit des lois spéciales sur la matière ;

«Que partant, c'est à tort que les prévenus ont fait la prisée des meubles décrits dans l'inventaire dont il s'agit, et que dès lors ce fait tombe sous l'application des lois précitées auxquelles ils ont contrevenu;

«Par ces motifs, etc. »>

Cette sentence ayant été confirmée par la Cour d'appel de Gand, Lebègue el Dewilde se sont pourvus en cassation.

MM. Tuncq et Goemarre, conseils des demandeurs, ont développé, à l'audience, les propositions suivantes :

Les anciens édits de France, disaient-ils, ont toujours distingué la prisée de l'inventaire avec la prisée des ventes après inventaire.

Preuves les art. 1, 3, 4 de l'édit de 1536; l'édit de 1691 et l'acte de notoriété du Châtelet de 1703.

Les rois de France ont fait la même dislinction quant à l'étendue des droits et des prérogatives des priseurs, entre les officiers créés pour Paris et les officiers créés pour le reste de la France (édit de 1696; acte de notoriété de 1703 et édit de 1771).

L'édit de 1691 et l'acte de notoriété, spéciaux pour Paris, ses faubourgs et sa banlieue, attribuent aux huissiers-priseurs de Paris les prisées de l'inventaire et les prisées de ventes.

Les édits de 1696 et de 1771, applicables au reste de la France, n'attribuent aux jurés. priseurs vendeurs que les prisées de ventes.

Les édits sont de droit étroit: 1o en malière de collation d'offices; 2° en matière pénale (Recueil de questions notables, no 64).

Dans l'espèce, où il s'agit d'offices et de pénalités, il y a double motif de restreindre sévèrement l'édit de 1771 dans ses termes, sans aucune extension.

Aucun auteur n'enseigne l'interprétation extensive que la Cour de Gand a donnée à l'édit de 1771; ni les auteurs anciens, ni la jurisprudence ne décident que les édits de 1696 et de 1771 s'appliquent à la prisée de l'inventaire.

L'édit de 1771, spécial pour la vente des meubles, était donc sans application.

D'autre part, les huissiers-priseurs de Paris, créés par l'édit de 1691 et confirmés par l'acte de notoriété de 1703, et les jurés-priseurs vendeurs du reste de la France, créés par les édits de 1696 et 1771, ont été supPASIC., 1852. Ire PARTIE,

primés par les décrets du 21 juillet 1790 et 17 septembre 1793 el par arrêtés du 12 fructidor an IV et 27 nivôse an v. Le Directoire a seulement remis en vigueur l'édit de 1771 dont il confère les attributions aux notaires, greffiers et huissiers, tandis qu'aucun texte de loi n'a rétabli les édits de 1556 et 1791, ni l'acte de notoriété de 1705, lesquels sont étrangers à l'édit de 1771.

L'arrêt viole donc les décrets des 22 juill. 1790 et 17 septembre 1793, et fait une fausse application des arrêtés des 12 fructidor an IV et 17 nivôse an v, en faisant revivre les édits de 1556 et 1691 et l'acte de notoriété du Châtelet de 1705.

L'arrêt attaqué ne se justifierait que si l'acte de notoriété de 1703 ou l'édit de 1691 avait été remis en vigueur postérieurement au décret du 17 septembre 1793, et que si de plus, l'acte de notoriété de 1703 et l'édit de 1691, qui n'était applicable qu'à Paris, ses faubourgs et sa banlieue, s'étendaient à tout le territoire de la France, avec la pénalité comminée par l'édit de 1771, ce qui n'est pas.

Jamais, du reste, l'édit de février 1771 n'a été étendu à la prisée, de l'inventaire, ni par les lettres patentes du 7 juillet 1771, ni par les arrêts du conseil d'Etat, des 21 août 1775 et 13 novembre 1778, ni par les arrêtés du Directoire du 12 fructidor an iv et du 27 nivôse an v, ni par la loi du 14 juin 1813 concernant l'organisation du service des huissiers, ni par aucun acte législatif subsequent.

