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prés du demandeur, spécialement dès le 24 juin, que les premières herbes fussent ou non enlevées.

Cette décision est souveraine, mais s'il fallait la justifier, il suffirait de citer deux arrêts de la Cour de cassation de France, des 7 mai 1838 et 22 novembre 1841 (Sirey, 1838, 1, 790, et 1842, 1, 19), qui décident qu'un droit sur certaines terres d'une localité, s'exerçant à jour fixe, plus étendu que la vaine pâture coutumière, et absorbant au préjudice du propriétaire de véritables fruits, ne ressemble en rien au droit général dont s'occupe la loi de 1791. On cite encore Merlin, Répert., vo Vaine pâture, § 5; Henrion de Pansey, Traité des justices de paix, chap. 43, § 5, et Proudhon, Traité de l'usufruit, no 3657 et suivants.

Le demandeur soutient que, d'après les anciennes coutumes, auxquelles la loi de 1791 s'est référée, on réputait vaine pâture tout pacage exercé après l'enlèvement de la première herbe, alors même que le fonds servant aurait produit une seconde récolte, et que la Cour de Liége s'est trompée en supposant que la vaine pâture n'existe qu'à titre précaire et ne s'exerce qu'à une époque avancée de l'année et sur des produits de minime valeur non susceptibles de récolte et de conservation. La Cour aurait commis cette erreur qu'elle n'aurait pu, à défaut de définition légale de la vaine pâture, contrevenir à la loi; mais cette erreur n'existe pas, car la plupart des coutumes françaises et belges protégeaient contre le vain pâturage tout terrain susceptible de produire des récoltes. On cite Sohet, liv. II, tit. LXVII, no 10 et 11, et de nombreux auteurs qui ont écrit sur diverses coutumes françaises.

pas

Le ministère public a conclu au rejet du pourvoi, sans admettre que l'on' pût s'appayer sur ce que la loi de 1791 n'aurait défini la vaine pâture. Il a dit, sur le moyen de cassation, dans sa partie relative au caractère de la vaine pâture:

Le pourvoi roule sur une proposition unique, dont on peut admettre le mérite et le fondement sans qu'il faille en conclure que l'arrêt a été mal rendu.

D'après le demandeur, il résulte de la combinaison des divers articles cités de la loi du 28 septembre 1791 et du rapprochement de ces textes avec l'édit de 1771, que le droit aux secondes herbes a été considéré comme droit de vaine pâture, et que c'est parce que ce droit a été ainsi envisagé que le propriétaire du fonds servant est admis à libérer son fonds de ce droit par la clôture.

Nous croyons avec le demandeur que dans l'esprit de la loi de 1791 le droit aux secondes herbes est un droit dit de vaine

pâture; et nous l'induisons de ce que ce droit est anéanti par la clôture. En effet, pour que la volonté du propriétaire manifestée par la clôture, devenant exclusive d'une familiarité présumée jusque-là, suffise pour éteindre le droit de la commune, on doit admettre que le droit qui s'anéantit ainsi ne peut être considéré que comme assis uniquement sur la familiarité et la simple tolérance, c'est-à-dire comme ne constituant qu'un vain pâturage.

Admettons encore, d'après l'autorité de Heurtaut-Lamerville, dans son rapport sur la loi de 1791, que c'est par un abus de la chose que la vaine pâture a été étendue aux secondes herbes.

L'abus reconnu, il fallait le faire cesser. Et comme dans l'origine du droit du vain pâturage ce droit ne pouvait s'exercer sur les lieux ensemencés, sur les lieux clos ou entourés de fossés (1), il fallut bien réserver au propriétaire du fonds servant la faculté de clore le fonds pour mettre obstacle au droit de vain pâturage. Voilà l'explication. toute naturelle des dispositions spéciales de l'édit de 1771 et de la loi de 1791.

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Mais s'agit-il d'un pur droit aux secondes herbes?

Non évidemment. Le fait qui a donné naissance au litige consiste dans l'exercice du pâturage, non sur la seconde, mais sur la première herbe, et ce droit a été consacré au profit de la commune par l'arrêt attaqué.

Il s'agit donc d'un droit de pâturage qui pouvait, accidentellement il est vrai, mais enfin qui pouvait être droit de vive pâture, ce qui arrivait quand, s'exerçant le 24 juin de chaque année, la première herbe n'avait pas été enlevée à cette époque.