L'édit de 1771 ne pouvait se rapporter aux opérations de l'inventaire puisque cette matière était réglée par des édits spéciaux, notamment par l'édit de mars 1702, instituant des commissaires aux inventaires pour toute la France, moins Paris; or il importe de remarquer 1o qu'à cette époque, l'édit de 1796 était en vigueur pour toute la France, moins Paris, et que si cet édit se fùt appliqué à l'inventaire, celui de 1772 n'eût été qu'un acte de spoliation fait au détriment des juréspriseurs vendeurs, spoliation dont on ne trouve aucune trace dans cet édit, et 2° que l'édit de 1771 n'est que la reproduction littérale, quant à la question du procès, de l'édit de 1796.

Enfin, ce n'est qu'en restreignant l'édit de 1771 dans ses véritables limites, c'est-àdire dans son texte, que l'on s'explique les articles 453 du Code civil, 935 et 943 du Code de procédure civile, et que l'on fait disparaître l'odieux dont la loi du 21 mars 1819 sur les patentes se trouve entachée

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dans le système contraire à celui du pour

voi.

Aussi est-ce dans ce sens que l'édit a été, jusqu'à ce jour, compris par les praticiens et par les auteurs.

Les demandeurs concluaient en conséquence à la cassation de l'arrêt dénoncé : pour fausse application de l'arrêté du Directoire du 27 nivôse an v, qui publie seulement les articles 5 et 9 de l'édit de 1771; les lettres patentes du 16 juillet 1771; l'arrêté du conseil d'Etat du 21 août 1775 et l'arrêt du conseil du 13 novembre 1778; fausse application des articles 1 et 2 de l'arrêté du Directoire exécutif du 12 fructidor an iv et fausse application des art. 5 et 9 de l'édit de 1771.

Ce système n'a pas été admis par le ministère public. M. le premier avocat général Dewandre, qui portait la parole dans cette affaire, a dit :

Malgré les doutes que doivent nécessairement avoir jeté dans vos esprits les profondes et consciencieuses plaidoiries que vous avez entendues, nous estimons cependant que l'arrêt attaqué fait une juste application des textes de lois qui lui servent de base, ainsi qu'une saine appréciation des dispositions où ces textes puisent leur origine et leur véritable portée. Nous croyons qu'en présence des motifs si clairement, si logiquement, suivant nous, déduits tant par le premier juge que par la Cour d'appel de Gand, et en présence surtout de votre arrêt du 2 mai 1839, qui juge bien réellement la question dont il s'agit aujourd'hui, puisqu'alors comme maintenant, il s'agissait de

l'intervention des sieurs Crickx et Bazin dans des prisées et estimation de meubles dans différents inventaires de succession; nous croyons, disons-nous, qu'en présence des motifs de l'arrêt attaqué, qui se justifient par la loi, et de votre propre jurisprudence, nous n'aurons que peu de considérations à vous soumettre pour établir nos conclusions. Non pas que nous ne reconnaissions que la manière lumineuse avec laquelle les honorables conseils des demandeurs ont traité la question ne la rende délicate, mais parce que nous pensons qu'elle doit être prise à un autre point de vue.

Les lois des 21-26 juillet 1790 et 17 septembre 1793 ont appelé les greffiers, notaires et huissiers aux fonctions qu'exerçaient précédemment les jurés-priseurs de meubles, sans en définir les attributions spéciales. Pour connaître ces attributions nous devons donc nécessairement les re

chercher dans les dispositions qui ont successivement régi la matière.

Les demandeurs l'ont reconnu, et procédant de la même manière, ils ont cru devoir partir de l'édit de 1771, en s'arrêtant à la discussion de quelques dispositions isolées des mesures législatives qui lui ont succédé. Nous croyons, au contraire, que le seul moyen de se rendre un compte exact de la question que soulève le pourvoi, est de se reporter au point où s'est placé, en 1556, le roi Henri II lorsqu'il a publié son édit de février, édit dont tous les autres, de même que les lois et décrets postérieurs, n'ont été que la reproduction sous des formes plus ou moins variées; et que, pour saisir la véritable portée de ces dispositions, il faut en embrasser l'ensemble et non s'attacher aux détails.

Avant de nous occuper de l'édit de 1771 et des actes qui lui ont été postérieurs, commençons donc par dessiner nettement le terrain sur lequel doit s'établir le débat.

En 1536, le roi Henri II, frappé des abus et des fraudes qui se pratiquaient journellement par l'intervention, dans les prisées, aux inventaires et aux ventes de meubles et

objets mobiliers d'une foule de personnes sans aucun caractère public et ne présentant aucune garantie pour la société, institua (nous prions la Cour de noter les expressions, parce qu'elle comprendra immédiatement toute l'importance qu'elles empruntent dans la discussion), le roi Henri II, disons-nous, au mois de février 1556, institua des priseurs vendeurs de meubles, qu'il investit, à l'exclusion de tous autres, de faire, en quelque manière que ce fût, les prisées et estimations de tous biens meubles, soit (porte l'édit) dans les successions, soit dans les saisies, soit enfin du consentement des parties.

L'édit de 1556 formant le pivot sur lequel roule en définitive tout le débat, il est indispensable que nous placions sous les yeux de la Cour son préambule et ses quatre premiers articles. Après cela, les déductions que nous avons à en tirer viendront se grouper tout naturellement pour former notre démonstration.

Ouvrons donc l'édit de 1556.

Voilà comment, en 1556, s'exprimait le roi Henri II. En présence des motifs et des termes généraux de cet acte du pouvoir souverain, il n'est point de doute possible; les priseurs vendeurs de meubles recevaient, sous cette qualification, le droit ex

clusif de faire, privativement à toutes autres personnes, non pas seulement les prisées aur rentes; mais incontestablement aussi, les prisées aux inventaires, les prisées, enfin, en quelque manière que ce put être, qu'il y eût des mineurs ou que les prisées se fissent entre majeurs seulement. Or, après cela, il n'est pas moyen de démontrer plus clairement, plus méthodiquement que ne l'ont fait le tribunal de Termonde d'abord, et la Cour d'appel de Gand ensuite, que les priseurs vendeurs de meubles, créés par l'édit de février 1556, n'ont subi, quant à l'esprit et au but de leur institution, aucune restriction ou modification quelconque par les décrets postérieurs.

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Ce serait, fatiguer inutilement votre altention que de reprendre, pour les discuter de nouveau un à un, les articles des diverses dispositions sur la matière qui se sont succédées de 1556 jusqu'en 1813. Le pourvoi tout entier, en effet, se résume en un seul raisonnement. On vous dit : « L'édit de « création des priseurs vendeurs de meubles de 1556 distinguait entre les prisées à « l'inventaire et les prisées aux ventes; ces « deux espèces de prisées formaient des << attributions distinctes réunies, il est vrai, « dans les mêmes mains sous cet édit de « 1556; mais plus tard la position a changé, « les jurés-priseurs vendeurs de meubles, supprimés par l'édit du mois de février 1771 et reconstitués sur de nouvelles bases par celui du mois d'août de la même année, de même que par l'avis du conseil « d'Etat du 13 novembre 1778, qui inflige « la peine de mille livres d'amende, contre << les contrevenants, n'ont plus été appelés qu'à faire les prisées aux ventes; d'où la

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conséquence, suivant les demandeurs, que

"hors les prisées aux ventes, il est libre « à toutes personnes d'intervenir dans les « estimations de meubles après décès ou « autrement. »

Cette déduction du pourvoi repose sur

une erreur.