Nous comprenons bien qu'une date ainsi fixée, la commune ait le droit de contraindre à l'enlèvement de la première herbe, qu'elle puisse réclamer une indemnité par chaque jour de retard, mais ce que nous ne comprenons pas, c'est que la commune, dé

(1) Voy. coutume d'Orléans, article 145,

pouillant le fonds de la première herbe, prétende n'exercer qu'un droit de vaine pâture! Cela est incompatible avec toutes les définitions du vain pâturage (Proudhon, Usuf., no 3656; Merlin, Rép., vo Vaine pâture, in-8°, p. 455; Guyot, Rép., vo Regain).

Mais, dit ici le demandeur, qu'importe au procès que le droit pût s'exercer à jour fixe; d'après l'article 11 de la loi de 1791, je pouvais éteindre ce droit par la clôture, et s'il en est ainsi, c'est qu'il ne s'agit toujours que d'un droit de vaine pâture!

Ici nous pensons que l'induction est forcée, qu'elle repose sur une fausse entente de la loi de 1791.

Recherchons le motif de la mention du jour fixe dans l'article 11 de cette loi.

Comme nous l'avons dit, il y avait certaines coutumes permissives du droit de vaine pâture. La coutume d'Orléans était de ce nombre, elle portait à son article 147:

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<< Tous prez, soient à une herbe ou deux, « sont deffendus depuis le jour et feste notre "Dame en mars, jusques à ce qu'ils soient « fauchez, et l'herbe d'iceux enlevée ou le « jour de Saint-Remi passé (1er octobre). » C'est aux coutumes de cette espèce que fait allusion l'article 11 de la loi de 1791.

Écoutons maintenant l'explication que nous donne Lalande de ce texte de la coutume d'Orléans :

« 6. Soit à une herbe ou deux. Il y a des prez qui produisent deux fois dans l'année, et dont la dernière coupe qui se fait en automne est appelée regain; il y a des coutu mes qui les appellent revivre (coutume de Nevers, chap. 2, articles 12 et 13). Les prez sont appelés prez gaignaux dans la coutume de Poitou, titre Ier, article 196, et Loudun, titre XIX, article 6, prix gaignez chez les Latins.

« 7. Depuis le jour de Notre-Dame en mars. Coquille, sur la coutume de Nevers, chap. 14, article 1er, en rend cette raison, qu'alors la saison commence à se renouveler par l'équinoxe du printemps, et ainsi les herbes commencent à pousser, et par conséquent dès lors il est dangereux que les bestiaux y aillent, parce qu'ils fouleroient cette herbe, l'empêcheroient de croître, outre qu'en la mangeant, ces mêmes bestiaux empêcheroient qu'elle ne crùt.

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à l'air; ainsi, en prenant depuis la NotreDame de mars jusqu'à la fin de septembre, on conserve au propriétaire tout le temps qu'il convient pour la production et la récolte des foins, et l'on ne laisse aux bestiaux qu'un peu d'herbe qui repousse en l'arrièresaison, et dont ce même propriétaire ne pourrait tirer aucun fruit. »

Pourra-t-on jamais mettre sur la même ligne le droit qui s'exercera le 1er octobre et celui qui s'exercera dès le 24 juin ?

Il est bien évident pour nous qu'en rappelant le point de départ à jour fixe de l'exercice du droit, le législateur de 1791 n'avait en vue qu'un pur droit de vaine pâture, et nullement un droit qui, à raison de la date fixée pour l'ouverture du droit, pouvait convertir le vain pâturage en un droit de pâture vive et grasse.

Or, c'est parce que le droit dont il s'agit au procès pouvait dégénérer en pâture vive et grasse que la Cour de Liége s'est refusée à lui reconnaître les caractères du vain pâturage.

C'est donc là une décision d'espèce, non une décision de principe.

En statuant, comme elle l'a fait, a-t-elle pu violer l'article 11 de la loi de 1791?

Mais cette disposition n'a de rapport qu'au droit de vaine pâture, y compris le droit aux secondes herbes, mais n'a pas en vue un droit qui peut s'étendre jusqu'à la påture vive et grasse; comme il était sans åpplication à l'espèce, la Cour de Liège n'a pu y contrevenir.

S'il s'agissait d'un droit de vaine pâture proprement dit, la Cour aurait contrevenu à l'article 5 de la loi de 1791, mais cette contravention ne peut exister qu'à la condition qu'il s'agisse ici d'un vain pâturage; or cette condition fait défaut dans l'espèce.

On ne peut sérieusement prétendre non plus que l'article 10 de cette loi est relatif à toute espèce de pâturage exercé à titre de servitude. Cet article n'a en vue que le vain pâturage en comprenant sous ce mot, il est vrai, le droit aux secondes herbes, mais il est restreint à la vaine pâture. Le droit de pâture vive et grasse est aussi exercé à titre de servitude; or il serait impossible d'appliquer à un droit de cette nature, à un droit de pâture vive et grasse, l'article précité.