Encore une fois, pour apprécier convenablement, soit l'édit de février 1771, soit l'avis du conseil d'Etat du 13 novembre 1778, il ne faut pas les prendre isolément; pour pouvoir en constater la portée, il faut, au contraire, nécessairement remonter à leur source. Or, nous venons de voir que, sous le titre de priseurs vendeurs de biens meubles, l'édit de février 1556 avait institué des officiers publics seuls aptes à faire les prisées de meubles en général.

en ce sens que les huissiers et sergents royaux en furent investis; mais cet édit de juillet 1690, qui vise celui de février 1556, ne dit pas un seul mot d'une abrogation quelconque d'une partie des prérogatives. des priseurs vendeurs de meubles créés originairement en cette année 1556. La conséquence à tirer de l'édit de juillet 1690, parce que c'est la seule logique, est donc que les huissiers et sergents du royaume, devenus priseurs vendeurs de meubles, ont succédé à la plénitude des attributions conférées, dans un but d'intérêt public, aux priseurs vendeurs de meubles de 1556.

Le 26 février 1691, nouvel édit qui, se fondant sur ce que les huissiers et sergents autorisés à faire les prisées et ventes de meubles étant trop nombreux pour que les bénéfices qu'ils retiraient de leurs fonctions présentassent les garanties nécessaires à la société, les réduit à 120.

Ce document vient-il davantage modifier les attributions primitives des priseurs vendeurs de meubles? Non, aucunement.Comme celui de juillet 1690, il fait, au contraire, appel à celui de 1556, à celui de 1536 dans sa plénitude.

Jusque là, les mesures prises à l'égard des officiers publics dont nous nous occupons, mesures dictées évidemment par le même esprit qui avait suggéré l'édit originaire; jusque-là, disons nous, il est sensible que rien ne pourrait amener à conclure que les auteurs des édits de juillet 1690 et février 1691 eussent entendu ouvrir de nouveau la porte aux abus si énergiquement énumérés dans le préambule de l'édit de 1556, et qu'il faut en déduire, au contraire, la conséquence que sous la même qualification de priseurs vendeurs, ils ont entendu placer les mêmes attributions, car les mêmes mots employés dans la même occasion ne peuvent pas avoir des significations différentes, à moins de la manifestation formelle d'une intention contraire.

En octobre 1696, les choses ont encore veau change; mais ont-elles changé dans le but de livrer à la libre concurrence les prisées aux inventaires et de restreindre les fonctions des priseurs vendeurs de meubles aux seules prisées de ventes? Encore une fois, ici, non. En effet, pour des motifs qu'il est inutile de reproduire parce qu'ils sont étrangers au débat actuel, le roi Louis XIV, en octobre 1696, a de nouveau séparé les fonctions des huissiers et sergents royaux de celles des huissiers - priseurs vendeurs de En 1690, ces attributions furent déplacées meubles, et le corps de ces derniers a été

réorganisé sous la dénomination de jurés priseurs vendeurs de meubles, avec défense à tous huissiers et sergents royaux de s'immiscer dans ces prisées, sous peine de 500 livres d'amende.

Rien donc encore, en 1696, n'a été changé aux attributions primitives de ces agents. Comme ceux de 1556, ils ont reçu le titre de priseurs vendeurs et, à moins d'une disposition formelle dans l'édit d'octobre 1696, il faut bien admettre qu'à la même qualité ont été dévolues les mêmes prérogatives. Or l'édit de 1696, pas plus que celui de 1690, n'apporte aucune modification quelconque à la disposition de l'art. 1er de l'édit de 1556, aux termes duquel les priseurs vendeurs étaient seuls, et à l'exclusion de tous autres, autorisés à faire les prisées, soit à l'inventaire, soit après, et c'est en vain que les demandeurs, par cela que l'édit de 1696 parle des prisées de ventes spécialement, prétendent qu'il aurait entendu abroger cette autre branche essentiellement connexe de leurs attributions, à savoir les prisées aux inventaires indispensables pour les partages à l'amiable des successions; car, comme le dit avec raison l'arrêt attaqué, les abrogations de lois et surtout l'abrogation de dispositions d'ordre public ne se présument pas, et doivent résulter d'un texte formel; et, de ce que, en matière pénale comme en matière de collation d'offices, les édits sont de droit strict, il ne s'ensuit pas qu'il soit permis d'en restreindre arbitrairement la portée naturelle et légale.

Nous oubliions de vous parler de deux actes, l'un de février 1691 et l'autre de 1703, importants aux yeux des demandeurs, parce que dans l'édit du 26 février 1691 et dans l'acte de notoriété de 1703, il est parlé séparément des prisées à l'inventaire et des prisées de ventes, d'où, suivant le pourvoi, il faut conclure que quand, postérieurement à 1556, le législateur a entendu prescrire les prisées à l'inventaire autrement que par des officiers publics, il l'a dit expressément.

Nous croyons, au contraire, que l'édit du 26 février 1691 et l'acte de notoriété du Châtelet de Paris de 1703, examinés avec attention, viennent nous fournir un argument nouveau en faveur de la doctrine consacrée par l'arrêt attaqué.

En effet, que voyons-nous dans les deux documents dont il s'agit? Nous y voyons l'attribution aux huissiers-priseurs de Paris, ses faubourgs et sa banlieue, des prisées de l'inventaire et des prisées de ventes.

C'est donc que jusqu'en 1705 la prisée aux

inventaires n'était pas dans le domaine du premier venu; c'est que le principe posė dans l'édit de 1556 subsistait encore; c'est enfin une preuve nouvelle que les mots priseurs vendeurs de meubles de l'édit de 1696 avaient encore la même étendue et la même portée que les mêmes mots employés primitivement dans l'édit de 1556. Il n'y a donc aucun parti à tirer pour les demandeurs, soit de l'édit de 1691, soit de l'acte de notoriété de 1703.

Quant aux édits de mars 1702 et septembre 1714, le premier, créant des officiers spéciaux aux inventaires, le second, restituant ce droit à ceux qui en étaient investis précédemment, il serait sans objet de nous y arrêter, car de ce que ces officiers avaient la mission spéciale de faire les inventaires, il ne suit aucunement qu'on leur eût retiré celle de faire les prisées dans ces inventaires, attribution bien plus importante que celle de dresser l'inventaire et qui formait le principe fondamental de l'édit de 1556.

Nous arrivons maintenant aux édits de 1771 dont le pourvoi prétend qu'il a été fait une fausse application à la cause actuelle, en ce que la Cour de Gand déclare « Que ces «édits ne fournissent aucun élément d'où «l'on puisse inférer qu'ils auraient entendu « innover ou restreindre les attributions des priseurs vendeurs, telles qu'elles avaient « été établies en 1536, 1576 et oct. 1696. »

L'édit du mois d'août 1771 ne consacre aucunement la restriction que les demandeurs veulent y trouver; comme le dit avec raison la Cour d'appel de Gand, les art. 5 et 9 de cet édit sont conçus en termes géné raux, et s'ils règlent spécialement ce qui concerne les prisées suivies de ventes, au moins ne formulent-ils aucune restriction à l'égard des prisées aux inventaires. Nous voyons, au contraire, que sous le titre d'huissiers ou sergents royaux, l'édit réserve à ces agents les offices de jurés - priseurs vendeurs de meubles, créés, porte cet édit, par les édits de 1556, 1576, 1696 et autres. C'est donc encore une fois à l'institution telle qu'elle avait eu lieu originairement que l'auteur de l'édit de 1771 se réfère, c'est toujours à l'édit de 1556 qu'il renvoie pour fixer le sens des dispositions nouvelles. Cette vérité est si frappante, qu'il devient oiseux d'avoir à le repéter sans cesse; et pourtant les lettres patentes de juillet 1771 ne sont que la confirmation de l'édit de février précédent.