Dès qu'il ne s'agit pas dans l'espèce d'un pur droit de vaine pâture, il n'est plus exigé que ce droit, pour être supérieur à la clôture, pour être maintenu même aux termes

de la loi de 1791, soit établi par un titre écrit constitutif du titre de propriété tel que l'exige cette loi, et toute l'argumentation du pourvoi, sous ce rapport, porte complétement à faux.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen de cassation tiré de la violation des articles 5, 9, 10 et 11, titre IV de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791, des articles 544, 545, 1370 et 1382 du Code civil, et enfin des articles 2229, 2232 et 2236 du même Code, et de l'article 23 du Code de proc. civ. :

Attendu que sur l'action intentée par le demandeur et tendant à ce qu'il fût déclaré pour droit qu'il ne compète à la commune de Lens-Saint-Servais aucun droit de pâturage sur deux prés appartenant au demandeur, cette commune, par arrêt de la Cour d'appel de Liége, en date du 25 mai 1850, a été admise à prouver par témoins, 1o que les habitants de Lens-Saint-Servais sont depuis plus de trente ans depuis la publication du Code civil, en possession de faire paître par leurs bestiaux la seconde herbe que produisent les prés dont s'agit; 2° que ces prés produisent du regain qui peut être fané et conservé; 3° que lesdits habitants exerçaient ce droit le 24 juin de chaque année à l'heure de midi au plus tard; 4° qu'il est même arrivé que le foin de ces prés n'était pas récolté à cette époque, mais que le bétail desdits habitants était cependant conduit dans le pré au jour et à l'heure ci-dessus; 5o que l'administration communale seule pouvait proroger l'époque du pacage de la seconde herbe; 6o que la commune exerce ce droit sur d'autres prairies plus éloignées du centre de cette commune en faisant vendre le regain que ces prairies produisent; 7° que les faits dont l'intimé se plaint n'ont eu lieu que conformément à l'usage suivi; 8° que les habitants ont même joui de ce pâturage avant la publication du Code civil de temps immémorial et suffisant à prescrire ;

Attendu que, par arrêt du 16 janvier 1851, la Cour d'appel de Liége a décidé que la commune avait suffisamment prouvé l'ensemble des faits ci-dessus, et que notamment elle avait établi que les habitants de Lens sont, depuis un temps immémorial avant la publication du Code civil, en possession de faire paitre par leurs troupeaux la seconde herbe des prés dont il s'agit au procès; que ces prés, s'ils n'étaient pâturés, produiraient une seconde récolte ou regain

susceptible d'être fané et conservé; que l'espèce de pâturage exercé par la commune sur les prés en question n'a pas lieu sur la généralité des prés de la commune de LensSaint-Servais, mais seulement sur certains prės dits prés de la Saint-Jean; que les habitants commencent régulièrement ce pâturage tous les ans au 24 juin à midi, et que s'il est arrivé qu'on ait parfois accordé quelques jours pour l'enlèvement du foin, lorsque l'intempérie de la saison n'avait pas permis de faire la récolte avant le 24 juin, cela n'a eu lieu que par égard pour le propriétaire et par bienveillance pour son fermier;

Attendu qu'en tenant ces faits pour avėrés, la Cour d'appel de Liége a reconnu à la commune défenderesse une véritable servitude de pâturage, par le motif que l'exercice de pareils droits dans les conditions ci-dessus déterminées exclut la précarité et ne peut se concilier avec le caractère de la vaine pâture qui ne s'exerce en général qu'à une époque fort avancée de l'année sur des produits de minime valeur non susceptibles de récolte et de conservation, et après que le propriétaire a joui de la totalité des fruits que le fonds donne naturellement, mais qu'au contraire les droits de la commune constituent la pâture vive et grasse qui, à défaut de titre, a pu s'acquérir par prescription;

Attendu que le droit de pacager la seconde herbe, quand il n'est fondé que sur un usage local, constitue véritablement le droit de vaine pâture; que cela résulte formellement de l'édit du mois de mai 1771 qui a servi de base aux dispositions de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791, et que c'est en conservant à ce droit ce même caractère légal que l'article 11, titre IV de cette dernière loi, statue que le droit dont jouit tout propriétaire de clore ses héritages a lien, même par rapport aux prairies, dans les paroisses où, sans titre de propriété et seulement par l'usage, elles deviennent communes à tous les habitants, soit immédiatement après la récolte de la première herbe, soit dans tout autre temps déterminé; que la loi, en caractérisant ainsi le droit de seconde herbe, n'a pas pris en considération le plus ou moins d'importance de son produit, et ne distingue pas si le droit s'exerce sur l'universalité des prairies de la paroisse ou seulement sur une partie desdites prairies; que cette distinction, repoussée par la disposition formelle de l'article 6 de l'édit de 1771, l'est également par la généralité des termes de la loi de 1791;