Quand donc ensuite l'avis du conseil d'Etat du 13 novembre 1778 est venu, sous

peine de mille livres d'amende, faire encore une fois, en termes généraux, défense à toutes personnes autres que les greffiers et huissiers, de faire les prisées et ventes de biens meubles, il est manifeste que c'est toujours dans le cadre, dans l'ordre des attributions, telles qu'elles avaient été primitivement fixées; il est manifeste enfin que si des variations se sont successivement produites, soit quant aux personnes spécialement autorisées à faire les prisées et les ventes de meubles, soit quant aux termes employés pour désigner les officiers appelés à faire les prisées et les ventes; au moins doit-il rester constant que le principe fondamental de l'édit de 1556 a passé, dans sa plenitude, dans tous les actes qui se sont succédé jusqu'en 1778, et la raison, c'est que, d'une part, le motif d'utilité publique est resté le même, et de l'autre, que si, en général, les documents dont se prévalent les demandeurs indiquent spécialement les prisées aux ventes, il n'en est pas moins vrai aussi qu'aucun, ni dans ses motifs, ni dans ses dispositions, ne contient le moindre elément qui annonce la pensée de l'abrogation d'une partie quelconque des attributions qui avaient été primitivement conférées aux officiers institués en 1536.

Jusqu'en 1778 la prisée aux inventaires est donc restée confiée aux officiers, autorisés par l'édit de 1556 à faire les prisées aux ventes, puisque, si dans un seul cas les prisées aux inventaires ont été momentanément distraites des prisées aux ventes pour faire, de ces deux espèces de prisées, des offices distincts, encore ces offices sont-ils restés l'un et l'autre confiés à des agents publics et que jamais le principe de l'édit de 1556 n'a été rapporté.

Les lois des 26 juillet 1790 et 17 octobre 1793, et les arrêtés du Directoire exécutif des 12 fructidor an Iv et 27 nivôse an v, ont-ils changé cet état de choses?

Vous connaissez ces diverses dispositions. Le décret du 21 juillet 1790, en supprimant les offices de jurés-priseurs, a ordonné que le droit de 4 pour cent qui était attribué à ces jurés - priseurs serait à l'avenir perçu au profit de l'Etat par les notaires, greffiers et sergents qu'il autorise à cette fin.

La conséquence unique à tirer du décret de 1790, c'est que les notaires, les greffiers et les huissiers ont, purement et simplement, été subrogés aux droits et aux attributions des officiers qu'ils remplaçaient, et voilà tout; si ce décret parle de droit de 4 pour cent sur le prix de vente à verser aux caisses de

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Mais cette loi vient encore plus directement confirmer la doctrine que proclame l'arrêt attaqué!

Nous y lisons: Article 1er. « Les notaires, greffiers et huissiers sont autorisés à faire les prisées et ventes de meubles dans toute l'étendue de la république. »

Art. 2. En conséquence les huissierspriseurs de Paris et les huissiers ci-devant de l'hôtel cesseront les fonctions attribuées à leurs offices... »

On le voit donc, la loi du 17 septembre 1793, comme celle du 21 juillet 1790, est de nouveau conçue en termes généraux; ce sont les attributions des anciens huissierspriseurs qui passent aux nouveaux; el vainement les demandeurs veulent-ils encore ici argumenter de ce que la loi, ne parlant que des prisées et ventes, n'entendrait indiquer que l'estimation des meubles ou objets mobiliers destinés à être mis en vente publique; car, comme le disait avec raison le premier juge, la généralité du texte prisées et ventes, comme l'esprit de la loi, résistent à cette interprétation restrictive.

La loi du 17 septembre 1793, bien que s'occupant encore dans ses articles spécialement des prisées aux ventes, ne vient donc pas plus en aide au pourvoi que la loi du 21 juillet 1790; pas plus que tous les édits et décrets qui les ont précédés et qui tous leur servent d'explication, puisque cette loi, pas plus que les décrets antérieurs, ne contient aucune abrogation des attributions originaires des jurés-priseurs vendeurs de meubles.

Il ne nous reste plus que quelques mots à vous dire des arrêtés du Directoire exécutif des 12 fructidor an IV el 27 nivòse an v. Ces dispositions sont si claires et si précises, qu'elles nous dispenseront de tout commenlaire et qu'il nous suffira d'en remettre le texte sous vos yeux.

L'arrêté du 12 fructidor an iv porte:

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