Que la circonstance que le droit s'exerce chaque année à jour et heure fixe est également indifférente aux yeux de la loi; qu'en effet, dans un grand nombre de communes, la coutume où l'usage fixait une époque déterminée de l'année où les prés cessaient d'être en défense pour l'exercice de la vaine pâture, à moins que le propriétaire n'obtint un délai pour récolter la première herbe, soit de la commune usagère, soit de l'autorité supérieure; que si dès lors, à défaut de prorogation du terme fixé, la commune pacageait la première herbe, ce n'était point en vertu d'une prétendue servitude ou d'un droit réel de pâturage, mais en conséquence du droit de vaine pâture lui-même;

Qu'aussi c'est précisément en vue de ces fixations d'époques déterminées par les usages locaux que les articles 9 et 10, tit. IV de la loi de 1791, statuent formellement que, dans aucun cas et dans aucun temps, le droit de vaine pâture ne pourra s'exercer sur les prairies artificielles et terres ensemencées qu'après la récolte, et sur les prairies naturelles qu'au temps autorisé par les lois et coutumes, et jamais tant que la première herbe ne sera pas récoltée; qu'il résulte de ce qui précède qu'en admettant la preuve des faits articulés par la commune de LensSaint-Servais, et en la déchargeant des condamnations prononcées contre elle pour avoir pacagé la première herbe des prés dont s'agit, la Cour de Liége a méconnu le caractère légal du droit dont la commune se trouvait en possession, et a expressément contrevenu aux articles 10 et 11, titre IV de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791;

Par ces motifs, casse et annule les arrêts rendus par la Cour d'appel de Liége, le 13 mai 1850 et le 16 janvier 1851; renvoie la cause, etc.

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préalable, ou sans que les parties aient été présentes ou appelées (1).

(KACKENBECK,

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c. Vanderpoele. ) Jean-François Kackenbeck avait eu par héritage de ses parents deux maisons contiguës, situées rue des Tanneurs, à Bruxelles, et portant les numéros 30 et 32. Vanderpoele acquit l'une de ces maisons, le numéro 32, à une adjudication publique qui eut lieu le 28 juin 1848, devant le nolaire Hetveld; l'acte d'acquisition porte que la maison est vendue avec toutes ses appendances et dépendances, dans l'état où elle se trouve, avec toutes ses servitudes actives et passives. Au-dessus d'une partie de cette maison se trouve un grenier dont la possession fait l'objet du litige. Vanderpoele prétend que la possession lui en a été transmise avec celle du restant de la maison; Kackenbeck soutient au contraire que ce grenier avait été séparé de la maison vendue par une clôture en planches qui en défendait l'accès de ce côté, et qu'il avait toujours été possédé par les habitants de la maison numéro 30, qui y avaient eu seuls accès,

En novembre 1850, plus de deux ans après son acquisition, le défendeur fit enlever la cloison en planches qui se trouvait de son côté, ainsi que quelques tuiles du toit.

Le demandeur, considérant ce fait comme un trouble à sa possession, fit citer Vanderpoele, par exploit du 5 décembre 1850, devant le juge de paix du premier canton de Bruxelles, à l'effet de s'entendre condamner à lui abandonner la possession da grenier dont s'agit, avec défense de l'y trou bler à l'avenir, et condamnation aux dommages-intérêts.

Le défendeur dénia le prétendu trouble; il contesta que la cloison en planches qu'il avait enlevée eùt interdit l'accès au grenier en litige, et il soutint que, depuis son acquisition, il avait possédé ce grenier comme se trouvant au-dessus du sol qu'il avait acquis.

Le juge de paix ordonna une descente sur les lieux et une enquête, et voici ce que porte, quant à l'état des lieux, son procèsverbal qui est signé par les parties:

« Nous... avons reconnu que la maison « numéro 32, appartenant au défendeur, a « été jadis agrandie par une emprise du

(1) Pour les autorités voir l'analyse de l'avis du ministère public.

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côté gauche de la rue; que cette emprise, d'après les anciens pignons, se trouvait « entre les numéros 30 et 52, et que le gre<< nier litigieux se trouve au-dessus de cette « emprise; que de l'ancien grenier du nu«méro 30, et à environ quatre pieds au« dessus du plancher, il y avait accès au << moyen de trois ouvertures ou entrées, « que deux de ces entrées sont actuellement << bouchées par de vieilles tuiles qui appar«liennent au propriétaire, et que feu son père y a fait arranger du consentement, dit-il, de la personne qui occupe la mai

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<< son. »>

Le 8 février 1851, le juge de paix rendit un jugement par lequel il condamna le défendeur à rétablir les lieux dans leur état primitif, et ce dans les vingt-quatre heures à compter de la signification, sous peine de 20 francs pour chaque jour de retard; lui fit défense de troubler dorénavant le demandeur dans sa possession, et pour l'avoir fait, le condamna à 100 francs de dommagesintérêts et aux dépens.

Le défendeur interjela appel de ce jugement, et devant le tribunal de Bruxelles il conclut à ce que l'action fût déclarée non recevable, et le demandeur condamné à la restitution des sommes reçues en exécution du jugement de première instance, aux dommages-intérêts et aux dépens.

Le demandeur conclut au contraire à ce que l'appel fut mis au néant avec amende et dépens.

Le 12 avril 1851, le tribunal rendit son jugement en ces termes :

« Attendu que la question à décider est celle de savoir si l'intimé en vendant à l'appelant, le 28 juin 1848, par procès-verbal d'adjudication, reçu par le notaire Hetveld, à Bruxelles, enregistré, la maison située rue des Tanneurs, no 32, a conservé néanmoins la possessien du grenier en litige, ou bien si cette possession a passé dans le chef de l'appelant ;

<< Attendu que pour apprécier cette possession, les faits antérieurs à la vente sont inopérants, qu'il est donc indifférent au procès que les locataires de la maison numéro 32 aient eu il y a dix ans la jouissance du grenier contesté, tandis que ceux du no 32 en auraient été privés;

<<< Attendu qu'il est établi par les enquêtes et reconnu au procès par les parties, qu'à l'époque de la vente il existait depuis plu sieurs années, au-dessus du mur mitoyen séparant les deux maisons, mur s'élevant

à un mètre et demi environ du sol du grenier, des tuiles superposées sans mortier en forme de muraille;

<< Attendu que ces tuiles montant presque contre les combles formaient un obstacle réel au passage; qu'à la vérité, une place près du toit du côté de la rue était restée ouverte, mais que ce passage par ce toit, ainsi que l'inspection des lieux l'a démontré au tribunal, n'était ni plus grand, ni plus commode que celui qui se trouvait du côté de la maison no 52; en sorte qu'il est vrai de dire qu'à l'époque de la vente, il n'y avait point d'accès au grenier en litige, ni par la maison vendue à l'appelant, ni par celle conservée par le vendeur... »

Le tribunal invoque en outre d'autres circonstances de fait, et justifie dans l'espèce la nécessité de recourir à l'acte de vente. Il en infère que l'intimé n'a pas eu depuis la vente la possession annale du grenier litigieux, et conséquemment réforme le jugement du juge de paix.

Pourvoi par Kackenbeck.

Il invoque quatre moyens de cassation, dont le premier est tiré de la violation des art. 295, 296, 297, 298, 299 et 383 du Code de procédure civile.

Le tribunal, dit-il, commence par constater, d'après les enquêtes et les aveux des parties, l'existence d'une clôture avec ouverture du côté de la maison non vendue, et ce fait, décisif en faveur de ma possession, il ne l'écarte que parce que l'inspection des lieux, inspection dont il n'y a aucune trace au procès, lui aurait démontré que cette ouverture n'était ni plus grande ni plus commode pour le passage que celle qui s'était trouvée dans la cloison en planches du côté de la maison vendue. Or, une visite des lieux ne peut avoir lieu qu'en vertu d'un jugement et avec les formalités tracées par les articles 295 et suivants du Code de procédure civile, formalités qui sont sacramentelles et sans lesquelles il n'y a plus qu'une visite arbitraire qui prive les parties des garanties que la loi leur accorde, et qui dès lors ne peut devenir un élément légal de décision. En l'absence d'un procès-verbal, le fait même de la visite ne peut être considéré comme constant.

Le défendeur répond que rien ne prouve que les formalités prescrites par les art. 295 et suiv. du Code de procédure n'aient pas été observées; qu'il est d'ailleurs possible que c'est à l'inspection des lieux, constatée par le procès-verbal du juge de paix, que le jugement attaqué fasse allusion; que dans

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